Ne parle pas de l'absence
à ceux qui reviennent.
Ce qu'on a vécu dans le carré vide
ne rapproche ni les pensées
ni les visages.
Leur présence même les éloigne.
Le bois humide,
la poignée de sel ne ravive rien.
Bras sans palpitations, je
ne vous toucherai pas, ni ne vous frôlerai
lèvres avares.
Votre premier sourire seul
me tient au corps. Oui
celui que vous avez repris.
Un jour en bâtit un autre.
Les voilà tous en contre bas
petit village tassé
entre jachères et vergers, perdu
dans ses clés
et ses seuils où l'on voisine.
Qui sait pourquoi une ruelle
donne sur un souvenir, aire
de battage du temps
qui libère ses semences ?
La joie fait-elle son rosier
des instants choisis
ou repêchés dans l'arrière cour ?
Un sourire scintille : certes
il tient dans quatre murs
ruinés. Mais là
se démène le voleur de lumière.
C'est lui qui tend la rose !
Les jours se dérobent, nous passent
au travers, oubliant, une pincée
de neige sur les cols, une longue
coulée de pierres, des vents
aux doigts durs :
tout est prêt
à la brouille d'un visage, à sa casse
dans l'éboulis.
Parfois un air
moins glacé que le ressentiment sifflote
" Retiens la voilure des pollens
avant que la bruine rafle la joie
qui ne sait pas qu'elle en est une
malgré tout.
Vois la lumière s'affermir plus loin
tu en seras moins perdue ".