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Citations sur Hergé mon ami (9)

Nos visages ravagés de rides se souviennent des sillons de larmes et notre colonne vertébrale se voûte sous le poids des tristesses passées. Un corps vivant ne reste pas longtemps vierge et lisse ; la santé, la joie de vivre n'excluent pas les coups ; bien au contraire, nous n'existons que de souffrances vaillantes contre l'adversité ; les bons organismes présentent une tête burinée, un corps las et courageux, une puissance dévastée, mais toujours debout. Avant le premier coup de corne, comment savoir si le torero se conduit avec courage ? Il n'y a de vrai vivant que déchiré. Les cicatrices renforcent. Il n'y a de vérité que falsifiée. Le faux plaide pour le vrai. Il n'y a de bonté que tentée. Quelle vertu sans tribulations ? Il n'y a de bon système que cassé. Si tout marche, rien ne marchera. Chaque épreuve me précipite au devant de ce fétiche : il n'y a de vrai dieu que blessé.

L'Oreille cassée
Le vivant, le vrai, p. 50
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Le lointain devient le prochain
Pour son cycle mondial de voyages extraordinaires, j'ai déjà décoré Hergé du titre de "Jules Verne des sciences humaines" ; je me suis trompé, je l'avoue. Car ces sciences placent une telle distance entre l'homme qui étudie les autres et ces autres qu'il étudie, que l'écart ne se comble jamais, que la réciproque n'advient pas. Tintin, au contraire, réduit la distance et fait de l'éloigné ou du chassé un proche.
Il invente donc l'action ou le voyage humanitaires, tels que nous les pratiquons. Vivrons-nous assez pour que les sciences sociales remplacent une objectivité, souvent inhumaine, par cette inaccessible bonté, verrons-nous donc naître des sciences humanitaires ? (p. 121)
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L'éloigné ou le prochain ?
[...] Seul l'intense effort d'un grand voyage fait, à l'inverse, que l'être lointain redevient le prochain. (p. 113)

La plus précieuse des raretés.
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« Bref, toute l'histoire de l'ethnologie ou de l'anthropologie suit ce même chemin, des colonies à l'antiracisme, celui, justement, qui va de Tintin au Congo à l'amitié du héros avec Tchang et Zorrino.
Si Hergé a droit au titre d'expert en sciences humaines, il le doit au parcours de tous les savants de ces disciplines qui, à la même époque, travaillaient sur ces mêmes sujets. Ce trajet fut le sien : mêmes sources troubles, même chemin somptueux, mêmes résultats sublimes. Le procès intenté à Tintin au Congo devrait alors se généraliser à Frazer, Durkheim, Lévy-Bruhl, Marcel Mauss... tous nos maîtres en humanité.
Je rêve parfois d'un retournement : qu'un groupe d'Amérindiens, d'Aborigènes australiens ou de bergers des Pyrénées viennent, en ces hauts lieux, étudier les mœurs et la sexualité des professeurs à Oxford, Harvard ou au Collège de France. Un tel retournement, une telle symétrie, Hergé les suggère à la dernière case de Tintin au Tibet, où le yéti, abominable homme des neiges, comme on sait, mais doué d'une bonté hospitalière transcendante, contemple, de sa solitude glacée, dos courbé pour que nul ne voie ses larmes, la caravane abominable dans les neiges, quitter ce haut pays, après lui avoir volé son nouvel ami. Quelle barbarie que la nôtre ! » (p. 138)
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La bonté de l'abominable
Voici. Bien au chaud dans nos maisons, nous aimons nous poser, après de bons repas, des questions très compliquées au sujet de l'éthique : si elle existe, pourquoi se perd-elle, comment l'enseigner... alors qu'il n'y en a qu'une et qu'elle est toute simple, mais terrible.
Tintin au Tibet dit le plus limpidement du monde la morale la plus forte et la plus profonde qui ait jamais été dite sous le ciel et pour les hommes : que l'abominable est bon et qu'il se conduit comme aucun civilisé ne le ferait, avec douceur et charité. (p. 116)
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Les meilleurs amis, dit-on, restent de la jeunesse ; mais avez-vous eu des amis de vieillesse ? Quand le mot n'existe pas, doit-on douter de la chose ? (p. 31)

Amis de vieillesse
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Avec plus d'aise que dans notre propre chambre, nous fûmes nombreux à jouir de son hospitalité, à Moulinsart, en un temps où nos maisons vibraient des bombardements et nos têtes des camps d'extermination. (p. 31)

Amis de vieillesse
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Qui n'a parcouru Shangaï, le Tibet, l'Ecosse ou le Proche-Orient sans se dire : je reconnais le paysage qui ressemble étrangement à ce que j'ai vu dans mon enfance par les yeux de Tchang ou du fils de l'Emir ? Comment se fait-il que, bloqué par la guerre dans un creux de la Garonne, j'aie déjà tant voyagé ? Les choses se renversent par enchantement : le monde mime les cases mémorables, les modèles reflètent l'image, la vie se met à suivre les sortilèges de l'art. (p. 23)
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« Supprimons les media. Reste la Société comme groupe nu. Voulez-vous classer les sauvages ? D'abord les émetteurs non récepteur : le savant (la science), sourd et distrait, prend la carte pour la tarte et le whisky pour la pluie de printemps ; il se moque de l'émeraude ; la cantatrice émet (aux abris!) sans recevoir pour une autre raison : elle prend la parole et la musique et ne sait pas la rendre ; l'assureur, à son tour, n'entend pas l'opéra et préfère la bière. La patrouille des pies, leur totem. Suivent les récepteurs non émetteurs : le vieux marin, qui hume le joli mois de mai lorsque l'ordure pue, qui sourit à Miarka et se laisse mordre, qu'on fiance à son corps horrifié, qui danse au sortir de la Fleur et chante sa douleur au pied qui, par chance, s'en va au départ de la belle ; les gens de maison et les gens du voyage, accusés de voler sans pouvoir se défendre ; les silencieux ; les opprimés, ceux de l'ombre. La patrouille des hiboux, leur totem. Qui marche dans les combles et ulule à la nuit. Les vecteurs en troisième, qui reçoivent n'importe quoi, émettent n'importe quoi, journalistes, opérateurs, la patrouille des guêpes, leur totem. Comme un vol, un essaim, issu du nid natal. Ceux qui n'émettent ni ne reçoivent, enfin, mais bégaient, contrepètent, font du bruit, cassent les véhicules, et symbolisent le pouvoir : les Dupondt, la patrouille des perroquets, leur totem. Tout ce beau monde roule dans l'escalier en série régulière. » (pp. 85-86)
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