" - La vie est une chienne. Et tu sais quoi, gamine ?
- Quoi Messire ?
- Les chiennes, faut les tenir en laisse."
Le marais bruisse avec délectation, une odeur de pierre mouillée chatouille les narines, comme après une pluie d'été, les arbres offrent
l'ombre d'un jour de pique-nique. Charlotte mène le domaine du Grand Mazureau, de vastes vergers, seule, avec l'aide d'un jeune travailleur acharné, au vocabulaire tiré du meilleur du Prince de Motordu. Les quiproquos en sont savoureux. le petit Valentin, neuf ans, pousse auprès de sa mère, avec toute l'impétuosité de son âge, teintée de la nostalgie du manque du père, mais je vous laisserai en découvrir la raison.
Les affaires sont dures et la douceur de vivre des canards et des barques langoureuses ne suffisent pas à maintenir la tête de Charlotte hors de l'eau. Et ce vieil homme qui vient d'emménager dans la maison délabrée d'en face ne fait qu'ajouter à l'ambiance bourrue qui voudrait enserrer la jeune femme. Mais le poitevin est doux, sous sa carapace, et Jules se dévoilera peu à peu.
Ce roman tranche en partie avec le style plus noir qu'affiche habituellement
Luca Tahtieazym. Mais je l'ai vu, lui, dans le rôle de Jules, cet homme bourru qui cherche à garder ses distances pour ne pas finir trop transparent de son amour pour l'autre. Et je lai surtout imaginé petit garçon, en Valentin cherchant le Monstre du marais pendant ses vacances d'été. Au fait, dans cette histoire, Luca nous transporte dans les années 80, et je dois dire que c'est un régal de se faire surprendre par le décor temporel que nous propose l'auteur à chaque nouveau roman.
Le style est différent mais la patte est bien là, je me suis régalée, et j'ai retrouvé le fil rouge immanquable de cet auteur, la résilience. Quelles que soient les circonstances, il faut "faire avec" et pousser vers l'avant. Ne cherchez pas en revanche les personnages fétiches de Tahtiemachin, ce roman fait naître d'autres figures que les dangereux Achille, inquiétant Angus, et surtout, notre Romain indéfectiblement attaché à Élise. Claire est absente aussi, mais bon, comme en général Luca la fait passer de vie à trépas, pour une fois que j'y échappe, je ne vais pas m'en plaindre
Certains pourront qualifier ce roman de feel good, mais j'ai du mal à catégoriser les histoires. En tous cas, un livre idéal pour cet été, quel que soit le lieu de vos vacances. C'est un beau roman, c'est une belle histoire (c'est bon, vous l'avez bien en tête ?), et je file de ce pas en agence immobilière acheter une bicoque dans le marais, je suis sous le charme !