Tout le monde a entendu parler au moins une fois de cette grande fresque mythologique qui a connu un regain d'intérêt en France à l'occasion de son adaptation cinématographique. : je parle du
Seigneur des Anneaux de
Tolkien Quand sortit le premier film, je venais de terminer ma première lecture de ce grand cycle ; je l'ai relu peu après. Puis j'ai rangé mon gros livre dans un coin de la bibliothèque en me disant que c'était une belle histoire, et j'ai poursuivi mes découvertes littéraires au fil des années, sans plus m'en soucier. Il n'était pas du tout prévu que je saisisse le livre de
Tolkien maintenant, à une période où je croule sous les lectures nouvelles. Mais après avoir revu les films dans la perspective de me distraire, l'envie est soudainement réapparue. Parce que j'ai pris conscience que mon regard porté sur
le Seigneur des Anneaux ainsi que les images que j'en conservais avaient été contaminés par les adaptations filmées, et que je n'en avais finalement pas grand souvenir. J'ai donc décidé de prendre le temps de me plonger à nouveau dans l'univers de la Terre du Milieu.
C'est une véritable gageüre que de se lancer dans l'écriture d'un billet à propos de ce livre, et il m'a fallu noter d'abord quelques idées éparses dans mon carnet de brouillon pour réussir à construire mon propos. J'ai voulu au départ traiter chaque tome séparément, mais quand il a fallu parler de la communauté de l'Anneau, je n'ai rien su dire : construit comme un tout,
le Seigneur des Anneaux demandait à être lu et considéré dans son entier. Je précise d'ailleurs que
Tolkien l'a toujours travaillé d'un seul tenant : la division en trois volumes ne s'est faite que pour des raisons éditoriales.
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Le Seigneur des Anneaux est un livre surprenant et inclassable, constituant une grande fresque épique qui renouvelle nombre de traditions littéraires. Ce qui frappe en premier lieu, c'est la grande cohérence du monde créé par
Tolkien : immergé dans la Terre du Milieu, l'on s'imprègne rapidement de ses mythes, de ses chansons, de ses diverses coutumes et de ses peuples. La géographie de ce lieu inconnu a été pen sée et repensée, et les livres sont toujours parsemés de cartes imaginaires ; un univers d'une impressionnante richesse se développe alors sous nos yeux. L'oeuvre compte par ailleurs de multiples échos, et des motifs se trouvent répétés et enrichis au fil du texte : ainsi, les occurrences de la figure du saule, qui apparaît à de multiples reprises, que ce soit dans la narration ou dans les chansons. Plus encore,
le Seigneur des Anneaux semble jouer avec d'anciennes traditio ns littéraires, en particulier avec la littérature épique, qu'elle soit antique ou médiévale. Je prendrais l'exemple d'un chapitre du troisième volume, « le chemin des morts » (Le retour du roi), où Aragorn et sa troupe empruntent un passage à travers les profondeurs des montagnes pour rallier à eux des guerriers damnés qui n'ont pas trouvé le repos. Ce moment du livre semble en effet un écho intéressant aux nekuia antiques (descentes aux enfers, que l'on peut trouver chez
Homère,
Ovide ou
Virgile, par exemple) : même parcours s'enfonçant dans la montagne, même image des morts errants qui chuchotent des paroles incompréhensibles aux vivants, même cheminement jusqu'au monde des vivants le long d'une longue route où il s'agit de ne pas se retourner, etc. Au passage, un article intéressant sur ce sujet a été oublié ici. D'une autre façon, le récit est émaillé de poèmes et chansons ; certains textes insérés sont même présentés comme des lais, forme poétique ayant cours dans l'Europe médiévale : l'oeuvre majeure recèle donc de nombreuses oeuvres secondaires (poésies, chansons et histoires rapportées) qui viennent l'enrichir et la diversifier.
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Epopée individuelle et collective,
le Seigneur des Anneaux présente une galerie impressionnante de personnages de toutes races et de tous caractères, où la nuance est de mise. Chaque figure positive comporte sa part d'ombre et vice-versa : les personnages qui semblaient caricaturaux dans l'adaptation filmée ne l'étaient qu'en raison de la simplification d'une histoire si difficile à mettre à l'écran. Au sein de ce long récit, de multiples destins se croisent et se mêlent, dans une épopée qui tient à la fois des coutumes païennes et des mythes bibliques. Tout en traitant de la corruption du pouvoir, de la relation à autrui et d'autres grands thèmes omniprésents en littérature tout en permettant l'évasion et le rêve, cette oeuvre supporte aisément différents niveaux de lecture et c'est en cela que ce fut pour moi une véritable redécouverte. Lors de mes premières lectures, je n'ai fait attention qu'aux rebondissements et à l'intrigue, particulièrement prenants, tout en trouvant certaines digressions et certains passages descriptifs bien trop longs. Aujourd'hui, en continuant à apprécier les linéaments de l'histoire, j'ai pris plaisir à m'arrêter sur un passage moins rattaché à la problématique de l'Anneau (comme les chapitres de Tom Bombadil dans La communauté de l'Anneau qui présentent un personnage pour le moins étrange, non mentionné dans les films) ou un passage qui me semblait poétique (comme les descriptions de paysages imaginaires, particulièrement importants dans la construction du monde tel que le connaissent les personnages de la trilogie.) Et ce fut alors pour moi un réel plaisir que d'entamer cette relecture qui m'aura permis de redécouvrir un monde d'une richesse incroyable où chaque peuple conserve sa propre culture et son propre héritage qui transparaissent dans son architecture, sa tradition culinaire ou sa littérature.
(La critique complète avec citations et illustrations est sur mon blog. Je l'ai écourtée ici dans un soucis de confort de lecture)
Lien :
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