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C'est l'histoire d'une langue perdue et d'une langue retrouvée. Mme Astrida est une vieille dame métisse en fin de vie dans un EHPAD, atteinte de la maladie d'Alzheimer. Au fur et à mesure que sa mémoire s'envole, elle perd l'usage de son français alors qu'une langue inconnue de tous émerge. Ramata, quinquagénaire noire en reconversion professionnelle, propose un stage d'art-thérapie dans cet EHPAD. Irrésistiblement attirée par Mme Astrida, elle décide d'enquêter sur elle, remontant progressivement vers la vérité de racines de l'histoire de la vieille femme, à l'époque de la colonisation belge en Afrique centrale.

Beata Unubyeyi Mairesse met un lumière une réalité médicale d'une ampleur importante mais méconnuz du grand public. Les personnes d'origine immigrée - qu'elles soient africaines, asiatiques ou européennes - atteintes de maladie neuro-dégénérative, oublient leur français lorsque c'est leur deuxième langue, et ne s'expriment plus que dans leur langue maternelle, même si cette dernière n'était plus pratiquée depuis des décennies. Les pays anglo-saxons ont déjà mis sur pied des programmes spécifiques pour améliorer la prise en charge de ces patients. En France, cette approche interculturelle du soin gérontologique tarde, comme si on n'avait jamais pensé aux immigrés comme des personnes susceptibles de vieillir dans leur pays d'accueil.

Mme Astrida est née au Rwanda et à l'instar de près de 20.000 autres enfants, elle a été placée dans un orphelinat pour mulâtres ( pères blancs, mères noires ) où des missionnaires les ont coupés de leur culture africaine, de leur langue, avant de les déporter en Belgique pour les faire adopter sans l'accord de leurs parents en 1959, juste avant l'indépendance du pays. Ramata, elle, est née au Sénégal et a immigré en France en 1975 pour suivre un père ouvrier dans l'usine Ford de Bordeaux. Elle aussi a connu le déracinement linguistique :

« Quand on émigre, les visages changent, les paysages sont remplacés par d'autres, les goûts se transforment mais on oublie souvent de dire combien les sons aussi nous perdent, nous devons fermer le rideau ondulant des voyelles et apprendre à grimper sur un mur de consonnes gutturales et, en passant de l'un à l'autre, nous nous trouvons affublées d'un boitement disgracieux qui s'incrustera durablement dans notre prononciation d'exilées. Comment pouvait-on changer d'environnement sonore en une seule vie, passer d'un monde à l'autre, s'adapter toujours sans devenir muet ? »

Par l'alternance des chapitres 1954 / 2019, l'autrice fait résonner les vies de Mme Astrida et de Ramata. L'Histoire ne se découpe pas en tranches distinctes, elle tisse des liens entre passé et présent, le passé irriguant certains traumatismes toujours très actuels. C'est la langue qui est au coeur de ce très riche récit qui questionne plus largement, avec beaucoup de justesse, les questions sensibles qui gravitent autour de l'immigration, du racisme, de la colonisation et de la transmission générationnelle.

Les chapitres sur Mme Astrida, notamment ceux évoquant son paradis perdu, plein de couleurs, de saveurs et d'oiseaux avant le chagrin dans l'orphelinat de Save, qui m'ont le plus touchés. Mme Astrida est un très beau personnage dont le parcours ne peut que toucher.

Par contre, j'ai trouvé le reste du casting moins convaincant car on sent trop qu'il a été construit pour démontrer. Ils font « personnages » et l'autrice a tendance à surexpliquer leur profil : Ramata, la femme noire transfuge de classe qui étouffe sous le conditionnement des injonctions de sa mère ( « Tais-toi, écoute, surtout ne te fais pas remarquer, on n'est pas chez nous » ) et qui affiche une méritocratie color blind avant de faire un burn out ; son mari musulman comme elle mais d'origine maghrébine, plus stoïque face au racisme qu'il a pu subir ; et surtout leur fille.

