Citations sur Les Enfants Jéromine (94)
Nelly76. Dame Marthe était devenue plus grave et plus sévère encore . jamais plus elle ne riait, mais souvent elle restait assise en haut, dans la chambre où couchait autrefois Jons, tenant à la main un de ses anciens cahiers d'écolier et regardant l 'étroite fenêtre qui se détachait sur la lumière du couchant. Oui, elle se contenterait de le voir devenir pasteur, partageant entre les fidèles le pain et le vin. A ses yeux ce n 'était pas beaucoup, mais il aurait des enfants et ils pourraient s' élever plus haut.plus haut que ne montait la fumée de la meule.Elle ne s 'inquiétait pas beaucoup de savoir s' il était heureux ou malheureux dans la grande ville.Il avait à travailler , comme ils avaient travaillé tous, et à faire en sorte d'être le premier en toutes choses.
...celui qui préfère rester sous son toit pauvre et inconnu, n'est pas digne de recevoir l'armure de l'Esprit. il n'est pas moindre que les autres, il n'y a même pas lieu de le blâmer, mais il n'est pas digne de l'armure.
Lorsqu'une époque est malade et n'a pas assez de travail pour toutes les mains, c'est une nouvelle exhortation qu'elle nous adresse, l'exhortation de travailler avec nos cœurs, au lieu d'y employer nos mains. Et je ne connais pas encore d'époque qui n'ont pas eu d'emploi pour tous les coeurs.
Non, on n'avait pas encore connu toutes les épreuves quand on avait connu la guerre et la mort, en soldat gardant l'honneur (...).
Et même à l'âge de vingt ans on devait déjà avoir entendu dire que l'épreuve de la vie est plus difficile que toutes les guerres du monde (pages 568-569).
(...), mais il se disait qu'il ne suffit pas quelquefois, de passer toute sa vie avec la Bible et la parole divine entre les mains pour être touché par le souffle du Christ. Il y avait sûrement là, chez les gens d'Eglise comme en son propre état d'éducateur, bien des choses laissant profondément à désirer et dont les enfants et tout le pays ne pouvaient que pâtir.
Elle savait qu'il ne lui serait pas répondu, qu'il n'y avait de réponse que dans les contes. Et pourtant elle restait encore là, parce que sa tête reposait si tranquillement contre la paroi de l'étable, tandis que dans ses yeux s'infiltrait si profondément la lumière de la lune.
Peut être bien Stilling n 'était -il pas ce qu 'on appelle un bon maître, s 'élevant de degré en degré, d après un plan modeste, tenant toujours un regard scrutateur fixé sur son disciple marchant vers un objectif limité et uniquement vers lui, laissant à d 'autres mains plus qualifiées tout ce qui dépassait cet objectif. Il s' était si souvent tu, durant sa vie. Il avait dû, quarante ans durant, parler comme un enfant, afin d 'être compris des enfants. Et maintenant il était comme en proie à une sorte d 'ivresse, l'ivresse de l 'Hermite qui pouvait étaler ses trésors, qui prononçait la formule magique sous laquelle s' illuminaient les jeunes yeux de Jons. Il lui était permis de donner à pleines mains, au lieu de thesauriser. Il s' élevait à grands coups d'ailes au dessus des états et des mers et il avait conscience de ne pas avoir perdu sa vie, mais de lui voir porter des fruits tardifs, qui entre ces jeunes mains se transformeraient en bienfaisante nourriture.
La vie n'est pas très belle, vois-tu, dès qu'on y regarde d'un peu plus près, et c'est pourquoi on a inventé l'au-delà, afin que tous les hommes ne recourent pas au suicide.
Une famille ne meurt que lorsqu’il n’y a plus personne pour donner la main aux autres. Il faut que l’un d’eux donne la main qu’il soit « un refuge contre le vent » et « un abri contre l’averse »
Et qu'est-ce que ça veut dire : remuer le monde ? demanda Jons.
À l'école, on te dira que ce sont les empereurs et les rois qui remuent le monde, répliqua Jacob. Mais il ne faut pas le croire. (...) Le Christ a remué le monde, et beaucoup d'autres l'ont fait après lui. Il a guéri des aveugles et ressuscité des morts. Il a remué des cœurs. Et celui-là seul remue le monde qui sait remuer les cœurs.
Et Grand-Père a-t-il remué le monde ?
Grand-Père a pris, au cours d'une longue vie, du poisson pour nourrir les pauvres. (...) Un jour, quand j'étais encore enfant, on a assassiné un homme dans cette forêt-ci. Un forestier. Nous savions tous qui l'avait fait, mais il n'y avait pas eu de témoin. Et l'auteur du meurtre a nié (...) Mais alors le grand-père est allé trouver l'homme, et il a fait appel à sa conscience. (...) Le grand-père était un simple bonhomme, moins que le pasteur et le juge, rien qu'un pêcheur, mais ce jour-là il a "remué" le monde ! (pages 30-31).