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Citations de Antonine Maillet (42)


Pis vient un temps que tu jongles plusse parce que t’es pus aussi jeune que t’avais accoutume. Ça vient avec les années, ça la jonglerie. C’est peut-être parce que quand c’est que tu viellzis, t’as plusse de temps pour jongler… C’est malaisé à saouère.(p.55)

* jongler : réfléchir
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depuis le premier de la lignée sorti de la Seigneurie d'Aulnay, voilà que les Thibodeau s'étaient passé la forgerie comme on se passe un gobelet d'argent, d'hoir en hoir. Et alors, si vous pensez qu'un forgeron qui a brisé durant toute une vie les fers des chevaux et des bœufs, saura point en une nuit briser ceux de ses frères et compères prisonniers des Anglais !
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C’est la forge qui dit ça, la forge qui s’est tout le temps complue à ce genre de ragots. Tellement qu’au pays on appelle ces commentaires des ragoûts de forge.

(Leméac, p.101)
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Ne cherche pas midi à l’aube ou en brunante,

En quittant hier, sache que demain est en attente.

À l’exilé, au sans-abri, offre l’asile

Et si ton ami louche, regarde-le de profil.
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Les outardes étaient rentrées, les marées hautes avaient lavé les herbes de dunes et les foins des prés, on pouvait larguer les bêtes au champ. On pouvait sécher l'hiver sur la corde, et s'éventer la mémoire et les sentiments. Un siècle avait passé sur l'Acadie cachée au fond des bois et qui n'avait pas dit un mot durant cent ans.
...N'éveillez pas l'ours qui dort.
Mais en 1880, cent ans après son retour d'exil par la porte arrière et sur la pointe des pieds, l'Acadie sortait sur son devant-de-porte pour renifler le temps et s'émoyer de la parenté. De toutes les anses, et de toutes les baies, et de toutes les îles, on sortait la tête et dressait l'oeil.
Et c'est alors qu'on se reconnut.
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Les guerres précédentes n'avaient fait qu'émonder l'arbre ; la Déportation risquait de le déraciner.
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Non, le chat ne se lamentait pas, il mi-au-lait comme s’il avait du miel et du lait qui lui coulaient le long du gosier.

(Leméac, p.18)
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Parsoune s'en vient non plus laver nos hardes. Ni coudre, ni raccommoder. Ils pouvont, ben nous trouver guénilloux : je portons les capots usés qu'ils nous avont baillés pour l'amour de Jésus-Christ. Par chance qu'ils avont de la religion : ils pensont des fois à nous douner par charité leux vieilles affaires. Leux vieilles affaires et leux vieilles hardes qu'étiont neuves un jour que ça nous faisait rêver d'en aouère des pareilles. Je finissons par les receouère pour nous payer nos journées d'ouvrage, mais quand c'est que j'en avons pus envie. Quand c'est que t'as vu dix ans de temps un chapeau de velours sus la tête d'une femme, au coumencement tu le trouves ben beau et tu voudrais ben l'aouère. Pis il coumence à cobir pis finit pas ressembler une crêpe de boqouite. C'est ce temps-là qui te le dounont. Ils te dounont des châles itou quand c'est qu'ils se portont pus, et des bottines quand c'est la mode des souliers. Ça arrive même qu'ils te dounont deux claques du même pied, ou ben un manteau trop petit où c'est qu'ils avont louté les boutons. Ils pou vont ben trouver que je sons mal attifés.

