Hans Scharwtz a seize ans, l'âge de tous les espoirs, des grands idéaux et des amitiés indéfectibles et passionnées, celles pour lesquelles on donnerait sa vie sans hésitation. Cet ami d'exception, il pense l'avoir trouvé dans la personne de Conrad Graf von Hohenfels, dernier descendant d'une fameuse famille d'aristocrates allemands. Les deux jeunes garçons sont aussi semblables que possible – tous deux sensibles, timides, solitaires, passionnés de littérature et de poésie – mais une barrière infranchissable se dresse entre eux : Hans est juif, fils d'un médecin juif et petit fils d'une longue lignée de rabbins. Et dans l'Allemagne de 1932 où fleurissent de toute part mouvements nationalistes et manifestions de haine raciale, ce n'est pas un inconvénient de moindre envergure.
Dans un premier temps, l'amitié pure et solide des deux enfants les protège de la tourmente, mais les choses ne tardent pas à changer… Tandis que Hans subit de plus en plus le racisme ordinaire qui touche peu à peu toutes les couches de la société allemande, la famille de Conrad va se rapprocher progressivement des idées du parti nazi. Petit à petit, leur amitié perd de son innocence, les deux garçons étant attirés contre leur gré dans deux mondes différents et antinomiques, deux conceptions inconciliables de l'Allemagne. Les liens se distendent puis se brisent finalement, quand Hans est envoyé aux Etats-Unis par ses parents quelques années avant l'éclatement de la deuxième guerre mondiale. Pourtant, Hans ne parvient pas à oublier Conrad. Son souvenir reste gravé dans son esprit, blessure douloureuse qui ni le temps, ni l'éloignement ne semblent pouvoir guérir.
Ce qui m'a frappé avant toute chose dans «
L'ami retrouvé » c'est l'absence de haine. Il y a beaucoup de tristesse et de regret dans ce très court roman écrit par un auteur allemand exilé en Grande Bretagne au début du siècle, mais pas la moindre de trace de rage ou de cynisme.
Fred Ulhman aime l'Allemagne et l'aimera toujours. Mais pas n'importe quelle Allemagne : celle de son enfance, celle des forêts verdoyantes et des châteaux abandonnés, celle des poètes et des musiciens, celle des jeux et des amitiés d'enfance… Ni amertume, ni colère non plus, dans le récit touchant de cette affection à la fois fabuleuse et si ordinaire entre deux jeunes gens que tout sépare. Rapprochement, complicité, amour, éloignement, rupture, retrouvaille : tout y est décrit avec beaucoup de pudeur et de sensibilité. Une histoire simple et forte, sans pathos inutile, à conseiller aux adolescents, comme aux adultes de tout âge.