Citations sur Sacra - Parfums d'Isenne et d'Ailleurs, tome 1 : Aucu.. (10)
Je ne l'ai jamais mieux aimée qu'en silence, et c'est ainsi, alors, que je l'aime encore, et le ferai toujours. En silence, et avec la rime adéquate : à distance.
(Gold)
Lorsqu'on aime monter, on n'a pas besoin d'objectif ou de leurre. Seulement de l'espace grand ouvert droit devant, et derrière, et au-dessus.
(Under The Ivy)
Dieu devrait être, uniquement, tel que Salomon le chanta, sous couvert de pavane amoureuse, dans le Cantique des Cantiques. Une énergie vivace, faite de parfums, de fruits, d’images exaltées. Une pulsion irrépressible, tressée de soleil, d’eaux courantes, de roses de Saaron et de muguet des sous-bois. Une sensation vibrante, passionnée, (que l’on sentirait dans son ventre sans besoin de lui donner de nom), ressentie à la simple contemplation de sa Création. Alors, il me semble, il nous viendrait cette denrée dont nous nous montrons si pauvres : le respect de tout. Tout ce qui vit, tout ce qui marche, tout ce qui pousse, tout ce qui hisse nos âmes affamées plus haut. Si nous étions dignes de ce que nous prétendons être, à savoir une espèce supérieure à toutes les autres, nous n’aurions jamais besoin de penser à Dieu, et il n’aurait jamais – avec un bien compréhensible soulagement – à penser à nous. Nous nous contenterions de coexister avec toute chose, y compris lui, sans plus nous toquer de régenter les autres êtres, de tracer des champs aux angles droits, et d’imposer nos idées les plus saugrenues à l’intégralité de l’univers.
[Under The Ivy]
Quoi de mieux que le noir, pour capturer la lumière ?
[Lithophanie]
"Je veux m'asseoir sur le rocher de Prométhée. Boire au banquet avec Hector. Chevaucher vers la bataille avec les brigades de Tennyson. Marcher à l'aube dans les jardins neufs d'Antigone. Sentir les parfums de la forge d'Ilmarinen, de Wayland, de Tubal Caïn, même ! Consulter l'Oracle à Delphes. Non : *devenir* l'Oracle à Delphes ! Je veux le goût de ce sang, le parfum des libations, et celui de l'hamartia et de l'hubris, Neil. Plus que tout, oui, courir sur la vague de l'hubris ! Sur la vague déliée qui est un chant, une ode, une épopée en soi ! Je ne veux plus regarder tout ceci au travers d'une vitre embuée. Je veux faire partie des univers dont je me suis faite la scalde. Être à la fin le chaman et non le bateleur."
"A Travers la Fumée"
J'aime marcher ainsi, seul et sans gardes, dans le ventre vibrant de la cité. Dans la douleur - ou ce qui, dans le cœur complexe des Melnibonéens, lui ressemble - elle est plus sauvage et plus libre que dans la joie.
[Le Rêve en la Cité]
Je me suis souvent demandé d'où vient la magie des écrivains.
Cette espèce de transe d'où jaillissent les mots. Des mots qui se font phrases, se font chants, et hissent hors du néant la trame construite des histoires.
(À travers la fumée)
"La lumière poudrée, à travers les hautes futaies, prend une myriade de formes, de couleurs, d'éclats. Il y a un son minuscule dans la façon dont les rayons du soleil poudroient, dans le lent déploiement des feuilles, dans le mâchonnement des racines, loin dans la terre noire. Il n'est pas un seul mètre, ici, qui ne soit un chant, et personne ne reçoit de regard désobligeant s'il l'entonne. Quoi que Mère en dise, c'est bien l'église du début du monde, quand Adam et Eve étaient seuls à jouir du Jardin. Si les hommes sont devenus si sots, si ternes, et si (mal) *habillés* ce n'est pas parce qu'ils ont croqué une pomme : c'est parce qu'ils sont devenus trop nombreux. Le silence des bois ne devrait pas se partager, jamais."
"Under the Ivy"
Chaque être est un petit système solaire en soi, […] avec ses planètes, ses satellites, ses comètes. Il ne faut pas observer ou contester les systèmes solaires des autres. Ils nous paraissent toujours étranges, mais ils fonctionnent très bien sans notre intervention, jugement, ou permission. Laisse faire ; laisse aller. Il faut apprendre à ne pas vouloir tout contrôler.
[Magnificat]
Voilà ma leçon sur le Kintsugi : il est un temps, et certaines circonstances, où les poteries ne sont pas brisées sans raison, si précieuses soient-elles. Et il convient alors de faire la seule chose honorable : les laisser telles qu'elles sont. C'est pourquoi, parfois, on leur rend leur intégrité en les lézardant de métaux précieux, ou qu'on les conserve à l'état de tessons, mais qu'on ne les restaure pas. On ne cache pas le bris, on le surligne, au contraire. C'est vrai pour les céramiques, et c'est vrai pour les hommes.
(Gold)