Inès aurait pu être un personnage passionnant, étudiante brillante qui décide de se voiler après les attentats de Charlie Hebdo pour affirmer son identité et ne plus raser les murs comme ses parents. Mais au final, je trouve ce personnage de trop dans le récit qu'il alourdit alors que tout ce qu'en dit Beata Unubyeyi Mairesse est pertinent et fort. Dans doute le roman étreint-il trop d'intentions comme s'il visait une quasi exhaustivité sur les sujets de l'immigration et du racisme. J'aurais préféré qu'il se concentre sur Mme Astrida à laquelle il offre un très belle fin, apaisante et lumineuse.

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Je vais le dire je pense à chacun de ces livres, mais une histoire particulière s'est nouée entre cette auteure et moi. Je l'ai découverte par un recueil de nouvelles et j'ai depuis suivi son parcours, attendant chaque prochaine étape avec impatience. Nous voici à celle du deuxième roman, étape essentielle s'il en est, presque aussi importante que le premier. L'étape de la confirmation, de l'installation dans ce genre qui reste phare dans notre littérature, cette capacité à s'installer dans une histoire longue, à y emmener avec elle son lecteur.

Telle une championne olympique de littérature, Beata transforme l'essai (oui je sais c'est au rugby qui n'est pas olympique, mais l'auteure a fait sa vie en France à Bordeaux, donc le lien est aussi logique). Après la lecture de Tous tes enfants dispersés, je n'avais plus la crainte du passage à la forme longue. Ici, pour le coup, elle prend ses aises, gagne encore une centaine de pages sans en avoir l'air, conserve toute la force de sa phrase que j'aime dire complexe dans sa simplicité.Ce style contamine d'ailleurs heureusement ses thématiques, puisque d'un résumé qui pourrait paraître simple, abordant majoritairement les questions du métissage et de la migration, elle y mêle des passages essentiels sur la façon dont on traite nos ainés (précédant sans doute le scandale Orpea vu le temps que prend la rédaction d'un livre), sur la maladie d'Alzheimer, sur le burn out et la reconversion, sur le voile, sur le multilinguisme...

Alors que dans le premier roman on pouvait identifier assez aisément les parts autobiographiques, Beata brouille un peu les pistes, se diffusant au sein de son histoire en laissant prendre à ses personnages le premier plan, qu'il s'agisse d'Astrida la grand-mère isolée dans son EHPAD, de Ramata la Sénégalaise rêvant tellement d'intégration qu'elle s'en est désintégrée, de Consolée l'enfant métisse du Rwanda qui donne son titre au livre et sa conclusion à l'histoire. Comme dans le premier roman, la narration à plusieurs voix convient bien au style comme à l'histoire. On met du temps à comprendre le sens de l'enquête de Ramata auprès d'Astrida alors qu'on a l'impression d'avoir déjà tout compris en lecteur omniscient... mais les boîtes de photos cachent bien des secrets qui ne nous seront d'ailleurs révélés qu'à nous, parce que contrairement à ces personnages enfermés dans le petit monde qu'elle a créé, nous avons de notre côté l'insigne honneur de vivre dans le même monde que Mme Umubyeyi Mairesse (oui je reprend la solennité du nom de famille pour la fin).

