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3,96

sur 136 notes
En octobre dernier, au Festival.du.lac à Geney , j'avais eu le plaisir de rencontrer Bénédicte Soymier et de pouvoir échanger avec elle. Elle m'avait ainsi dédicacé son premier roman que j'ai lu ces derniers jours avec beaucoup de plaisir, il est vraiment prenant.

Paul n'est pas beau, malgré ses yeux bleus intenses et sa fossette charmante quand il sourit.
Paul n'est pas beau et il le sait.
Paul est seul, employé à la poste, malheureux, blessé, il aimerait tellement aimer et être aimé.
Paul rempli des carnets.
Angélique est mère célibataire, vit dans un tout petit appartement, enchaîne les boulots précaires.
Elle aimerait tant être aimée pour ce qu'elle est et non pour son apparence et Paul est si gentil et prévenant... Jusqu'au jour où !


Se mettre dans la peau d'un homme violent, analyser sa psychologie, montrer les rouages de l'engrenage dans lequel peut se retrouver un couple, tel est le pari de Bénédicte Soymier et elle l'a relevé haut la main !
J'ai vraiment beaucoup aimé ce roman. On est complètement entraîné à la suite de Paul, on vit ses émotions, on tombe avec lui dans la parano, la jalousie et la violence. Et c'est terrifiant de le vivre ainsi, d'être dans la tête du monstre et à la fois de se rendre compte que tout n'est pas entièrement noir. On est presque étonné de le trouver attachant cet homme qui se bat entre sa folie et ses blessures.

J'ai aimé le style, des phrases courtes et percutantes, des apartés qui s'adressent directement à Paul - est-ce l'auteure ou son inconscient, peu de chapitres, chacun consacré à une phase de la vie de l'homme, le mal-épris, le mal-aimé, le mal-aimant.

Bravo Bénédicte pour ce premier roman percutant !
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Paul vit seul dans son appartement et travaille au guichet d'une poste. Il tente de surnager dans un quotidien qu'il trouve bien morose jusqu'au jour où une nouvelle voisine emménage en face de chez lui. Cela va chambouler ses habitudes et le lecteur entre dans la tête d'un personnage qui tend vers le malsain et développe une attirance pour cette femme. On se retrouve dans les pensées de Paul et on voit arriver inéluctablement des évènements que l'on redoute. L'auteure questionne les raisons qui font que Paul change, devient obsessionnel devant les rencontres qu'il fait.

Bénédicte Soymier avec une écriture scandée et sans fioriture, nous fait entrer dans la tête de ce personnage introverti, à l'enfance difficile. L'économie de mots va droit au but. Les sonorités participent à l'immersion dans l'histoire. Derrière les traits de caractère de Paul on distingue des comportements sexistes, misogynes ou égoïstes. Plus globalement, des comportements et des mécanismes que l'on peut retrouver chez de nombreux hommes. Et c'est une des forces de ce roman, mettre la lectrice ou le lecteur sur une ligne de crête entre ce qu'il va advenir et le passé de Paul qui pourrait expliquer des choses. L'auteure insinue très bien ce sentiment de malaise, qui diffuse au fil du récit. On distingue les mécanismes d'emprise, les états qui mènent à la sidération d'un coté chez une femme. Et d'un autre côté on distingue un passé, un environnement familial qui amène contre le gré du lecteur à développer de l'empathie pour le personnage principal et ses réactions. Ce roman remue et questionne, tout en faisant apparaître au grand jour des façons de faire plus courantes qu'on le pense chez les hommes.
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Il est rare qu'une lecture me mette à ce point mal à l'aise, que son héros me soit à ce point antipathique.
Et pourtant c'est un très bon roman, un roman nécessaire sur un sujet grave. Il traite de la violence conjugale, de ce qui peut pousser un homme à commettre l'irréparable en se plaçant du point de vue du bourreau. le propos n'est pas nouveau puisqu'il était déjà celui de « Sale bourge » lu il y a quelques semaines . Mais là où on pouvait trouver des circonstances atténuantes au héros du fait de son enfance, il n'en est rien dans celui ci tant il est détestable, repoussant.

