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sur 183 notes
Militante féministe depuis plus de dix ans, il fallait bien un jour que je me penche sur ce pamphlet. Et moi qui me fais régulièrement traiter de misandre, anti-hommes, pro matriarcat, j'aimerais faire lire à tous ceux là ce petit livre, qu'ils comprennent ce qu'est la misandrie.
L'autrice est essentialiste ; c'est à dire qu'elle pense (grosso modo) que les hommes naissent pervers, mauvais, violents - et autres "qualités" tandis que les femmes seraient douces, compréhensives, innocentes et généreuses. Personnellement, je suis une féministe de la deuxième vague : radical/matérialiste. Je considère que c'est l'éducation, la société, bref tout ce qui nous entoure, qui façonne notre façon de voir et de penser les choses. Pour moi, notre personnalité est quasiment acquise à près de 95%, l'inné se retrouvant juste dans le physique. Ce qui fait que, contrairement à Solanas, j'ai encore un peu d'espoir quant à changer la société -même si ça va être très très long, vu ce que je lis dans les médias, ou lorsque j'écoute les gens parler.
Au final, j'ai tout de même un peu ri tant c'était exagéré, mais sa colère, je la partage et elle est légitime.
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Lauren Bastide, dans sa postface, écrit : "Car personne n'a jamais vraiment su comment aborder le texte de Solanas."
Et c'est comme çà que je me sens après avoir refermé cet ouvrage, prise entre un premier degré revanchard et extrême, limite malaisant, et un second degré rigolard, tout aussi malaisant par les idées pas si ridicules que çà qui émergent du texte, prises au milieu de présentations caricaturales. Parce qu'aujourd'hui, quelle femme ne se reconnaitrait pas dans au moins une face de la domination masculine que Valérie Solinas présente dans son manifeste. du coup, on peut en arriver à se poser la question de la légitimité de l'éradication des hommes. C'est presque une blague. Presque... parce que dans la société du #metoo, on peut légitimement s'interroger.
En parallèle, Valérie Solanas remet en cause le capitalisme, rêvant d'une société sans argent et automatisée qui répondrait à tous les besoins de ses membres et en feraient des êtres égaux.
La postface de Lauren Bastide raconte Valérie Solinas et sa vie et replace dans un contexte actuel ce pamphlet féministe un brin extrême, mais intéressant à lire, ne serait-ce que pour mettre à jour notre part revancharde, envers les hommes et la société et réfléchir sur notre place vis-à-vis de tout çà.
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En anglais, « scum », c'est l'ordure, le rebut, le salaud. Pour Valerie Solanas, c'est l'acronyme de Society for Cutting Up Men, et c'est déjà tout un programme !

« Vivre dans cette société, c'est au mieux y mourir d'ennui. Rien dans cette société ne concerne les femmes. Alors, à toutes celles qui ont un brin de civisme, le sens des responsabilités et celui de la rigolade, il ne reste qu'à renverser le gouvernement, en finir avec l'argent, instaurer l'automation à tous les niveaux et supprimer le sexe masculin. » (p. 9) Dans ce pamphlet, l'autrice effectue une démonstration par l'absurde poussée à l'extrême. Cela peut sembler grotesque ou délirant, mais à bien lire et relire le texte, on comprend toute la pertinence du propos.

Le postulat de Valerie Solanas, c'est que l'homme voudrait être une femme. Frustré, il compense en baisant à tout va et en projetant sur les femmes ses propres faiblesses. « Chaque homme sait, au fond de lui, qu'il n'est qu'un tas de merde sans intérêt. » (p. 16) Pour mettre en place une société plus juste où les femmes auraient toute leur place, l'autrice prône évidemment la fin du patriarcat et du capitalisme, mais surtout la mise sous tutelle des hommes, ces êtres maladifs et incomplets. « La virilité est une déficience organique, et les hommes sont des êtres affectivement infirmes. » (p. 10) Il faut redonner le pouvoir aux femmes, seules à être capable de l'assumer et de diriger le monde.

