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Critique de Patsales


Les douces dingueries de familles atypiques… Aïe aïe aïe… Il y a toujours le risque de forcer sur le déjanté et l'atypique et d'aboutir à un truc hors-sol qui fatigue le lecteur à force d'invraisemblances. Les Contreforts sont parfois à deux doigts de la sortie de route, mais ça fonctionne. Ça fonctionne parce que le père foutraque et les esprits qui veillent sur le château familial relèvent moins du merveilleux que de la tragédie en 5 actes. Une belle tragédie cornélienne, comme qui dirait Horace-sur-Corbière.
Les pères chez Corneille sont toujours des salauds hors-normes. Horace père envoie donc ses trois fils défendre Rome, ce qui nécessite au passage de trucider la belle-famille. Et quand le dernier survivant de la tuerie s'enfuit, Horace père se déchaîne. « Que vouliez-vous qu'il fît contre trois? » lui demande-t-on. « Qu'il mourût! », répond-il benoîtement.
Ben là, c'est pareil. Il y a le château, il y a le village. Autant dire Rome et Albe. de l'un à l'autre, des amourettes, des amitiés, des bastons rigolardes. Et puis un jour, on ne rigole plus. La famille Testasecca, qui croule sous les dettes, doit être expropriée. Et comme le père est trop vieux pour tenir encore son rôle de patriarche, le nom et le territoire des ancêtres doivent être défendus par les enfants qui ploient sous l'injonction catégorique et titubent de devoir rester droits dans leurs bottes. La bataille sera terrible, épique, et riche en coups de théâtre.
Comme chez Corneille, le héros triomphe. Mais à quel prix? le châtelain au château décati mais encore magnifique est surnommé « le Minotaure », pour sa force, son caractère sanguin et pour son domaine labyrinthique. Mais le Minotaure est aussi un monstre qui se repaissait d'adolescents qu'il fallait lui sacrifier tous les ans.
Bien sûr que ce Minotaure-là est séduisant et que son combat est juste. Mais son égoïsme infantile met tout le monde en péril autour de lui. D'ailleurs c'est l'amour absolu qu'on lui voue qui le rend si dangereux.
Le château relève de l'enfance. La triste réalité est beaucoup moins glamour. Mais « être né quelque part » ne donne aucun droit et les gens ont définitivement plus de valeur que les lieux. Et il est d'ailleurs dommage que Guillaume Sire ait lui-même parfois escamoté la nécessaire part de réel (genre ne nous embêtons pas trop avec les détails techniques, on va mettre des mots qui font joli et on va dire que les étançons cèdent et que les mâchicoulis s'affaissent, ça suffira bien).
Sinon Horace, à la fin de la pièce, a perdu ses frères, tué son meilleur ami et occis sa soeur. Mais Papa est fier de son fiston: Rome est sauvée et l'honneur lavé. Dans le roman de Guillaume Sire, les pères finissent par céder et les contreforts ne tiennent pas, c'est ce qui apportera paradoxalement le salut.
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