Ce personnage c'est Paul. Un loser, un minable, laid, pathétique de banalité. Il a un travail routinier, une vie sans intérêt, traîne une enfance cabossée . Logiquement, il vit seul, frustré en célibataire endurci. Ses relations avec les femmes il les fantasme et souvent elles se soldent par des échecs. Jusqu'à Angelique, une jeune collègue dont les fêlures feront d'elle une proie facile, une victime désignée.

Bénédicte Soymier @aufildeslivres décrit de façon magistrale les ressorts de cet esprit pervers et l'engrenage de la manipulation jusqu'à la violence inexorable. Elle dissèque chacune des pensées de cet homme dérangé, violent, de façon brute, sans empathie. Mais j'ai surtout beaucoup aimé le portrait de la victime, touchante dans sa naïveté et poignante dans sa lucidité, son fatalisme. A noter le style vif, précis et rythmé qui donne de l'intensité à la tension narrative.
Un roman prometteur pour une auteur à suivre
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Ce n'est pas un plaisir de lecture que nous propose Bénédicte Soymier mais c'est une oeuvre salutaire ! Entrer dans la psychologie d'un homme violent n'est pas si courant !
Dès la première phrase le décor est planté « Paul n'est pas beau ».
Il est mal dans son corps, mal perçu par ses collègues de travail. Il se console seul dans le luxe de son appartement jusqu'à ce que Mylène emménage à côté de lui. Mylène qui surgit après une Léa partie « dans les gros bras musclés du garagiste ».
Mylène, qui se comporte en amie et qu' « il meurt de ne pas embrasser » jusqu'à cette nuit où il la croit consentante. Mais dès le lendemain « il perçoit la bavure ». Mylène s'éloigne, tout en restant habiter là, et emménage avec un copain.
Paul n'est que souffrance. Sa soeur qui a partagé leur enfance dévastée par un père violent est la seule à s'inquiéter de lui. Paul consigne ses fantasmes dans un carnet, et un jour craque : il a des gestes de violence, puis il s'en veut tellement ! il marche dans la ville, il voudrait disparaitre.
A l'agence postale où il travaille, il fait la connaissance d'Angélique. Oh ce n'est pas Mylène ! Mais elle est pulpeuse, aguichante, et un peu naïve.
Ce sera l'engrenage de la violence. D'abord la faire renoncer à travailler à l'extérieur, une première gifle, l'alcool pour essayer d'oublier ce qu'il a fait. Il ne veut surtout pas poursuivre sur ce chemin, et cherche à regagner sa confiance.
Mais c'est pourtant vers des gestes bien pires qu'il ira.
La façon de raconter les affres vécus par Paul, sans nous le rendre sympathique permet un autre regard qui, je pense, demeurera lorsque ce genre de fait divers sera, malheureusement, porté à notre connaissance par les médias.
La dernière partie du roman, qui se veut un chemin vers la réhabilitation est un peu moins convaincante. Mais l'autrice possède sans aucun doute un talent pour explorer l'âme humaine.

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Un roman fluide où on découvre l'histoire de vie de Paul. Un homme de 45 ans, célibataire qui travaille à La Poste. Paul a beaucoup de mal à se remettre de sa rupture avec Léa jusqu'au jour où Mylène va emménager dans l'appartement d'en face. Désormais Mylène occupera son esprit jour et nuit. Un seul objectif, la séduire. Mais tout ne se passera pas comme il l'imaginait.

Ensuite, il jettera son dévolu sur Angélique... Une collègue qui classera de "sexy". Il espère ainsi oublier Mylène.

Au fil de pages, on découvre la psychologie de cet homme et son côté obsessionnel envers la "femme du moment". Il y a un côté attendrissant dans le caractère de Paul, comme s'il s'agissait d'un petit enfant blessé et fragile. On découvre ensuite son côté obsessionnel, voir maladif.

Plus les pages avancent, plus la situation s'aggrave jusqu'à en venir aux mains, aux coups.

