Citations sur De la liberté précédé de De la profession de Cynique (7)
C'est ainsi qu'un philosophe apporte son témoignage contre un ami; c'est ainsi qu'un philosophe fait le métier de parasite; c'est ainsi qu'il se vend pour de l'argent; c'est ainsi qu'au sénat, un homme ne dit pas ce qu'il pense, tandis que dans son cœur s'exclame son jugement, non pas une froide et misérable opinion, suspendue comme à un cheveu à des raisonnements de fortune, mais un jugement vigoureux et utile, un jugement que l'exercice pratique a vraiment initié.
Et bien ! quand tu vois un homme faire des courbettes devant un autre, ou lui dire des flatteries que contredit sa pensée intime, confesse hardiment que cet homme aussi n'est pas libre, et pas seulement s'il le fait pour un pauvre petit souper, mais même si c'est pour une préfecture ou un consulat. Toutefois, appelle petits esclaves ceux qui agissent ainsi pour des bagatelles, et les autres, du nom qu'ils méritent, grands esclaves.
partout où j'irai, il y aura le soleil, la lune, les astres, les songes, les présages, la conversation avec les dieux.
Tu apprendras, par l'expérience, que toutes ces choses que l'on admire et pour lesquelles on s'empresse ne servent de rien à ceux qui les ont obtenues. Ceux, au contraire, qui ne les ont pas encore obtenues s'imaginent que les avoir leur procurera tous les biens. Puis, quand on les a , aussi lourde est la chaleur, aussi grands l'agitation, le dégoût, le désir de ce que l'on n'a pas. Car ce n'est pas par la satisfaction des désirs que s'acquiert la liberté, mais par la destruction du désir. Pour comprendre que ces affirmations sont vraies, toute la peine dépensée à satisfaire ces désirs, retourne-la sur elles : au lieu de faire ta cour à un riche vieillard, fais-la à un philosophe ; montre-toi à sa porte ; tu ne seras pas déshonoré d'y être vu, et tu ne t'en retourneras pas les mains vides, ni sans profit. Du moins, essaie toujours : essayer n'est pas déshonorant.
- Pourquoi donc le créateur m'a-t-il introduit ici-bas sous ces conditions?
- Si cela n'est pas à ton goût, sors ; il n'a pas besoin d'un spectateur toujours mécontent de son sort. Il lui faut des gens qui participent à ses fêtes et à ses danses, pour applaudir plus fort, pour suivre l'inspiration divine et chanter les louanges de l'assemblée. Quant aux grognons et aux lâches, c'est sans peine qu'il les verra déserter l'assemblée ; car, même présents, ils ne s'y conduisaient pas comme à une fête et ne remplissaient pas la place qu'ils auraient dû, mais ils se lamentaient, ils incriminaient la divinité, le sort, leurs compagnons, insensibles à ce qu'ils avaient obtenu et aux facultés qu'ils avaient reçues pour résister à l'adversité : la grandeur d'âme, la noblesse de caractère, le courage, cette liberté même que nous sommes en train de chercher.
Car là où règnent troubles, peines, terreurs, désirs insatisfaits, réalisation de tout ce qu'on voudrait éviter, envies et jalousies, par où la félicité peut-elle se frayer un chemin?
- Dans quelle condition t'a-t-il introduit ici-bas? N'est-ce pas comme mortel? N'est-ce pas pour vivre sur terre avec un misérable morceau de chair, et, pendant quelque temps, contempler son gouvernement, suivre son cortège et célébrer avec lui la fête? Ne veux-tu donc pas, après avoir contemplé, tant que cela t'est permis, le cortège et l'assemblée, t'en aller lorsqu'il t'emmène, non sans l'avoir remercié pour tout ce que tu as entendu et vu?
- Non, je voulais encore assister à la fête.
- Oui, et les spectateurs d'Olympie veulent voir d'autres athlètes. Mais la fête à un terme. Sors, va-t'en, comme un homme reconnaissant et discret. Fais place à d'autres. Il faut que d'autres aussi viennent au monde, comme tu y es venu toi-même, et une fois venus, qu'ils aient de la place, et des demeures, et tout le nécessaire. Mais si les premiers ne se retirent pas, que reste-t-il pour eux? Pourquoi es-tu insatiable? Pourquoi n'es-tu jamais satisfait? Pourquoi encombres-tu le monde?