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sur 282 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Avec le vieil âge, la mémoire immédiate s'efface, laissant place à la mémoire lointaine. Et certains souvenirs, les plus anciens, les plus troublants, sont enracinés viscéralement. le domaine de Tyneford est un de ceux-là. Elise se rappelle… elle a dix-neuf ans dans l'Autriche de 1938 et ses parents veulent l'envoyer en Angleterre.

Elise Landau est d'origine juive. Anna, sa mère, est une célèbre cantatrice et Julian, son père, un écrivain reconnu. A Vienne, ils font partie d'une élite et la vie leur est plus que plaisante dans les fastes de la bonne société. 1938, Hitler unifie l'Allemagne à l'Autriche par un coup d'état. le régime nazi a déjà laissé une empreinte et la terreur se répand comme une nappe de brouillard qui grignote petit à petit les libertés. Les parents d'Elise, conscients des menaces, ont décidé de quitter leur pays pour l'Amérique, mais n'ayant pu avoir de visa pour leur benjamine, ils se voient obligés de l'exiler en Angleterre pour une année. Là-bas, dans une riche famille du Dorset, un poste de domestique lui est proposé.
Avec les précieuses perles de sa mère, des bijoux cousus dans la doublure de ses vêtements, et le vieil alto de son père dans lequel il a glissé son dernier manuscrit, un roman autobiographique, Elise part s'installer chez Mr. Rivers en faisant promettre à ses parents et sa soeur Margot, de ne pas l'oublier…

Lorsqu'elle arrive à Tyneford, la beauté du domaine la surprend et on peut penser qu'elle en tombe amoureuse dès ce premier jour. le manoir d'allure gothique a de belles pierres et la propriété s'étend jusqu'à la mer. Accueillie par la gouvernante Mrs. Ellsworth et le majordome Mr. Wrexham, tous deux très solennels, on lui confie aussitôt son costume de domestique, on lui attribue une petite chambre dans les combles et on lui ordonne de couper ses longs cheveux. Une servante doit se rendre invisible et n'avoir aucune coquetterie. Invisible… celui qui souhaiterait qu'Elise se fonde dans le décor ne connaît pas du tout le personnage ! Tout son être brille d'intelligence et de curiosité. Un caractère avide de tout, émotif, parfois théâtral, attentionné et très chaleureux.
Les premiers jours sont durs car sa famille lui manque énormément. Ce n'est pas tant les travaux qu'elle doit exécuter sans rechigner qui lui pèsent, mais plus la frontière qu'on lui impose. Il y a le monde des domestiques et celui des patrons, un univers nouveau dans lequel elle devra s'adapter sans commettre d'impairs. En réponses aux lettres de Margot, elle envoie des courriers enjoués en cachant sa tristesse et en les pimentant de ses frasques. Les extravagances d'Elise agacent beaucoup mais en font sourire d'autres, comme le vieux Art, le palefrenier, et Mr. Rivers, un homme particulièrement taciturne, conscient de son rang et de sa charge. Tyneford est un héritage lourd.

"Vous avez de la chance, Elise. Mr. Rivers appartient à une très bonne famille qui, sans être aristocratique, est néanmoins très ancienne. Vous devez essayer de ne pas décevoir la confiance qu'il place en vous, ajouta-t-elle d'un ton qui indiquait clairement qu'elle jugeait cela impossible. Je ne veux pas vous revoir ici dans une ou deux semaines parce que vous avez trouvé ce travail trop dur. Il y a un mois, une femme qui se disait comtesse, ou quelque chose de ce genre, m'a confié qu'elle n'avait jamais mis ses bas toute seule. Sans la pénurie de domestiques que nous connaissons, je l'aurais envoyée paître. Mais ce matin j'ai reçu un mot de Mrs. Forde m'assurant qu'elle n'avait jamais eu une aussi bonne femme de ménage que cette comtesse."

