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Critiques de Aude Lancelin (37)
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La fièvre

Livre éminemment politique puisque sous couvert de raconter les trajectoires de deux protagonistes de la seule révolte populaire de ces dernières décennies, c’est bien son point de vue de journaliste, certes engagée, qu’elle met en scène dans ce roman.

Soyons francs, elle prend clairement fait et cause pour les «sans dents», les «terroristes», les «hordes de sauvage » qui ont brièvement mais intensément posé la question de la légitimité de nos maîtres (je n’utilise plus le mot « élite » depuis qu’on m’a fait comprendre que c’était trop d’honneur pour ces perroquets savants).

On navigue donc entre fiction et réalité. Les noms sont maquillés, parfois suffisamment, parfois pas, on cherche donc systématiquement à reconnaître les victimes de ses traits souvent assassins.

Si cupidon décoche des flèches d’amour, là c’est sa version féminine Nodupic, la déesse blonde vacharde !

Du coup c’est aussi ce qui fait la limite de l’exercice. Le ton est uniforme, peu distancié et c’est clairement Mme Lancelin qui parle de son perchoir médiatique habituel (journal, éditorial), qui exprime ses opinions, qui juge au passage d’autres figures de cette contestation.

Figures engagées et donc pourtant aussi légitimes qu’elle, assez méchamment descendues par madame donneuse de leçon de probité pendant la révolte : je pense à Etienne Chouard ou bien à Juan Branco. Peut-être à d’autres que je n’ai pas reconnu franchement : François Boulo ?

Si un Babéliote peut me dire qui est le personnage central de Laurent Bourdin, je lui en serai reconnaissant !

Bref, une impression bizarre se dégage à la lecture de ce livre. Je me dis qu’avec des porte-voix de ce style, les insurgés ne sont pas forcément bien soutenus.

Mais justement, peut-être que les insurgés ne doivent compter que sur eux-mêmes ?

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La fièvre

On se souvient qu il y a déjà quatre ans, à la rentrée 2016, Aude Lancelin, journaliste bien connue, notamment des lecteurs de Nouvel Obs, avait fait beaucoup parler d'elle avec le Monde Libre", un ouvrage lauréat du Prix Renaudot Essai, alors qu'il ne figurait même pas sur la première liste.



Dans cet essai d'une force indéniable, Aude Lancelin décrivait les dérives d'une presse totalement asservie aux annonceurs qu'aux financiers qui possèdent les principaux titres, ainsi qu'à certains pseudos intellectuels .



Après un autre essai dans le même genre, "La pensée en Otage », Aude Lancelin tente sa première incursion dans la fiction (c'est également première incursion pour sa fidèle maison d'édition LLL) avec "la Fièvre" dont l'ambition première est d'être le tout premier roman des gilets jaunes.



La journaliste, qui a suivi de très près le mouvement des gilets jaunes, notamment avec sa nouveau média en ligne, QG, raconte, sous le prisme de la fiction, ces six mois de soulèvement populaire comme la France n'en avait pas connu depuis mai 68, ces 6 mois qui auraient pu faire basculer un pouvoir à l'édifice bien précaire.



Cette période historique de la vie de la nation française, qui n'est pas sans rappeller les heures de la commune de Paris du 19ème siècle, est racontée par la romancière à partir d'une tragique histoire vraie, à savoir le suicide d'un gilet jaune creusois qui avait été condamné pour avoir jeté un pavé lors des toutes premières manifestations sur les Champs Elysées.



A travers l'histoire de ce jeune homme, Yoann, protagoniste principal d'un roman choral où divers protagonistes racontent leur point de vue, La Fièvre raconte ces mois de folie qui auront vu le pouvoir vaciller face à un soulèvement historique que personne n’attendait. Ce texte, aussi enflammé et intense que son titre ne l'indique, est l'occasion pour l'autrice de prendre la température (sic) d'une France aux abois, dans lequel la repression policière est particulièrement prégnante, les médias totalement soumis au bon vouloir olligarchiques des patrons du CAC 40 qui les controlent, les intellectuels de plus en plus dépassés et le peuple de plus en plus démuni et en rebellion totale.



Prenant la peine de donner la parole à tous les protagonistes de cet évenement historique; des membres des gilets jaunes bien évidemment, en passant par les journalistes qui ont couvert l'évenement, du préfet de police qui a cherché en endiguer le mouvement par tous les moyens ou les grands penseurs totalement dépassés par ce mouvement qu'ils n'ont pas vu venir, Aude Lancelin livre un roman engagé, militant, fortement et forcément partial, mais en même temps jamais manichéen.



La primo romancière, avec qui on a eu l'occasion de longuement échanger à la mi juillet, nous a confié avoir souhaité écrire une fresque sociale, sorte de portrait d’une époque de décomposition morale et intellectuelle, qui aura laissé s’installer un véritable apartheid entre les classes sociales.



Aude Lancelin nous a également expliqué à cette occasion qu'à l'origine, elle avait souhaité écrire La Fièvre à l'intention des personnes de son entourage qui n'ont pas forcément bien saisi la portée du mouvement et ont préféré croire les raccourcis que l'opinion publique avait tendance à relayer.



