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L'écrivaine vietnamienne Duong Thu Huong part d'un drame familial, la fugue définitive de son neveu et fait appel à l'écriture pour essayer de le comprendre. “Les collines d'eucalyptus” est ce qu'elle appelle “une hypothèse” pour expliquer la fuite d'un jeune homme, sans se retourner. Elle fera d'ailleurs d'autres hypothèses, dans d'autres livres.

Than est un jeune vietnamien, fils unique et plutôt aisé, qui grandit dans une province vietnamienne des années soixante-dix. Seulement voilà, Than est homosexuel et cette révélation le poussera à sortir de lui-même et trouver des ressources profondes, sans doute dans son éducation, pour faire face à l'imprévu et le tragique. Dans sa description des sentiments d'un jeune homme qui aime les garçons, l'écrivaine surprend par l'acuité de ses réflexions, la précision et la profondeur des émotions qu'elle retranscrit, démontrant une empathie et une connaissance rare pour qui ne peut que se mettre “à la place de”.

Roman d'apprentissage, éclosion d'un désir inconnu et réprouvé, les aventures de Than sont ponctuées de passages en italiques, réflexions intérieures et salutaires du personnage principal qui comme chacun de nous, se regarde vivre, à coté de sa vie.

L'intrigue principale est étirée par le truchement de nombre d'intrigues subalternes, notamment les souvenirs de tel ou tel personnage secondaire, toutes sortes d'histoires dans l'histoire qui ajoutent au panorama des émotions et des paysages que nous traversons tout au long de ce roman. Tous ces passages ne se valent pas et parfois ils peuvent donner le sentiment de couper un peu la narration en plein souffle, notamment l'alternance entre l'aventure passée et la situation présente du personnage principal qui n'est pas ce que je préfère dans le livre bien que la violence du système répressif soit utilement mise à nue.
D'autant que comme nombre d'écrivains du XXe siècle, Duong The Huong a elle aussi connu la prison, pour avoir dénoncé les forces politiques en place et vit désormais en Exil en France.

Un livre intéressant pour la belle cause qu'il embrasse et l'audacieux sujet qu'il se propose de mettre en lumière, l'homosexualité comme porte d'entrée non pas seulement d'une critique de la répression politique, mais aussi pour partir à la découverte du Vietnam littéraire.

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Je pensais que c'était mon premier livre vietnamien, en fait grâce aux stats et à la carte des lectures, j'ai pu voir que c'était le second. Autant le premier m'avait moyennement plu, autant j'ai aimé celui-ci, qui mêle douceur et horreur, quiétude et malheur, qui sait aussi bien nous décrire la nature que nous raconter les hommes, qui nous emmène d'une enfance choyée à un bagne aux conditions de vie épouvantables.

On fait la connaissance de Thanh alors qu'il fixe ce qu'il aimerait n'être qu'un théâtre magnifique, cette nature que l'autrice nous conte si bien, mais qui est d'abord la vue qu'il a de la petite fenêtre du bloc des forçats, au bagne. Il est condamné à 25 ans, 25 ans qui vont être longs, étant donné les conditions inhumaines de cette captivité.

Pourquoi est-il enfermé ? On le découvrira peu à peu à travers le récit de sa vie, qui va venir s'intercaler dans les épisodes se passant au bagne. La plupart des récits mettent en scène Thanh, d'autres des personnages qu'il a rencontrés dans sa vie, ou au bagne. Cet aspect non linéaire m'a un peu freinée au départ, surtout cet épisode sur une condamnée à mort, qui retardait d'autant la découverte de la suite de la vie de Thanh, après le récit de son enfance, une enfance heureuse, protégée, dans un foyer aimant et plutôt aisé, qui ne laissait rien prévoir des malheurs qui allaient s'abattre sur lui :
« Une catastrophe secrète, muette, réservée à lui seul. Pour la première fois de sa vie, il découvrit la vérité sur lui-même. Sans doute était-elle déjà là, enfouie comme un minerai sous la montagne, comme un cadavre dans la terre profonde, attendant le moment de se révéler au jour. La fatalité avait sonné son heure. »

Je ne vous en dirai pas plus sur ce qui va arriver à cet adolescent, vous laissant le découvrir vous-même, ayant apprécié de ne pas en connaitre grand-chose avant de me plonger dans ce pavé. Sachez que son cheminement, ses états d'âme, ses sentiments sont décrits avec beaucoup de finesse. Pour mieux nous aider à le comprendre, l'autrice utilise des passages en italique, qui sont les réflexions de Thanh sur lui-même, sa vie, ceux qui l'entourent. Ce procédé ne devient jamais envahissant, mais permet de se glisser dans l'intimité de ce garçon.

