D’une sirène un homme était amoureux fou.
Il venait sans cesse au rivage
Offrir à sa Vénus le plus ardent hommage ;
Se tenait là, soupirait tout son soûl.
La nuit l’en arrachait à peine,
Les soucis avoient pris la place du sommeil ;
Et la nuit se passait à presser le soleil
De revenir lui montrer sa sirène.
Quels yeux ! Quels traits ! Et quel corps fait au tour !
S’écriait-il : quelle voix ravissante !
Le ciel n’enferme pas de beauté si touchante.
Il languit, sèche, meurt d’amour.
Neptune en eut pitié. Ça, lui dit-il un jour,
La sirène est à toi ; je l’accorde à ta flamme.
L’hymen se fait ; il est au comble de ses vœux ;
Mais dès le lendemain le pauvre malheureux
Trouve un monstre au lieu d’une femme.
Pauvre homme ! Autant l’avaient travaillé ses transports,
Autant le dégoût le travaille.
Le désirant ne vit que la tête et le corps ;
Le jouissant ne vit que la queue et l’écaille.
Ne vous y trompez pas ; toute chose à deux faces ;
Moitié défauts et moitié grâces.
Que cet objet est beau ! Vous en êtes tenté.
Qu’il sera laid, s’il devient vôtre !
Ce qu’on souhaite est vu du bon côté ;
Ce qu’on possède est vu de l’autre.
Ils étaient quatre amis qu'assortit la fortune ;
Gens de goûts et d'esprit divers.
L'un était pour la blonde, et l'autre pour la brune ;
Un autre aimait la prose, et celui-là les vers.
L'un prenait-il l'endroit ? L'autre prenait l'envers.
(...)
C'est un grand agrément que la diversité.
(...)
L'ennui naquit un jour de l’uniformité.
L'ennui naquit un jour de l'uniformité .