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Isabelle Pereira (Traducteur)
EAN : 9782264019462
121 pages
10-18 (04/03/1994)
3.88/5   83 notes
Résumé :
"C'est un récit bien extraordinaire, une "hallucination", un "rêve " portugais.
Dans une ferme de l'Alentejo, par un dimanche caniculaire de Juillet, le narrateur, un italien qui lit à l'ombre d'un mûrier. Le Livre de l'intranquillité de Fernando Pessoa, s'endort : il rêve qu'il erre par cette même après midi "dans une Lisbonne déserte et torride" où il rencontre indifféremment "des vivants et des morts".
Requiem a été écrit directement en portugais, "... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (16) Voir plus Ajouter une critique
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Requiem (1991) est un formidable et savoureux voyage à Lisbonne entre réel et imaginaire que l'Italien Antonio Tabucchi (1943-2012) a entièrement écrit en portugais. Il n'est pas nécessaire de connaître Pessoa ni son oeuvre pour prendre plaisir à lire ce livre.
L'histoire se déroule par un dimanche de juillet sous un soleil de plomb à Lisbonne. le narrateur attend quelqu'un sur le quai. Un grand poète, mort depuis longtemps. Celui-ci lui a donné rendez-vous à douze heures, mais peut-être s'agit-il du soir car c'est l'heure où apparaissent les fantômes. Alors le narrateur se rend dans le jardin à côté…
C'est peu dire que ce roman m'a plu. Il n'est pas réaliste du tout, il appartient au monde flottant comme disent les Japonais dans lequel les fantômes du passé viennent rendre visite aux vivants. Avant de rencontrer son poète, le narrateur, un Italien, déambule en suant à grosses gouttes dans des lieux qui existent vraiment et qu'il adore tant il prend plaisir à en dresser la liste. Il vous donne une envie folle de vous balader autour du quai d'Alcantara, la gare maritime d'où sont partis les grands navigateurs, de vous rendre au Musée d'art ancien admirer les détails de la Tentation de saint Antoine de Jérôme Bosch, de parcourir le cimetière etc. le narrateur rencontre en chemin des personnages très modernes : un jeune drogué en manque, un chauffeur de taxi clandestin, une vieille prostituée obèse, une vieille gitane qui vend des fausses et des vraies chemisettes Lacoste, un ancien barman du Harry's bar parisien etc. Beaucoup d'Alentejans. Ce sont tous des passeurs qui vont lui ouvrir la porte des songes. Il pourra revoir son père mort d'un cancer du larynx, se taper un sarabalhoà moda do Duoro avec son ami Tadeus, tenter de trouver auprès d'eux un réconfort à son intranquillité ou bien chercher des réponses aux questions qui le hantent depuis leur disparition. Et, à chaque fois qu'il rencontrera un spectre, il savourera un plat. A la fin, c'est dans un prestigieux restaurant qu'il pourra enfin déguster un merveilleux Porto 52 conquis de haute lutte, en compagnie de ce poète prestigieux, disparu depuis longtemps dont il est le biographe.
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Quelle douceur, quelle mélodieuse promenade à travers Lisbonne, à la recherche de ses fantômes. Sans doute, un hommage à Pessoa, mais pas seulement. J'ai beaucoup aimé cette oeuvre de Tabucchi, alors que je n'avais pas apprécié ses incursions dans l'onirisme dans d'autres de ses romans. Ici, c'est bienvenu, délicat et suave à la fois.
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Installé sur sa chaise en plein été, le narrateur lit le Livre de l'Intranquilité du poète portugais Fernando Pessoa. Il entend alors des voix lusophones s'adresser à lui. Il leur répond dans leur langue, cette langue que Tabucchi aimait et maîtrisait au point d'écrire tout un livre en délaissant son italien natal. A ses voix intérieures (issues des images mélancoliques de sa lecture, mais aussi de son passé), il attribue des visages, des lieux, et reconstitue ainsi un Lisbonne fantasmé, au fil de rencontres successives dans une hallucination qui emprunte à la fois au début et à la fin du vingtième siècle.

Ainsi, les personnages dont il est ici question sont parfois désuets, voire anachroniques, à l'image de cette vielle bohémienne chiromancienne, qui établit un diagnostic implacable : le narrateur oscille entre rêve et réalité. Au fil de son errance, il emprunte les histoires (et les recettes de cuisine) de ses personnages, en sautant souvent du coq à l'âne. Ou plutôt d'une recette de cocktail à une ekphrasis de Jérôme Bosch. Gourmet et gourmand, Tabucchi goûte aux plats et à la compagnie de ces autres imaginaires. de ces mélanges (alcoolisés ?) résulte sans doute l'absence de guillemets et de tirets dans les dialogues, totalement mêlés au flux narratif, de même que le narrateur est mêlé à l'auteur.