Au travers des aventures de Thanh, l'autrice nous fait découvrir le Vietnam communiste avec toutes les absurdités de ce régime, la corruption, les passe-droits, la disparition de toute culture différente, la rareté des livres non approuvés par le régime.

Elle est aussi une merveilleuse conteuse, une écriture qui nous relate aussi bien les moments heureux que ceux tragiques, qui mêle harmonieusement la description de la nature toujours présente aux tribulations des personnages. Elle fait vivre dans ce livre tout un pays, paysages, odeurs, traditions et malheureusement pour ce pays, le communisme.

Il est à noter que l'autrice a elle-même subi les foudres du régime communiste et s'est exilée en France.
Ce roman est inspiré de sa propre histoire. Un de ses neveux a disparu sans laisser de traces. Elle imagine ici ce qu'aurait pu être les raisons de cette disparition.
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En entamant Les Collines d'Eucalyptus, je m'attendais à m'immerger longuement (près de 900 pages quand même) dans des eaux de raffinement, parfumées aux essences naturelles, dans le bruissement de milliers de branches ondulant sous une douce brise. le titre était tentant, ma curiosité vive puisque je faisais mes premiers pas dans la littérature vietnamienne.

Voilà que je me retrouve en prison, dans un univers forcément confiné, dans les hurlements des gardes, les murs en béton et les odeurs nauséabondes. Bon, ben tant pis, je vais regarder par la fenêtre, la nature doit être fort belle sur ces hauteurs. Nouvelle désillusion, un petit carré de lumière à 30 cm du sol ne montre que du rocher bien gris, bien rugueux, prolongement en miroir de la paroi intérieure.

Au secours ! Où sont les vertes collines du titre ? Qui est ce Thanh, prisonnier chétif, qui purge une peine de vingt-cinq ans dans cet enfer de violence et de famine ? Qui est cette Lan que l'on fusille à quelques mètres de sa cellule ?

C'est ainsi que peu à peu l'histoire va se dérouler. Thanh est le fils unique de parents professeurs, aimé et choyé dans un milieu privilégié. Adolescent, il ressent des pulsions homosexuelles et une première tentative le marque cruellement. Apprentissage des différences, des codes sociétaux, des commérages de village, des traditions ancestrales immuables.

Thanh pratique la vie. Il se lie avec Phu Vuong, fils de l'ogre-poète du village, enfant maltraité devenu ado manipulateur, oisif et intéressé. Ne voulant pas soumettre ses parents à l'opprobre public à la découverte de ses penchants, Thanh choisit de fuir à Dalat, au Vietnam du Sud, avec son jeune amant. Il se débrouille pour trouver de petits boulots tandis que Phu Vuong, désoeuvré et paresseux, devient de plus en plus odieux. Séparation, nouvelle rencontre, nouveau boulot, tissage de relations sociales. Insouciance et émerveillement ont définitivement quitté la place.

Thanh reverra Phu Vuong à Saïgon, le tuera et se retrouvera au bagne.

Duong Thu Huong est revenue du communisme dont elle a vécu les dérives. Exilée en France, ses livres sont interdits au Vietnam. Elle fait particulièrement bien ressortir les tentacules des strates communistes à travers la hiérarchie des gardiens de prison.

Elle peint un portrait de son pays, fin des années 80, avec finesse et, apparemment, sans concession. le long vagabondage de son héros jusqu'à Saïgon lui donne l'occasion de digresser sur les facettes psychologiques de ses personnages, ce qui enlève parfois un intérêt pour l'histoire.

Néanmoins, les sensations, les bruits, les odeurs sont aussi présents que la solitude, l'acceptation et la rédemption.

Première lecture intéressante qui traduit parfaitement les impasses d'un peuple de tradition, brimé, envahi, meurtri par une très longue guerre et qui cherche néanmoins à s'ouvrir sur l'Occident.

