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Son père lui avait dit : « Petiot…
Fais jamais confiance à personne. Fais jamais confiance à personne. Fais confiance qu'à toi-même.
Surtout, t'as jamais le droit de te laisser traiter comme de la merde,
tu piges ? Faut que tu sois fort. Promets-le moi. »
Donc, il lui avait promis.

Ce fils, c'est Vandam. Il est peintre en bâtiment. « L'Histoire du monde, c'est rien d'autre que de la superposition, du ponçage, de la dilution et de la peinture. (…) Couche sur couche. Bataille sur bataille. Récit sur récit. »
Il vit dans une cité du nord de Prague, où les immeubles sont construits en panneaux de béton préfabriqués selon l'architecture communiste des années 1960 à 1980. C'est lui le narrateur de ce roman. Il est fier d'habiter dans cette cité, car son père et son grand-père ont participé à sa construction, et il a du respect pour ses anciens.

Vandam, c'est son surnom, ridicule… Depuis qu'il a visionné, du temps des communistes, des films de Jean-Claude van Damme sur son vieux magnéto à cassettes VHS, il est devenu fan et grand admirateur de cette star belge du cinéma d'action des années 1990. Tout comme lui, il fait des pompes et il boxe.
Il a la même façon de s'exprimer aussi, avec ce langage populaire rudimentaire et sans finesse d'un garçon de banlieue -un langage au vocabulaire limité, brut, direct, cru, grossier et vulgaire.

Pour lui, il est nécessaire de garder la forme, d'entretenir son corps, ses muscles, et son moral, pour pouvoir affronter une nouvelle éventuelle guerre, ou un nouveau conflit. « La paix n'est qu'une pause entre deux guerres », lui disait sa grand-mère !
« Mais moi je sais comment c'est. Je sens que ça fond comme les glaciers. Que de nouvelles batailles se préparent. », ce sont les mots de Vandam. Il est convaincu de ce qu'il dit, mais en fait, il est de mauvaise foi ! Il s'illusionne sur lui-même !
On est dans la décennie de 2003 à 2013... La Révolution de velours a eu lieu en novembre 1989.
Voilà déjà une quinzaine d'années que les communistes ne sont plus aux commandes du pays.
La démocratie s'est installée. Mais il ne fait toujours pas confiance aux dirigeants politiques...
« Ils te mettent dans le crâne que capitalisme égale liberté et démocratie. Ils te mettent dans le crâne qu'il n'existe rien de meilleur que ça. Et si tu dis qu'il existe peut-être quelque chose de meilleur, t'es tout de suite un communiste ou un nazi. »
Après toutes ces années vécues sous un régime totalitaire, Vandam est en manque de repères.
En fait, il n'a pas évolué. Il glorifie encore les soldats germains et romains qui combattaient en l'An 9 !
Pendant les matchs, il fait aussi le salut romain. Vandam est un frustré.
Sa radicalité fait peur.
Dans la vie de tous les jours on n'aimerait pas le rencontrer !

Tout au long du roman, on a l'impression qu'il soliloque, mais, en réalité, les mots qu'il débite comme une mitraillette, s'adressent à son fils.
Il lui dicte la conduite qu'il doit tenir dans la vie, tout comme son père lui avait demandé, à lui précédemment : « Tu devrais écouter que toi-même. Que tes instincts. Pas le cerveau. Les instincts. » Avec un discours violent et obsédant, il l'incite à se bouger, à s'endurcir, à savoir se battre, dans le but de se sentir fort, de ne pas être celui qui subit, de ne pas être « un mi-homme » !
Vandam veut être un exemple aux yeux de son fils, alors que lui-même n'est qu'un minable, xénophobe et hypernationaliste. Il est pathétique !

