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320 pages
1866 (01/01/1866)
5/5   2 notes
Résumé :
recueil de vingt trois nouvelles humoristiques, sarcastiques ou tout simplement "grotesques" qui est le mot qui résume le mieux l'ouvrage.
I - Le perroquet de ma tante
II - X ..., homme de lettres
III - le chant du cygne
IV - Le Monsieur qui connaît tout
V - les trois phases d'une collaboration
VI - Le mercredi des Cendres
VII - Le chemin de La croix
VIII - Le vade-mecum du parfait domestique
IX - Je ne... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (1) Ajouter une critique
Vous trouverez dans ces 23 nouvelles « grotesques » une délicate observation, une charmante imagination avec du « grotesque » du sarcastique et de l'humour.
Mieux vaut quelques exemples qu'une critique.

Le perroquet de ma tante :
Voulant étouffer un perroquet bruyant ; l'animal déploie soudainement toute son intelligence coquinement cachée devant l'homme qui l'écoute, stupéfait, ébahi :

« Ah ! Tu perds patience parce que tu es obligé de m'entendre pendant quelques minutes ! Que dirai-je donc moi, qui suis forcé de vous ouïr depuis cent ans ? Oui cent ans… A cet âge, tu conviendras qu'on aurait le droit de radoter … Tel que tu me vois, je suis, je le confesse, un absurde et intolérable bavard. Est-ce ma faute ? Non. Les phrases que j'amalgame, sans aucune cohésion apparente, ne sont que l'écho de ce que j'ai entendu chez mes différents propriétaires. J'en ai changé environ 50 fois… Chacun d'eux avait sa marotte que je me suis appropriée … »
Tu m'as entendu crier souvent « ça peut se plaider ! Ça peut se plaider ! » C'est chez un avocat que j'ai enrichi mon répertoire de cette formule. Affaires bonnes ou mauvaises, louches ou borgnes, droites ou tortueuses, du moment où un client venait à lui, c'était sa réponse sacramentelle…
« Laissez agir la nature ! » une autre de mes exclamations favorites, me vient d'un médecin chez qui j'ai résidé quelque temps.
Il prenait 5 à 10 FRS pour répéter cette phrase à ses malades. (…)
« Repassez demain … Monsieur n'y est pas ! » m'a été enseigné chez un marquis de noblesse douteuse. le domestique de ce gentilhomme n'avait que cette réponse aux lèvres chaque fois que sonnait un de ses nombreux créanciers » .
En quittant le marquis, j'ai été vendu à l'hôtel des ventes et acquis par un commerçant. C'est de lui que je tiens l'exclamation : « je vous jure que c'est parce que c'est vous, car à ce prix là j'y perds ! » À force de perdre, il s'est acheté un château où il couronnait des rosières et prononçait devant ses collègues du conseil municipal des discours sur la pureté et la loyauté des transactions.
« Vivre sans toi, mon ami, oh ! Jamais ! »
M'a été appris par une veuve qui disait la même chose à tous ses maris… Elle en a enterré quatre…

Et ainsi de suite ! (...)

Les illustrations sont délicates à exposer, le comique se savoure sur la totalité de la nouvelle, pas évident de trouver des extraits, mais jugez aussi si possible de la drôlerie de celle-ci :

Le spectacle d'une cervelle :
Un modeste homme joue ses économies au jeu et on perçoit le chaos de contradictions dans sa cervelle où chaque caractère tente de contredire un autre de ses caractères et où se forment assez vite une coalition contre le caractère le plus ennuyant : La raison :