Mais "la Fièvre" est également l'occasion pour son autrice de rendre un vibrant hommage à des invisibles de la société qui ont eu pour la première fois depuis longtemps la possibilité de faire entendre leur voix, aussi inaudible et caricaturée soit elle.

suite et fin de l'article sur le site
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Le monde libre

Il est assez ironique de constater que, quelques jours seulement après m'être régalé à lire la biographie romancée de Claude Perdriel , le ofondateur du Nouvel Observateur, j'ai enchainé avec une lecture qui a des gros points communs avec cet ouvrage mais qui en est également un peu son miroir inversé.



Cet essai, qui fait beaucoup parler de lui- plus d'ailleurs que "Sans Oublier d'être heureux"- en cette rentrée 2016, c'est "le Monde Libre" d'Aude Asselin, qui vient de recevoir le Prix Renaudot Essai- alors qu'il ne figurait même pas sur la première liste- et qui raconte également les coulisses du Nouvel Observateur de l'intérieur .

Naturellement, Claude Perdriel- renommé ici Claude Rossignel, car l'auteur prend soin de donner à chaque fois un nom différent à ses protagonistes mais suffisamment proche pour qu'on le reconnaisse- en est un aussi des protagonistes principaux



Sauf que l'être courageux, fort de ses convictions et de ses prises de risque, personnalité proprement fascinante et passionnante chez Marie Dominique Leliève, apparait chez Ancelin comme un industriel plutot lache, qui n'écoute que ce que lui dicte les marchés financiers et ne prend jamais part aux débats d'idées et à la ligne éditoriale de son journal.



Mais Perdriel n'est pas le seul homme de presse à prendre cher dans le récit d'Aude Lancelin, son acolyte Jean Daniel - renommé quant à lui Jean Noël- n'est pas mieux loti, en éditorialiste qui parait complètement désabusé et impuissant face à la dérive de cette presse écrite qui ne cherche même plus à trouver de nouvelles idéees et qui semble totalement abandonner le débat d'idées.



Afficher l'image d'origine



La presse écrite que décrit Aude Lancelin, ex numéro 2 du journal, licenciée sans ménagement l'an passé, parait tout autant asservie aux annonceurs qu'aux financiers qui possèdent les principaux titres, ainsi qu'à certains pseudos intellectuels (l'image de BHL est particulièreement malmenée) et last but not least à encore hommes politiques ( particulièrement haut placés) qui n'hésitent pas à s’immiscer eux aussi dans les colonnes de ce qui ne semble plus vraiment mériter le nom de quatrième pouvoir qu'on lui a souvent prété .



On est en effet ici très loin de la presse qu'on aime, la presse libre et qui s'affranchit de toutes tutelles, celle que nous présente les films holywoodiens des Hommes du président au récent Spotlight.



Chez Lancelin, la presse parait au contraire constamment musélée, cadenasée, et pareillement complaisante envers le capital et les puissants.



Si le livre d’Aude Lancelin ne dépasse pas toujours le règlement de comptes plein d'amertume, ce qui en fait parfois sa limite, la morale de ce tableau lucide et saisissant d'un monde à la dérive est sans appel : le journalisme d’idées est une menace pour le pouvoir politique en général et l’ascension professionnelle et sociale de beaucoup et doit comme toute être menace réduit au silence...



Dans ce portait au scalpel et sans appel, Lancelin accable encore plus que les autres le nouveau directeur de la rédaction, qui visiblement n'a aucune visée profonde et semble être animé exclusivement par une obsession managériale, et on sent bien que le portrait est sans doute un poil à chargevu que c'est cet homme qui est à l'origine directe de son éviction.



"Les attentats islamistes n'étaient toutefois pas les seuls évènements à redonner à Mathieu Ludeneau quelque gout à la vie du journal. Les catastrophes aériennes produisaient chez lui un effet similaire quuoique de moindre durée. "



Toutefois, ce monde libre reste une lecture essentielle car, au delà du pamphlet et des attaques personnelles on sait gré à Aude Lancelin de parvenir à sonder avec une vraie justesse les errements d'un monde des médias et de la pensée en total déclin.



On aime la façon dont Aude Lancelin décrit minutieusement rouages et coulisses d’un monde qui n'essaie même plus de faire face aux dérives capitalisme et on ferme la dernière page de ce monde libre assez inquiet et déprimé sur l'état de notre monde tant les médias en sont un fidèle miroir..



Et en même temps, on se dit aussi qu'on est finalement pas si malheureux d'être un simple blogueur sans avoir de compte à rendre à personne..
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Le monde libre

Un livre mal ficelé, mais les brûlots doivent-ils s'embarrasser d'une construction ? Trop long pour que le style percutant, apprécié dans un format journalistique, ne s'épuise pas, ou n'épuise pas le lecteur. Plus grave, l'auteur hésite entre le sérieux objectif de l'enquête (elle nous ferait presque croire qu'elle fut en immersion durant une décennie) et le pamphlet cinglant et humoristique à la fois, à la manière des bons mots meurtriers qui flinguent une carrière. Le problème est, qu'à tirer, de loin, sur certaines ambulances, Aude Lancelin ne nous fournit pas de quoi espérer beaucoup mieux à leur place. Et que si son tir est souvent ajusté, il n'en reste pas moins tardif. Ayant à son tour reçu un prix de ceux que sûrement elle épargna, elle prend, peuchère, place dans la file des futures cibles d'autres justiciers.
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La fièvre

Plaidoyer? Réquisitoire ? Avant tout un témoignage.

Puisqu'il est d'usage de déclarer que ce sont les gagnants qui écrivent l'histoire, alors il faut pour remettre la justice en bon équilibre écrire des romans et les donner à lire.