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Les Collines d'Eucalyptus peut également faire office de couteau suisse.
Outre le plaisir procuré à sa lecture, il permet également de se muscler rapidement les avant-bras.
Pavé de près de 900 pages qu'on attaque fébrilement, il se révèle finalement d'un abord ultra plaisant, mixant les émotions au gré des nombreux chapitres évoquant la vie tumultueuse de notre jeune héros, Thanh, bien loin d'être un long Mékong tranquille.

Certaines trajectoires sont gravées dans le marbre dès la naissance.
Gamin issu des classes bourgeoises et affichant de réelles prédispositions pour les études, ce petit canaillou n'aura pourtant de cesse de se torturer les méninges quant à la tournure des évènements futurs qu'il pressent funeste.
Confronté très rapidement à son homosexualité, il prendra rapidement le taureau par les cornes en optant...pour la fuite plutôt que le déshonneur familial.
Alors totalement sous la coupe de son compagnon manipulateur, Thanh entrevoit lucidement la solitude et la tristesse journalière dont il va devoir rapidement se draper, loin de ses proches et de sa terre natale.

C'est long mais c'est beau.
Duong Thu Huong, écrivain au souffle puissant et épique non dénué d'une certaine poésie, relate ici la destinée d'un homme qui se sera construit à la force des poignets, n'y voyez aucune malice, faisant fi des terribles aléas rencontrés au gré de ses nombreuses pérégrinations et traçant son sillon, peut-être pas le plus droit qui soit, mais suffisamment profond pour pouvoir y semer les quelques graines d'espoir nécessaires à sa survie.
Raillé, maltraité, répudié, ce jeune homosexuel aura su trouver une force vitale, impérieuse, le poussant toujours un peu plus à s'affirmer et s'accepter en ce Vietnam pétri de préjugés et souvent prompt à condamner la différence.

C'est parfois long, certes, mais jamais barbant.
Duong Thu Huong manie la plume avec une grâce et une précision digne des plus illustres calligraphes qui officièrent sous la dynastie des Jin orientaux. Ce qui ne nous rajeunit pas.
Intelligence du propos, style flamboyant, profonde humanité, autant de facettes que le lecteur se fera un plaisir de découvrir en soupesant ce diamant brut d'un fort beau gabarit, ma foi, et qui suscite au final moult émotions diverses exceptée celle d'avoir enfiler des perles.

Alors, t'as ton Thanh ?
Si non, dépêche-toi vite de le commander, la rentrée approche...

4,356/5
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Le roman Les collines d'eucalyptus s'ouvre sur Tranh, chétif, qui regarde à travers les barreaux de sa prison au Vietnam. Les pages qui suivent donnent un aperçu des dures (et parfois inhumaines) conditions dans lesquelles se trouvent les prisonniers. Puis, on a droit à l'histoire de quelques uns d'entre eux, à ce qui les a menés dans ce trou à rats. Sur le coup, c'était un peu déstabilisant, j'avais l'impression que ça allait dans tous les sens. Puis, après une centaine de pages, peut-être un peu plus, la narration revient – enfin! – sur Tranh et elle reste concentrée sur lui jusqu'à la fin. Ce type qui semble si poli, si sage, qu'on se demande bien comment il a pu se retrouver en prison. C'est alors que commence réellement l'histoire. Sa jeunesse puis l'adolescence, où il découvre les émois de son homosexualité, dans un Vietnam de l'époque où les écarts à la norme, les «déviances» ne sont pas tolérées. Ces moments comptent parmi mes préférés. Bref, une belle histoire d'amour se dessine entre le jeune homme et Phu Vuong, le fils du poète-itinérant, un amour intense et destructeur qui le conduit vers sa perte.