J'espère fortement qu'elle me fera le plaisir de revenir à la Comédie du Livre en 2023 après son passage uniquement virtuel (cause COVID) à celle de 2021. J'ai quatre livres à faire dédicacer, des conversations rêvées sur le sens des prénoms et des noms de famille, sur la vie à Lille et à Bordeaux (deux villes que le hasard a mis sur nos deux routes) et surtout sur les émotions dans lesquelles son écriture me transporte à chaque lecture.
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1954. Ruanda-Urundi. Consolée, jeune métisse, est arrachée à sa mère à l'âge de sept ans. Elle est placée dans un orphelinat à Save, qui regroupe tous les mulâtres et mulâtresses du coin afin de les "civiliser".
2019. Quelque part dans le Sud-Ouest de la France. Ramata, cinquantenaire sénégalaise en pleine reconversion professionnelle, effectue un stage en art-thérapie dans un EHPAD, la résidence "Les Oiseaux". C'est là qu'une des pensionnaires, Astrida Papailiaki, attirera son attention : atteinte de la maladie d'Alzheimer, cette dame en a oublié son français et baragouine une langue que personne ne comprend. de fil en aiguille, Ramata finit par comprendre qu'elle n'a de belge et de grec que ses prénom et nom. Elle est en fait l'une de ses enfants métis qui ont été expatriés en Belgique à la veille de la décolonisation...

Beata Umubyeyi Mairesse, grâce à "Consolée", évoque un pan de l'Histoire encore trop peu connu de nos jours, celui des destins des enfants dits mulâtres ou mulâtresses, nés d'un père Blanc et d'une mère Noire, qu'on a arrachés à leur famille maternelle et réunis dans des "colonies scolaires pour enfants mulâtres", des orphelinats pour enfants qui ne sont pas orphelins... Rejetés par les Noirs car pas assez noirs, rejetés par les Blancs pour leur peau trop foncée, ces enfants n'ont leur place nulle part, ils dérangent. Rassemblés dans ces colonies, ils passent plus inaperçus... À la veille de la décolonisation, on ne sait qu'en faire, certains sont expatriés en Belgique, adoptés ou employés, en fonction de leur âge et de leurs savoir-faire.

Consolée, dont on est prévenu dès le départ qu'elle est un personnage fictif, fait partie de ces enfants. L'autrice nous conte son histoire, de la séparation d'avec sa mère et son grand-père à son arrivée dans cet EHPAD où elle se perd à petit feu. Sa vie, très mouvementée et souvent terrible, nous est pourtant racontée tout en douceur et sensibilité. La plume de l'autrice se veut poétique, enchanteresse, mélodieuse, à l'image des chants et vols des oiseaux que Consolée guette sur son banc en solitaire. J'ai été subjuguée et conquise immédiatement.

Le contexte historique (histoire du Rwanda/Burundi, décolonisation, génocide) est plutôt bien développé. L'autrice aborde également d'autres sujets tout aussi appétents, tels que l'appel à la main d'oeuvre étrangère dans les années 1970, les difficultés d'intégration au sein d'une population qui ne les accepte guère, les difficultés qui se présentent aux générations suivantes, toujours considérées comme des immigrés et donc comme des étrangers. Elle évoque également le manque de personnels dans les EHPAD, le peu de temps accordé à chacun des pensionnaires, le manque de reconnaissance pour les uns comme pour les autres.

Quels que soient la période ou le lieu où se déroulent les événements, quel que soit le personnage auquel est consacré chacun des chapitres, tout est parfaitement bien emboîté.

Pas de suspense ici, on sait et comprend quasiment tout assez tôt. Mais il n'est aucunement utile pour nous tenir en haleine : le personnage de Consolée, qu'elle soit toute gamine ou bien plus âgée, est attendrissant, très attachant, et suffit à nous garder éveillés du début à la fin. L'histoire de Ramata, issue d'une famille d'immigrés sénégalais, est également intéressante.

Un roman merveilleusement bien écrit, percutant, bouleversant, captivant.