Au-delà du discours violemment satirique et agressif envers les hommes et résolument féministe, Valerie Solanas veut forcer les lecteur·ices à changer de vision sur le monde, à déplacer leur point de vue pour se mettre dans les pompes de l'autre sexe. « L'amour ne peut s'épanouir dans une société fondée sur l'argent et sur le travail dépourvu de sens. Il exige une totale liberté économique et individuelle. » (p. 47) En première lecture, le manifeste est évidemment féroce et jubilatoire : il fait hurler de rire, soit pour éviter de hurler tout court, soit pour s'entraîner à hurler, justement !

La postface modeste et lucide de Lauren Bastide éclaire le texte et donne d'autres pistes pour le comprendre et l'appliquer à notre société de 2023. Vous vous en doutez, ce petit livre prend sa place sans attendre sur mon étagère de lectures féministes ! « Les femmes, elles, prennent pour acquises leur identité et leur individualité, elles savent instinctivement que le seul mal est de nuire aux autres et que le sens de la vie est l'amour. » (p. 40)
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Plus qu'une pensée féministe, rebelle, anarchiste ou que sais-je encore, Scum Manifesto est avant tout un pamphlet. Afin de bien éclairer le futur lecteur, il est bon de définir le concept du pamphlet, soit un écrit fait pour tuer.
A ce titre, Scum Manifesto réussit, puisqu'il argumente et explique comment et pourquoi il faudrait tuer tous les hommes de la Terre sans éprouver aucune pitié.

Le véritable problème de ce texte est son auteur : Valérie Solanas. Et certain(e)s lecteur(ice)s qui n'ont jamais vu aucun ordre patriarcal s'exprimer, qui pensent que ces idées sont des fantasmes de féministes, auront l'impression de tenir entre leurs mains un mein kampf. A celles-là et ceux-là, j'aimerais les rassurer.

Non, un génocide masculin n'aura jamais lieu, peu importe le nombre de gens qui le lisent, et
non, jamais les femmes ne détiendront un pouvoir absolu et fasciste sur l'humanité - oui je sais, il parait que certaines tribus primitives évoluant culs-nus avaient mis en place un pouvoir matriarcal, mais ne nous en inquiétons pas outre-mesure.
Pour l'instant, et je parierais mon âme là-dessus, des hommes déteindront le pouvoir sur les femmes jusqu'à la fin des temps.

Cela, n'importe quel esprit honnête pourrait en convenir. D'où l'humour de l'auteur par ce renversement des forces, et le trente-six millième degrés nécessaire pour lire ce texte. Mais hormis cela, que reste t-il ? le cri d'une femme blessée par les hommes. Comme ces hommes qui la violèrent depuis sa plus tendre enfance, ou comme celui qui l'exploita artistiquement (1), puis qui perdit sa pièce de théâtre (2) par pur je m'en foutisme, ou encore, comme cet homme éditeur qui fit fortune en vendant le Scum Manifesto dans le monde entier sans jamais rétribuer son auteur. Au final Solanas n'arrivera pas à briser sa tragédie, les hommes, et finira par crever d'une pneumonie dans une bouge crasseux de San Francisco.

C'est ce qui motiva mon envie d'écrire cette critique, vous affirmer que pour bien appréhender ce court pamphlet, il est nécessaire de s'intéresser à la vie de son auteur. Solanas, un artiste de génie que la société américaine destina à la rue, la toxicomanie et à la prostitution, mais un esprit incroyable aussi, une guerrière pleine de pulsions de vie, et de mort.

En plus du Scum Manifesto, si vous souhaitez vous intéresser à ce destin hors du commun, je vous conseille vivement le visionnage du film qui raconte sa vie, " I Shot Andy Warhol ", et la prestation incroyable de l'actrice qui l'incarne, Lili Taylor.


(1) le même homme qui exploita le peintre Basquiat, puis qui l'assassina
(1) selon Solanas son oeuvre ultime, qu'elle ne possédait qu'en un seul exemplaire.
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C'est parce que Virginie Despentes en fait une référence que je me suis intéressée à "Scum Manifesto" le texte le plus radical de l'histoire du féminisme, le Scum étant une "Association pour tailler les hommes en pièces" comme l'indique le sous-titre. Alors rien que pour ça il faut lire le cri de colère de Valerie Solanas, à ne pas prendre au premier degré même si elle l'a écrit avec une grande sincérité en 1967. Il faut dire qu'aux États-Unis l'époque est marquée par la pensée révolutionnaire, entre la lutte des Noirs pour les droits civiques et la guerre du Vietnam et que l'autrice est une femme qui a été abusée par les hommes toute sa vie, depuis sa petite enfance.