Dans sa postface, Tabucchi révèle que cette histoire lui a été inspirée par un rêve où son père lui parlait dans un portugais qu'il ne connaissait pas de son vivant. La scène est présente dans le roman, et on peut aussi noter que lors de son apparition, Pessoa (père spirituel ?) cabotine avec des interjections en anglais (langue qui lui était chère). Toute cette petite famille dérive hors des barrières entre les langues, à la recherche d'une parole permettant de se retrouver malgré l'absence.

Bien que Tabucchi n'ait jamais eu l'occasion de connaître l'auteur du Livre de l'intranqulité, il devient donc son interlocuteur à distance, dans le monde des rêves. Exactement comme Pessoa aimait concevoir ses relations avec les autres.

PS : merci Bookycooky pour cette sympathique découverte.

PPS : je n'ai pas encore vu l'adaptation de ce roman par Alain Tanner, mais elle doit être intéressante, tant il était en phase avec l'univers pessoien (cf son film « Dans la ville blanche »).
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Requiem est divisé en neuf chapitres comme les neuf parties de la musique du même nom.
L'auteur je définit "hallucinations"
Lisbonne déserte,un dimanche de fin juillet ,est habitée exclusivement par les "invités" de la ville. le protagoniste,un italien, est lui aussi un invité comme de nombreux hôtes qu'il rencontre dans son hallucination.
La ville,elle,est toujours là avec ses rues et ses ruelles en pente qui partent du port et ses personnages deviennent des stéréotypes.
Toute l'histoire tourne autour d'une table ,face à nourriture et boisson.
Tout a commencé à l'ombre d'un mûrier o^notre personnage s'endort et (rêve, hallucination ,) il erre dans la ville déserte d durant douze heures ,à la recherche de réponses aux questions qu'il se pose; à la recherche d'une rencontre avec son passé.
Requiem est une déclaration d'amour au Portugal,ce pays que Tabucchi avait adopté.
C'est un livre fascinant,simple dans sa profondeur. Une écriture onirique mais très réaliste. Bref,écrit dans un style que j'aime et qui laisse une émotion indéfinissable.
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Antonio Tabucchi est un écrivain italien qui a écrit ce roman directement en portugais. Précédemment j'avais été très étonné (et enchanté) par son "Nocturne indien". "Requiem" est beaucoup plus surprenant, c'est un OVNI de la littérature.
Un homme, qui s'est assoupi en lisant un livre de Pessoa, se trouve transporté en songe dans la ville de Lisbonne écrasée sous le soleil. C'est comme une longue hallucination. Dans ses pérégrinations, l'homme fait les rencontres les plus improbables avec des personnages très particuliers (ceux-ci sont assez nombreux pour que Tabucchi juge utile de tous les répertorier au début du roman). le lecteur est entraîné - de gré ou de force - dans cette divagation d'apparence gratuite et absurde. Tout semble étrange et, en même temps, presque simple et banal. Pendant cette lecture, ça passe ou ça casse, car A. Tabucchi a poussé sa fantaisie à l'extrême; en tout cas, il va beaucoup plus loin que dans "Nocturne indien". La fin du roman arrive à l'improviste et je suis resté perplexe, regrettant que l'auteur n'ait pas jugé nécessaire de finir sur une "chute" bien trouvée.
Je comprends que certains aient envie d'abandonner le livre sans l'achever. En ce qui me concerne, je l'ai lu entièrement mais j'ai dû (un peu) m'accrocher. Ceci n'est certes pas un ouvrage "grand public" !
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Citations et extraits (15) Voir plus Ajouter une citation
Le sarrabulho arriva dans un grand plat de faïence, de style populaire, brune et décorée de fleurettes jaunes en relief. À première vue, il avait un aspect repoussant. Au centre du plat se trouvaient les pommes de terre, toutes dorées de graisse, et autour les rognons et les tripes. L’ensemble baignait dans une sauce brune qui devait être du vin ou du sang cuit, je n’en avais pas la moindre idée. C’est la première fois que je mange une chose pareille, dis-je, je connais le Portugal depuis une éternité […] et je n’ai jamais eu le courage de manger ce plat, ça va être ma mort, je vais m’intoxiquer. Tu ne vas pas le regretter, me dit Tadeus en me servant, mange donc, mon timide, et ne dis pas de bêtises. Je plantai ma fourchette dans un rognon, en fermant presque les yeux, et le portai à ma bouche. C’était un pur délice, un mets d’une saveur absolument exquise