Un mouvement, qui était en réalité un soulèvement. Celui des Gilets Jaunes.

Entre Paris et Guéret, Aude Lancelin, auteure et journaliste, nous montre toute l'étendue de la complexité des évènements qui se sont déroulés lors de ces révoltes. Si certains parlent d'échec, d'autres y voient la naissance d'une prise de conscience d'une grande majorité des français.e.s , face à un système autoritaire, inégalitaire, répressif et violent.

L'analyse d'Aude Lancelin est , je le pense, juste, effroyablement juste.

Quels furent les rôles de chacun.es durant ces mois ? Monde politique ( partie et syndicats), intellectuel, journalistique, et celui de la nation toute entière.



Astrid Shriqui Garain





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La fièvre

A travers deux personnages, Yoann Defresnes, un électricien au chômage de 35 ans, que sa compagne a quitté et Eliel Laurent, journaliste, Aude Lancelin (elle-même journaliste) retrace le mouvement des Gilets jaunes qui a "secoué" la France à partir d'Octobre 2018.  S'appuyant sur des faits réels, que nous avons tous vécus de près ou de loin, elle retrace à travers deux hommes, deux destins pour deux visions d'un mouvement. Du côté des "révoltés", Yoann, qui sera interpellé et condamné à une peine avec sursis pour avoir lancé un pavé (inspiré d'un fait réel), qui vit dans la Creuse, un des départements les plus pauvres, les plus éloignés en temps normal de l'agitation et Eliel, qui a pour mentor Laurent Bourdin, célèbre journaliste à Libération et figure emblématique des médias, qui se lance dans une recherche d'informations pour rédiger un mémoire sur les événements.



Rien n'aurait dû les faire se rapprocher, il a fallu le ras-le-bol d'existences partout en France pour qu'ils se rejoignent, l'un parmi les autres qui ont eu le sentiment, pendant quelques temps d'être vus, entendus et qui y ont cru, l'autre non pas dans ceux qui leur faisaient face mais ceux qui en faisaient le compte-rendu en découvrant également les manipulations et revirements.



La confrontation des deux univers est particulièrement édifiant avec deux tons et deux ambiances différentes : Yoann emporté par un ras-le-bol général dans sa vie mais non préparé à une mise sous le feu des projecteurs qui pourtant y prendra goût sans comprendre que tout à une fin et Eliel qui pense tenir un sujet qui le fera sortir de l'anonymat mais dont la naïveté face aux briscards de l'information et du pouvoir va le conduire à revoir son avenir. 



Ce document-roman permet d'analyser les deux facettes : celle de l'intérieur pour ceux qui s'y sont retrouvés sans trop savoir où cela allait les mener au départ et celle de l'extérieur à travers l'œil d'un témoin grâce à Eliel qui rencontrera préfet et autres détenteurs du pouvoir et fera un constat amer à la fois d'un système mais aussi du milieu où il évolue.



Je ne suis pas versée dans ce genre de littérature ni cette zone de lecture. J'ai vécu comme tout à chacun cette période houleuse, avec des sentiments partagés et j'ai eu parfois un peu de mal à suivre les chemins de chacun et plus particulièrement tout ce qui touchait aux arcanes du pouvoir mais non pas du fait de l'écriture mais parce que c'est un secteur pour lequel je ne me sens pas à mon aise, même si je m'intéresse à l'actualité. J'ai malgré tout aimé cette confrontation des deux mondes, si loin l'un de l'autre, l'auteure restituant tout ce qui les sépare que ce soit dans leurs attentes, leurs espoirs et leurs colères.



Stratégies, espoirs, désillusions, c'est à la fois un roman mais aussi un document qui pourra intéresser ceux (ou celles) qui veulent en savoir un peu plus que ce qui était montré dans les médias et même si je me suis attachée au personnage de Yoann et à son tragique destin et à la quête d'Eliel pour restituer une vision juste des événements, je me suis parfois perdue dans les attitudes et langages surtout du côté d'Eliel car je n'en comprenais pas toujours le sens, n'étant pas au fait des rouages des mécanismes politiques et médiatiques.
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Le monde libre

La journaliste licenciée règle ses compte avec son ancien journal, "L'obs" baptisé pour l'occasion "L'obsolète". On peut cependant aisément deviner de qui il s'agit, d'autant plus que peu de noms ont été changés.

Malgré cela, j'ai trouvé son propos réaliste et l'autrice m'a appris que la situation est pire que ce que je craignais dans les médias officiels.

J'ajoute qu'elle a su rebondir en animant des chroniques pertinentes sur le site "Là-bas si j'y suis", à écouter pour celles et ceux que cela intéresse.
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Le monde libre

Il y a plusieurs manière d'aborder la lecture de cet essai - récemment couronné par le Renaudot - selon que l'on soit attiré par son angle "pamphlet parisiano-microcosmique", par son angle "plongée au coeur des réalités de la Presse du XXI e siècle" ou par son angle "analyse politique d'un système et d'une gauche à la dérive".



Mais quel que soit l'angle de lecture, force est d'abord de constater que c'est bien écrit, très bien écrit. Et ce n'est pas une surprise de la part d'une des grandes plumes de la presse des idées et de la culture de ces vingt dernières années, dont la carrière l'amena à co-diriger L'Obs, qui n'était déjà plus Le Nouvel Observateur qu'elle avait connu - aimé ? - à ses débuts de jeune journaliste.