Trois lieux s'avèrent importants pour lui, dans sa vie :
la forêt (où l'orme est « La porte d'un ailleurs »), la cité elle-même, et une taverne.
La forêt, c'est un lieu de mémoire familial tragique pour lui (sa mère s'y serait perdue, étant devenue folle après que son mari, alcoolique, y ait été retrouvé pendu) ; - la cité, parce qu'il y a ses habitudes et qu'il y a ses souvenirs de famille ; - et la taverne, un lieu qui lui permet de se lâcher, d'évacuer ses tensions, en compagnie de son ami Mrazak, et de Lucka, la tenancière pour laquelle il a le béguin.
Dans une partie du roman qui s'intitule « Cicatrices », Lucka et Vandam se retrouvent tous les deux, au lit. Chacun exprime son mal-être et sa solitude… A tour de rôle, chacun parle de sa vie cabossée et chaotique, de son enfant, de la difficulté de l'éduquer… Lucka va lui apprendre qu'elle a vécu au sein d'une communauté : « A l'époque, tous les Tchèques voulaient être des Celtes. »

Ce roman est écrit avec des phases courtes, qui s'enchainent. C'est très rythmé. Des mots et des phrases se répètent… C'est entêtant. Ca bouscule. Ca convient bien au personnage de notre narrateur, qui est en marge, ne tient pas en place, trépigne et parle comme un enragé.
A la lecture, on se sent comme essoufflé ! Ca se lit facilement, rapidement, et c'est captivant.

Des passages sont drôles, notamment avec l'évocation d'un Noël en famille, où son père a des soucis avec un « porc-chou-boulettes » (plat national tchèque) -l'épisode aussi, de sa castagne dans la taverne avec un gros gars venu de la province, vaut le coup ! D'autres passages sont émouvants, et nostalgiques. Outre son côté bagarreur, et sa façon de s'exprimer très directe et brutale, ce gars en marge de la société, semble néanmoins avoir quelques valeurs morales. Il sait faire preuve de respect, et de courage. Il est courageux, mais il lutte contre ses propres limites. Il a un charisme certain, mais en définitive, il ne charme pas, il sidère !
Quand il se bagarre avec quelqu'un, pour lui ce n'est pas de façon gratuite, non, il considère qu'il agit en justicier, pour le bien ! Il sait esquiver les coups, est bon tacticien et il se compare aisément à Jan Zizka (ce héros national tchèque, chef de guerre hussite, et grand stratège) !
Il règle leurs comptes, aux personnes arrogantes et irrespectueuses des règles, quand lui-même transgresse les normes par son comportement déviant ! Il n'y a plus que hargne et rage en lui, qui est abimé par la vie.

Ce roman est aussi rempli de références à l'Histoire tchèque, à sa littérature, à ses émissions télé, à sa cuisine et ses boissons, à la chasse, etc.
Et on découvre un peu ce qu'est « l'humour tchèque » …

A la taverne, un moment, on a l'impression de se retrouver en compagnie des piliers de brasserie palabreurs, des personnages des romans de Bohumil Hrabal ou encore de Vladimir Tresnak, avec de franches rigolades collectives, mais ici les propos dérivent et deviennent -rageurs, envers ceux et celles qui ne les ont pas compris (les femmes, les hommes politiques), -machistes, et -xénophobes.
Les exagérations, les grossièretés, fusent, l'alcool aidant, comme pour se libérer des tensions accumulées et des désagréments de la vie : « Quand y a rien qui va, on peut s'en remettre en picolant. Faut que t'apprenne à te remettre de tout en picolant. »
Vandam n'aime pas ceux « qui se la jouent », ni « les forts en gueule ». Il les remet à leurs places avec des coups de poings bien décochés, qui « font mouche ». Mais un jour, à force de jouer aux justiciers, les choses ne vont pas tourner à son avantage… Et la dernière partie du livre est inattendue !
Lors de la Révolution de velours, il était dans l'« Avenue nationale », en droite ligne ; c'est lui qui a donné le 1er coup ! Il est fier de cela, et se vante d'avoir entraîné la chute du communisme tchèque !