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Je me dis : ce mec n'arrivera donc jamais. Puis, je pensai : je ne peux pas l'appeler "ce mec", c'est un grand poète, peut-être le plus grand poète du XXe siècle, il est mort depuis longtemps, je lui dois du respect - disons mieux, un grand respect. Malgré tout, je commençais à m'ennuyer ferme, le soleil était brûlant, un soleil de fin juillet, et j'ajoutai pour moi-même : je suis en vacances, je me trouvais tellement bien là-bas, à Azeitao, dans la ferme de mes amis, pourquoi donc ai-je accepté ce rendez-vous ici, sur ce quai au bord du Tage ? C'est complètement absurde. Et je regardai à mes pieds la silhouette de mon ombre, qui me parut elle aussi absurde, incongrue, dénuée de sens, courte comme elle était, écrasée par le soleil de midi, et c'est alors que je me souvins ; il m'a donné rendez-vous à douze heures, mais il voulait peut-être dire douze heures du soir, parce que les fantômes apparaissent à minuit. Je me levai, je longeai le quai. La circulation sur l'avenue avait cessé, les voitures étaient rares, certaines emportaient des parasols sur leur porte-bagages - tous ces gens-là s'en allaient vers les plages de Caparica, il faisait une chaleur étouffante, et je pensai alors : mais qu'est-ce-que je fais ici, le dernier dimanche de juillet ? Et j'allongeai le pas pour arriver le plus vite possible au jardin de Santos, peut-être y ferait-il un peu plus frais.
(incipit)
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Je me dit : ce mec n'arrivera donc jamais. Puis, je pensai : je ne peux pas l'appeler "ce mec", c'est un grand poète, peut-être le plus grand poète du XXe siècle, il est mort depuis longtemps, je lui dois du respect - disons mieux, un grand respect. Malgré tout, je commençais à m'ennuyer ferme, le soleil était brûlant, un soleil de fin juillet, et j'ajoutai pour moi-même : je suis en vacances, je me trouvais tellement bien là-bas, à Azeitao, dans la ferme de mes amis, pourquoi donc ai-je accepté ce rendez-vous ici, sur ce quai au bord du Tage ? C'est complètement absurde. Et je regardai à mes pieds la silhouette de mon ombre, qui me parut elle aussi absurde, incongrue, dénuée de sens, courte comme elle était, écrasée par le soleil de midi, et c'est alors que je me souvins ; il m'a donné rendez-vous à douze heures, mais il voulait peut-être dire douze heures du soir, parce que les fantômes apparaissent à minuit. Je me levai, je longeai le quai. La circulation sur l'avenue avait cessé, les voitures étaient rares, certaines emportaients des parasols sur leur porte-bagages - tous ces gens-là s'en allaient vers les plages de Caparica, il faisait une chaleur étouffante, et je pensai alors : mais qu'est-ce-que je fais ici, le dernier dimanche de juillet ? Et j'allongeai le pas pour arriver le plus vite possible au jardin de Santos, peut-être y ferait-il un peu plus frais.
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Monsieur voudra bien m’excuser, répliquai-je, je suis Italien, il m’arrive de me tromper dans les formules de politesse, elles sont tellement compliquées en portugais, ne m’en veuillez pas. Si Monsieur préfère, nous pouvons parler anglais, répondit le Boiteux de la Loterie, en anglais pas de problème, c’est toujours you, je parle bien anglais, ou même français, là non plus on ne peut pas se tromper, c’est toujours vous, je parle très bien le français aussi. Non, répondis-je, excusez-moi, j’aime mieux parler en portugais, je suis dans une aventure portugaise, et je ne veux pas sortir de mon aventure.
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Ma compagnie vous a-t-elle déplu ? demanda-t-il. Non, elle a été très importante, mais elle m’a troublé, disons qu’elle a troublé ma tranquillité. Eh oui, confirma-t-il, cela se passe toujours comme cela avec moi, mais écoutez, ne croyez-vous pas que c’est justement ce que doit faire la littérature, provoquer une certaine intranquilité ? En ce qui me concerne, je ne fais pas confiance à la littérature qui tranquillise les consciences. Moi non plus, approuvai-je, mais vous comprenez, de moi-même je suis déjà assez tourmenté, votre intranquilité est venue s’ajouter à la mienne et a produit de l’angoisse. Je préfère l’angoisse à une paix pourrissante, affirma-t-il, entre les deux je préfère l’angoisse.
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