Blandine P. Martin

Paul était l’unique chose qui me rattachait à ce monde-là.
Le reste du dîner se déroula sur le même fil rouge, Marc se lançant des fleurs à tout va, ses enfants et sa compagne l’encourageant sur cette voie. Et de mon côté, je sentais se creuser le fossé entre leur vie dorée et mes aspirations pour la mienne. J’avais l’impression d’étouffer, de manquer d’air dans cette demeure bouffée par l’orgueil et l’argent, la réussite en fanion. Aucune place n’était gardée pour l’inattendu, les petits bonheurs et la simplicité. Aucune.
L’employée de maison vint débarrasser nos assiettes et nous apporta le dessert, un sublime fraisier. Vint alors sur la table le sujet du moment : notre mariage. Je comprenais que l’événement les intéresse, ils étaient la famille de Paul. Mais au vu de nos divergences d’opinions sur bien des points, aborder l’événement avec eux n’était pas une mince affaire.
— Les préparatifs se déroulent comme vous le souhaitez, Lena ? me demanda Roya de son plus beau sourire.

Plus les minutes défilent, plus l'air devient irritant. Par réflexe, j'ouvre la fenêtre et m'apprête à quitter les lieux quand j'entends le plafond craquer. Un atroce pressentiment me gagne et par instinct, je traverse mon salon pour récupérer mon téléphone portable afin de contacter les pompiers, mais je n'ai pas le temps de l'atteindre.
Tout explose.
Littéralement.

Quand on est gosse, on s'étonne de voir parfois la pluie tomber pendant que le soleil brille encore. En grandissant, on réalise que ce genre de contradictions résument à merveille la vie d'adulte.

Cupidon n'est qu'un homme, il est parfois long à la détente !

J’oublie tout : la peur de la chute, l’avis des autres, mon besoin de tout contrôler.

Qu'on interrompe une réunion du club, ça, c'était déjà fort. Qu'une femme le fasse, pire encore. Que ma femme le fasse, OK, j'abandonnais tout espoir de m'en tirer sans problèmes cette fois.

Un véritable papa poule. Avec des armes et un fort penchant pour le danger.

« – Je t’aime, ma fille.
– Je t’aime, papa.
Noël, c’était cet instant adoré de beaucoup, détesté des autres. Trevor n’aimait pas cette période et il avait ses raisons. Mais depuis deux ans, pour moi, il avait recommencé à célébrer cette fête. Pour moi, il avait mis de côté ses pires souvenirs pour partager quelques heures de partage avec sa famille. Pour nous, il réitérerait encore et encore.
Une main dans celle de mon père, et une dans la sienne. Je contemplai ce tableau si parfait, dépeignant la vie comme je l’aimais. J’avais découvert qui j’étais le jour où je les avais tous rencontrés. Une renaissance. Celle d’une femme qui jusque-là s’ignorait, et qui avait appris à vivre en côtoyant cette famille tombée du ciel, comme envoyé par ma bonne étoile. »

- Tu le crois, ça ? demandai-je à Lazar. Même après une blessure par balle et une demi-bouteille de whisky, il ne la ferme pas...

Mes pensées bouillonnent. Un flot de questions tournoie dans ma tête.
Comment un geste si anodin peut-il véhiculer tellement de sensations?

J'observe longuement mon interlocuteur. Il est vêtu de noir et porte un blouson en cuir. Avec son teint blafard et sa chevelure sombre, il semble être le porte-parole de la Mort en personne. Ca, ou bien un fanatique de musique métal ou gothique.