Je sors un peu étourdi de ce livre ! « Avenue nationale » est un drôle d'objet littéraire, inclassable, violent car sans concessions, et tellement fascinant en même temps !
Je suis admiratif du style particulièrement atypique de Jaroslav Rudis.
J'avais précédemment beaucoup aimé son roman graphique « Alois Nebel », mais ici c'est encore autre chose et c'est davantage puissant.
Cet anti-héros, qui nous inspire de la répulsion, est en fait un laisser pour compte du monde moderne, qui fait partie d'un prolétariat déchu.
Ce livre, paru en français en 2016, donne à réfléchir sur la montée du populisme dans les pays de l'Est. Il est tout à fait d'actualité !
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Avenue Nationale n'est pas un livre ordinaire. Vandam, le personnage principal, n'a rien d'un héros littéraire. Au contraire, c'est un extrémiste, bagarreur, ancien taulard et fan de Jean-Claude van Damme. Bref, au premier abord, il semble difficile de s'attacher a lui. Pourtant au fil des pages, on voit clairement que la vie n'a pas épargné notre héros, et on arrive a lui trouvé quelques excuses :
"Et Mrazák dit : Vandam, mon père disait toujours que ton père, il savait toujours mettre de l'ordre ici.
Et moi, je dis rien et je bois.
Et Mrazák me dit : D'ailleurs, c'est bizarre, pas vrai ? Quand t'es jeune, tu détestes ton père. Et plus tu vieillis, plus tu lui ressembles. Et pour finir t'es la même brute que lui. La vie, c'est rien que des mystères cosmiques, pas vrai ?
Mais moi, je veux rien dire et je vais pisser."

Pourtant, Jaroslav Rudis signe ici un très bon roman. A travers son héros, on découvre la République Tchèque populaire, son histoire (le livre est extrêmement bien documenté). C'est cru, l'écriture est un langage parlé mais le livre se lit très vite. "Ils te mettent dans le crâne qu'en ce moment la guerre est de l'autre côté de la planète et que c'est vachement loin, que c'est sûrement une planète tout à fait différente de celle sur laquelle tu vis.
Ils te mettent dans le crâne que t'as du bol de pas devoir partir à la guerre, parce que tu vis dans un bassin de la Bohême où règnent la calme et la paix.
Et où les guerres se déroulent aujourd'hui uniquement dans ton ventre.
Si tu prends du porc-chou-boulettes et de la bière, c'est un vrai Stalingrad que tu vivras dans tes boyaux."

C'était ma première rencontre avec l'écrivain tchèque et je suis bien tentée d'en découvrir plus.
Lien : http://missmolko1.blogspot.i..
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Long monologue, entrecoupé d'un court récit à la troisième personne, Avenue Nationale est l'histoire de Vandam, peintre en bâtiment dont le fait de gloire est d'être celui qui, en 1989, aurait lancé la Révolution de Velours en donnant le premier coup lors d'une manifestation sur l'avenue Nationale.
Pas sûr que tout cela ait véritablement servi Vandam. Pas sûr non plus qu'il le comprenne vraiment, ce fan de Jean-Claude van Damme fasciné par la violence, obsédé par l'idée qu'il faut être constamment prêt à se battre pour sa vie et pour maintenir l'ordre. L'ordre tel qu'il le voit, du moins, lui qui aime à tendre le bras autant pour attraper une chope de bière que pour faire ce qu'il appelle pudiquement le salut romain.
De ce discours confus d'un homme submergé à la fois par son désir de puissance et son impuissance, obsédé par un ordre illusoire qu'il ne saurait lui-même respecter mais dont il attend des autres qu'ils s'y plient, Jaroslav Rudis extrait un portrait en creux d'une classe populaire tchèque délaissée et gagnée par le populisme le plus crasse, nourrie d'une pensée politique pour le moins trouble, mais surtout maintenue dans la misère et l'ignorance.
De la nécessité d'enchaîner 200 pompes par jours pour être en mesure de survivre à la convocation de l'esprit des antiques Germains en passant par les considérations sur les arbres ou les relations homme-femme, on est partagé entre affliction et rire nerveux face à une logorrhée qui finit parfois par approcher de la poésie.
Autant dire qu'il faut parfois s'accrocher face à ce drôle d'objet littéraire qui, pour autant, n'est pas dénué de charme ni d'intérêt. Une véritable curiosité.

Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Ce qui marque avant toute chose, c'est le style de l'auteur. Résolument moderne et oral. Brutal parfois, direct et poétique. J'ai peu de références en la matière, mais je le rapprocherais d'un écrivain étasunien dont j'ai lu quelques livres, Larry Fondation (ici, ici, et là). C'est âpre, rugueux et ça dérange. Heureusement que le livre est court et aéré, 500 pages du même calibre et j'aurais sans doute abandonné, mais je dois dire que le rythme, le style, et l'énergie qui se dégage m'ont largement tenu jusqu'au bout.

Ce sont les propos et la vie d'un homme qui a sans doute eu de l'espoir en 1989 et qui n'en a plus. Il a toujours vécu dans le lotissement préfabriqué, n'en est que peu sorti et n'espère plus grand chose de la vie. Les espoirs sont derrière lui, oubliés avec la came et la taule. Lorsqu'il parle avec ses copains de boisson, on se rapproche des brèves de comptoir, qui parfois sont plus profondes qu'il n'y paraît : "Quand t'es jeune, tu détestes ton père. Et plus tu vieillis, plus tu lui ressembles. Et pour finir t'es la même brute que lui. La vie, c'est rien que des mystères cosmiques, pas vrai ?" (p.85)

Voici donc la vie d'un néoextrémiste, mal dans sa peau, violent et irritable. Un type ordinaire totalement perdu dans le monde contemporain qui va trop vite pour lui. Il sait d'où il vient, mais tout a tellement changé vite qu'il ne sait plus où il est, où il va et ce qu'il va transmettre à son fils. Alors, il transmet ce qu'il connaît bien : la peur de l'autre, la violence : frapper avant de se faire frapper. Pour lui la paix n'est qu'une période entre deux guerres. Il s'inscrit totalement dans la montée des fanatismes et des extrémisme à laquelle on assiste depuis plusieurs années un peu partout en Europe, en France itou, puisque nous avons l'un des -sinon le- partis d'extrême droite le plus fort.

Jaroslav Rudis met tout cela en mots très brillamment. Vandam n'est pas tout noir, ce serait trop facile. Il n'est pas vraiment fréquentable, certes, il est perdu, largué. La lecture est dure mais belle et rapide, et si certains passages sont un peu longs, eh bien on les passe vite pour se retrouver quelques pages plus loin.

Mirobole m'a habitué à des textes forts, barrés, décalés, ce roman ne déroge pas à cette règle. Dérangeant et pas confortable. Bonne pioche pour la maison d'édition.
Lien : http://www.lyvres.fr
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Il est tchèque, peintre, costaud, bagarreur, militariste, extrémiste – avec un penchant pour le salut romain. Il a tâté de la taule, de la drogue. Quel est son nom d'emprunt ? Un indice : monsieur fait désormais ses deux cent pompes par jour. Vandam ! C'est à la taverne qu'il s'envoie des bières avec ses potes et c'est aussi là qu'il joue des poings. Vandam affirme avoir déclenché les événements qui ont engendré la Révolution de 89. Cette forte tête, ce paumé a des trucs à nous dire, écoutons-le...



C'est quoi cette avalanche de propos haineux délivrés par un facho à la petite semaine qui déblatère des saloperies à longueur de récit ? Psitt ! On se pose et on développe ? Ce n'est pas le genre de type que nous inviterions pour fêter l'anniversaire de la Révolution d'Octobre parce que Vandam il fait plutôt dans le Velours question révolution. Et pour lui, le rouge n'est pas un symbole, c'est la couleur de la peinture qui tâche ses mains, « ce n'est pas du sang » répète-t-il à l'envi – l'emploi fréquent de l'anaphore dans le texte fait penser à un acte de propagande mais il a plutôt un caractère incantatoire. En écho de ce long et terrible monologue, l'auteur nous propose de porter notre regard sur la destinée de la République Tchèque et a fortiori celle de l'Europe vacillante. Mais si cet homme hisse le pavillon noir avec des yeux exorbités ce qu'il tente de nous révéler s'inscrit dans le crépuscule du deuil, de l'intime.