Ce pamphlet doit s'entendre comme la haine du patriarcat et des mâles dominants plutôt que des hommes individuellement. D'ailleurs, Valerie Solanas avait des potes y compris transgenres dans la vraie vie.
Elle met donc les pieds dans le plat en déclarant qu'il faut bousiller le système patriarcal fondé sur l'argent, la domination et le travail, avec les filles Scum.
Elle y met de la violence y compris contre "les filles à son papa" comme elle appelle les femmes soumises (en opposition aux femmes Scum) ou contre le Grand art en référence à Andy Warhol qu'elle ne cite pas mais qui la suffisamment méprisée pour qu'elle le blesse gravement en lui tirant dessus en 1968 quand elle fréquente la Factory à New-York.

Voilà un livre qui met mal à l'aise parce qu'il appelle très clairement à l'éradication des hommes (ce qui est impensable bien sûr sauf pour Valerie Solanas) mais cela prend peu de place dans le manifeste finalement. C'est la critique de la société de l'époque qui est centrale d'autant plus qu'elle est persuadée de la supériorité de la femme, l'homme étant une femme manquée. Si cela peut sembler caricatural puisque radical, il y a aussi un côté visionnaire dans ce livre : elle évoque par exemple l'automation généralisée ou la binarité de genre. Et puis, il faut compter de belles phrases comme "Les femmes savent indistinctement que le seul mal est de nuire aux autres et que le sens de la vie est l'amour."
Ce qui est certain c'est que personne n'a écrit un texte comme ça avant.


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On entend souvent dire "ce qui est excessif est insignifiant". Non !
Ce texte, ce Scum manifesto est "excessif". Et il n'est pas une bouffonnerie, ou une blague. Il est issu d'une femme qui s'est fait violer, abîmer sa vie durant par des hommes. Tu m'étonnes qu'elle hait la haine ! La haine de ces sales cons !
Pourtant, malgré son "excès", Solanas n'en oublie pas de considérer l'aspect systémique de l'infâme. Système capitaliste pognon-roi construit par et pour l'homme. Mais qui craint, qui pousse tout le monde à sa perte. L'homme tout autant, d'ailleurs.
Solanas a raison, l'automation-machinisation nous aiderait à ne plus avoir à faire des travaux inutiles voire dégradants. Et 55 ans plus tard, c'est encore plus vrai et plus réaliste, réalisable.
Solanas croyait en elle et ses pensées et ce manifeste. Aucun second degré. Une simple "expression" express, survivre. Comment ne pas la comprendre ? Pourquoi la mépriser ? Pourquoi ne pas en discuter.
Je suis un homme et même si je fais partie par conséquent de ceux qu'il conviendrait d'éliminer, je trouve que ce n'est pas "intelligent" de faire l'économie d'y réfléchir.
Petit point au passage, suis totalement pour le centre de suicide ouvert à tous pour disparaître sans douleur.
Cette femme, elle, encore, a dû se suicider, cloîtrée en hôpital psychiatrique : absolument choquant. le genre de fin qui m'est insupportable. Et tant d'autres ont cette tentation ou en sont résolus à agir en ce sens, ce non-sens... Dans ce système abject qui n'a pas encore fini de se perpétuer et de perpétrer ses malheurs.

Ce manifeste est "excessif", oui (n'est-ce pas un peu le propre d'un manifeste ?), mais insignifiant, non. Non.