Lexique :
Bailler : donner
Cobir : bosseler
Capot : veste ou manteau
Boqouite : sarqazin
Guénillou : en guénille
Hardes : vêtements
Louter : ôter
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Entrer en littérature, c'est en partie sortir de la ligne droite et franchir l'horizon des interdits.
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Pas de quartier pour les sans-cœur qui s'attaquent à des sans-pays.
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- Plusse que la vie, tu dis? Quoi c'est qu'y a de plusse que la vie de l'homme?
- C'telle-là de sa lignée, qu'il fit, le mousse.
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Au dire du vieux Louis à Bélonie lui-même, ce rejeton des Bélonie né comme moi de la charrette, seuls ont survécu au massacre des saints innocents, les innocents qui ont su se taire. N'éveille pas l'ours qui dort, qu'il dit, surtout pas l'ours qui dort sur le marchepied de ton logis. C'est pourquoi l'Acadie qui s'arrachait à l'exil, à la fin du XVIIIe siècle, est sortie des ses langes tout bas, sans vagir ni hurler, sans même se taper dans les mains. Elles est rentrée au pays par la porte arrière et sur la pointe des pieds. Quand le monde s'en est aperçu, il était trop tard, elle avait déjà des ressorts aux jambes et le vent dans le nez.
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«  Le bonheur?
Le mot le plus répandu et pourtant le plus indéfinissable » .
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C'est de la côte qu'avaient surgi les premiers Caissie sortis d'exil, à la fin du XVIIIe siècle. Fatigué de traîner sa famille et son ménage depuis la Louisiane jusqu'à Memramcook, puis de Memramcook jusqu'à la Baie, Gélas Caissie s'était laissé choir sur le sable et y avait planté quatre piquets pour y supporter sa cabane. Petit à petit , sa descendance avait affermi les piquets et agrandi la cabane jusqu'à donner à l'habitation des premiers Caissie à peu près l'allure d'une maison.
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Rentrez chacun à votre chacunière sur la pointe des pieds et attendez le temps qu'il faut. On a bien attendu en Géorgie, dans les Caroline, en Marilande, et tout le long de la Nouvelle-Angleterre, attendu que passe la première charrette pour y accrocher la sienne. On pourra de même attendre sur le marchepied de son logis que la porte s'ouvre et que la maison se vide. Attendre que la terre se réchauffe, que la mer se calme, que les mémoires s'émoussent. Attendre que les plantes regerment dans les champs et les potagers saccagés.
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Les mauvais temps, ça finit tout le temps par passer… La meilleure chose, c’est de farmer les yeux et d’espèrer que les temps veniont bons.
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Antonine Maillet
Je veux vivre jusqu'à ce que la vie soit terminée.
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Il dit [Gapi] qu'il peut peut pas aouère d'enfer pour le pauvre monde, parce qu'ils l'avons eu sus terre, leur enfer.
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Bélonie, le premier du lignage des Bélonie à sortir du Grand Dérangement, était déjà un vieillard épluché quand la charrette se mit en branle. Et il déchiffra pour les jeunesses qui montaient à bord la légende de la charrette de la Mort. Il l’avait vue de près tant et tant de fois, entendue, Bélonie, entendue, car personne n’avait jamais vu ce sombre fourgon, sans portières ni fanaux, tiré par six chevaux flambant noirs, une charrette qui parcourait le monde depuis le commencement des temps.
– Si parsonne l’a onques vue, comment c’est qu’on sait qu’elle est noire, votre charrette ? que planta Pélagie en plein dans le front du vieux radoteux.
– Hi !
…pour toute réponse de Bélonie. Car en bon conteur de sa profession, il se réservait pour ses contes, Bélonie, et ne gaspillait jamais sa salive dans des obstinations perdues. Verrait qui verrait. Aucun vivant n’a encore vu la Mort et tout le monde la connaît. Tout le monde connaît le Diable encorné, l’Archange Saint-Michel accoté sur sa lance, et la charrette fantôme, noire, sans portières, tirée par trois paires de chevaux, voilà. Et qu’on n’en parle plus.
D’accord, qu’on n’en parle plus. Mais Pélagie savait qui en reparlerait le premier. Et à coups de hue! dia! elle remit les boeufs en marche.
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Après tout, si on peut lire un dessin, lire les lignes de la main, lire dans le ciel le mauvais temps qui se prépare, ou lire les pensées dans le visage du renfrogné qui n'a pas ouvert la bouche, pourquoi ne pourrait-on apprendre à lire ce qui n'est écrit qu'entre les lignes?
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