Un roman très bien construit, très bien écrit qui nous fait rentrer dans la tête de Paul ce qui provoque un sentiment étrange de dégoût et de tendresse à la fois. Une situation finalement assez dérangeante puisqu'on parle de violences conjugales et de manipulations.
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Etonnante la couverture de ce livre ! le nom de l'auteur écrit en gros caractères cache un peu le titre du roman. En cette époque où l'on parle beaucoup de violence dans les couples, ce livre nous fait découvrir la vie amoureuse de Paul, le laid, l'enfant qu'on a mal aimé et qui n'a pas vraiment appris à aimer ! On voudrait croire que sa vie sera différente après l'expérience désagréable qu'il a vécue et son séjour en clinique, mais on reste sur sa faim ! On souhaiterait une suite à ce roman un peu trop pessimiste. G
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Dès le prologue, on sent que l'on va plonger dans un roman dont les mots et les maux vont être puissants.

Paul est un homme compliqué à cerner, il a de plus en plus de mal à faire face à la solitude qu'il ressent lorsqu'il rentre de son travail, il subit sa vie. On sent qu'à tout moment il peut basculer. Paul est le narrateur de cette histoire et je dois dire que c'est déstabilisant d'avoir accès à ses pensées, celle d'un homme violent. Tel un thriller, le mal-épris est une histoire sombre... C'est extrêmement bien écrit et j'ai eu beaucoup de mal à lâcher cette histoire.

Paul voit certaines femmes comme des proies et il va avoir un comportement totalement angoissant, il va espionner, tenir un carnet tel un détective, fabuler et fantasmer.
Lorsqu'une nouvelle voisine va emménager, il va devenir totalement obsédé par ses faits et gestes, comme un drogué il va tout noter et tout faire pour l'aborder.
On sent qu'elle n'est pas réceptive mais petit à petit une relation amicale va s'instaurer, ils vont prendre l'habitude de boire un verre et d'échanger et puis un jour tout va basculer et elle va vite réaliser son erreur et elle décide très vite de l'ignorer, de l'effacer.
Pour Paul ce n'est pas possible et la violence va de plus en plus s'installer.

Et puis il va avoir Angélique, cette collègue qui manque de confiance en elle, qui veut croire en l'amour. Mais elle est loin d'imaginer que cette relation avec Paul va être terrible…

Il s'agit d'un premier roman et c'est une très bonne surprise, j'ai apprécié le style, avec des phrases courtes, qui percutent. On ressent vraiment la puissance des mots, l'urgence d'écrire cette terrible violence qui touche malheureusement beaucoup trop de personnes.
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« La violence, en s'épanouissant, produit un épi de malheur, qui ne fournit qu'une moisson de larmes. » - Eschyle, Les Perses

« Paul, je sais ce que tu es. Je ne brode pas, c'est ton récit. Et rien ne t'excuse. »

Rares sont les textes apaisés en cette rentrée littéraire de janvier 2021. Je n'en suis qu'au prologue, j'ai à peine entrouvert le Mal-épris (joli titre) de Bénédicte Soymier, que je suis déjà mal à l'aise. C'est un 1er roman dont le sujet n'a rien d'original, mais dont l'angle de vue est, plus que novateur, audacieux. D'autant plus audacieux que c'est une autrice qui nous place à hauteur de l'homme violent.

Paul est un homme moins que banal.

« Paul n'est pas beau.
Petit, maigre, le cheveu terne et rare, le nez long, il présente un physique ingrat que n'arrangent pas des tenues démodées, portées étriquées, du pantalon de velours côtelé, toujours beige ou gris, aux chemises de fin coton d'Égypte plaquées sur son torse. […] »

Il travaille à la Poste et occupe un appartement décoré avec goût où chaque chose est à sa place, un appartement de vieux garçon. À 45 ans, on ne connaît aucun ami à ce solitaire effacé qui ne s'est jamais remis de sa rupture avec Léa. Quand il découvre que sa nouvelle voisine est la belle Mylène, il se laisse aller à un désir d'attention et, pourquoi pas, d'amour qui a tôt fait de tourner à l'obsession.