« Moi, je suis un patriote. [...]

Le dernier guerrier.

Le dernier Romain. »



Vandam est le héros négatif par excellence. Violent, malsain, néo-nazi, il crache ses urgences, comme on vomit un mauvais vin. Ses éructations ne sont pas passagères, il les scande puisqu'il en va de l'avenir de l'Homme. Il s'est forgé cette idéologie en se tournant vers l'histoire des grands hommes de guerre, ses livres de chevet dégagent des odeurs de poudre à canon, de sang, de conquêtes. « Y'en a qu'un seul qui peut gagner. » Mais une question nous turlupine au fil des pages : à qui s'adresse-t-il ? Cependant, à la frange de ses délires paranoïaques l'image du père s'insinue, son père dans la forêt, sous l'orme mythique et son père mourant qui va basculer dans le vide. La forêt et le marécage. La forêt, mère protectrice. le marécage qui engloutit, absorbe. Vandam ne sera jamais une proie. Il scande :



« Ils te mettent dans le crâne que t'as pas à avoir peur.

Ils te mettent dans le crâne que ça, c'est pas du tout la crise.

Ils te mettent dans le crâne que le monde s'est sorti d'emmerdements plus graves.

Ils te mettent dans le crâne que ça va tenir.

Ils te mettent dans le crâne que ça durera toute l'éternité, que rien va s'écrouler.

Ils te mettent dans le crâne que tout baigne.

Ils te mettent dans le crâne qu'ils gardent le contrôle. »


La suite sur : http://bobpolarexpress.over-blog.com/2016/10/konzentration-junge-avenue-nationale-jaroslav-rudis.html
Lien : http://bobpolarexpress.over-..
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Je ne vais pas faire de détour : Ce roman est un vrai paradoxe. Nous n'avons pas de véritable histoire, mais vraiment des tranches de vie du personnage principal Vandam.

J'ai eu du mal à accrocher avec ce personnage qui se veut comme étant un homme ayant une réflexion sur la société qui l'entoure, mais qui, au final, reste un pilier de comptoir. Parfois, il m'a fait le même effet que le personnage principal de « Je vais m'y mettre » (une critique arrive bientôt), dans le sens où ils disent une chose et font l'inverse de cette chose. Je préfère quand le personnage a au moins cette honnêteté envers lui-même. Vandam est décrit dans la quatrième de couverture comme un néo-extrémiste, mais si on l'écoute, pas du tout..

Avec Valentine, nous avons vraiment eu du mal avec ce roman. Ecrire cette critique a été compliqué et Valentine a eu le même soucis que moi. Ce livre est une expérience, je pense, un genre vraiment à part que je peux conseiller qu'aux personnes qui souhaitent sortir des sentiers battus. Par contre, je ne dis pas que vous en sortirez indemne.
Lien : https://popcornandgibberish...
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C'est l'histoire d'un sale type.

Un sale type dont on ne connaîtra pas le nom, uniquement ce surnom ridicule -Vandam- dont il a été affublé parce qu'il s'astreint à faire 300 pompes par jour, et que ses capacités intellectuelles sont a priori inversement proportionnelles à l'ampleur de sa masse musculaire.

Un type qui vit depuis toujours dans une cité de la banlieue de Prague, le célèbre quartier Severní Mesto, immense lotissement de préfabriqués construit dans les années 70 et 80, dont les habitants végètent à la limite de la misère, entre ennui et hébétement face aux mutations d'un monde dont ils se sentent exclus.

