Citations sur 1275 âmes / Pottsville, 1280 habitants (202)
Alors, voilà, Buck, voilà ma décision. J’ai réfléchi et réfléchi, et puis j’ai réfléchi encore un peu, et j’ai fini par arriver à une décision. Ce que je dois faire, j’ai décidé que je ne le savais pas plus que si j’étais n’importe quel autre pitoyable spécimen du genre humain !
Car le Seigneur aime les vaillants travailleurs, Rose ; Il aime voir un homme s’éreinter pendant ses heures de dur labeur. Et moi, les heures de travail, je les ai réduites de plus en plus pour trouver le temps de manger et de dormir, mais je ne peux pas ne faire que manger et dormir.
Cette maison, j’y suis déjà entré une centaine de fois, sans doute, dans celle-ci et dans une centaine d’autres qui lui ressemblent. Mais c’est la première fois que je découvre ce qu’elles sont vraiment. Ce ne sont pas des foyers, pas des lieux où les gens habitent, elles ne sont rien du tout. Rien de plus que des cloisons en bois blanc qui emprisonnent du vide. Pas de tableaux aux murs, pas de livres -rien qui attire le regard ou qui incite à réfléchir. Il n’y a que de vide, ce vide qui s’insinue en moi, dans l’instant même.
Et soudain, le vide n’est pas seulement ici, il est partout, dans toutes les maisons semblables à celle-ci.
Tu parles ! T’es pas son frère, t’es son gigolo ! C’est pour ça qu’elle veut toujours t’avoir sous la main, pour se faire ramoner la cheminée quand l’envie lui en prend. Parce que t’es monté comme un bourricot et qu’elle a le feu au fourneau ! […]
Je t’ai vu la trombiner ! J’ai grimpé sur l’échelle des peintres et j’ai regardé à travers le carreau, et bon sang, tu y allais de bon cœur. A la façon dont tu lui ramonais la boutonnière, t’as bien failli tomber dedans !
Je crois que c’est le mauvais côté du whiskey, vous voyez ? -le mauvais côté de beaucoup de choses. Non pas le fait de le savourer, mais celui de ne plus y trouver de plaisir ; le contrecoup, quand vous revient au fond de la bouche ce vieux goût de pisse d’âne que vous connaissez bien, et que l’envie vous vient de le cracher au visage de tous ceux qui vous entourent.
Ce que je voulais faire croire, c’est qu’Oncle John a tiré sur Tom Hauck après lui avoir pris son propre fusil, puis que Tom est parvenu à récupérer son arme pour l’abattre avant de mourir lui-même. Ou vice-versa. Quoi qu’il en soit, quand j’ai repensé à tout ça après coup, il m’a semblé que les gens ne goberaient jamais une explication pareille.
La seule personne que j’aime, c’est moi, et je suis prêt à faire tout ce qu’il faudra pour continuer à mentir, à duper les gens, à être infidèle en amour, à boire du whiskey, à copuler, et à aller à l’église le dimanche avec tous les autres citoyens respectables.
Mais voilà comment il était, mon père -semblable à ces gens-là. Ils achètent un livre quelconque écrit par un type qui n’en sait pas plus long qu’eux sur quoi que ce soit (sinon, il n’aurait pas eu besoin de pondre un bouquin), et sa lecture est censée leur donner toutes les solutions. Ou bien s’ils s’achètent une boîte de pilules. Ou ils disent que ce sont les autres qui créent tous les problèmes, et que la seule chose à faire, c’est de se débarrasser d’eux.
Si y avait pas les putes, les femmes honnêtes, elles seraient pas en sécurité dans les rues.
Même si je n’étais pas en manque, vous savez comment ça se passe. Je veux dire, c’est un peu comme manger du pop-corn. Plus vous en avalez, plus il vous en faut.