« Cette nouvelle voisine pourtant l'interpelle […] Mylène, elle se nomme, il a regardé sur la petite étiquette collée sous la sonnette. Il fallait qu'il sache. Elle lui plaît, Mylène. Beaucoup. Elle est si raffinée et délicate, le geste posé, la grâce innée, belle, si belle. »

Mylène glisse imperceptiblement vers un personnage fantasmé, un personnage prisonnier des pages du coûteux carnet bleu dans lequel Paul consigne à encre noire de son Mont-Blanc, avec un soin maniaque, tout ce qu'il peut glaner pour approcher cette jeune femme. Qu'il est pernicieux et étouffant cet enfermement papier de la femme convoitée !
Est-ce parce qu'elle sort d'un chagrin d'amour ? parce qu'elle est fragile ? timide ? Est-ce parce qu'elle manque de courage ? ne veut pas le blesser ? Mylène n'éconduit pas Paul. Pas tout de suite. Ces deux âmes solitaires et amochées entament une relation de voisinage équivoque où Mylène bouscule quelque peu la routine de Paul avant de s'échapper lorsqu'elle rencontre un « grand, brun, athlétique – beau, évidemment » que Paul s'empresse de détester puisque désormais c'est lui que Mylène regarde, c'est à lui que Mylène sourit.

La violence latente était déjà là, qui guettait. Elle commence à sourdre dans les insultes qui naissent des brumes de l'alcool et de la déconvenue d'avoir été rejeté : Mylène est une « salope », les autres, « des cons ».
Quand, sur son lieu de travail, Paul rencontre Angélique (ah ! l'onomastique !)

« Elle est sexy, Angélique. Très sexy. Pas aussi jolie que Mylène, mais agréable à regarder. Petite, un peu ronde, la taille floue et les seins lourds. »

il se dit qu'elle est peut-être celle qui lui fera oublier toutes les autres, qui aura pour lui des sentiments réciproques, celle qui ne partira pas.

C'est qu'elle est vulnérable, Angélique. Elle est mère célibataire d'un petit garçon et vivote entre deux missions d'intérim. Elle est consciente des regards concupiscents que les hommes posent sur son corps tout en courbes voluptueuses, ces regards qui « convoite[nt] et insulte[nt] ». Elle n'a de cesse de voir le meilleur en chacun. Que voulez-vous, elle est comme ça Angélique, et sa bienveillance généreuse l'a abonnée aux relations aussi éphémères que boiteuses.

« Angélique s'inquiète.
[…] sa peine est sincère, elle dont la compassion guide la route bien trop souvent à ses dépens. Elle en a fait les frais de sa grande bienveillance, adoptant en amour tous les « chiens errants », malchanceux, cabossés qu'elle imagine rafistoler malgré leurs mensonges et leurs dix mille promesses. »

Comment son coeur trop tendre pourrait-il ne pas être touché par cet insignifiant petit homme malingre, taiseux, complexé, fagoté comme l'as de pique ? Comme ne pourrait-elle pas se retrouver prise au piège des rets tendus par ce collègue en qui elle a aperçu une âme en perdition, et donc à sauver ?

« Elle rêve de sentiments, malgré tout, ni naïve ni stupide, animée par l'envie de n'être plus seule avec son fils. Elle racle le sable et le disperse en un millier de particules roulées par le vent, mangées par l'écume, elle le projette et le chasse comme elle chassera les démons de cet homme. »

Et Paul, comment pourrait-il ne pas souhaiter être enfin regardé, au-delà d' apparences jouant contre lui, par une femme qui aimante tous les regards ? Ce n'est pas un hasard si les références au regard parsèment le roman.

On comprend vite que l'histoire de Paul et Angélique est moins celle d'un amour partagé que d'une dépendance affective et d'une soif commune d'enfin trouver un soi à estimer.

« Elle est une conne, acceptant l'illusion sans plus savoir pourquoi – mal d'amour, mal de soi, elle pleurerait d'être aussi faible. Se déteste. »

Raison pour laquelle le Mal-épris, en plus d'être un roman sur les violences conjugales, est l'histoire d'un drame humain qui se noue quand un homme meurtri dans sa chair depuis l'enfance se retrouve en présence de la victime idéale. Bénédicte Soymier ausculte le mécanisme de la violence au sein du couple, comment elle s'échauffe, enfle, déborde, un peu à l'image du lait que l'on a oublié sur le feu, sans surveillance.
Paul frappe avec les poings :

« Ça lui ronge les tripes et le cerveau, plus fort que sa volonté – une hargne qui l'habite, une violence qui déferle tel un vent d'orage, puissante et incontrôlable. Il voudrait lâcher mais ne pense qu'à frapper. »

