Raimundo Silva accepte donc Mogueime pour personnage, mais considère qu'il doit d'abord élucider certains points pour que ne subsiste aucun malentendu susceptible de l'empêcher plus tard, quand les liens de l'affection inévitable qui attachent l'auteur à ses univers sont devenus indestructibles, de l'empêcher, disions-nous, d'assurer pleinement les causes et les effets qui resserrent ce nœud avec la double force de la nécessité et de la fatalité.
[...] je fais le bilan de ma vie, c'est une façon de parler, bien sûr, ce que je fais c'est penser que je pense à la vie alors que je ne pense à rien [...]
[...] parce qu'il n'est pas historien, catégorie humaine qui se rapproche le plus de la divinité par sa façon de regarder les choses [...]
[...] l'ordre étant autre, l'histoire serait autre, autre aussi le siège, Lisbonne autre, et ainsi à l'infini.
[...] c'est toujours la même chanson, nous rejetons sur les dieux la faute pour ceci ou pour cela, alors que c'est nous qui inventons et fabriquons tout, y compris l'absolution de ces fautes et de bien d'autres encore.
Toutefois, l'ennui avec les sources, même quand elles se veulent véridiques, c'est que les données sont imprécises et que les nouvelles s'y propagent à une vitesse hallucinante [...]
Bref, vivre n'est pas seulement difficile, c'est presque impossible.
[...] ou bien supposons qu'un homme demande à une femme, Tu m'aimes, et que celle-ci se taise, se bornant à le regarder, énigmatique et distante, refusant de dire le Non qui l'anéantira, ou le Oui qui les anéantirait tous les deux [...]
[...] il est évident que j'en saurai plus en arrivant au bout de ma promenade, mais il est certain aussi que j'en saurai moins, du fait même que j'en saurai plus, en d'autres termes, je vais essayer de m'expliquer, la conscience d'en savoir plus suscite en moi la conscience d'en savoir peu [...]
[...] s'il avait eu la sagesse et la prudence de ne pas croire aveuglément dans ce qui croit savoir, car c'est de là que proviennent les pires méprises et non pas de l'ignorance.