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Critiques filtrées sur 3 étoiles  
Qui n'a jamais imaginé revenir en témoin silencieux dans son propre passé ou celui de ses proches pour comprendre l'enchaînement des évènements à défaut des les changer ? C'est le procédé ingénieux qu'utilise l'auteur dans une longue introduction, parfois fastidieuse, pour comprendre les évènements qui se sont déroulés à Fouriesfontein, petite ville de l'ancienne colonie du Cap au moment de la guerre des Boers. Peu de temps avant Noël de l'année 1901, une bande de rebelles, soutenue par une partie de la communauté blanche d'origine hollandaise, envahit Fouriesfontein. Chassés deux semaines plus tard par les troupes anglaises, leur passage va laisser des cicatrices indélébiles dans le tissu local. Trois témoins livrent leurs souvenirs de cette période troublée. La première Alice, fille du magistrat en poste, représentant de la Couronne, a vécu comme dans un rêve les évènements. Ses souvenirs sont imprécis. le deuxième témoin, Kally, jeune clerc travaillant au bureau du magistrat, raconte les faits. Il garde une neutralité de circonstance, copiée sur l'attitude de son employeur. Mademoiselle Godby, soeur du médecin de secteur, alors décédé, membre actif de la communauté, est le témoin impuissant des oppositions latentes qui traversent la petite société composée de blancs d'origine anglaise et hollandaise et de métis. La guerre met à nue les divisions et fait éclater les rancoeurs et les haines qui marqueront pour longtemps l'Afrique du sud. Qui se souviendra d'Adam Balie, jeune métis, victime de ces violences ? Quelle signification donner à ces évènements tragiques dans un pays où l'injustice et la violence sont devenues banales ? Au lever du jour, notre témoin silencieux s'éloigne. Mission accomplie.
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Et si vous aviez accès à un monde parallèle, un monde faisant partie du passé, dans lequel vous passeriez inaperçu tout en cotoyant et en observant les vivants d'alors, dans leur quotidien ... C'est ce qui arrive au narrateur qui enquête sur une ville isolée d'Afrique du Sud, Fouriesfontein, où est enterré un jeune héros de la guerre qui y sévit début 1900, et dont la visite a pour but de photographier sa tombe. Se déplaçant dans un espace entre deux réalités, dans cette ville spectrale, il croise des gens qui ne le voient pas, une foule autour d'un cercueil, une jeune métisse en pleurs, il entend le galop de chevaux et les voix de cavaliers qu'il ne voit pas lui-même. Ce sont ces faits apparemment sans importance qui seront détaillés au travers de la voix de la fille du magistrat alors en fonction, du clerc assistant du magistrat et de la soeur du médecin. Tous trois ont vécu la guerre, l'arrivée des Boers, les haines raciales; ils en parlent de leur point de vue, évoquent les dissensions provoquées par la guerre, la violence, l'injustice et l'aliénation.
La vie continue, le quotidien est admirablement décrit par trois personnages pour qui la guerre causera une fracture inévitable dans leur vie. Adieu le bonheur et l'insouciance d'antan, la guerre ne change rien, au contraire, les divisions et l'amertume ne cesseront pas avec la paix.
Mais est-il nécessaire d'analyser et de comprendre les comportements et les événements du passé ? Doit-on juste se contenter d'un rôle d'observateur puisque tout ce qui s'est passé échappe à notre contrôle ?
Une très belle écriture fluide et cinématographique pour une description détaillée et puissante des lieux, des comportements, des sentiments de l'époque. de la grande littérature !
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D'abord, les ombres.
Celles qui hantent la petite ville étrangement déserte de Fouriesfontein, fantômes du passé qui répètent inlassablement les bribes des mêmes scènes, auxquelles assiste un narrateur -reporter, historien, essayiste ?- parti sur les traces d'un jeune rebelle ayant trouvé un siècle auparavant la mort lors de la guerre des Boers*, dont la physionomie, aperçue sur une photographie, est restée gravée dans son esprit... le sens de ce ballet surnaturel dont il admet pourtant la légitimité avec une patience respectueuse, lui est d'emblée insaisissable, symbole de la difficulté avec laquelle L Histoire, mouvante, subjective et multiforme, se laisse appréhender.

Ensuite, les voix.
Au nombre de trois, elles appartiennent à des narrateurs contemporains des événements, tous anglais. Chacun d'entre eux, plusieurs décennies après les faits, déroule un long monologue, visiblement en réponse à une question qui lui a été posée, mais qui est tue au lecteur : quels souvenirs ont-ils gardés des mois durant lesquels Fouriesfontein subit les conséquences de la guerre des Boers, son occupation par les forces rebelles, puis par l'armée anglaise ?

L'une est la fille du magistrat alors en poste à Fouriesfontein, l'autre fût le clerc de ce même magistrat. La troisième était la soeur d'un médecin décédé au moment des faits. Tous insistent régulièrement sur la confusion de leurs souvenirs, soi-disant due à l'absence d'événements marquants ou véritablement représentatifs de la violence de la guerre. Ils ont également à coeur de faire comprendre le peu d'importance de leurs témoignages, ils n'ont pas été des acteurs de cette guerre, mais des figures insignifiantes, ayant subi cet épisode de manière plutôt passive. Ce sont d'ailleurs surtout des souvenirs personnels qu'ils évoquent, émaillant leur narration de nombreuses répétitions, en proie à la difficulté de se remémorer des faits dont le passage du temps a oblitéré la cohérence chronologique.

Peu à peu émergent de cet amas de souvenirs, constitués d'anecdotes, de digressions, les réminiscences de l'atmosphère de suspicion, d'animosité qui a progressivement enveloppé la petite communauté de Fouriesfontein, modifiant les relations entre les individus, créant un climat de crainte diffuse. Émergent ainsi presque subrepticement des témoignages les petites humiliations subies par certains anglais de la part de l'occupant Boer, l'angoisse suscitée par les rumeurs contradictoires sur l'évolution du conflit, l'ostracisme grandissant manifesté envers les britanniques de la part de leurs concitoyens d'origine néerlandaise.

"Des voix parmi les ombres" aborde cette période de l'histoire sud-africaine non par la grande porte, ses épisodes célèbres, ses figures légendaires, ou ses hauts faits d'armes, mais par l'intermédiaire de ses résonances sur l'existence quotidienne des individus, et des cicatrices sous-jacentes mais durables qu'elle laisse dans la mémoire des peuples.

Les avis très élogieux exprimés sur ce titre, me font d'autant plus regretter les réticences que je dois personnellement avouer le concernant... J'ai eu de réelles difficultés à maintenir mon intérêt tout au long du roman, la principale raison en étant ces répétitions évoquées ci-dessus, la portée du propos se diluant dans les tergiversations narratives des personnages. L'auteur construit son récit comme par à-coups, au gré d'une progression qui m'a paru poussive. Cette impression s'est cependant amenuisée avec le témoignage de la troisième narratrice, que j'ai trouvé plus intéressant, car moins centré sur elle-même, et ouvrant l'intrigue sur des problématiques jusqu'alors occultées, telle la condition des métis du Cap au sein de cette Afrique du sud du début du XXe siècle.
Lien : http://bookin-inganmic.blogs..
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