Paul frappe avec les mots :

« Arrête ton travail, ne porte plus de jupes, tu es bonne à rien de toute façon. »
ou
« Paul écrit un sms, « Je t'aime, même dans ces fringues de pute qui te vont comme un gant ». le relit et l'envoie. »

Paul étend son emprise, ajoutant la dépendance financière à la dépendance affective. Angélique n'est pas dupe, elle souffre, mais de là à partir… L'autrice ne nous fait jamais perdre de vue que toute relation de couple implique deux personnes. N'était la violence bien sûr, ces deux-là, malmenés par la vie, ne sont pas aussi dissemblables qu'on peut le penser.

L'écriture de Bénédicte Soymier tient la note juste. Son phrasé est syncopé et - paradoxe ! - fluide, bien que la phrase voie son élan interrompu, cassé par un foisonnement de virgules et de points. Souvent j'ai eu envie de dire de cette écriture « Mais qu'elle s'assoie au lieu de s'agiter […] elle [me] donne le tournis » ! Son intense bougeotte aspire le lecteur dans le maelström. Ce texte heurté qui mérite de passer par la lecture à voix haute (essayez, vous verrez) est aussi effrayant que cet homme. Phrases elliptiques et courtes, retours à la ligne intempestifs, autant de stratagèmes qui concourent à transcrire la violence, la souffrance, l'enfermement. C'est tout à fait fascinant d'éprouver combien l'écriture participe au malaise, combien elle en est même l'un des éléments substantiels quand elle hébète le lecteur en en faisant sa victime. Ça bouscule, martèle, cogne, essouffle, essore, recrache.
Écoutez :

« Il est une merde piétinant les principes, un contre-exemple, un contre-amour et un lâche. Il a frappé par fierté, par dépit, par stupidité, violent pour la violence, comme si les coups pouvaient gommer une frustration. Quel con ! Pourtant, il sait. Il a lu les articles sur les pervers narcissiques, les maltraitances, les femmes battues, les associations, a vu des reportages et, malgré tout, oublie quand ça l'arrange. Il n'a pas d'excuse. »

Si Paul n'a pas d'excuse, peut-on au moins essayer de comprendre comment il est devenu ce que lui-même réprouve : un monstre manipulateur, alcoolique et violent ?

« Il est ce que l'enfance a fait de lui, une histoire d'adultes défaillants et malfaisants, le produit de sa mère et de son père. »

C'est aussi dans son analyse sensible du bourreau et de sa victime, dans les questions essentielles qu'il soulève, sans jamais juger ni donner de réponse prête à l'emploi, que ce 1er roman est particulièrement réussi. La maltraitance engendre-t-elle la maltraitance ? Où s'enracine la violence ? Comment repérer ces petits riens, nuages anodins et pourtant annonciateurs des orages à venir ? Cet homme à la dérive n'est-il pas aussi une victime ? Et pour sa victime, une fois le piège refermé, comment se sauver, à tous les sens du verbe ?
Et le lecteur, asphyxié par l'écriture intranquille de Bénédicte Soymier, d'être emporté par ce tourbillon de questions. Jusqu'à la toute dernière.

1er roman, lu pour la session 2021 des #68premieresfois
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Paul est un homme sans beauté, fade, de ceux que les femmes ne regardent pas, qu'elles évitent même, en tous les cas qui n'inspirent pas l'amour. Paul est un homme rempli de rancoeur, de rancune. Paul est seul. Mais quand Mylène vient s'installer sur son palier, Paul se prend à rêver. Il parvient à tisser des liens d'amitié puis à créer une véritable proximité avec la jeune femme. Au point de la séduire. Pour une nuit. Une nuit sans lendemain qui brise leur amitié car Mylène coupe tous les ponts avec son voisin. Alors Paul ressasse, Paul attise sa haine. Jusqu'au jour où il rencontre Angélique. Paul tombe amoureux, Angélique cède. Ils vont s'installer ensemble. Mais Paul devient très vite jaloux, méfiant, méchant. Jusqu'à l'irréparable.