L'espérance :
Enfin ! Nous voilà donc sur le terrain de nos futurs exploits (gains au jeu)… Holà !… Réveillons-nous mon ami
La paresse :
Hein ? … Où suis-je ? … il est trop tôt pour me lever. Laissez-moi dormir.
L'envie :
Dormir !…. Quelle plaisanterie !
L'espérance :
Dormir ! Tu ne te rappelles donc plus où tu es ?
L'ambition :
Dormir ! … est-ce que je dors moi ?
La Paresse :
De grâce, nous sommes brisé. Nous avons une courbature dans tous les membres. Rien qu'un petit somme d'une heure !
L'espérance :
Une heure de perdue, quand la fortune nous attend, quand la roulette a déjà commencé ses fascinantes évolutions !
L'envie, l'ambition, l'amour, la gourmandise, en choeur :
La roulette !…. dépêchons ! Dépêchons !
(…)
La raison :
Arrêtez ! Pendant qu'il est temps, je veux faire entendre ici ma voix… Lucien, mon ami, écoute mes conseils, leurs perfides insinuations t'égarent. le jeu est de toutes les folies la plus redoutable.
L'espérance :
C'est la seule porte ouverte à l'imprévu, c'est la trésorerie du hasard
La raison :
Lucien, boucle ta malle, paye à l'hôtelier ce que tu lui dois pour 12H de séjour et reprend en hâte le chemin de Paris.
Ce n'est point un pauvre employé comme toi qui peut lutter contre les caprices du sort.
L'envie :
Employé !!! … Tu as bien fait de nous rappeler ce titre humiliant. J'ai assez souffert. Il me faut une revanche. Employé !!!! C'est à qui me bafouera (…) En avant ! Et nous irons riche.
L'espérance :
Il a raison.
La raison :
Je proteste contre cet abus de mon nom.
L'envie :
En avant ! Et nous nous reposerons du matin au soir !
La paresse :
Se reposer ! J'accepte avec transport. Se reposer ! …. Nous nous levons tout de suite. Vous allez voir de quoi est capable la Paresse pour un si noble but.

L'amour :
Lucien ! Songe aussi à moi… Tu sais bien, ta cousine Julie, la fille de ton cousin issu de germains qui a gagné un million dans les (…)
Tu l'as vu cet hiver au bal donné par son père…

L'envie :
Et auquel il nous avait invité pour nous humilier !
L'amour :
Elle est belle comme Monna Lisa ! … Si tu demandais aujourd'hui sa main, on te rirait au nez, mais que cette main soit pleine de billets de banque, j'y réponds du succès… Des billets, il y en a par centaines, là-bas, sur le tapis vert.
L'envie :
Tu seras salué humblement par tous et envié à ton tour
L'amour :
Tu deviendras le mari de Julie
L'ambition :
Peut-être maire de la commune, où tu achèteras un château.
La gourmandise :
En dégustant quatre grands repas par jour.
La raison :
Lucien ! On t'abuse ! … je te jure que….
L'envie :
Regarde tes coudes râpés
L'amour :
Pense à elle !
La paresse :
365 dimanches par an ! Calcule ! …
L'espérance :
Victoire ! …. nous partons pour la salle de jeu.

Et ainsi de suite ! (…)

Allez ! Dernier exemple de folies clownesques non sans arrière-pensée sur la vie humaine car l'auteur voit haut mais sa manière de railler les moeurs est toujours légère.

La pendule :

« Tic tac ding ding…
C'est ainsi qu'elle parle, la pendule de marbre noir qui a la prétention d'orner la cheminée de ma chambre.
Au premier abord, rien de plus banal que ce langage. Rien de moins éloquent.
Mais les discours les plus émouvants que j'aie entendus de ma vie ont été prononcés par des pendules »

Et il nous décrit avec sarcasme comment sa pendule vivante, véritable dictateur, torture son hôte, d'abord en le traitant de fainéant :

« Fainéant sans coeur ni parole, recommenceras-tu encore aujourd'hui à te conduire ainsi que tu en as l'habitude ? » (… et autre discours moralisateur) et l'oblige à sortir du lit en accélérant le temps et la cadence de sa terrible horloge « Et la pendule obstinée, impitoyable, acharnée, vous harcèle de ses apostrophes jusqu'à ce que vous ayez cédé et sauté de rage à bas du lit moelleux ! »

Autre forme de supplice, la pendule bat lentement cette fois-ci pour un rendez-vous amoureux à midi :
« Dès 11H, la pendule a commencé - il semble qu'elle prenne plaisir à traîner sur les syllabes, tant elle bat lentement son mouvement alternatif.
« Elle ne viendra pas, ricane la cruelle. Je te répète qu'elle ne viendra pas. Et comme elle aura raison !
Te figures-tu qu'elle va se compromettre pour un volage de ton espèce ? Il faudrait qu'elle eût le perdu le bon sens !
Ding !….
Oui mon cher. 11H et demie. Quand je te répète qu'elle ne viendra pas. Ce qu'elle t'en a dit, c'était pour se délivrer de tes obsessions importunes.
Tu es impatient, horriblement impatient. Tu trouves que je ne marche pas assez vite ? Il faudrait peut-être casser son grand ressort pour plaire à Monsieur. Je ne suis pas pressée, moi. Dinnng…. Dinnnnng ! … Oh ne te dérange pas. Ce n'est pas elle qui a sonné, c'est moi. »

