L'enfant , qui rentre dans l'adolescence , se figure que tout lui sera permis quand il sera grand .
Il suffit parfois d'une chanson , d'un portrait , voire d'un film qui prendrait son imagination en otage . Il se projette alors dans le décor , participe à sa réalisation , en devient un héros .
Cristine a marqué cette chimère au fer chaud .
Aucun tiroir de sa mémoire n'est assez résistant pour garder secret ce souvenir , celui du visage enfantin et révolté d'
Alain Delon qui , bien que truand , subjugua son âme pure et sensible .
Pour elle , " le Clan des Siciliens " évoque une île magique , celle de Vulcain . Et pourtant , le titre représente seulement le lieu de tant de méfaits perpétrés par la mafia , depuis la nuit des temps ; en réalité , le tournage de la scène de la plage s'est passé en France , dans le Var , si près de l'Italie .
Habiter un bijou , où la faune et la flore enluminent ses journées , dans sa petite île des Antilles , ne rivalise pas avec séjourner dans cette immense île de la Méditerranée qui l'attend depuis tant d'années .
Finalement , c'est arrivé : elle s'y rend avec sa soeur Eléanore ; elles débarquent à Palerme , ville pleine de promesses et d'allégresse , où la misère se cache derrière un soleil qui enveloppe le corps et l'esprit , surtout quand les étrangères sont jeunes et jolies .
Dansons , chantons , buvons , flirtons avant que l'été ne s'enfuie et revienne la vraie vie : la recherche d'un travail , la violence , l'argent facilement gagné grâce à ces hordes de mafieux qui saignent le pays sans remords , sans soucis . Ce sont les paroles insensées qui bourdonnent dans la tête de cette jeunesse déboussolée .
" Il est un jeune homme qui vit dans ce village ".
" Ce Santo est pareil à un électron libre " .
Apollon pourrait être son surnom ,il est si beau et si fier .
Ses yeux , couleur charbon , ont fait tilt dans le coeur de Cristine : il est l'électrochoc qui va modifier et surtout bouleverser sa destinée .
L'auteure nous offre une " véritable pièce d'orfèvrerie " par ses tirades empreintes de lyrisme antique où le pathos domine .
Tantôt , elle part dans des aparte implacables , tantôt ses mots meurent tant elle est malheureuse .
" Je ramasse mes forces , tente de rabouter mes pensées , qui dans l'égarement de mon esprit partent à la débandade , et puise , ce que de courage il me reste " .
Aucun verbe n'est assez insolite , assez inattendu pour décrire cette passion dévastatrice , inassouvie .
Comme dans le roman de
Stephan Zweig , "
Lettre d'une Inconnue " où l'esprit se bloque sur un individu pendant des jours ,pendant une vie .
L'amour-passion peut être soit éphémère , soit indéfectible car le coeur est tellement ouvert qu'il ressemble à une corolle ; il absorbe les sucs des personnes éperdues ; les garde ou les rejette suivant l'intensité du poison infusé .
Il n'est pas spécialement physique ; il peut se contenter d'un sentiment platonique .
C'est la plus merveilleuse des sensations mais surtout la plus dangereuse pour la santé mentale .
" J'ai beau t'aimer encore , j'ai beau t'aimer toujours
J'ai beau n'aimer que toi , j'ai beau t'aimer d'amour
Si tu ne comprends pas qu'il te faut revenir
Je ferai de nous deux mes plus beaux souvenirs "
( Barbara )