Il n'avait conservé aucun souvenir particulier de ceux qui avaient pris part aux recherches. Il avait brièvement repris conscience quand ces hommes l'avaient descendu de la lande, aussi transi qu'un glaçon. Il se rappelait ce lait tiède qu'on lui avait fait boire en chemin. Ensuite, il avait à nouveau perdu connaissance et s'était réveillé emmitouflé dans son lit, un médecin à son chevet. Il avait entendu des voix inconnues dans la maison, il savait qu'une chose horrible était arrivée, mais ne parvenait pas à se rappeler laquelle. Puis tout lui était revenu. Sa mère l'avait serré contre sa poitrine en lui disant que son père était sain et sauf, qu'il avait réussi à grand-peine à rentrer à la maison. Les sauveteurs qui continuaient de rechercher son frère étaient certains de bientôt le retrouver. Elle lui avait demandé s'il pouvait leur communiquer des éléments susceptibles de les aider. Il lui avait répondu qu'il se souvenait seulement de cette tempête blanche qui hurlait autour d'eux, cette tempête qui l'avait frappé et plaqué à terre jusqu'à ce qu'il n'est plus la force de se relever.
Le corps de la victime s'était pour ainsi dire vidé de son sang, lequel avait séché sur le sol de l'appartement. Ce détail indiquait que son cœur avait continué de battre et qu'elle avait continué de vivre pendant un certain temps après l'agression.
Elinborg n'avait pu envisager de cuire à la poêle du muscle de bœuf après avoir vu ça, même s'il lui avait fallu essuyer les reproches de son fils aîné.
Les premières phrases : On parvenait à deviner son âge, mais il était plus difficile de se prononcer avec précision sur l'endroit du monde dont il était originaire. Ils lui donnaient environ dix ans. Vêtu d'une doudoune déboutonnée grise à capuche et d'un pantalon couleur camouflage, une sorte de treillis militaire, l'enfant avait encore son cartable sur le dos. Il avait perdu l'une de ses bottes. Les policiers remarquèrent à l'extrémité de sa chaussette un trou duquel dépassait un orteil. Le petit garçon ne portait ni moufles ni bonnet. Le froid avait déjà collé ses cheveux noirs au verglas. Il était allongé sur le ventre, une joue tournée vers les policiers qui regardaient ses yeux éteints fixer la surface glacée de la terre. Le sang qui avait coulé sous son corps avait déjà commencé à geler.
Dans le domaine des sentiments, le temps n'existe pas.
[...] ... Il enfila un jeans noir, une chemise blanche et une veste confortable, mit ses chaussures les plus élégantes, achetée trois ans plus tôt, et réfléchit aux lieux de distraction que l'une de ces femmes avait évoqué.
Il se prépara deux cocktails assez forts qu'il but devant la télévision en attendant le moment adéquat pour descendre en ville. Il ne voulait pas sortir trop tôt. S'il s'attardait dans les bars encore presque vides, quelqu'un remarquerait sa présence. Il préférait ne pas courir ce risque. Le plus important, c'était de se fondre dans la foule, il ne fallait pas que quelqu'un s'interroge ou s'étonne, il devait n'être qu'un client anonyme. Aucun détail de son apparence ne devait le rendre mémorable ; il voulait éviter de se distinguer des autres. Si, par le plus grand des hasards, on lui posait ensuite des questions, il répondrait simplement qu'il avait passé la soirée seul chez lui, à regarder la télé. Si tout allait comme prévu, personne ne se rappellerait l'avoir croisé où que ce soit.
Le moment venu, il termina son deuxième verre puis sortit de chez lui, très légèrement éméché. Il habitait à deux pas du centre-ville. Marchant dans la nuit de l'automne, il se dirigea vers le premier bar. La ville grouillait déjà de gens venus chercher leur distraction de fin de semaine. Des files d'attente commençaient à se former devant les établissements les plus en vogue. Les videurs bombaient le torse et les gens les priaient de les laisser entrer. De la musique descendait jusque dans les rues. Les odeurs de cuisine des restaurants se mêlaient à celle de l'alcool qui coulait dans les bars. Certains étaient plus soûls que d'autres. Ceux-là lui donnaient la nausée.
Il entra dans le bar au terme d'une attente plutôt brève. ... [...]
Elle reconnaissait cette angoisse, cette mélancolie, cette mélancolie, ce manque d'allant, cet état d'apesanteur et cet épuisement mental qui la privainet de son énergie en la rendant indifférente à tout ce qui concernait pas l'univers intime qu'elle s'était forgé sur le terreauu de son souffrance.
Nous passons notre temps à attendre la fin du monde. Qu’elle se manifeste sous la forme d’une comète ou d’autre chose. Nous avons tous notre fin du monde personnelle. Certains vont même jusqu’à l’attirer. Certain la désirent. D’autre tentent d’y échapper…