“— J’ai vendu mon âme au diable…?
— Il aurait sans doute mieux fallu, souffle-t-il, agacé.
— Tu es puissant…
Le regard qu’il m’adresse témoigne de son exaspération.
— Tu devrais pouvoir intervenir…, tenté-je avec maladresse.
— Et sauver tes jolies petites fesses ? En plus de celle de ton fils et de celles de ton loup ?
Sa remarque sonne juste. Je perçois dans sa voix plus de lassitude que je ne le voudrais.
— Ne me demande pas toi aussi d’en payer le prix. Je suis déjà endettée…
— Je ne te demande rien, si ce n’est de tourner sept fois ta langue dans ta bouche à partir de maintenant, sans quoi nous risquons de repartir sans toi.
Je ne moufte pas, vaincue.
— Et si ta propre bouche ne te convient pas, tu peux choisir la mienne. L’idée que tu te montres intrusive en retour n’est pas pour me déplaire.”

Il ne doutait pas un instant de son charme. Et il n'avait pas tort. Machiavéliquement vicieux, mais insupportablement sexy.

Il faut parfois réaliser à quel point le fait de perdre quelqu’un pourrait nous anéantir pour prendre conscience de l’importance qu’il tient dans notre existence.

J'ai moi aussi vécu des interventions très difficiles et je sais à quel point la culpabilité peut nous submerger. Mais nous avons choisi ce métier en sachant que parfois, nous serions impuissants. Il faut que les personnes que tu as sauvées restent ton moteur.

Il venait de réveiller une part de moi que je ne soupçonnai pas, une part sombre dont j’avais tout à découvrir. Mais elle était bien là, enfouie, ignorée jusqu’alors. Sa noirceur coulait dans mon sang, dans mes veines. Je le sentais dans le moindre battement de mon cœur, dans chaque pulsation. J’étais une des leurs. Que je le veuille ou non, en étant l’enfant de Jerry Welsh, ma place dans ce monde était réservée. Je n’avais ni le casier judiciaire des Wild Crows, ni leur soif de rébellion, mais quoi qu’il en soit, ils me tendaient une main que j’étais sur le point de saisir. Le vent sauvage qui soufflait sur Monty Valley avait quelque chose d’enivrant, et une part de moi ne résisterait pas à son appel, j’en étais plus convaincue que jamais. Mon besoin évident de renouveau, de changement, ne faisait que l’ancrer un peu plus fort dans mon être. Ma place était ici.

Alors on reste de longues minutes comme deux rêveurs allongés sous un ciel de lit plein de paillettes. Elle me rappelle que la vie peut être jolie, qu'il suffit parfois de la voir depuis nos yeux d'enfant pour en prendre conscience. C'est en nous, ça n'est jamais parti. On l'a juste oublié quand on a fait de la place pour nos soucis d'adultes.

La vie est bien trop courte pour s'emmerder de fioritures.

Irish Renegades, c’est le genre de roman qui vous prend aux tripes. Avec ce roman, Blandine P. Martin met en scène des personnages touchants par leur caractère et par leur histoire passée et présente et ce avec une plume fluide et entraînante.
Malgré le temps passé depuis leur arrivée sur le territoire américain, la famille Doherty galère, on est bien loin du rêve américain, et il en est de même pour Keziah, le meilleur ami de Farell et Malone mais aussi pour Sarah ! Alors quand le destin s’en mêle, ce quatuor improbable décide de s’allier !
Dès les premières pages, j’ai été conquise par Malone, ce papa célibataire qui galère à joindre les deux bouts pour sa petite princesse : Hailey. Ils ont une relation fusionnelle hyper touchante qui m’a prise aux tripes et m’a même arraché quelques larmes !
Quant à Sarah, cette « elfe marginale », elle m’a aussi beaucoup touchée. Intrépide, elle ne se laisse pas marcher sur les pieds mais comme les autres personnages de ce roman, elle a des failles.
Keziah et Farell sont quant à eux deux personnages très intriguant qui ne laisse apparaître que des parcelles de ceux qu’ils sont à travers ce premier tome, ce qui renforce mon impatience de découvrir la suite !

C’est un juste retour des choses que d’accorder un peu de son temps pour faire quelque chose de bien. En tout cas, c’est ma façon de voir les choses.