Ou d'une régularité impeccable quand un créancier s'apprête à taper à la porte pour réclamer son dû :
« Ah ah ! Vous voilà tout triste, Monsieur le dépensier. Il est bien temps d'entamer aujourd'hui votre mea culpa.
Pourquoi l'avez-vous gaspillé, cet argent, au lieu de le garder pieusement pour faire honneur à votre signature ?
Il va venir, il va venir… celui que redoute votre inconduite. Sa lettre de change à la main, menaçant comme la justice, inexorable comme elle.
Que lui répondrez-vous, coupable ? Quelle excuse balbutierez-vous devant ce protêt vivant ? … Tic… Tac… vous voudrez bien arrêter aujourd'hui ma marche. Vous voudriez retarder le moment fatal. Souhaits inutiles ! Poupinet le créancier doit déjà être au coin de la rue. Il parle au concierge. Il pose le pied sur la première marche.
C'est votre coeur qui fait maintenant tic, tac, à mon unisson.
Le balancier du remords, monsieur, le balancier du remords ! »

La pendule est infatigable quand il s'agit de tirailler son propriétaire, l'humiliation est son plaisir favori mais être sadique lui convient tout aussi bien :

Quand son propriétaire est près d'un homme alité, proche de la mort :
« Tic .. Tac !… Chaque balancement le rapproche de la mort, celui qui t'est cher ! Et toi aussi ! Toi aussi !
Tic… tac !… Un bon coeur que cet ami-là. Ce sont toujours les bons coeurs qui partent les premiers. Vous êtes presque du même âge, à quelques jours près. Il était robuste comme toi ; insouciant, comme toi ! Quels avertissements !
Tic… tac ! … Qui sait si ton tour ? … Dinnggg ! Dinnng !!! Oh ! N'aie pas peur, je puis tinter sans me gêner maintenant ; il dort un sommeil qu'on ne réveillera plus ! »

Un esprit déjanté, subtil, de nombreuses originalités... Et il y en a beaucoup d'autres encore tant ses oeuvres sont nombreuses !


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Citations et extraits (1) Ajouter une citation
Le perroquet, sur son perchoir, se tenait fixe et immobile.
C’était l’été. Il était grand jour encore ; de plus, il faisait chaud.
Si bien qu’après quelques minutes, ma tante se laissait aller à un sommeil de digestion, m’abandonnant aux cruelles voluptés d’un tête-à-tête avec Jacquot le perroquet.
Le scélérat paraissait n’attendre que cette occasion funeste pour défier ma patience.
A peine ma tante eut-elle fermé les yeux, que, préludant à l’exécution de son répertoire, il entama ses gammes chromatiques de piaillements, de ricanements, de croassements. Après quoi, entrant en plein dans le coeur de son projet, il se mit à défiler des kyrielles de formules, d’exclamations, de vociférations.
En meme temps, son oeil inquisiteur semblait ajouter à la provocation et scruter ma pensée pour y jouir de ma colère !
Par tous les diables, c’en était trop. Pendant cinq minutes, je luttai ; pendant cinq autres je faiblis ; pendant les cinq dernières je lâchai la bride à mon emportement. A la seizième minute, Jacquot, dans mon esprit, était condamné à mort.
Restait à exécuter la sentence. Sur la pointe du pied, — comme si ma tante n’eût pas été sourde, — je me levai, je m’approchai en tapinois ; j’étendis les deux mains…

Le perroquet me regardait toujours, mais d’une façon si pénétrante, qu’il avait l’air de deviner ma résolution. N’importe ! Je rapprochai les mains. J’allais serrer, quand une voix moqueuse me jeta soudain ce cri ironique :

« Merci bien ! »

Cette voix, c’était celle de Jacquot, je n’en pouvais pas douter ; et d’ailleurs, si j’eusse conservé quelque incertitude, elle n’aurait pas été de longue durée, car, reprenant aussitôt :

- Oui, merci, fit Jacquot, car tu vas me rendre là un signalé service, en me débarrassant d’une existence qui me pèse singulièrement… 

Devant cette fantastique manifestation, j’avais reculé effrayé, et j’étais retombé sur ma chaise, confondu et stupéfait.