Un joli coup de coeur !
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Il est des rencontres aussi imprévisibles qu'inattendues mais qui ne pouvaient que se faire. Lorsque Ramata entre aux Oiseaux pour y effectuer un dernier stage en art-thérapie, métier qu'elle a choisi d'exercer après son burn out , sa vie est sur le point de basculer mais elle ne le sait pas encore.
Son regard est attiré par une femme esseulée, plus claire de peau qu'elle . Madame Astrida est une femme discrète, dont la mémoire a vacillé et qui s'exprime de plus en plus difficilement en français, ressort de son passé une langue que nul dans l'EPHAD ne comprend. Qui donc est cette femme? quel est son vécu? ..
En cherchant à mieux connaitre Astrida, Ramata va être amenée à affronter les non-dits enfouis de son arrivée en France, des regards que tous ont porté et portent encore sur elle, Petit à petit le voile se lève sur une enfant Consolée en 1954 , métisse , qui a été retirée à sa mère rwandaise , placée dans une institution religieuse à Save , ce sera ensuite la guerre , le rapatriement en Belgique..
Un roman puissant qui retrace les vies de ces deux femmes, des parcours à la fois similaires et différents, un roman qui touche, émeut, informe et offre à chacun matière à une réflexion salutaire et indispensable.
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Ce livre de douleur soulève les questions d'exil et d'intégration.
Consolée finit sa vie dans une Ephad en perdant l'usage du français.
Ramata, l'art-thérapeute en formation qui la suit est intriguée par cette femme qui s'éteint peu à peu en marmonnant une langue étrangère peu connue.
Ramata décide donc de découvrir la biographie de cette vieille femme née au Rwanda et arrachée à sa famille en 1954.
Jeune fille, Consolée ne se préoccupait pas de son métissage . Mais les belges qui se retirent du Rwanda préfèrent éduquer ces enfants dont un des parents est blanc.
Ce sont donc des Soeurs qui feront la transition difficile et violente avant l'arrivée en Europe et les placements dans des familles d'accueil.
Consolée sera d'une part docile dans son adolescence mais avec l'âge adulte elle refuse cette enfance volée.
Si la mémoire flanche beaucoup, elle n'oublie pas pourtant son grand-père qui lui racontait des contes. Elle attend cet aïeul qui devrait se manifester par un milan, oiseau qu'elle voyait au Rwanda.
Grâce à ce roman émouvant, l'empathie s'accroit pour ces enfants de couleurs déracinés malgré eux.
J'ai apprécié découvrir le rôle d'art-thérapeute avec Ramata qui donne un éclairage sur une profession peu connu et qui pourtant ouvre des perspectives d'espoir auprès des malades d'Alzheimer.