A quelques pas de ce marasme urbain, survivent les vestiges d'une forêt ancestrale, qui a conservé à ses yeux sa dimension fantasmagorique et ténébreuse, et dont la présence le hante (il a même aperçu un loup à ses abords)... Une forêt dans laquelle, il en est persuadé, sa mère, devenue folle après le suicide de son mari alcoolique et violent, s'est définitivement perdue.

Il a connu la prison, la drogue, mais ce n'est pas ce qui nous le rend si antipathique. La répulsion qu'il nous inspire naît de la doctrine qu'il professe, des conceptions qu'il expose en une longue logorrhée scandée à l'attention d'un interlocuteur que l'on devine être son jeune fils, qu'il voit en cachette suite à un jugement lui interdisant de l'approcher.

Il lui assène ainsi, en une succession de phrases brèves, coupantes, ses leçons de vie très personnelles, alimentées par une morale guerrière. Convaincu que l'existence est un combat permanent et que la violence est par conséquent un mal nécessaire, abreuvé de fantasmes d'héroïsme romanesque qu'il entretient par la lecture exclusive de récits de batailles et de stratégie militaire, il martèle l'importance de jouir d'une condition physique et d'une force mentale optimales, car indispensables à la survie.

La conviction qu'a le héros de sa grandiloquence, de la justesse de son raisonnement, est à la fois effrayante et pathétique. Au fil de son discours rétrograde et délétère, sous la virilité ostentatoire et obtuse dont il l'enveloppe, transparaissent son racisme ordinaire, sa mesquinerie, sa mauvaise foi. Plus qu'un menteur, toutefois, Vandam est un être qui s'illusionne sur lui-même, passant certains des événements qu'il a vécus au crible d'une interprétation qui lui donne le beau rôle, à ses propres yeux comme -du moins le croit-il- à ceux des autres...

Et il ne faut pas creuser beaucoup plus pour deviner, sous ses airs belliqueux et pontifiants, la détresse et l'égarement... sa quête d'identité, d'une place dans une société dont l'évolution, les nouveaux codes lui échappent, est sans doute le reflet du désarroi et du sentiment de solitude d'une nation écartelée entre la nécessité de s'ouvrir au monde, et l'angoisse d'y laisser une part de son intégrité.

"Avenue Nationale", en rapportant une parole que l'on préfère habituellement ignorer, brosse le tableau d'un désespoir sordide et amer, terreau propice à la prolifération de la haine et du repli sur soi.

Lien : https://bookin-ingannmic.blo..
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Vandam, un surnom à la sauce tchèque pour un fan de Jean-Claude, amateur de pompes en série, de bière au comptoir, de bastons et grand défenseur du salut romain. Ça donne un aperçu du personnage… Et pourtant, ça va plus loin que ça.

Du rude boy pur jus tendance facho qui incarne ici un anti héros dans toute sa splendeur. Vandam frise la quarantaine. Il a connu la drogue et la prison, il s'est aujourd'hui un peu rangé, avec un job de peintre en bâtiment, il vit dans une cité grise de Prague et se ressource en buvant des coups à la taverne, où il peut refaire le monde avec ses potes, et s'imaginer un autre futur avec Lucky, la serveuse. En attendant, on le sent rempli d'amertume avec un esprit revanchard couplé d'un sentiment d'injustice, et il propulse dans ses idées politiques toutes ses frustrations.

Le personnage n'est pas spécialement charismatique, il est même franchement agaçant. Nous assistons dans ce roman à des monologues intérieurs assez obsessionnels, qu'il n'est pas toujours évident de suivre, où l'on peine à se familiariser, à s'identifier. L'auteur joue de ce manque de dialogue. Il nous coupe la chique, et une fois refermé le bouquin, on est à la fois déstabilisé et sidéré. C'est un grand plongeon en République tchèque, avec un fond d'histoire et de culture locale qui pose l'ambiance. Nous sommes à la fois dans l'instant et dans le souvenir, avec ce texte à sens unique qui véhicule une sorte d'urgence absolue, tout en se recroquevillant dans un passé idéalisé.

