Les personnes qui ont vécu dans le calme et la retraite ont un merveilleux instinct pour se représenter la vie d'autrui pleine d'orages et de désastres qu'elles s'applaudissent en secret d'avoir évités.
J'ai une petite question pour vous qui me lisez... vous ne pensez pas que le le titre de ce livre n'est pas totalement approprié au roman ? Car c'est Laurence qui est le fil conducteur et qui fait tout pour Pauline non ? Ou alors ce roman aurait pu s'appeler Montgenays. Qu'en pensez vous ? J'attends vos réponses :)
Il est des âmes qui ne manquent pas d’élévation, mais de bonté. On aurait tort de confondre dans le même arrêt celles qui font le mal par besoin et celles qui le font malgré elles, croyant ne pas s’écarter de la justice. Ces dernières sont les plus malheureuses ; elles vont toujours cherchant un idéal qu’elles ne peuvent trouver, car il n’existe pas sur la terre, et elles n’ont point en elles ce fonds de tendresse et d’amour qui fait accepter l’imperfection de l’être humain.
Pauline ne voulait pas s’éclairer, elle fermait les yeux à l’évidence avec terreur ; mais, en dépit d’elle-même, la tristesse et la jalousie étaient entrées dans son âme.
Pauline savait tout de la vie de Laurence, même ce qui ne lui avait pas été raconté, et cela plus que tout le reste peut-être, car les personnes qui ont vécu dans le calme et la retraite ont un merveilleux instinct pour se représenter la vie d’autrui pleine d’orages et de désastres qu’elles s’applaudissent en secret d’avoir évités. C’est une consolation intérieure qu’il leur faut laisser, car l’amour-propre y trouve bien un peu son compte, et la vertu seule ne suffit pas toujours à dédommager des longs ennuis de la solitude.
[…] ma vie se consumait dans l’ombre et dans l’inaction ; mais qui me rendra ces souffrances d’une âme agitée par sa propre puissance ? Ô jeunesse du coeur ! qu’êtes-vous devenue ?…
Elle trouvait dans le catholicisme la nuance qui convenait à son caractère, car toutes les nuances possibles se trouvent dans les religions vieillies; tant de siècles les ont modifiées, tant d'hommes ont mis la main à l'édifice, tant d'intelligences, de passions et de vertus y ont apporté leurs trésors, leurs erreurs ou leurs lumières, que mille doctrines se trouvent à la fin contenues dans une seule, et mille natures diverses y peuvent puiser l'excuse ou le stimulant qui leur convient. C'est par là que les religions s'élèvent, c'est aussi par là qu'elles s'écroulent. p.67
Je connais certains chefs-lieux de canton où la première femme qui se permit de galoper sur une selle anglaise fut traitée de Cosaque en jupon, et où, l’année suivante, toutes les dames de l’endroit voulurent avoir équipage d’amazone jusqu’à la cravache inclusivement.
À peine Laurence fut-elle partie, qu’une prompte et universelle réaction s’opéra dans les esprits.
Tu ne sais pas une chose, Laurence ? C'est que les personnes qui vivent dans la solitude ont parfois d'étranges idées. Comment le dirai-je ? Ce sont des souvenirs, des images qui se logent dans leur esprit, et qui semblent passer devant leurs yeux. Ma mère appelle cela des visions. Moi je sais bien que je ne suis pas folle ; mais je pense que Dieu permet souvent, pour me consoler dans mon isolement, que les personnes que j'aime m'apparaissent tout à coup au milieu de mes rêveries. Va, bien souvent je t'ai vue là devant cette porte, debout d'un air indécis. J'avais coutume de ne rien dire et de ne pas bouger, pour que l'apparition ne s'envolât pas. Oh ! alors ta voix m'a réveillée ! elle est venue me frapper jusqu'au cœur !
Pauline avait un sens très droit et un véritable amour de la justice ; mais entre la théorie et la pratique il y avait comme un voile qui couvrait son discernement.