Ce roman est une réussite car Beata Umubyeyi Mairesse a le mérite de détailler les aspects d'une maladie dégénérative et surtout de nous confronter à l'exil et la transmission pour trouver une identité et une place dans ce monde.
Un bon livre d'une jeunesse confisquée qui n'a pas droit à l'oubli.
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Consolée qui deviendra Astrida d'un côté et Ramata de l'autre.
Deux femmes. Deux femmes fortes. Particularité commune : elles sont toutes deux nées ailleurs, en Afrique, et vivent en France.
La place dans ce roman entre ces deux femmes est équilibrée, sans doute l'auteure voulait montrer que si les choses avaient évolué, ce n'était pas encore suffisant quand on est femme et Noire.
Mais voilà, si j'ai été passionnée par l'histoire de Consolée/Astrida, j'ai été moins tentée par celle de Ramata. En fait j'ai eu l'impression que l'auteure voulait aborder trop de thèmes, les survolant trop.
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Avec Consolée/Astrida, on va découvrir la destinée des enfants métis dans le Rwanda des années 50. L'aberration qu'ils représentent dans la hiérarchie des races. Car on a beau être après la 2e Guerre Mondiale, cette idée demeure. Avec cette enfant on découvre sa vie auprès de son grand-père maternel, sa mère et sa cousine. Ces moments sont empreints de poésie et de douceur. Puis vient l'arrachement, ce moment effarant où ces enfants seront emmenés dans un orphelinat (alors qu'ils ont bien leurs parents en vie !) un établissement spécialisé dans les "mulâtres". J'aurais aimé m'attarder sur la vie de Consolée/Astrida.
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Avec Ramata on aborde le burn out, le racisme, la misogynie, l'intégration, les enfants de la 2e et 3e génération. Déjà beaucoup de thèmes en soi...
Ce personnage va croiser Consolée/Astrida, désormais une personnage âgée atteinte de la maladie d'Alzheimer.
Cette maladie va ramener Consolée à sa langue d'origine.
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Les histoires racontées sont intéressantes, mais j'aurais peut-être aimé en limiter le nombre pour m'attarder davantage sur la destinée de Consolée/Astrida.
Donc ce roman m'a plu puisque il m'a donné envie de lire un autre titre de l'auteure (les moments de Consolée petite fille sont si poétiques et presque magiques !) mais je garde en moi cette petite déception.....
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Ramata, après un burn-out, se reconverti ; elle veut être art-thérapeute.
Son premier stage se déroule dans un EPHAD et elle est intriguée par une vieille dame métisse qui perd l'usage du français et qui utilise des mots d'une langue que personne ne comprend.
Dans un style poétique et une narration qui alterne entre 1954 au Rwanda à aujourd'hui, l'auteure va nous conter le destin de cette femme mais aussi de celle qui la prend sous son aile.
Il est question d'identité, de colonialisme, de racisme, d'intolérance, de tolérance, des souffrances de l'abandon et de religion.
Beata Umubyeyi Mairesse aborde les raisons qui font que l'on se perd parfois sois même pour s'intégrer, pour se faire une place.
Ces sujets sérieux, difficiles et peu gais sont le coeur du récit.
Les personnages sont esquintés par le vie et attachants.
Un joli roman nostalgique.
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La mémoire des mots
Ramata est en reconversion professionnelle : elle qui occupait un poste à très hautes responsabilités, se destine maintenant à l'art thérapie. Il ne lui reste qu'un stage à faire pour valider sa formation, et c'est dans l'Ehpad « Les Oiseaux » qu'elle va l'effectuer. Accueillie très fraîchement par la directrice, Ramata a bien l'intention de mettre en place des ateliers avec les résidents, notamment ceux qui sont atteints de la maladie d'Alzheimer et qui perdent, peu à peu, la mémoire. Lors du premier atelier, l'attention de Ramata est attirée par l'une des pensionnaires : Madame Astrida. Peut-être parce qu'Astrida est la seule de l'Ehpad a ne pas avoir la peau blanche… Ramata est elle-même noire, d'origine Sénégalaise. Astrida semble être un mystère pour tout le monde aux Oiseaux. Elle est très calme, reste des heures assise à l'extérieur, et s'exprime dans une langue que personne ne comprend. D'ailleurs, Astrida perd peu à peu l'usage du français qu'elle parlait pourtant parfaitement à son entrée dans la résidence. Avec l'aide de Claude, la psychologue de l'établissement, Ramata va peu à peu tenter de percer l'énigme Astrida et de remonter le fil du temps, jusqu'aux années 50 au « Ruanda-Urundi ».
L'histoire de Madame Astrida est tragique. Dans les années 50, le Rwanda était une colonie belge. Les enfants nés de pères blancs et de mères noires étaient on ne peut plus gênants… Ces petits métisses (qu'on appelait « mulâtres ») trop blancs pour leurs familles maternelles vivaient souvent cachés, jusqu'au jour où ils devaient brutalement quitter les leurs pour un orphelinat catholique (https://information.tv5monde.com/international/ni-noirs-ni-blancs-les-enfants-metis-durant-la-colonisation-belge-1521). Un comble pour ces enfants qui n'étaient nullement orphelins… On leur vole tout, leur famille, leur culture, leur langue, jusqu'à leur nom… A la veille de l'indépendance, ces enfants sont exfiltrés en Belgique où certains seront adoptés.
En alternant habilement les temporalités, les histoires de Consolée-Astrida et de Ramata s'entremêlent, car toutes deux ont en commun plus qu'on pourrait le croire.
Roman poignant sur l'immigration, l'exil, la mémoire, Consolée est aussi une histoire passionnante que l'auteure a su ancrer dans le passé à travers le destin de Consolée-Astrida et inscrire dans le présent, avec le personnage de Ramata qui a fait de l'intégration un emblème.
Beata Umubyeyi-Mairesse nous fait également visiter l'envers du décor de ces Ehpad, appelés pudiquement « maisons de retraite » où nos anciens terminent leurs jours (enfin, s'ils en ont les moyens).
J'ai beaucoup aimé ce roman écrit avec une grande sensibilité, les passages les plus touchants étant ceux qui racontent l'enfance de Consolée.
Ce livre m'a bouleversée, à plus d'un titre et j'ai eu plusieurs fois la larme à l'oeil…
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Avec Consolée, Beata Umubyeyi Mairesse remonte encore davantage le temps qu'avec Tous tes enfants dispersés, et nous conte cette fois une autre part sombre du Rwanda, faisant partie à l'époque, en 1954, de la colonie belge nommée Ruanda-Urundi, dans laquelle les enfants issus de femmes rwandaises et d'hommes principalement belges, mais aussi grecs, italiens..., étaient retirés à leur mère pour être envoyés dans des institutions destinées à les éduquer à la mode occidentale.

