Quiconque n'a pas vécu l'épreuve de la disgrâce, du dénuement et de l'accusation ne peut prétendre connaître véritablement la vie.
Je n’ai jamais pratiqué la trahison, mais je ne l’ai que faiblement condamnée, car je sais à quel point elle est proche, souvent, de la loyauté. A certains moments de la vie, face à l’énigme du monde et de l’avenir, tout être humain peut se sentir partagé entre une cause et son contraire. Le pas de l’une à l’autre est si court qu’on peut en un instant sauter d’un côté à son opposé avec la même facilité que l’enfant qui traverse un ruisseau à cloche-pied.
Il était l'un de ces êtres, j'en ai rencontré quelques-uns par la suite, qu' une plaie invisible, jamais cicatrisée, ouverte dans l'enfance par la violence d'un proche, conduit leur vie durant à hurler une haine indistincte.
Agnès me hante, depuis que j'ai évoqué ma rencontre avec elle. Pendant toutes ces années, je l'avais placée dans un retrait de ma mémoire, sous une châsse que je n'avais plus ouverte depuis sa mort. Tous mes souvenirs sont restés là, intacts, embaumés comme l'a été son corps. Mais il a suffi que je prononce son nom pour que l'ampoule se brise. Son visage, son parfum, sa voix envahissent tout.
(Marche sur Florence).
Je choisis donc d’arriver, contrairement à mon habitude, en grand équipage et de faire étalage de mes titres. Les Italiens, à ce que j’en savais, goûtaient moins que nous la simplicité ou, plutôt, ils la plaçaient ailleurs. La politesse, pour eux, consiste à tenir son rang, et ce qui nous paraît ostentation n’est à leurs yeux qu’un repère commode donné par une personne pour que les autres puissent immédiatement situer son rôle dans le grand théâtre de la société. Cette mise au point faite, il était possible et même apprécié de se comporter avec affabilité et naturel. Chez nous, le procédé est souvent inverse. Les grands personnages se donnent une apparence de simplicité mais, pour faire tout de même reconnaître leur importance, ils sèment leurs propos d’insolences et de marques de vanité.
Sitôt les Alpes franchies, je pris soin de revêtir de riches vêtements. Mon cheval reçut des soins et fut harnaché de velours avec force gourmettes d’or et pompons chatoyants. (p.243)
Toutes les richesses de la terre étaient rassemblées là, tirées des forêts de Sibérie comme des déserts de l’Afrique. Le savoir-faire des artisans de Damas était représenté comme l’habileté des tisserands flamands […] Le centre du monde était là. Et il n’était pas acquis par la conquête ou le pillage mais par l’échange, la liberté des hommes et le talent de leur industrie. L’énergie arrachée enfin à la guerre se répandait dans toutes les œuvres de la paix.
Seul nous appartient ce qui n'existe pas et que nous avons le pouvoir de faire venir au monde.
Cela s'appelait le temps et, quand on y jouait un rôle, il devenait l'Histoire. Il appartenait à chacun d'y prendre sa part.
Pour les hommes du commun, il ne peut y avoir d’amitié, d’amour, ni même de confiance quand se profile l’ombre d’une attente intéressée. Au contraire, pour les hommes de pouvoir, la seule manière d’atteindre des relations véritables est d’aborder franchement le sujet de l’intérêt. Avant toute chose, ils posent la question : qu’attendez-vous de moi ? Et de la franchise avec laquelle on leur répond dépend la possibilité de passer à une étape supérieure d’intimité.
Les lettres que l'amour trace en nous ne sont jamais plus faciles à déchiffrer que sur la page blanche d'un esprit non préparé.