Je termine "
Les brutes en blanc".
Livre polémiste, livre dénonciateur, livre à lire en tout cas.
Quand on est extérieur à l'hôpital ou tout système de santé, on ne peut se rendre compte réellement des comportements déviants (j'ose le mot) avant d'y être soi-même confronté. Quand on est "dedans", on s'en rend compte, on crée une carapace pour exorciser le "mal", on se satisfait, on démissionne, on accepte. Et on perd forcément de cette humanité qui un jour nous a fait choisir cette voie: soigner.
Bien évidemment, tous les médecins ne sont pas comme ceux décrits dans cet ouvrage. J'aurais envie de dire à tous: "vous vous sentez impliqués ou vous sentez-vous concernés?"
De cet étrange remarque découle l'attitude que chaque soignant montre envers la maltraitante d'un patient fragilisé, qu'il soit en simple consultation ou hospitalisé.
Aurais-je une autre attitude envers "les brutes" à la lecture de cet essai. Un sentiment de pitié certainement.
Mais à y bien regarder, n'avons-nous pas tous le choix? le choix d'agir selon nos valeurs, le choix de l'altruisme, de la bonté. Ce n'est pas à moi, individu, que le patient s'adresse, mais à moi, soignant, et dans ce miroir de connaissances de la maladie dont il vient s'ouvrir, il attend l'aide, la réponse, un mot qui soulagera sa souffrance. Il attend un mot, il n'attend pas des maux supplémentaires.
Le système hospitalier est ainsi fait qu'en France, comme le précise
Martin Winckler, le patient devient une pathologie dès qu'il franchit la porte de l'établissement. Là où l'auteur aurait pu porter son regard, au delà des carabins de toutes sortes, et de ceux qui ne le sont pas mais s'y identifient quand même, c'est sur l'ensemble du dispositif. Une allusion en filigrane de l'ouvrage dénonce le manque de moyens, ou une mauvaise répartition des moyens. C'est clair! Ce qui l'est moins, c'est le mouvement qui s'installe dans les autres professions de l'hôpital, une forme de hiérarchie brutale justifiée par un "contexte contraint" qui veut tout dire et peu dire en même temps.
Les médecins ne sont pas les seuls à supporter les dépassements d'horaires et la charge de travail. Pour palier cet état, les organisations sont restreintes à l'acte et la procédure (de soin) vient remplacer l'accueil, la rencontre avec le patient. Comment peut-on faire entrer un patient dans une procédure sans nier son identité. Cette indifférence est déjà de la maltraitance.
Et les politiques de santé n'y sont pas toujours les seules responsables... On a toujours le choix!
Je suis entièrement d'accord avec le constat établi par M. Winckler.