Citations sur Quand tu ouvriras les yeux (54)
Elle était fascinée par la nonchalance de sa fille. Comment arrivait-elle à conserver un tel sang-froid et à manifester autant d’assurance ? N’avait-elle pas de conscience ? Marion n’osa pas s’aventurer à chercher une réponse à cette question.
Pauline avait souhaité défendre les femmes victimes de violences conjugales, mais elle n’inspirait pas confiance étant donné qu’elle avait toujours défendu la partie adverse. Après quelques mois d’essais infructueux, elle avait dû accepter des affaires plus déplaisantes, mais qui avaient l’avantage d’être lucratives.
Sa plus grande crainte était de divulguer ses terribles secrets en pleine phase de sommeil. Si Xavier découvrait son passé meurtrier, il n’aurait d’autre option que de la dénoncer… Les conséquences seraient dramatiques.
Elle était devenue avocate pour une raison bien spécifique. Défendre les bourreaux pour mieux les abattre, quelle meilleure couverture ? Qui soupçonnerait un as du barreau toujours prêt à représenter l’indéfendable devant une cour de justice ? Trois de ses clients avaient perdu la vie dans des conditions dramatiques et mystérieuses. Pour Pauline, la prison aurait été une retraite trop douce pour ces monstres.
Pauline était une écorchée. Un père alcoolique, une mère battue à mort, une enfance ballotée de foyer en foyer… C’est seule qu’elle avait dû faire face à son destin, sans un adulte à ses côtés pour la conseiller, la guider, la soutenir… ou simplement l’aimer.
Romane restait discrète sur ses relations. Elle cultivait son jardin secret, Marion ne pouvait lui en vouloir. Son regard s’arrêta sur une photo en particulier. Un visage avait été effacé au feutre noir. Marion devina le corps d’un garçon encadré par sa fille et une autre lycéenne. Ils devaient être proches, les bras du jeune homme enveloppant la taille de Romane.
Elle se sentait fébrile. Cela faisait seize ans que ses poumons avaient été préservés de nicotine. C’était le premier paquet acheté depuis des lustres et, déjà, la moitié était partie en fumée. Marion ne culpabilisait pas. Elle avait de bonnes raisons d’enchaîner les clopes.
Les antidépresseurs n’étaient pas efficaces face à certaines épreuves. Elle fit quelques pas le long du trottoir. Le vent soufflait en rafale, glaçant sa gorge et son cou. Elle s’en moquait, plus rien n’avait d’importance dorénavant. Dire qu’elle pensait pouvoir remonter la pente. Peine perdue ! Marion poussa la porte du premier bureau de tabac qu’elle croisa et s’offrit un paquet de cigarettes, geste qu’elle n’avait pas fait depuis la naissance de Romane.
Elle n’arriverait pas à lui cacher son trouble. Laurent lisait en elle comme dans un livre ouvert. Anxieuse, elle entra dans la première pharmacie qu’elle trouva sur son chemin et se procura une boîte de valium.
Quand je pense que les femmes se battent depuis des années pour l’égalité des sexes et qu’à peine née notre fille va se retrouver couverte de fuchsia de la tête aux pieds. Décidément, ma petite chérie, nous avons encore du boulot !