Ainsi de Consolée, petite fille qui devra quitter subitement sa mère, plus encore son grand-père adoré, pour devenir l'une de ces enfants mulâtres sans famille, qui va découvrir un autre univers, bien plus dur, et plus que déshumanisant. Dans le même temps, soixante-cinq ans plus tard, Ramata, devenue depuis peu art-thérapeute suite à un burn-out alors qu'elle était cadre dans une administration, rencontre dans l'EHPAD où elle réalise son stage Astrida, vieille dame à la maladie d'Alzheimer, qui parle de plus en plus en raison de sa maladie une langue inconnue, et qui va rapidement l'intriguer.

Avec ce nouveau roman, j'ai été une fois de plus bercée par la beauté poétique dont sait si bien faire preuve l'autrice pour nous conter pourtant tout sauf la beauté, du moins dans le sort qui a été réservé à ces enfants, car ce roman, au contraire du précédent, est profondément moins violent : la douceur d'Astrida, contrebalançant une partie de la vie volée de Consolée, y est peut-être pour quelque chose. de même que l'alternance des voix entre les trois femmes/enfant centrales de celui-ci, qui décrit avec beaucoup de justesse la condition noire - Amata est d'origine sénégalaise - ou métisse, soulevant les mêmes préjugés, les mêmes remarques, les mêmes comportements plus ou moins consciemment racistes, au fil des époques, aborde toutes ces thématiques avec une certaine douceur paradoxale, et invite à la réflexion avec beaucoup de justesse et de sagesse.

Troisième lecture, troisième superbe découverte. Vivement le prochain !

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Très bon livre à 3 voix: celle de Consolée, jeune métisse rwandaise qui en 1957 est retirée de sa famille noire pour être placée dans une institution avec d'autres enfants "mulâtres", cette même personne qu'on retrouve sous le nom de Madame Astrida dans un Ehpad en France et enfin Ramata, d'origine sénégalaise qui effectue un stage dans ce même Ehpad.

Ramata va chercher à connaitre l'histoire d'Astrida, qui atteinte de la maladie d'Alzheimer, n'arrive plus à s'exprimer en français mais uniquement dans une langue inconnue.

Ce roman est magnifique par sa douceur tout ne traitant de sujets graves comme la colonisation, le déracinement violent des enfants métis et du problème de dialogues des personnes immigrées qui sont atteintes de maladie neuro-dégénérative et qui ont plus de facilité à échanger dans leur langue d'origine.

Ce livre décrit également les différents générations d'immigration et leurs différences de vision d'une intégration plus ou moins réussie.

C'était donc une très belle découverte et je me ferai un plaisir d'acheter d'autres livres de cette autrice.
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