Passer inaperçue, ne pas faire de bruit, ne pas manifester son avis et récurer cette bâtisse sombre et vide, ne faire que ça, jusqu'au soir où elle s'écroule et s'endort bercée par les eaux… Il y a de quoi réciter tout un chapelet de jurons en allemand et en anglais… et Elise ne s'en prive pas. Face à la mer, elle peut tout crier. Et c'est ainsi, sur une salve de mauvaise humeur qu'elle rencontre pour la première fois Kit, le fils de Mr. Rivers. Kit fait des études à Cambridge et revient chez lui pour fêter ses vingt ans. le manoir va recevoir des invités pour l'occasion et connaître une animation très vive avec cette bouffée de jeunesse délurée. Tyneford assoupi, se réveille.

La guerre est très proche, les journaux annoncent de mauvaises nouvelles, Anna et Julian sont toujours à Vienne prisonniers d'une bureaucratie devenue exigeante et profiteuse, Margot a pu partir en Amérique avec son mari, et à Tyneford chacun se prépare à des temps obscurs. A travers le regard d'Elise empreint encore d'ingénuité, nous sommes témoin de cette nouvelle ère et du déclin de l'ancienne. Elle raconte Kit, leur amitié, leurs rêves, l'amour, sa vie à Tyneford, les sentiments qui la bousculent, la mer, les gens qu'elle a appris à connaître et à aimer, la présence protectrice de Mr. Rivers, son soutien indéfectible… l'attente, ses espoirs et ses désespoirs… Elle se dévoile, fière et courageuse, honnête et fidèle à l'éducation qu'elle a reçue, aimante et libre.
Les souvenirs d'une vieille dame parcourent ce tronçon de vie ; la guerre, Tyneford et deux amours… "On peut vivre plus d'une vie et aimer plus d'une fois."

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Je vous conseille ce beau roman qui est le deuxième livre de l'auteur.
Elle situe son histoire dans le Dorset, une région qu'elle habite et qu'elle aime. Tyneford est Tyneham, un village qui a été évacué et annexé lors de la Seconde Guerre mondiale, par les armées britanniques et américaines pour implanter leur camp d'entraînement. D'un charmant village, sauvage et préservé, il est devenu un village fantôme peuplé de ruines. Avec ce livre, elle fait renaître une époque et rend hommage aux pierres du manoir élisabéthain… "…l'un des plus beaux d'Angleterre : une exquise demeure en pierre dorée du Purbeck."
Ce livre est aussi l'histoire de sa famille qu'elle évoque avec Elise et tous les autres réfugiés. Sa grand-tante Gabi Landau fut une de ces jeunes filles qui ont fui l'Europe et qui sont venues travailler en Angleterre avec un "visa d'employée de maison". Gabi avait une soeur Gerda qu'elle aimait tendrement… l'une en Angleterre, l'autre en Amérique.
Témoignages, romance, Natasha Solomons décrit de belles façons les émotions et les décors. Dés le début, elle nous invite à faire corps avec la campagne qui s'étire vers la mer. Et comme Elise, nous sommes conquis.
Les personnages qui entourent notre héroïne ont tous des personnalités affirmées. On a plaisir à les lire et on se prend d'affection pour eux. Leurs natures sont franches, originales dans la fantaisie comme dans l'austérité, et offrent à Elise la famille qu'elle a perdue.
La nostalgie a ses bonheurs et ses peines, idéaliste et concrète, les amours sont beaux, passionnés, juvéniles et matures, Elise donne un message positif, plein de force.

A la lecture, on ne peut s'empêcher de faire des rapprochements avec d'autres images… celles d'un magnifique roman d'Eva Ibbotson "Les matins d'émeraude" et celles de la passionnante série télévisée de la BBC "Downton Abbey".