Et c'est là qu'apparaît l'angle "parisiano-microcosmique" puisque Aude Lancelin nous décrit dans Le monde libre ses deux années de désillusions passées à la tête de l'hebdomadaire jusqu'à son éviction récente et brutale qui y mirent fin. Sous couvert de pseudos, tant pour le titre que pour certains de ses dirigeants, ou d'allusions tellement précises que le nom des personnes évoquées ne fait plus aucun doute pour le lecteur un minimum au fait de l'actualité, elle nous livre la chronique d'un flingage annoncé, réglant ses comptes avec férocité à tout une caste qui l'a rejeté. C'est un peu le Koh Lanta du parisianisme médiatique : "La tribu des journalistes parisiens bien pensants à décider de vous éliminer, et sa décision est irrévocable ! ".



Sous cet angle, bien que la plume soit incisive et que les accroches flattent le lecteur avide de révélations de salons, l'ouvrage est vite lassant. Le couperet fut certes rude et a priori injuste, le complot fomenté avec soin, ce qui justifie cette réparation de haut vol par la plume qui laisse, parfois, des marques plus profondes que l'épée des duels d'antan. Mais de là à émouvoir le lecteur sur cette injustice, il y a un pas. Un fossé. Un gouffre !



Ainsi, si Aude Lancelin s'en était tenue là en simple victime expiatoire d'un système qui tourne désormais en rond, son livre n'aurait eu aucun intérêt. Mais elle a au contraire eu le mérite d'explorer deux autres angles qui font tout le sel de son essai.



Celui de l'état de la Presse du XXIe siècle est le plus intéressant et décrit parfaitement la spirale infernalement vicieuse dans laquelle la plupart des titres sont engagés : la publicité florissante a longtemps masqué dans les ressources les incessantes baisse de lectorat des journaux. À cause d'Internet, de la TV etc... Oui, bien sûr, mais pas seulement. Aude Lancelin nous renvoie à l'essence même du journalisme d'opinion, celui des idées, du débat, du pluralisme, du temps de la réflexion et de l'expression des textes. Mais ces mêmes baisses de ressources ont conduit les dirigeants des titres à adapter constamment les charges, "downsizant" leurs effectifs et leurs rédactions de plan en plan ; ne permettant plus - métaphore politique fort à propos - de relance par l'offre ; et ouvrant la voie à de nouveaux dirigeants concentrateurs plus soucieux de l'image acquise par leur nouveau statut que de la pérennité de leur lectorat. Des « tigres de papier » comme disait le grand Jacques dans L’Aventure…



Bref, Aude Lancelin nous décrit dans Le monde libre l'apogée de la pensée unique, en y déployant son troisième angle, engagé et politique, faisant le lien entre une presse d'opinion de gauche qui s'éloigne de ses valeurs fondatrices au fur et à mesure que le principal parti de son camp en fait de même.



Tout cela, elle n'a pas attendu son livre pour le dénoncer : elle l'a fait peu à peu, de plus en plus ouvertement pendant deux années. Et a fini par le payer. "Le premier qui dit, la vérité. Il doit être exécuté !" disait Béart...



Au final, un livre profond et passionnant, qui manque juste d'un peu de recul (c'est tout chaud) et donc laisse un peu sur sa faim en matière de solutions, d'alternative. OK pour le constat. So what ?

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La fièvre

Bien heureux d'apprendre que Aude Lancelin, brillante et fine plume littéraire et philosophique, après ses errements douloureux dans les arcanes des médias politiques pourris, publie son premier roman, La Fièvre sur les Gilets Jaunes, avec au coeur de son action, le drame d'un jeune homme que la société dite civilisée n'a toujours pas vaincu : l'écart démesuré entre l'objet du litige et la sanction du pouvoir politique qui finira ici dans la noirceur de la nuit, insoutenable !..





De retour de Bretagne, il y a deux ans, j'ai été retenu par des barrages de Gilets jaunes, l'un à un rond point à Rouen, l'autre dans le Bray. non seulement je n'y ai pris ombrage, mais me suis mêlé à eux comme un frère. J'étais déjà conquis par leur lutte. Tous ces gens des ronds points, les Gilets jaunes historiques, solidaires, courageux, prenaient sur leur temps de repos pour monter à Paris et battre le pavé pacifiquement , pour crier leur colère et ont été traités comme des chiens par Macron Castaner et ses sbires. La police chargeait en permanence avec des armes plutôt faites pour endiguer une mutinerie ou un coup d'état, il y eut beaucoup de gueules cassées, d'éborgnés dans les rangs des Gilets jaunes. Cela a duré plus d'un an et jamais Macron ne les a reçus, il affichait une telle morgue à l'égard de son peuple !..



J'ai mieux connu les Gilets jaunes au rond point de Senlis, haut lieu de lutte, la télévision venait les voir dans leur campement de fortune, on échangeait librement, il y avait des assemblées générales.. Tous ceux qui les croisaient en voiture ou en camion ralentissaient l'allure et les saluaient avec déférence et sympathie ..On leur donnait plein de victuailles qui alimentaient l'intendance. La générosité ne manquait pas ! Jamais un rond point ne sentit mieux l'humanité !



