Richard est caissière dans une supérette. Avant, il fut coiffeur pour dames, et encore avant, moniteur de voile. Il a étudié la sociologie, la psychologie, balancé au passage quelques riffs dans un groupe de rock amateur qui restera notoirement inconnu.
Puis, il s'est trouvé une opportunité dans la remise en état de voitures de collection. C'est alors qu'il a rencontré Clémence, l'amour de sa vie. Bref, tout lui réussit.
La plus grande partie du roman est consacrée à la description de cette période heureuse. Une description légère et sensible: il a des amis adorables, un partenaire de travail plus-que-parfait. Un job prenant mais gratifiant, une petite vie tranquille et ordinaire. Et puis Clémence, qui est merveilleuse.
Laurent ScoTTi(*) dépeint avec finesse cette période où l'on tombe amoureux, celle des papillons dans le ventre, des décharges électriques que l'on ressent lorsqu'on prend la main de l'autre.
Les bons sentiments font de mauvais romans, dit-on. Alors bien sûr, on pressent que cela ne va pas durer, ce bonheur simple, presque mièvre: une virée en Bretagne, une bière au bar du coin, l'aménagement d'un appart', un dîner entre amis,... Bref, cette vie plutôt banale.
Le bonheur est il possible? Richard a t'il vraiment fait ses propres choix, ou bien s'est-il laissé aller, laissé guider par le hasard de ses rencontres? Parmi ses amis, un couple qui bat de l'aile, et qui finira par se séparer, en douceur. Leur plaisir d'être ensemble avait fini par disparaître dans le quotidien. Ce ne sera pas le cas de Richard. La force du style de
Laurent ScoTTi est de nous laisser pressentir qu'une catastrophe va se produire, tout en procédant par petites touches tantôt profondes, tantôt légères, et même humoristiques. Sans jamais tomber dans les ornières du pathos ou du sirupeux.
J'ai bien aimé l'alternance de phrases courtes avec d'autres, plus longues, rythmées par de nombreuses virgules. J'ai aussi noté un usage de l'imparfait frisant l'iconoclaste, au mépris des règles de concordance des temps, type: "Claire me proposa un verre de vin que j'acceptais avec plaisir". Comme pour montrer que le temps ne s'écoule pas à la même vitesse pour tous?
(*) non, ce n'est pas une faute de frappe: je m'oblige à respecter la graphie choisie par l'auteur.