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La postface de Lauren Bastide donne de très utiles et intéressants (indispensables même) éléments pour contextualiser le texte et la personne de Solanas.
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Vu la date et le contexte sociétal de la publication de ce livre, la violence des propos s'explique. Choc de générations, volonté de libération du carcan masculin, la nécessité d'une révolution contre la société patriarcale est une évidence pour l'époque.
Le livre est cru, méchant, sans concession, sans recul, totalement fermé à toute contradiction, c'est une harangue qui sort des tripes ! Elle ne vise pas que les hommes, mais aussi le capitalisme, la domination par le pouvoir et l'argent.
Même si ils sont souvent dépassées par la violence des solutions, les propos sonnent juste et L'auteure balaye les études et les propositions de réforme qui pourraient faire évoluer la situation : la situation est irrattrapable, éliminons l'homme !
Le style résonne comme si l'auteure criait à une tribune devant une assemblée mi-médusée mi-hystérique.
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J'étais curieuse de découvrir ce manifeste depuis le temps que j'en entendais parler, principalement suite à la sortie de cette nouvelle édition, dans les podcasts féministes que j'écoute. C'est ainsi que j'en ai découvert l'existence et un bout de l'histoire de Valerie Solanas, qu'on réduit souvent à sa tentative d'assassinat d'Andy Warhol. Comme le précise Lauren Bastide, la journaliste derrière le podcast La Poudre, dans la postface, elle était aussi « une travailleuse du sexe queer, pauvre et psychotique », à la pensée révolutionnaire.

Le manifeste en lui-même ne mâche pas ses mots et promeut peu ou prou l'extermination des hommes, présentés comme inférieurs aux femmes. Si j'ai ri pour certains passages, ce n'était pas du tout parce que je ne prenais pas au sérieux les propos de Valerie Solanas et que je l'interprétais comme des exagérations comiques – comme l'édition française précédente était souvent perçue – mais bel et bien parce que la violence des propos était inattendue.

Bien sûr, elle ne fait pas dans la dentelle ni la nuance, d'ailleurs il ressort de son manifeste une essentialisation indéniable qui donne un caractère propre et définitif aux femmes, et séparément aux hommes (même si son essentialisme n'a pas le même sens que celui d'autres personnes à l'époque qui enfermaient les femmes dans la sphère domestique et les hommes dans la sphère publique). J'ai trouvé cet extrait représentatif dans le sens où il montre que Valerie Solanas avait tout de même quelques notions de la réalité sociologique de ce qu'elle avançait. Ce qui ne signifie pas que tout ce qu'elle dit est juste – très loin de là.

Bien entendu, je ne suis pas d'accord avec une grande partie de son propos, qu'il s'agisse de placer l'espèce humaine au dessus des autres animaux, ou de placer les femmes comme essentiellement supérieures. Il n'empêche que ce manifeste était intéressant à lire pour l'histoire qu'il a eu, et l'impact qu'il a pu avoir dans le féminisme.

La postface de Lauren Bastide est également très intéressante puisqu'elle resitue le livre dans son contexte de publication des années soixante, mais aussi dans notre société contemporaine où des voix de femmes s'élèvent, encore et toujours, pour protester contre la domination des hommes.

Je ne suis pas convaincue en revanche que des milliers de femmes ou personnes perçues comme telles envisagent de suivre ce manifeste qui reste tout de même très daté et un peu absurde parfois.

Si vous vous intéressez à l'histoire du féminisme et êtes curieux et curieuses de découvrir ce manifeste, c'est une lecture très rapide dans un tout petit format, et il est même trouvable sur le Web gratuitement en version anglaise.
Lien : https://deslivresetlesmots.w..
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Je suis passée du rire aux larmes...
De la colère à l'euphorie...
De l'espoir au désespoir...

Il est vrai que le côté extrémisme peut faire frémir, mais sous les couches d'exagération et de limites à ne pas franchir (on ne va quand même pas buter tous les hommes, hein...), on y retrouve pas mal de vérités sur les relations homme-femme, le patriarcat, le mariage, la paternité, le sexe...

Un petit manifeste à lire pour en tirer quelques tirades bien senties et pourquoi pas faire passer quelques messages...
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cette lecture n'est pas adaptée à tout le monde. Déjà, si le féminisme est quelque chose qui vous horripile, passez votre chemin. Si vous pensez que la misandrie est absurde, passez votre chemin. Vous pensez que l'homme est supérieur et que cela va de soi, passez votre chemin. Par contre, si vous voulez lire le manifeste d'une femme engagée et surement avec de sérieux troubles psychologiques, vous trouverez votre bonheur. Peut-être pas une affinité intellectuelle mais une réflexion, une autre façon de voir, un élément de discussion... Bref, le début de quelque chose car cela amène à des lectures plus complètes et structurés sur le féminisme. Les auteures surtout américaines ne manquent pas qui abordent la phallocratie (très présente), le manque d'égalité, de respect, la violence, le viol, les agressions...
Lien : https://22h05ruedesdames.com..
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