Dans ce premier roman Bénédicte Soymier explore les liens d'un couple, faits d'emprise et de soumission. On ne peut pas réellement parler d'amour entre ces deux êtres qui auraient pu se consoler mutuellement de leurs souffrances mais qui, au contraire, s'enfoncent dans une relation destructrice. Paul s'enlise dans une jalousie morbide, se voyant reproduire les gestes de son père, englué dans un passé traumatisant. Angélique s'enferre dans cette relation toxique, elle pour qui l'amour n'a bien souvent consisté qu'à donner son corps à des hommes qui l'ont rejetée.

J'ai trouvé très intéressant que l'auteure sonde l'esprit de Paul, qu'elle nous donne à voir de l'intérieur le mécanisme qui le pousse à agir de la sorte et que sans jamais lui trouver d'excuses elle apporte des clés à son tempérament violent qui s'éveille et se déploie tout au long du roman. Très intéressant aussi le fait qu'elle choisisse que ce soit lui qui décide de s'éloigner afin d'essayer de reprendre pied.

Si les personnages n'ont pas éveillé chez moi une grande empathie, l'analyse qui est faite de leurs comportements semble très juste et c'est ce côté décryptage qui a retenu mon attention aussi bien du côté de Paul que du côté d'Angélique.

J'ai parfois été un peu gênée par le côté répétitif de la narration qui parait tourner un peu en rond pour nous raconter les vies de Paul et d'Angélique, mais globalement j'ai trouvé le parti-pris très original et la façon d'arriver à ne pas rendre Paul sympathique tout en permettant au lecteur de le comprendre très réussie.
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•HUMANITÉ COÛTE QUE COÛTE•
.
Dans cette période de libération de la parole, il fallait oser écrire un tel roman. le courage n𠆚 pas de prix en littérature. le mal-épris. Ce mal. Ce mâle. Épris. Et pris. Comme si les facettes d’un titre devenaient celles du personnage principal. Tout débute avec cet homme, à la fois perdu et en manque de confiance. Il se trouve laid et minable, travaillant à la Poste mais se trouve être amoureux. Terriblement amoureux d’une femme qui le rejète. Transfert sur une autre. Comme s’il fallait une excuse, une justification plausible pour assouvir le mal en lui. Et pourtant, c𠆞st la société qui rend cet homme violent avec la femme qu’il prétend aimer. Inexcusable cela étant. Crée t-on nos propres monstres ? le doute est permis. La réalité sociale notamment chez les jeunes générations engendre des complexes, des moqueries. Qui peut-être dans dix ans généreront des délits ou des crimes. Jamais manichéen, Benedicte Soymier joue avec le rythme•••
.
Avec le rythme de l�tion tout d�ord où le lecteur devra faire sa part de travail. Oubliez les phrases descriptives. Ce roman est écrit avec les tripes, sans passer par des digressions inutiles. le rythme des mots ensuite où nous sentons l’urgence, à la fois physique et mentale. Celle qui pousse un homme à agir avec ses faiblesses. Envers la mauvaise victime. Celle qui n𠆚vait rien demandé et qui subit. Accablée. Meurtrie elle suffoque sous les coups de son homme. Il déverse sa haine. Par jalousie, par pulsion. Les barrières s�ondrent, tout est alors envisageable. Il regrette. Lui qui venait de participer à une manifestation contre les violences faites aux femmes. Comme un signal contradictoire qui laisse apparaître la part malsaine de son humanité. Quant à elle, elle s�le comme pour ne pas voir la réalité. le déni. Total. Elle s𠆞nferme, par amour. Certains seront mal à l𠆚ise, d𠆚utres y verront des similitudes avec certaines situations réelles, il ne faudra pas fermer les yeux. Benedicte Soymier n𠆞st pas dans la démonstration mais bien dans une écriture en apnée. Paul est ambivalent, souffrant de ses pulsions qu’il ne contrôle pas et pourtant il est aussi celui qui bat sa femme. Un homme qu’il faut maîtriser pour éviter les récidives, vous allez le détester, peut-être le comprendre ensuite et enfin le haïr dans la seconde d𠆚près. En n’étant jamais larmoyante sur un sujet qui ne laisse pas de place à l’équivoque, vous serez happé par ces personnages aussi vrais que nature•••





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