C'est un roman très sec, entêtant, violent, rude, beaucoup moins fluide que son précédent, La fin des punks à Helsinki. En revanche nous restons dans un thème similaire, à savoir la marge. Ici il change de bord, ce gars-là est imbuvable et un peu au ras des pâquerettes. Avec le recul on prend la teneur du bouquin, l'auteur nous parle de son pays, du climat social et politique actuel. Alors c'est très actuel, même si ce type d'extrémiste n'est pas nouveau. On le découvre peut-être dans les médias et il se répand sans doute davantage, mais il est toujours intéressant d'en parler. Pour autant, le credo « il y a un homme sensible derrière ce facho » (je raccourcis mais l'idée est là) me laisse perplexe. J'imagine bien les motivations de l'auteur mais je m'interroge.

Toujours est-il que Jaroslav Rudis est un écrivain à découvrir et à suivre.
Lien : http://casentlebook.fr/avenu..
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J'ai terminé ce bouquin il y a seulement quelques jours et je dois vous avouer que sans la quatrième de couverture, j'aurais été bien en peine de vous raconter l'histoire. Honnêtement, je n'ai rien mais alors rien compris à ce bouquin. Dès le début, Vandam s'adresse directement à nous, il nous fait part de ses pensées, de son histoire, de ses amours, du nombre de pompes qu'il fait tous les jours (et nous conseille d'ailleurs d'en faire autant). Et on sent vraiment qu'il y a quelque chose qui tourne pas rond là-haut, l'araignée, sa toile et sa réserve de moustiques et toute une colonie de vacances. Parce que le bonhomme, il répète TOUT LE TEMPS la même chose. Je comprends l'effet stylistique du truc, ça en devient presque poétique, le texte sonne comme un rap ou un slam, mais mes aïeux, à lire, c'est d'une pénibilité. Peut-être qu'en récitation, en pièce de théâtre, j'aurais mieux intégré ce qu'a essayé de me dire l'auteur mais là, autant vous dire que c'est tombé dans l'oreille d'une sourde. Je me suis même rendu compte qu'au bout d'un moment, les mots défilaient devant mes yeux sans que je les voie et encore moins, que je les comprenne.

Les phrases sont courtes, le ton laminaire, ça aurait pu être beau ou même carrément épique (Vandam a l'air d'avoir vécu beaucoup, son expérience aurait pu être passionnante), c'est pourtant retombé comme un soufflé dès les premières pages pour moi. le seul point positif est peut-être cette virulence, cette violence face aux discours de ces politiciens qui n'ont pas la moindre idée de comment vraiment s'adresser à ce genre de personnes. Violence qui passe d'une débilité profonde au début à un plaidoyer agressif mais plus intelligemment tourné vers la fin. Néanmoins, j'ai beaucoup de mal à trouver de la beauté dans le message que Vandam véhicule et j'ai encore plus de mal à éprouver de la compassion pour un nazi, même s'il dit ne pas l'être.

Entendons-nous bien : je n'ai pas aimé du tout et si ce livre n'avait pas été pour Babelio, je l'aurais sans doute abandonné dès les cinq premières pages. Après, je n'aime pas particulièrement descendre un livre, surtout quand celui-ci me fait me sentir bête de ne pas l'avoir compris. Je me rends bien compte qu'il n'était pas fait pour moi et je ne sais pas du tout à qui je pourrais le conseiller. Toutefois, je suis tombée sur quelques bonnes critiques (en voilà une) qui pourraient peut-être convaincre certains d'entre vous. Par contre, je vous avoue que je n'ai pas du tout l'impression d'avoir lu le même livre de ces chroniqueurs, vous voilà prévenus ^^.
Lien : http://merlin-brocoli.blogsp..
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Je m'attendais au pire après les première pages... et en fait on abouti à un très réussi portrait de "déclassé"... Comment dit-on "missfit" en tchèque?
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