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Citations sur Le jeu de l'envers (8)

Et alors, il m'a demandé si je connaissais le bruit du temps. Non ai-je dit, je ne le connais pas. Très bien, a-t-il fait, il suffit de s'asseoir sur le lit, la nuit, quand on n'arrive pas à dormir, et de rester les yeux ouverts dans le noir, et au bout d'un petit moment on l'entend, c'est comme un mugissement dans le lointain, comme l'haleine d'un animal qui dévore les gens.
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Le tableau était "Les Ménines" de Velasquez, la figure du fond sur laquelle convergeaient les lignes ,avec cette expression malicieuse et mélancolique que j'avais gardée en mémoire ; je m'acheminais vers ce point. Et à ce moment,je me retrouvai dans un autre songe.
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Les choses ont un sens ? Peut-être oui, mais un sens secret, mais elles doivent avoir un sens, un sens propre,certes,qui parfois ne nous regarde pas,même s'il semble que oui.
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Au fait est-ce que vous avez déjà vu une corrida portugaise ? ils ne tuent pas le taureau, vous savez, le torero danse autour de lui pendant une demi-heure et à la fin il fait un geste symbolique avec son bras pointé comme une épée, un troupeau de vaches avec des sonnailles entre, le taureau disparaît dans le troupeau et tout le monde rentre chez soi, olé, si vous appelez ça torear. C’est peut-être plus élégant, dis-je, pour tuer quelqu’un il n’est pas toujours nécessaire de l’assassiner, parfois un geste suffit, mais non, dit-il, le duel entre l’homme et le taureau doit être mortel, sinon ce n’est qu’une pantomime ridicule, mais les cérémonies ne sont que des stylisations, objectai-je, et celle-ci ne conserve que l’enveloppe, le geste, elle me semble plus noble, plus abstraite. Mon compagnon de voyage parut réfléchir. C’est possible, dit-il sans conviction, ah, regardez, nous sommes dans la banlieue de Lisbonne, il vaudrait mieux retourner dans notre compartiment préparer nos bagages.
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Maria do Carmo était morte, j’éprouvais une sensation étrange, comme si j’avais regardé d’en haut un autre moi-même qui, par une nuit de juillet, dans un compartiment d’un train peu éclairé, s’apprêtait à entrer dans un pays étranger pour aller voir une femme qu’il connaissait bien et qui était morte. C’était une sensation que je n’avais jamais éprouvée, et il me vint à l’idée que cela avait quelque chose à voir avec le revers des choses.
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La saudade, disait Maria do Carmo, ce n’est pas un mot, c’est une catégorie de l’esprit, il n’y a que les Portugais qui puissent la ressentir, car ils possèdent ce mot pour dire qu’ils l’ont, c’est un grand poète qui l’a dit. Et elle commençait à parler de Fernando Pessoa. Je passais la prendre chez elle, Rua das Chagas, vers six heures de l’après-midi, elle m’attendait derrière une fenêtre, et lorsqu’elle me voyait déboucher sur le Largo Camões, elle ouvrait la lourde porte cochère et nous descendions vers le port en flânant Rua dos Franqueiros et Rua dos Douradores. Faisons un itinéraire fernandin, disait-elle, ici c’étaient les lieux préférés de Bernardo Soares, aide-comptable dans la ville de Lisbonne, semi-hétéronyme par définition, c’était là qu’il faisait sa métaphysique, dans ces boutiques de barbiers. À cette heure-là, la Baixa était envahie par une foule de gens pressés et bruyants, les bureaux des compagnies de navigation et des maisons de commerce fermaient leurs guichets, aux arrêts de tram il y avait de longues queues, on entendait les boniments sonores des cireurs de chaussures et des crieurs de journaux. Nous nous faufilions au milieu de la cohue de la Rua da Prata, nous traversions la Rua da Conceição et nous descendions vers le Terreiro do Paço, blanc et mélancolique, où les premiers ferries bondés de banlieusards levaient l’ancre pour l’autre rive du Tage. Ici c’est déjà un quartier d’Alvaro de Campos, disait Maria do Carmo, en l’espace de quelques rues nous sommes passés d’un hétéronyme à l’autre.
À cette heure-là, la lumière de Lisbonne était blanche vers l’estuaire et rosée sur les collines, les édifices du XVIIIe siècle faisaient penser à un chromo et le Tage était sillonné par une myriade de bateaux. Nous nous dirigions vers les premiers quais, ces quais où Alvaro de Campos allait attendre personne, comme disait Maria do Carmo, et elle récitait quelques vers de l’Ode maritime, le passage où le petit vapeur dessine sa silhouette à l’horizon et où Campos sent une roue qui commence à tourner dans sa poitrine. Le crépuscule descendait sur la ville, les premières lumières s’allumaient, le Tage brillait de reflets changeants, il y avait une grande mélancolie dans les yeux de Maria do Carmo. Peut-être que tu es trop jeune pour comprendre, à ton âge moi je n’aurais pas compris, je n’aurais jamais pu imaginer que la vie puisse ressembler à un jeu auquel je jouais quand j’étais enfant à Buenos Aires, Pessoa est un génie parce qu’il a compris l’envers des choses, du réel et de l’imaginé, sa poésie est un juego del revés.
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J’entrais au Portugal comme tant d’autres fois dans ma vie, Maria do Carmo était morte, j’éprouvais une sensation étrange, comme si j’avais regardé d’en haut un autre moi-même qui, par une nuit de juillet, dans un compartiment d’un train peu éclairé, s’apprêtait à entrer dans un pays étranger pour aller voir une femme qu’il connaissait bien et qui était morte. C’était une sensation que je n’avais jamais éprouvée.
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Quando Maria do Carmo Meneses de Sequeira morì, io stavo guardando Las Meninas di Velasquez al museo del Prado. Era un mezzogiorno di luglio e io non sapevo che lei stava morendo. Restai a guardare il quadro fino alle dodici e un quarto, poi uscii lentamente cercando di trasportare nella memoria l'espressione della figura di fondo, ricordo che pensai alle parole di Maria do Carmo: la chiave del quadro sta nella figura di fondo, è un gioco del rovescio; attraversai il giardino e presi l'autobus fino alla Puerta del Sol, pranzai in albergo, un gazpacho ben freddo e frutta, e andai a coricarmi per ingannare la calura meridiana nella penombra della mia camera.
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