Midi neuf.
"Faut te lever, mon gars. C'est pas en roupillant jusqu'à midi que tu vas t'en sortir. A dix, je me lève."
Il se mit à compter mentalement. Il recommença plusieurs fois, puis au prix d'un effort surhumain, glissa mollement au bas de sa couche. Il enfila ses charentaises mitées et coula jusqu'à la cuisine pour s'y faire cuire deux œufs durs. Une journée épuisante - comme toutes les précédentes - commençait.
Pendant que ses œufs cuisaient, il alla se pencher sur l'évier et se passa un gant de toilette humide sur les joues.
"Le braquage du siècle... Je le ferai, nom de dieu !"
Epuisé par cette décision, il dut s'asseoir et continua d'une main molle à passer le gant mouillé sur sa face d'acteur années folles.
"Je lui ressemble un peu à Sterling Hayden, se dit le poussah blond, admirant le gabarit athlétique, le un mètre quatre-vingt-cinq, l'air implacable de l'acteur, et oubliant son énorme brioche, sa petite taille, son postérieur éléphantesque et sa bouille aussi grasse que si elle venait de mariner dans un pot-au-feu non dégraissé. Y a pas à dire, nous autres les tueurs, on a un air de famille."