Quand j'entends Barbier de BFMTV parler des Gilets jaunes avec mépris de classe, les prenant pour des imbéciles, des bons à rien et des brutes épaisses tels l'ogre capable de manger du bourgeois, sans les connaître, de de son confort douillet, portant l'écharpe rouge en plein studio pour se donner l'air d'exister : c'est tellement saugrenu ! j'ai envie de lui apporter un miroir au Barbier pour qu'il regarde sa face de crabe. A force de cracher sur son prochain, les gens de condition modeste qui ont du mal à joindre les deux bouts, on n'ira pas pleurer sur lui en cas de malheur. Cette engeance représentative de l'anti-peuple ne mérite que mépris !
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La pensée en otage

Dans cet opuscule, court mais fondamental, Claude Lancelin, ancienne directrice de l'Obs, analyse la dérive du système médiatique et journalistique français vers "un système d'information gardienné dans sa quasi-totalité par les entreprises du CAC 40" où la presse et les médias sont devenus un outil d'influence politique au service d'une poignée de milliardaires - des Télécoms ou d'autres secteurs clés de l'économie - qui en sont les propriétaires (« actionnaires principaux »).

Elle s'attache à démontrer sept idées fausses sur les médias : d'abord que les actionnaires "n'interviennent" pas dans leur ligne éditoriale, ensuite qu'on ne peut pas se passer de ces grands capitaux privés, qu'on ne peut pas critiquer les médias sans attaquer des personnes, les journalistes, qu'il y a une diversité d'opinions exprimées dans le paysage médiatique français, qu'il existe une neutralité journalistique, que les journaux sont, de façon inconditionnelle, une force démocratique , enfin que le pouvoir des médias est surestimé.

Pour chaque point, elle fait brillamment, preuves à l'appui, la démonstration du contraire, car en tant que journaliste expérimentée et passée par divers titres, elle connait fort bien le sérail et ses règles, ses figures et ses actionnaires. Mais elle ne s’en tient pas là et dénonce aussi de façon très critique l’illusion d’une information plus large donnée à tort par les réseaux sociaux, multinationales qui obéissent à une logique purement commerciale, dont les algorithmes enferment leurs usagers dans des « bulles de filtrage », sans compter l’inondation des « fake news ».

Servie par une écriture brillante et percutante délivrant une analyse remarquablement juste, voilà une mise en garde que chacun - chacune - devrait lire pour savoir comment et par qui il est informé et comment on fabrique son opinion.

Engagée, Claude Lancelin, certes ; critique, à coup sûr ; lucide, surtout, dans un domaine où les faux semblants sont de règle et dont l'influence sur la vie démocratique est sous-estimée.

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Le monde libre



Pour ceux qui liraient exclusivement "L'obs" ou d'autres périodiques du groupe du Monde, un petit rappel. Aude Lancelin, après quelques années au Nouvel Observateur puis au journal Marianne revient à son premier news magazine (devenu depuis L'obs) en tant que rédactrice en chef adjointe plutôt chargé de la culture et des idées. Beau poste pour cette journaliste férue de philosophie qui contrairement à beaucoup de confrères ou consoeurs ou même de philosophes ayant pignon sur rue connaît et a lu Nietzche, Lévinas, Bourdieu, Badiou, .... Pour faire bref, beaucoup de culture pour cette journaliste plus gauchiste que la tendance officielle du journal, servant sans doute dans son placard doré de caution morale à un journal relais d'une gauche molle en déliquescence, qui a toujours accompagné le virage néo libéral du Parti Socialiste. Mais L'obs, dorénavant géré par un triumvirat appartenant au CAC 40 ( Pigasse, Bergé et surtout Niel de Free) et noyauté par une bande de vieux amis indétrônables ( Jean Daniel, BHL, les époux Badinter, ...) s'avère être un terrain miné. Vous rajoutez l'actuel président de la République qui compte bien continuer à briller un tout petit peu dans ce magazine qu'il estime, ou pense, totalement acquis à sa cause et à sa politique et vous obtenez une situation explosive qui aboutira au licenciement de celle qui osait défier un tout petit peu la ligne éditoriale.

En colère mais libérée, Aude Lancelin dit (presque) tout dans ce livre coup de poing qui épargne peu de monde. Avec un style certain, brillant, masquant quelques noms, "le monde libre" ne se borne pas à raconter un licenciement mais dresse un état du journalisme et de la presse au début du 21ème siècle ainsi qu'un historique du virage néo libéral du PS, ou comment des intellectuels et une certaine presse ont accompagné ce mouvement, brassant concepts creux à tous vents et occultant volontairement d'autres pensées de gauche, souvent moquées au pire complètement censurées. La charge est dure nette, précise. Beaucoup de noms sont cités, pointés, d'une plume acérée. Certains sont exécutés en une phrase ( Les Badinter), d'autres plus longuement ( BHL, mais faut dire qu'il y a matière !), personne de cette nasse médiatico/philosophico/politique n'échappe à son tir.

Alors me direz-vous, encore un de ces ouvrages haineux, écrit sur le coup de la colère qui risque encore d'alimenter cette impression de "tous pourris" dont se servent certains partis extrêmes. Pour ma part, je dirai le contraire. La connivence qui existe dans cette frange de gens pensant et écrivant est connue, supputée. Le dire franchement, expliquer ce qu'est cette réalité de l'intérieur me semble être une démarche salutaire. En pointant du doigt ces pratiques guère ragoutantes, elle met en évidence l'extrême fragilité de la presse actuelle donnée pieds et poings liés aux seigneurs de la finances et comment celle dite de gauche a été le vecteur démoniaque du gommage des vraies idées socialistes de la sphère publique.