Les collines d'eucalyptus est un roman agréable à lire, quoique un peu long. Il eut certes gagné à être raccourci, ne serait-ce que les parties concernant les autres prisonniers, même si elles étaient intéressantes. (Peut-être qu'elles auraient pu constituer un recueil de nouvelles?). D'autres parties auraient pu être abrégée, aller à l'essentiel, je pense à l'épisode de Dalat, à l'histoire de Tïen Lai, etc. Pour tout le reste, je suis preneur. Toutefois, ces parties, elles permettent au lecteur de voir différents portraits, de se faire une tête plutôt juste du Vietnam communiste des années 1980. Un Vietnam à mi-chemin entre traditions et travail, tristesse et espoir, résignation et résilience. Bref, un joli roman. À la fin se trouve l'épilogue, dans lequel l'auteure Thu Huong Duong explique que ce roman est une tentative d'expliquer la disparition de son neveu. Il me semble que, avoir su cette information dès le début, cela aurait eu un impact sur ma lecture. Dans tous les cas, je l'aurais entrepris différemment.
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Ma première incursion en territoire vietnamien. Mais quelle immersion ! Duong Thu Huong appartient à cette catégorie d'écrivains dont j'avais entendu tant de bien qu'il m'était presque impossible d'en aborder l'oeuvre. Peur d'être déçue sans doute qui m'a longtemps tenue à l'écart et fait manquer un talent évident ! Quel regret, j'aurais dû ne pas écouter cette petite voix sceptique et me plonger à corps perdu dans l'oeuvre de cet auteur talentueux qui a tant su parler à mon coeur de lectrice.
Les collines d'eucalyptus ou itinéraire d'un enfant gâté, tel pourrait être le résumé de ce roman. Thanh est un jeune homme à qui la vie n'a octroyé que chance et bienfaits : chance d'avoir des parents aimants et cultivés, professeurs émérites et respectés (au Vietnam le corps enseignant est la force vive de la révolution communiste, pilier du système), chance d'être leur fils unique, choyé et chéri dans un village paisible du nord Vietnam, chance d'être beau et intelligent, sensible et honnête, bref l'enfant puis le jeune homme modèle. Mais comme dans tout conte, une mauvaise fée s'est penchée sur le berceau du jeune Thanh. Car notre enfant gâté aime les hommes et au Vietnam comme partout ailleurs, si elle ne condame pas à la prison, l"homosexualité jette l'opprobe sur toute la famille du "coupable". Thanh, séduit charnellement par un mauvais garçon, le fils du poète maudit du village, à qui il s'abandonne sans retenue car persuadé de ne trouver mieux, décide de quitter son cocon aimant pour préserver les siens, suivant ainsi son compagnon d'infortune. D'exil en exil, de ville en ville, Thanh fait le dur apprentissage d'une vie de vagabond, de paria, loin du cercle protecteur : confronté à la pauvreté, au rejet et à la peur du regard d'autrui, vidé de sa substance par un amant manipulateur, fainéant et fourbe qui vit à ses crochets et le retient par le sexe, Thanh commettra l"irréparable. Les collines d'eucalytpus retrace ce parcours, du terrible bagne dans lequel végète Thanh, à son enfance choyée et préservée, en passant par son éveil charnel, des faubourgs de Saigon à la chambre d'hôtel dans laquelle il vivra sa seule véritable histoire d'amour avec un homme plus âgé, ce roman brasse les destins d'hommes et de femmes pris au piège, partagés entre l'envie folle de vivre pleinement leurs désirs au grand jour et le poids des traditions et du régime qui les annihilent.
Ce roman polyphonique est à la fois roman d'amour, roman d'enfance, récit d"initiation mais aussi chronique sociale d'un pays, le Vietnam, déchiré entre ouverture et tradition, Orient et Occident. Duong Thu Huong m'a embarquée le temps de 900 pages sur des rives inconnues, à la fois paisibles et tortueuses. Ne soyez pas effrayés par l'ampleur de la tâche car les mots glissent si aisément, emportant le lecteur dans un tourbillon poétique. Quelle puissance derrière tant de douceurs ! Ne vous y méprenez pas. Tout y est excès caché sous l'apparence d'une prose sensible. Ce combo littéraire est exactement ce qui parle à mon âme de lectrice. Et si mon enthousiasme n'a pas fini de vous convaincre, je vous encourage à lire le prologue qui à lui seul donne tout son sens au roman et vous laissera sans voix.
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« Monsieur et madame Rô étaient aussi heureux que les deux garçons. Pour le couple, l'amitié entre les garçons était un cadeau inespéré du destin. Pouvoir confier leur fils à maître Thy et maîtresse Yên était un grand honneur, aussi gâtaient-ils Thanh en tout, façon pour eux de rembourser d'avance une sorte de dette. Durant ces deux semaines, madame Rô se lança dans la démonstration de son talent culinaire, tandis que monsieur Rô promenait les deux jeunes dans toute la région des Vertes Collines. »

C'est dans ces collines du nord du Vietnam que Thanh passe les plus belles de ses journées d'enfance, en compagnie de Petit Canh, un autre garçonnet de son âge, et de ses parents. Mais c'est aussi à cet endroit qu'il verra pour la première fois un autre enfant, Phu Vuong, qui se révèlera dix ans plus tard être son premier amant et, plus tard, après trois années d'enfer, la cause de son emprisonnement dans un bagne effroyable.