Une lecture que je vous conseille…
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J'étais sûre d'avoir déjà rédigé ma chronique peu après avoir lu le roman, mais j'ai dû oublié de valider vu qu'elle n'y est plus aujourd'hui...Je n'ai plus qu'à recommencer, une quinzaine de jours après avoir fini de lire le manoir de Tyneford, alors que j'ai lu sept ou huit autres romans depuis. Mes impressions vont être moins fraîches.Commençons par le plus évident : j'ai adoré ce roman.J'ai beaucoup aimé le style, très vivant, de Natacha Solomons qui nous fait partager de manière très crédible les joies et les peines de son héroïne, une jeune femme attachante et émouvante plongée dans les tourments de l'Histoire et des sentiments.Le manoir de Tyneford m'a aussi permis de découvrir un aspect de la Seconde guerre Mondiale dont j'ignorais tout : celui des jeunes filles juives allemandes ou autrichiennes qui s'engageaient comme domestiques à l'étranger pour échapper aux persécutions nazies.
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1938. Elise Landau, jeune fille juive issue de la bourgeoisie, se voit contrainte par la montée du nazisme de fuir Vienne. Ayant obtenu une place de domestique, elle part pour le domaine de Tyneford, en Angleterre, dans l'attente de recevoir son visa pour les USA et ainsi rejoindre sa famille. Ignorant tout de la rigoureuse condition domestique, elle va devoir s'adapter…

Les premiers chapitres nous plongent dans l'univers familier d'Elise pour mieux nous faire ressentir son dépaysement par la suite. La vie fastueuse à Vienne finit par céder la place à des débuts difficiles au domaine, sans parler de la survie en période de guerre. S'il y a quelques longueurs, j'ai fini par goûter cependant ce rythme lent et imprévisible, aussi lent et imprévisible que la vraie vie. A mi-chemin entre histoire et Histoire, fiction et réalité, c'est un récit qui s'apparente à une chronique au jour le jour des temps difficiles.

On n'a aucun mal à s'identifier à Elise, qui de jeune fille privilégiée, devient soumise à une austère étiquette anglaise. Elle est maladroite, étourdie et avoue ne pas posséder non plus les qualités artistiques requises dans le milieu bourgeois, contrairement à ses parents et à sa soeur. Mais elle est déterminée et tenace et va étonnamment gravir les échelons.

C'est un récit rétrospectif émouvant, placé sous le signe de la nostalgie, déplorant les aléas du destin et mettant en exergue la fragilité du bonheur.

Il y a bien sûr un petit côté Downton Abbey lorsque l'on voit les valeurs d'antan et le train de vie de la demeure remis en cause par la guerre, bien qu'il s'agisse de la deuxième et non de la première comme dans la série.

J'ai aimé me promener aux côtés d'Elise dans un cadre enchanteur : les falaises, la mer, l'omniprésence de la nature. « J'adorais cet endroit. J'aimais son côté sauvage, la mer battant les rochers noirs, le cri des oies cendrées dans le ciel, les oeillets maritimes au sommet des falaises, les couleuvres lovées dans la lande, le chant des pêcheurs, le ventre couleur d'arc-en-ciel des maquereaux, l'église silencieuse, la vue de Portland à travers le brouillard et les variations du temps aussi changeant qu'un opéra de Mozart – ensoleillé et chaud, avec des mouettes riant dans la baie, suivi l'instant d'après par une pluie qui criblait les vagues. J'aimais les bateaux de pêche et le ressac dans la nuit. »

Et enfin, cette histoire est d'autant plus poignante qu'elle est inspirée du funeste destin de Tyneham, un « village fantôme » du Dorset et de la propre grand-tante de l'auteure.

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Que j'ai passé un bon moment avec ce roman ! Je l'ai lu quasiment d'une traite et même si on a souvent l'impression de connaître déjà l'histoire tant elle peut ressembler à celle d'autres romans anglais (on pense à Daphnée du Maurier par exemple mais il me venait aussi sans cesse de nombreuses images de films anglais), la magie fonctionne, c'est bien écrit et on vibre pour celle qui raconte son histoire à la première personne, Elise Landau.