La fin sur le blog
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Le monde libre

Une fois n’est pas coutume, c’est dans un essai que je me suis plongée ces derniers jours. "Le Monde libre", couronné depuis par le Prix Renaudot, catégorie "essais" est, ce n’est un secret pour personne, un pamphlet à l’encontre de l’Obs, magazine d’actualité, ici appelé l’Obsolète. L’auteur en fut la directrice adjointe, licenciée depuis.

Nous sommes prévenus par un avertissement préalable "Dans tous les évènements qui seront relatés ici, il n’est pas une phrase, pas un fait, qui ait en quoi que ce soit été inventé ou même déformé." Oui, mais… Jean Daniel, le co-fondateur du journal, le "Jean Joël" de l’ouvrage, monte au créneau dans un article du magazine Le Point et avance que "Dans ce livre prétentieux, complotiste, et logorrhéique, il y a une erreur par page". Loin de moi l’idée de distribuer les bons et mauvais points. Je ne possède pas les compétences et surtout les connaissances suffisantes du milieu pour me poser en justicière.

J’ai senti la journaliste animée par une haute idée de la presse et de ses devoirs, visiblement chagrinée, et le mot est faible, par la collusion des grands journaux avec la politique, sans parler des actionnaires. Elle se déchaîne, sans donner de noms, contre le triumvirat qui dirige l’hebdomadaire, se plaint de la déliquescence de son métier et pleure l’agonie du socialisme.

Encore une fois, il est difficile pour moi d’émettre un avis sur le fond du problème même si ma propre opinion va intuitivement dans le même sens. S’agissant de la forme, j’ai trouvé l’écriture digne d’une agrégée de philosophie – elle ne manque d’ailleurs pas au détour d’une phrase de nous informer de son prestigieux diplôme et des lectures hautement intellectuelles qui sont les siennes – même si, pour ma part, une langue moins ampoulée m’aurait davantage satisfaite. Les phrases sont souvent longues et tarabiscotées, enlevant par là même du rythme au texte. Par ailleurs, si son récit est de nature à enthousiasmer le monde médiatique qui va sans doute trouver là un brillant défenseur de sa cause, je ne le trouve pas suffisamment accessible à tout un chacun et c’est dommage. Je lis beaucoup la presse d’information et notamment politique et ce sujet m’intéressait. Un texte simplement écrit, je le répète aurait tout aussi bien porté les valeurs de liberté chères aux journalistes qu’elle défend bec et ongles, c’est tout à son honneur, et que je vénère. Alors, "prétentieux", peut-être, "complotiste", les éléments me manquent pour en juger, " logorrhéique", pourquoi pas ? Reste le grand intérêt de sa réflexion.

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La fièvre

La journaliste Aude Lancelin se fait romancière pour rendre hommage à un gilet jaune arrêté devant elle lors d'une manifestation et condamné injustement.

Le personnage principal Eliel , journaliste à Libération, se rend auprès des gilets jaunes en Creuse et fait la connaissance de Yoan avec qui il sympathise. Il saisit alors la coupure entre deux mondes . D'un côté la bourgeoisie parisienne complètement coupée de la réalité, de l'autre des travailleurs, chômeurs, retraités dont le point commun est la précarité. Son roman est un véritable brûlot contre les médias, les intellectuels dits de gauche et le pouvoir Elle montre aussi les travers du mouvement qui conduisent à sa perte.

Un éclairage indispensable, pessimiste hélas, sur notre société.

PS : Je regrette vivement les nombreuses coquilles laissées par l'éditeur.
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Le monde libre

Le livre est amusant, donnant un portrait probablement assez juste de ce monde déliquescent de la presse de la "gauche de droite" (L'Obs, le Monde, Marianne, etc) passée en bloc sous le contrôle de quelques flibustiers sans scrupule de la finance et des multimédias. Le renoncement à toute liberté d'esprit, à toute autonomie de pensée, à toute conscience critique y est solidement établi. La servilité face aux pouvoirs en place est bien devenue la norme, ainsi que la chasse à toute tentative de divergence. Toutefois, le processus ayant amené à cet état des choses remonte déjà à loin et on a le sentiment que ce livre arrive un peu tard. Aude Lancelin, s'étant retrouvée récemment expulsée de cette basse fosse, plaide la naïveté pour justifier sa longue participation. Du fait même de l'effarant panier de crabes qu'elle décrit ici, vue de loin cette naïveté persistante ressemble plutôt à une assez plate compromission. Un aussi long séjour en un tel milieu ne peut vous laisser indemne. On trouvera malgré tout plaisir à lire les portraits croquignolesques de quelques-uns de nos plus célèbres bouffons médiatiques, décrits en leurs œuvres. En un espace aussi verrouillé que celui qui réunit désormais étroitement business, médias et politiciens, seuls les règlements de compte circonstanciels permettent encore un aperçu quelque peu véridique de ce petit monde putride.
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La fièvre

Une plongée dans l'univers de la France d'en bas, "des "premiers de cordées", ceux dont les espoirs s'amenuisent au fil des réformes. La France des laissés-pour-compte qui s'unissent dans un mouvement fulgurant de solidarité en décembre 2018. Yoann, trentenaire accablé par le destin puise un dernier élan de survie dans la lutte au côté des Gilets Jaunes. Symbole d'une lutte acharnée, stigmatisée et incomprise, il condense les espoirs, les interrogations et la mise au ban de toute cette partie de la population des oubliés. Un roman d'une veine poignante et d'une actualité brûlante !
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Le monde libre

Forcément, ce livre fait un certain buzz et on en attend beaucoup du coup !