C'est un drame au long cours que nous propose Duong Thu Huong dans ce roman émouvant et sombre. La relation toxique entre Thanh et Phu Vuong n'est pas le seul horizon de ce récit car, comme dans tout vaste roman un peu ambitieux, bien d'autres personnages se placeront au premier plan et détailleront eux aussi leurs vies à la fois fugitivement heureuses et le plus souvent tristes, marquées par les affres de la passion amoureuse, hétérosexuelle ou homosexuelle.

J'ai dévoré ce livre, qui, malgré son ampleur, est captivant. Je regrette seulement, parfois, l'usage d'un style un peu trop fleuri à mon goût, un peu trop grandiloquent. Mais n'oublions pas que c'est un mélodrame…
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Thanh s'enfuit de chez lui alors qu'il n'a que 16 ans et qu'il vit heureux auprès de ses parents tous deux professeurs. Pourquoi ?
Dans « Sanctuaire du coeur » Duong Thu Huong nous le présentait fuyant un amour incestueux et devenant gigolo.
Dans ce nouvel opus, « les collines d'Eucalyptus », Duong Thu Huong, lui imagine un autre destin.
Nous le retrouvons derrière les barreaux se remémorant l'engrenage fatal qui l'a conduit à commettre l'irréparable.
Lorsqu'il découvre son homosexualité, accablé par la honte il tire un trait sur tout ce qui faisait son bonheur dans ce village paisible et part à l'aventure avec son amant, un jeune voyou.
Très sensibilisée par l'ambiance à la foi tragique et poétique qui émane de cet ouvrage de Duong Thu Huong, je salue le talent du traducteur Phuong Dang Tran qui a si bien su la restituer.

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Le dernier Duong Thu Huong ! J'ai sauté de joie quand je l'ai reçu, tout à mon plaisir de dévorer ce gros pavé de mon auteur vietnamienne préférée. Je l'ai laissé mûrir lentement dans ma bibliothèque, attendant des vacances pour l'attaquer car je voulais avoir le temps de le déguster, sans être interrompue par le boulot ou déconcentrée dans le métro. Malheureusement, je vais devoir vous faire un aveu : j'ai été déçue. J'ai mis du temps à le terminer car je me suis lassée au milieu. Mais laissez-moi vous en dire davantage …

Dans Sanctuaire du Coeur, Duong Thu Huong avait introduit un personnage intéressant : le jeune Thanh, son neveu. Jeune homme de bonne famille, celui-ci disparaît dans l'année de ses seize ans et ne redonne jamais de ses nouvelles. Duong Thu Huong avait donc décidé d'imaginer ce qu'il avait bien pu se passer dans la tête du jeune homme, et ce qui a pu lui arriver. 700 pages que j'avais apprécié, même si certains passages m'avaient semblé long.

Dans Les Collines d'Eucalyptus, l'auteur élabore une autre hypothèse : cette fois Thanh n'est pas devenu gigolo mais il a suivi un voyou dont il était amoureux, amour qui s'est petit à petit transformé en haine et qui fait que nous le retrouvons trois ans plus tard dans un bagne où il a été condamné à des années de prison. Durant 800 pages, Duong Thu Huong alterne la vie de Thanh en prison et son histoire, qui l'a mené jusqu'ici. Fidèle à son habitude, elle peint des portraits de tous les gens que le jeune garçon rencontre, élaborant petit à petit une immense fresque de la société vietnamienne.

"La vraie vie, ce ne sont pas les équations mathématiques et les leçons d'histoire ! Dans la vraie vie, il y a des gouffres vertigineux, des grottes profondes, il y a des salauds, des voyous au comportement fangeux."

