Que veut dire ne rien attendre, être dans la pure attente ? Cela signifie s'attendre à tout et à n'importe quoi. Ce n'est pas une attentie vide, c'est une attente qui délibérément se vide, justement pour rester en contact avec tous les possibles et se rendre capable de les laisser advenir.
... l'hypnose, c'est-à-dire l'éclairage extrême d'un point et l'aveuglement sur la réalité environnante pour transformer les stéréotypes dans lesquels les patients étaient enfermés.
... l'identification et le lien affectif n'ont dû être inventés que par la supposition erronée que les individus d'abord confondus, ont été ensuite séparés.
Il suffit parfois de supposer le problème résolu pour que se fassent jour les obstacles à franchir.
5. « La remémoration peut nous conduire en ce lieu premier ou primitif, mais elle ne nous fournira jamais le moteur du développement, pas plus que la fascination de l'archaïque ne nous délivrera de la fatalité. Elle nous y figera plutôt. Au contraire – mais non pas à l'inverse, car il s'agit d'une différence qualitative – si l'on reconnaît que l'imagination dans sa puissance est en dehors de l'histoire, on pourra comprendre comment le fait de s'appuyer sur elle rend possible la refonte de cette histoire. De même que l'épigénétique peut modifier le génétique, qui, à son tour, reforme l'épigénétique, de même la mémoire, se reconvertissant en imagination, donnera à celle-ci une force plus grande pour modifier l'histoire. Parce qu'elle est capable de fuir le réel, on l'a vu, elle possède la force de le commander et de le transfigurer. Elle peut évoquer ce qui n'est pas encore pour le faire advenir, comme elle donne le futur au violoniste qui laisse la note qu'il va jouer s'imposer à sa main. » (pp. 131-132)
4. « [La disposition] de quel côté penche-t-elle : du côté de la volonté ou de celui de la non-volonté ? […] La disposition est un se-lasser-faire qu'il faut produire activement, un lâcher-prise qu'il faut vouloir. Comment est-il possible de vouloir une non-volonté, de chercher la lumière du jour pour autoriser la confusion ou de se tendre vers un abandon ? Si les deux termes se rapportaient au même niveau logique, si nous ne disposions pas de la distinction entre veille restreinte et veille généralisée, distinction fondée sur l'expérience, il y aurait là une contradiction insurmontable. En réalité, nous voulons, dans la veille restreinte, faire apparaître la veille généralisée, qui, elle, suppose la disponibilité du non-vouloir. Nous ne pouvons pas nous dispenser de prendre notre point de départ dans la veille restreinte. […] La veille restreinte ne peut pas éviter de vouloir. Il suffit donc de la prendre au mot, non pour la faire hésiter entre deux contraires, ce qui conduirait à l'inhibition, mais pour lui faire vouloir les deux, également et avec la même intensité, de sorte qu'elle soit réduite au silence et passe la main à la disposition. Cette dernière transformera les contraires en possibles en vue d'accéder à la veille généralisée, qui se joue des contraires et de ce qui les sépare. Il n'y a donc nulle contradiction à vouloir lâcher prise ou à vouloir ne pas vouloir. » (pp. 107-108)
... ce qui tient les humains ensemble n'est débord nu l'amour ni la sympathie ni l'empathie, mais la pure et simple anticipation.
L'anticipation mime dans l'histoire, étalée dans l'espace et le temps, le préalable anhistorique qui fonde l'histoire en configurant l'espace et le temps.
Selon le mot de Freud, l'angoisse est la monnaie en laquelle tous les affects peuvent s'échanger ; et cet échange fait autant de bruit que de mal. Toutes les formes d'énergie affectives ou cognitives, n'ayant pas encore trouvé leur place respective, sont en proie à l'agitation. Elles se précipitent pêle-mêle les unes contre les autres, se riant des tentatives de contrôle d'un moi qui a perdu toute autorité.
La fadeur est recherchée parce qu'elle précède et respecte toutes les saveurs, parce que c'est elle qui en évoque l'égale possibilité.