Alors, oui, Aude Lancelin règle ses comptes et dit, à demi-mots parfois, à voix haute souvent, ce qu'elle pense de l'évolution de la presse aujourd'hui en France, pouvoir et contre-pouvoirs, argent et actionnariat, indépendance et soumission.



Même si parfois on a l'impression que ce livre est écrit pour les initiés et tous ceux qui lisent entre les lignes, et au travers de ces noms à peine changés, à peine moqués...

Et pourtant, j'ai eu beaucoup de mal à accrocher à cette écriture que je trouve un peu "hautaine", ampoulée et supérieure, j’aurais aimé un peu plus de simplicité, généralement synonyme pour moi de qualité et de compétence. Mais là, c'est juste une impression très personnelle...

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La fièvre

Premier roman d'Aude Lancelin mais premier roman que je n'ai pas véritablement apprécié. Je l'ai trouvé long, répétitif, lourd et pesant. Le ton est hautain par moment, méprisant par d'autres. Comment vous l'expliquer, je ne sais. J'ai entendu une voix pleine d'assurance, de lucidité et d'intelligence mais elle se perd, à mon sens, dans un excès qui mène à l'agressivité et l'arrogance. C'est fort dommage car Aude Lancelin dessine un tableau qui me semble assez juste. Sa critique, notamment des intellectuels dit « de gauche », est pertinente - pour ne pas dire juste et son analyse de la société, des rapports de classe et du politique est, pour moi, assez vivifiante. Seulement, ces qualités se noient dans une eau trouble du quelle il ressort un brouillon arrogant aussi difficile à penser que le mouvement des Gilets jaunes. L'ensemble perd en clarté et le roman prend parfois l'allure d'un essai. Dommage.
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Le monde libre

Une plongée dans le monde du journalisme écrit dont je suis sortie un peu groggy.

Aude Lancelin, en direct du ventre de l’Obs raconte, témoigne de la lente et inexorable dégradation de la presse écrite, du copinage, des acoquinages des journalistes avec le pouvoir et l’argent.

Qu’un nouveau riche venu du minitel rose s’offre un journal, pourquoi pas.

Qu’un esthète (soi-disant) venu du monde de la haute couture s’offre un journal, pourquoi pas

Qu’un banquier s’offre un journal pourquoi pas

Mais que ces trois lascars se réunissent créent un groupe baptisé « Le monde libre » pour désincarner des journaux comme Le Monde, l’Obs entre autre et, surtout, le mettre à leur service, il y a de quoi rugir. Le nom de la holding prête à sourire jaune après lecture du livre.

Aude Lancelin va plus loin que l’explication de son licenciement, elle décrit le déclin de l’Obs devenu sous sa plume « l’Obsolète » -titre très parlant- et, plus généralement, de la presse écrite.

La collusion entre le politique et la presse, à travers ses journalistes, a toujours existé. A trop se fréquenter, se mêler s’épouser… Amoindrir la liberté de la presse équivaut, pour moi, à amoindrir la démocratie… C’est peut-être le but visé des grands argentiers.

Comme chez les politiques, une fois les spots éteints, les patrons de journaux sont copains comme cochons !! « Les patrons des trois plus grands hebdomadaires, « L’Obsolète », Le Point et Marianne, qui toute l’année faisaient mine de s’empailler sur les tréteaux comme des marionnettes batailleuses, passaient tous leurs Nouvel Ans à festoyer ensemble. Tantôt dans l’hôtel particulier de Saint-Germain-des-Prés qui appartenait à l’un d’entre eux, tantôt dans leurs datchas respectives de la côte normande qu’ils avaient achetées à proximité tant leur symbiose était totale et ne s’embarrassait pas d’obstacles idéologiques. » Mince (remarquez comme je suis polie !)Marianne ! Moi qui croyais en sa liberté pure et dure « La chose était d’autant plus stupéfiante à remarquer dans le cas de Marianne, fer de lance de la dénonciation de la « pensée unique » depuis la fin des années 90. ». Il est vrai que Laurent Joffrin Môquet passe gaillardement du fauteuil de Marianne à celui de l’Obs !

« L’Obsolète » est victime des « amis du journal » dont « Une sénescente poignée d’hommes politiques fermait le ban de cette infernale cohorte, au premier rang desquels un ancien ministre de la Culture, incarnation parcheminée et presque parodique de la gauche incantatoire des années 80, celle-là même que tout le monde était désormais désireux d’oublier. » qui font la pluie et le beau temps pour leur petit entre-soi. Certains intellectuels philosophes dont notre BHL national (« un pitre mégalomane dont chacun riait par-devers soi. »), Finkielkraut font partie de ces gens qui font la pluie et le beau temps à l’Obsolète.

Ce n’est pas qu’un règlement de compte mais la constation de l’échec du parti socialiste, de sa glissade à droite « La glissade à droite de tout le spectre intellectuel et politique était continue, d’une profondeur inouïe. Et ce qui ne laissait pas d’étonner, c’est que, même parmi les journalistes qui comprenaient la situation, rares étaient ceux qui s’aventuraient à en fournir le saisissant tableau ».