Avec pour thème central l'homosexualité, encore mal acceptée au Vietnam, ces deux romans fonctionnent comme un diptyque complet de la vie urbaine vietnamienne. Portrait sociétal mais aussi portrait psychologique approfondi de Thanh, c'est aussi le roman de la rédemption, portée par le tableau qui a inspiré cette histoire à Duong Thu Huong, le retour de l'enfant prodigue, de Rembrandt.

fils prodigue

J'ai pris plaisir à retrouver, comme d'habitude, l'écriture fluide et si poétique de Duong Thu Huong.

"Ils se faisaient face, assis à une table sous une fenêtre de l'hôtel. de là, ils apercevaient la surface miroitante du lac et les forêts de conifères qui s'étalaient jusqu'à l'horizon, où les montagnes se chevauchaient pour offrir au spectateur toutes les nuances de vert profond et de bleu intense jusqu'à la teinte du jade. Au-dessus les nuages formaient un voile de fine dentelle aux motifs sans cesse changeants en fonction de l'intensité lumineuse du crépuscule."

Néanmoins, pour la première fois je me suis lassée de ses histoires, trop longues, trop digressives, trop fournies, qui nous fait perdre le fil de l'histoire principale. Pour la première fois, j'ai trouvé que certains dialogues sonnaient faux, et les personnages m'ont agacés, me semblant parfois caricaturaux. de plus, la thématique était trop similaire à son roman précédents, et m'a moins intéressée. Je préfère finalement ses premiers romans comme Au-delà des illusions ou Myosotis qui, s'ils abordent des sujets importants, me semblent plus directs, plus frais, plus vivants.

Serais-je arrivée au bout de mon admiration pour cet auteur que je vénère depuis tant d'années ? Ou Les Collines d'eucalyptus est-il un signe de l'essoufflement de sa plume ?

Dans tous les cas j'espère qu'elle saura se renouveler … Et si vous ne la connaissez pas, je ne peux que vous inciter à découvrir les deux romans précédents cités ou son magnifique Terre des oublis, mon préféré ex-æquo avec Au Zénith.


Lien : http://missbouquinaix.wordpr..
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Au Vietnam, dans un lieu reculé, au bord d'une falaise entourée de brumes tenaces, le jeune Thanh est emprisonné dans un bagne parmi les forçats, la catégorie la plus féroce de prisonniers, la lie de la société. Qu'a fait pour arriver là, ce jeune homme qui semble cultivé, doué d'intériorité, sensible ? Par alternance, les chapitres s'éloignent de la prison pour revenir sur l'enfance et la jeunesse de Thanh. Enfance heureuse, notamment lorsque ses parents deviennent proches d'une famille qui habite le hameau des eucalyptus, permettant à Thahn, resté enfant unique, de découvrir une autre vie de famille, et la nature environnante. Les très belles descriptions des lieux donnent envie de partir séance tenante au Vietnam.
La vie de Thahn prend un tour plus dramatique pendant ses années de lycée, lorsqu'à la fois, il découvre son homosexualité, est rejeté par son meilleur ami, et craint de perdre l'amour de ses parents. Il décide alors de tout quitter avec la complicité d'un autre jeune homme plus roué que lui, et d'aller vivre dans une autre ville, de petits boulots mal payés.
Il faut savoir à propos de ce roman, que Duong Thu Huong l'a écrit en pensant à un jeune homme de sa famille disparu en 1987 au Vietnam, sans plus donner aucune nouvelle. Elle a donc écrit un premier roman où elle imagine ce qui a pu lui arriver, c'est Sanctuaire du coeur, et un deuxième, celui-ci, où elle échafaude un second scénario très crédible.
Alors, vous avez sans doute remarqué la longueur du roman. Globalement, une fois habituée aux digressions qui se tournent vers des destins de personnages secondaires, pour retrouver ensuite des passages qui éclairent l'évolution de Thanh, je n'ai pas trouvé le temps long. Ces histoires parallèles ou imbriquées sont heureusement intéressantes à plus d'un titre, entre autres le récit de son ami Tien qui donne à voir d'autres aspects de la vie des homosexuels au Vietnam, où, s'ils ne sont pas poursuivis par les lois, ils le sont par des préjugés tenaces, ça oui…
[...]
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