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Citations de Boubacar Boris Diop (74)


Les oiseaux s’enfuient en poussant des cris de frayeur. Quant aux années, elles ne vont plus en ligne droite, hier et demain se heurtent. Parfois elles frôlent des mottes de terre vertes et douces mais, saisies par le désir de soleils naissants, reviennent sur leurs pas.
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Voilà l'Afrique, songea t'il amèrement, tous ces types qui veulent vivre dans des maisons plus grandes que des écoles. Notre problême, ce n'est peut être pas notre pauvreté mais nos riches.
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Je me suis dit que je ne pourrais plus jamais voir le soleil sans penser à elle.
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En Afrique, en Europe, partout, les rares rêveurs qui ont encore envie de changer le monde ont comme honte de l’avouer, ils ont peur de passer pour des idiots.
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C’était le temps où le temps, ivre de haine, titubait à reculons. La mort précédait la vie.
Rester assis à même le sol, les yeux mi-clos et l’esprit vide, lui procurait une forte sensation de paix intérieure. Bien qu’il ne sût rien au monde des rêves, il lui semblait y être plongé tout éveillé depuis de longues heures. Tout concourait à rendre l’instant irréel : les arbres élevant sans hâte leurs troncs fins et noirs vers le ciel et les traces indécises de pas sur le sable rouge.
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Certains se sentent coupables de ne pas avoir été tués. Ils se demandent quelle faute ils ont commise pour être encore en vie. Cependant, toi, tâche de penser à ce qui peut encore naitre et non à ce qui est déjà mort.
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Des tas de gens autour de moi clament bruyamment leur amour de l’Afrique, ce qui me paraît toujours un peu suspect : on veut faire admirer ses mérites parce qu’on pense qu’il en faut beaucoup pour respecter un continent si méprisable.
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Les jours précédents, il avait aperçu de loin les collines, en se promenant le long des grandes avenues de Kigali. Elles lui avaient alors paru d’une sublime beauté. A présent, la ville lui montrait son visage caché. Rien jusque-là ne lui avait laissé deviner l’existence de ces maisons en torchis, sinistres, exiguës et aveugles. Tassées sur elles-mêmes, elles semblaient prêtes à s’effondrer à tout moment. C’était le chaos absolu. Tout semblait disloqué, zigzaguant, délabré, tordu, bricolé, minable. Jamais il n’avait eu un contact aussi direct et violent avec la misère.
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Un génocide est un génocide, ai-je répondu, eh bien, pour celui, ci ce sera pareil, plus le temps va passer, moins on va oublier
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Il voulait dire à la jeune femme en noir - comme plus tard aux enfants de Zakya - que les morts de Murambi font des rêves, eux aussi, et que leur plus ardent désir est la résurrection des vivants.
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Après une histoire pareille, tout le monde est, de toute façon, un peu mort.
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Comme toujours en pareil cas, personne ne peut dire ce qui se passe réellement. Il y a des soldats dans les rues et les gens, cachés derrière leurs fenêtres, scrutent les boulevards avec attention et ressentent une douce excitation. À combien de coups d'État a-t-elle assisté depuis sa vingtième année ? Elle essaie de compter. Mais c'est si difficile de savoir. Cela se ressemble, aussi, leurs affaires-là, à tous ces militaires. Puis elle se souvient que tous les quinze ans, il y avait un horrible bain de sang : depuis bientôt un demi-siècle, le désir, chaque fois renouvelé, de finir le travail, c'est-à-dire d'exterminer jusqu'au dernier ennemi, le Twi ou le Mwa, jetait le pays par terre, au milieu de ses ordures et de ses immondes déjections. C'était une histoire connue. Pendant chaque massacre, des bébés traversaient la frontière sur le dos de leurs mères. Quinze ans après, ils revenaient, soldats ivres de colère et aux yeux durs comme l'acier. Pour venger des crimes commis quinze ans plus tôt, ils commettaient des crimes que d'autres soldats reviendraient venger quinze ans plus tard. Et ainsi de suite. Mère Mwenza songe : "J'en ai bien peur, les fils sont encore revenus désherber les tombes de leurs pères."