Aude Lancelin envoie non pas des gifles, mais des scuds que j’ai reçus en pleine figure. Avec beaucoup de talent, de calme, elle raconte ce qu’elle a vu, ce qu’elle a supporté. Les lâchetés des patrons de presse, de sa hiérarchie, des collègues, la mainmise de certains intellectuels, d’anciennes gloires du PS, les courtisans genoux à terre, la médiocratie, la fuite des plumes. Elle met à nu la misère intellectuelle du triumvirat, de ses supérieurs hiérarchiques.

Un livre cruel par ce qu’il dévoile, mais un livre nécessaire ; un constat accablant

Combien d’années faudra t-il pour réparer ce formatage, cette descente vers la nullité. J’attends d’un journaliste, d’un éditorialiste qu’il élève le débat, qu’il soit, non pas impartial, cela n’existe pas, mais intelligent et courageux. L’Obsolète n’était plus, depuis plusieurs décennies, le journal de gauche que l’on a connu, mais quand même !!

Notre président de la république actuel est bien un président normal : le fait du prince, il pratique. « Une source élyséenne celle-là, affirmait qu’il y avait plus d’un mois que mon sort avait été scellé lors d’une entrevue ».



Claude Rossignol, fondateur de l’Obsolète l’avait compris « Le danger aujourd’hui est que, n’ayant pas fait les réformes nécessaires et sans moyens financiers, la presse et ses lecteurs tombent entre les mains des pouvoirs de l’argent, du politique ou du CAC40, dont les intérêts sont liés ». Nous avons un immense pouvoir, nous lecteurs : ne plus acheter ces journaux !!

Quelle plume, quel vocabulaire ! « Dans tous les événements qui seront relatés ici, il n’est pas une phrase, pas un fait, qui ait été informé ou même déformé. » écrit Laure Ancelin dans l’avertissement en début de l’ouvrage.

Un livre salutaire à lire, une belle plume.

Une question me taraude : Pourquoi Aude Lancelin est restée si longtemps à l’Obs ? Pourquoi n’être pas partie avant puisque le hiatus augmentait entre sa conception du journalisme et l’hebdomadaire ?

Est-ce la réponse ?

« Quel était, au fond, ce désir sur lequel je ne voulais pas céder ? Seulement, je crois, celui de ne pas renoncer à prendre ma part, celle que n’importe qui peut prendre à tout moment du temps, dans la lutte éternelle contre l’écrasement de l’esprit. Lâcher l’affaire, prendre ses distances, couvrir prudemment des opérations de faux-monnayage intellectuel, comme j’en vis tant d’autres, des gens de qualité parfois, accepter de le faire au fil des années, c’eût été capituler, et capituler c’eût été mourir intérieurement. Cela ne m’était tout simplement pas possible »


Lien : http://zazymut.over-blog.com..
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La fièvre

Un roman mais, qui a une forte connotation à la fois politique et biographique, puisque le personnage principal de ce livre a réellement existé. Le cadre est celui de la crise des gilets jaunes, en France. Il se veut une dénonciation des politiques anti-sociales qui ont prévalu depuis des décennies et qui ont conduit à la précarisation de la vie de beaucoup de personnes, surtout dans les campagnes de France.

A travers un destin particulier, on sent une tentative de reconquête de destins particuliers et communautaires, d'une souveraineté existentielle, allant jusqu'à ébranler le pouvoir en place.

Aude Lancelin montre l'irruption dans le paysage social et politique de ceux que l'on avait anonymisé, réduit à l'impuissance et que l'on considérait comme inoffensif.

C'est un même temps un roman choral, donnant la parole, à des personnages très typés: un universitaire marxiste désenchanté, un jeune journaliste en proie à des illusions perdues, etc. C'est un roman qui rend compte de toutes les ruptures, mais notamment de celle des entendements populaires et bourgeois.

Nous nous laissons à notre tour, prendre par la fièvre, lancinante et parfois violente, mais la politique, elle est toujours enjeu de vie ou de mort.
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Le monde libre

Aude Lancelin a été viré de l'Obs et règle ses comptes dans "le Monde Libre" qui a obtenu le Renaudot essai (on notera au passage que certains membres du jury sont flattés par l'auteur).

Un livre de vengeance fait il un bon livre ? Non dans le cas présent, si A.Lancelin écrit bien sa plaidoirie ne convainc pas. A la lire elle était le dernier des mohicans de la vraie gauche dans la rédaction de « l'obsolète » qui est en fait un ramassis de crypto-libéraux qui se cache derrière un discours socialisant. Que n'a-t-elle démissionné ? (à moins que la soupe capitaliste ne soit pas si mauvaise) on apprend qu'elle a mis presque vingt ans à le comprendre et à le combattre. On a évidemment droit au couplet féministe (C'est parce qu'elle est une femme qu'elle a été maltraitée), faute de quoi le réquisitoire ne serait pas complet. Tous nuls, tous incultes, tous faux culs et vendus au capital sauf moi voilà la thèse. Au passage on se demande pourquoi AL a changé les noms de ceux du journal qu'elle attaque (Jean Joël pour Jean Daniel, Joffret pour Joffrin…et l'Obsolete pour L'observateur) aurait elle peur de la diffamation ? peur de perdre une juteuse indemnité de licenciement ?

A ceux qui se pâmaient devant nuit debout, qui croient en un autre monde ce livre est pour vous, ceux qui croient qu'il faut composer avec la réalité et être pragmatiques passeront leur chemin. Reste une querelle bien parisienne qui peut amuser.

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