1938, en Autriche. Pour Anna et Julian Landau et leurs deux filles, Margot et Elise, bourgeois juifs viennois, la vie devient très difficile. Il est entendu que Margot et ses parents iront aux Etats-Unis dès qu'ils auront obtenu leur visa et qu'Elise essaie de trouver un emploi de femme de chambre en Angleterre. Voilà donc notre Elise, 19 ans, juive non pratiquante, potelée et jalouse de sa soeur, parlant un anglais déplorable, qui débarque à Tyneford. Dès le départ ce manoir nous est décrit par la narratrice des années plus tard et transmet l'admiration, la nostalgie, l'amour de ce lieu, symbole de tout un mode de vie anglais passé.

Et ce manoir prend vie à travers l'histoire d'Elise, ses difficultés à se faire à son nouveau métier, son manque douloureux de sa famille, le majordome Wrexham, parfaitement british dans son flegme et son attachement aux strictes traditions, le maître de maison, Mr Rivers, gentleman sombre et toujours impeccable, son fils de 20 ans, Kit, fougueux et attachant. Bref, un roman anglais qu'on savoure comme tel, romantique sans être mièvre, imaginant sans peine les près verts, la mer en toile de fond, les costumes, les ambiances...
Lien : http://dautresviesquelamienn..
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Une très belle histoire qui traite, à la fois de la fuite des Juifs avant la seconde guerre mondiale en Angleterre ou aux Usa, et d'une histoire d'amour magnifique. le deuil y est présenté pudiquement. On comprend combien de vies ont été détruites, le gâchis terrible qu'occasionnent les conflits et la manipulation subie par le peuple. Un roman à recommander, malgré des longueurs dues à de nombreuses descriptions.
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Voici un récit historique comme je les aime. Sur fond de deuxième guerre mondiale, une romance naît en Angleterre entre une autrichienne juive qui a dû quitter son pays pour sauver sa vie et un jeune anglais qui ne pas tarder à partir en guerre. La musique, l'écriture et la littérature font partie intégrante de ce roman qui ma fait pensé à l'écriture des soeurs Brontë ou Jane Austen. Encore un roman que je conseille à tous et toutes.
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Elise vit à Vienne avec sa mère chanteuse d'opéra et son père écrivain.
Quand la guerre arrive, Elise ne peut partir avec sa famille en Amérique.
Elle trouve un boulot de domestique au manoir de Tyneford en Angleterre...

Un très beau livre qui fait penser à Downton Abbey...
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Un très très bon moment de lecture. Superbe histoire bien écrite qui nous plonge dans l'histoire d'Elise une jeune bourgeoise juive viennoise dans les années trente. Par prudence et face aux avancées du nazisme, ses parents l'envoient en Angleterre devenir femme de chambre au manoir de Tyneford. Cette nouvelle posture est très difficile a vivre pour elle et l'arrivée du jeune maître au manoir complique encore les choses... le site de Tyneford est isolé au bord de mer et on se plonge très vite dans l'ambiance particulière des lieux. On suit le destin d'Elise pendant la guerre et elle vit de nombreux moments difficiles... beaucoup d'émotions! J'y ai retrouvé un peu de l'histoire de Rebecca.
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Une jeune fille de 19 ans arrive comme domestique dans un beau manoir anglais . Elle tombe rapidement amoureuse du fils du propriétaire et finit par se fiancer avec lui . Encore un roman feel good , une belle romance ? Non , car nous sommes en 1938 et Elise est une juive autrichienne. Ses parents l'ont envoyée là pour l'éloigner de la folie du nazisme . Mais la guerre la rattrapera, car les jeunes gens partent au combat, les domestiques s'en vont , et les souffrances s'enchainent. Heureusement Elise adore cet endroit en bord de mer et elle arrivera petit à petit à surmonter ses chagrins.
Magnifique livre , qui comme "la pension du bord de mer " , "la chorale des dames de Chilbury" ou "les recettes des dames de Finley" nous plonge dans le quotidien des anglais pendant la guerre. Un livre plein d'émotions, où les personnages ne sont jamais caricaturaux et les larmes jamais bien loin.
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L'histoire d'Élise autrichienne de confession juive et de bonne famille en 1938 que ces parents vont envoyer en Angleterre comme femme de chambre afin de la protéger

Nous allons la suivre dans sa nouvelle vie

Un roman intéressant mais sans plus









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