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Ce jour-là, une des survivantes explique avec calme pourquoi sa colère est restée intacte : « Depuis 1959, déclare-t-elle, chaque fois qu’il y a un massacre, le même homme, un de nos voisins, s’est directement dirigé vers notre maison avec ses fils pour tuer tous ceux qui s’y trouvaient. En 1994, ils sont revenus et je suis la seule à leur avoir échappé.
...
Chaque matin quand je vais au travail, je le vois assis sur le seuil de sa maison et il me suit du regard jusqu’à ce que je disparaisse au coin de la rue. » Lorsque la jeune femme arrive à la fin de son propos, sa voix paraît toujours aussi sereine mais on sent que cette évocation vient de réveiller brutalement dans son cœur une sourde colère et même de la haine et elle lance en détachant bien ses mots, le regard un peu fou, le doigt pointé sur sa poitrine : « Et on veut que, moi, je pardonne…? »
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— Tu sais ce que cela veut dire, Jessica Kamanzi ? Tu sais comment ils violent les femmes ?
Oui, j’avais vu cela. Vingt ou trente types assis sur un banc. Certains d’un âge respectable. Une femme, parfois juste une frêle gamine, est étendue contre un
mur, jambes écartées, totalement inconsciente. Il n’y a aucune violence chez ces pères de famille. Cela m’avait glacé le sang de les voir ainsi parler de choses et d’autres à l’instant où toute une vie se défaisait à jamais sous leurs yeux. Et parmi les violeurs il y a presque toujours, exprès, des malades du sida.
— Je sais comment ils font, fis-je.
— Quand ils ont fini, ils te versent de l’acide dans le vagin ou t’enfoncent dedans des tessons de bouteille ou des morceaux de fer.
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Il voulait dire à la jeune femme en noir - comme plus tard aux enfants de Zakya - que les morts de Murambi font des rêves eux aussi, et que leur plus ardent désir est la résurrection des vivants.
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Cornélius ne se souvenait pas d'avoir aperçu au cours de ses promenades des éclopés ou des malades mentaux. Le pays était au contraire intact et chacun juste occupé à vivre sa vie. Des rendez-vous amoureux. Un tour chez le coiffeur. La routine des jours ordinaires. Franky et les jeunes employés du Café du grand lac faisaient leur travail comme les serveurs du monde entier. Ils prenaient les commandes, disparaissaient derrière le comptoir ou dans la cuisine puis se faufilaient à nouveau entre les tables, le sourire aux lèvres. Ce mépris du tragique lui paraissait presque suspect. Etait-ce par dignité ou par habitude du malheur?
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La crainte de mourir serait aujourd’hui, pour quelqu’un comme moi, presque une faute de goût. Ma vie ne vaut pas plus que celle des milliers de gens qui tombent chaque jour.
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Le génocide n’a pas commencé le 6 avril 1994 mais en 1959 par de petits massacres auxquels personne ne faisait attention.
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Ils savent que c’est fini. Les chefs ne songent plus qu’à quitter le pays. Les barrières que l’on n’a pas encore démantelées sont presque toutes désertes. Mais de temps en temps, au coin d’une rue, on entend des rires et de joyeux battements de mains. Un Tutsi que l’on vient de découvrir par hasard. Sorti trop tôt de sa cachette. On le liquide au passage. Comme un cancrelat s’aventurant au milieu de la cour et aveuglé par la lumière. On l’écrase d’un coup de talon sans y prêter attention.
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J'ai vu cela de mes propres yeux. Est-ce que tu me crois, Cornelius ? Il est important que tu me croies. Je n'invente rien, ce n'est pas nécessaire, pour une fois. Si tu préfères penser que j'ai imaginé ces horreurs, tu te sentiras l'esprit en repos et ce ne sera pas bien. Ces souffrances se perdront dans des paroles opaques et tout sera oublié jusqu'aux prochains massacres. Ils ont réellement fait toutes ces choses. Cela s'est passé au Rwanda il y a juste quatre ans, quand le monde entier jouait au foot en Amérique. Moi, je retourne parfois à Murambi. Je regarde l'endroit où mes ossements auraient dû se trouver et je me dis que quelque chose ne tourne pas rond, je fais bouger mes mains et mes pieds parce que cela me paraît bizarre qu'ils soient encore à leur place et tout mon corps me semble une hallucination.
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