- Eh bien ! Reprit le perroquet gouailleur, voilà que ton courage faiblit et que tu refuses d’accomplir ton beau projet. Est-ce parce que je t’ai appris que tu me serais agréable ?…

Ah ! Tu perds patience parce que tu es obligé de m’entendre pendant quelques minutes !
Que dirai-je donc moi, qui suis forcé de vous ouïr tous depuis cent ans ?… Oui, cent ans, — moins quelques mois à peine.
A cet âge, tu conviendras qu’on aurait le droit de radoter, quand bien même on radoterait pour son propre compte… Ce qui n’est pas mon cas.
Tiens ! Pendant que j’y suis, je veux bien t’édifier, quoique je n’aie pas besoin de justification, le nombre des gens qui parlent pour ne rien dire suffisent à m’excuser d'avance. Mais n’importe ?… Je me sens en verve d’expansion, et tu vas en profiter.

Tel que tu me vois, je suis, je le confesse, un absurde et intolérable bavard. Est-ce ma faute ? Non, c’est celle des hommes, tes chers confrères.
Les phrases que j’amalgame, sans aucune cohésion apparente, ne sont que l’écho de ce que j’ai entendu chez mes différents propriétaires.
J’en ai changé environ cinquante fois… Chacun d’eux avait sa marotte que je me suis appropriée. Juge quel total ces fait dans ma mémoire.
Je n’ai pas envie de te raconter ma vie en détail, mais quelques rapides échantillons te renseigneront suffisamment.

De mes différentes étapes politiques je ne te dirai pas grand chose.
Dès ma première jeunesse, j’appris à connaître les révolutions. En douze ans, j’eus cinq maîtres. Le premier m’apprit à chanter : « Vive le Roi ! » le second « Ça ira ! » le troisième « Veillons au salut de l’empire »
Un bon commencement, comme tu le vois. Le reste de ma carrière devait y répondre.

Tu m’as entendu crier souvent : « Ça peut se plaider ! Ça peut se plaider ! » c’est chez un avocat que j’ai enrichi mon répertoire de cette formule. Affaires bonnes ou mauvaise, louches ou borgnes, droites ou tortueuses, du moment où un client venait à lui, c’était sa réponse sacramentelle… j’ai trouvé le mot drôle, au point de vue de Thémis, — et je l’ai retenu.

« Laissez agir la nature ! » une autre de mes exclamations favorites, me vient d’un médecin chez qui j'ai résidé quelque temps. Il prenait cinq et dix francs pour répéter cette phrase à ses malles. Quand il allait la dire à domicile ; c’était vingt francs. Il paraît, du reste, qu’il la prononçait à merveille, puisqu’on le nomma, rien que pour cela, membre de l’Académie de médecine.

« Repassez demain… Monsieur n’y est pas ! » m’a été enseigné chez un marquis de noblesse douteuse, qui tranchait du grand seigneur, au risque de se couper. Le domestique de ce gentilhomme apocryphe n’avait que cette réponse aux lèvres, chaque fois que sonnait un créancier.

En quittant le marquis, j’ai été vendu à l’hôtel des ventes et acquis par un commerçant. C’est de lui que je tiens l’exclamation :
« Je vous jure que c’est parce que c’est vous, car à ce prix-là j’y perds ! »
À force de perdre, il s’est acheté un château où il couronnait des rivières et prononçait devant ses collègues du conseil municipal des discours sur la pureté et la loyauté des transactions.

« Vives sans toi, mon ami, oh ! Jamais ! »
M’a été appris par une veuve qui disait la même chose à tous ses maris… Elle en a enterré quatre…

« Je lui fourrerai six pouces de fer dans le ventre ! » me vient d’un fanfaron qui provoquait les faibles et rampait devant les forts.

« Faites tout saisir ! » d’un propriétaire, arrière-neveu de M. Vautour.

« Nous ne voulons pas de vos gens de lettres ! » d’un académicien qui, je dois lui rendre cette justice, n’avait, pour être cohérent avec son principe, jamais écrit une ligne.

« A-t-il voiture ? » D’une jeune fille idéale qui posait cet ultimatum toutes les fois qu’on lui parlait d’un fiancé destiné à faire battre son coeur…

Et ainsi de tous mes refrains.

S’ils sont odieux, à qui la faute ? Au lieu de te courroucer, tu aurais mieux fait d’en chercher le sens et de tirer profit des leçons qu’ils peuvent contenir. Un perroquet tel que moi, c’est tout simplement un cours de philosophie pratique…
SI la philosophie t’ennuie, de même que ceux de ton époque, tue-moi… Je t’ai déjà dit que j’avais assez des tiens et de toi…

Comme Jacquot achevait, ma tante se réveilla.

Avais-je dormi aussi et été dupe d’un cauchemar ? Je n’ai jamais pu m’en assurer, l’oiseau étant trépassé à quelque temps de là.

Peut-être un sage de moins !…
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