AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Critiques de Bruno Schulz (19)
Classer par:   Titre   Date   Les plus appréciées
Le sanatorium au croque-mort

"Le temps est disloqué. Ô destin maudit,

pourquoi suis-je né pour le remettre en place !

Allons, venez, partons ensemble."

(W. Shakespeare, "Hamlet")



Allons-y donc, mais doucement...

Et faites attention en ouvrant le livre de Schulz dans un endroit public, car il est quelque peu explosif.

Pendant la lecture, je me sentais comme si j'étais devant un tableau géant et animé de Jérôme Bosch, en me perdant et me retrouvant à nouveau dans l'explosion d'images et de formes. Schulz a juste remplacé les traits de pinceau par des mots. Il peint dans l'air.

Il assemble les mots d'autrefois avec des mots que vous devez chercher dans un dictionnaire, puis avec d'autres mots... au point qu'on se demande s'il est seulement possible d'oser pareils collages, et pourquoi cela sonne aussi bien.

"Le Sanatorium au croque-mort" (1937) sont des orgies - mentales, visuelles et verbales. Un carnaval de mots libérés de toutes entraves qui dansent comme ça leur chante, sans demander l'avis de personne.



Il n'est pas étonnant que Bruno Schulz demeure un de ces auteurs dits "inclassables".

Né en 1892 en Galicie, qui faisait alors partie de l'Empire austro-hongrois, Schulz est issu de la culture juive, mais contrairement aux récits de Singer, Buber, ou aux peintures de Chagall, on ne trouve pas dans ses récits la notion lyrique du judaïsme patriarcal d'Europe de l'Est. Schulz la conteste par des images ambiguës, souvent ironiques, et pleines de scepticisme moderne. Peut-être que ses études aux Beaux-Arts de Vienne y sont pour quelque chose. D'ailleurs, c'est un excellent dessinateur. Dans ses nouvelles, il ne décrit pas une expérience juive, mais la sienne propre, comme s'il avait fait un pas en dehors de son shtetl natal, puis l'avait observé par-dessus son épaule. Il écrit en polonais, et même l'impitoyable Witold Gombrowicz, qui juge très sévèrement toute la littérature polonaise après la Grande Guerre, le considère comme "écrivain d'une toute autre sorte, d'un degré supérieur".

L'histoire juive n'est pas marquée seulement par des camps de concentration et d'extermination : Bruno Schulz est mort lors d'une des nombreuses razzias anti-juives spontanées, dans sa bourgade de Drohobycz. En même temps que finissait l'ancien monde de toute la communauté juive de l'Europe de l'Est, ces deux balles dans la nuque ont mis fin à un autre monde remarquable, sorti de l'imagination et des souvenirs de Schulz. Quant au "temps disloqué"...



... le narrateur nommé Joseph arrive dans un étrange sanatorium "au milieu des bois obscurs", pour rendre visite à son père, mort il y a longtemps. Mais tout est transposé dans un autre espace-temps, et son père y est toujours vivant, dans la limite des "situations conditionnées", comme le laisse entendre le docteur Gotard. Chaque moment, chaque porte ouverte va aboutir à une nouvelle réalité (réalité ?) dans un temps déjà reculé : Joseph-enfant, émerveillé, regarde son père encore jeune souffler des bulles de savon, pour se retrouver ensuite au chevet d'un mourant. Mais personne ne peut mourir, dans cet endroit. Cette intemporalité est aussi épaisse et stagnante que l'eau dans une mare, et elle a quelque chose de pesant et d'étouffant. La vie dans le sanatorium n'a aucune finalité, et même si la mémoire revient vers des choses plaisantes, vers "ce qui était" ou "aurait pu être", on ne pourrait jamais avancer vers ce qui "va être". On se retrouve sur une sorte d'anneau de Möbius sans fin. Tout cela fait vaguement penser aux histoires d'immortalité de Borges, mais je me demande si au fond ce n'est pas encore pire. Les souvenirs qui ressurgissent, et se transforment, transforment...



Ce n'est ni tout à fait du réalisme magique, ni du surréalisme, et encore moins de la SF. Les connaisseurs parlent d'une sorte d'expressionnisme, et il y a peut-être un brin de chaque. Schulz a créé sa mythologie personnelle, en triant ses souvenirs d'enfance. Comme si sa mémoire était un cabinet de curiosités qui renferme des choses étranges, horreurs et miracles, et comme s'il tissait autour des lieux ordinaires une magie exotique, pleine de lourde mélancolie, ancrée encore dans l'époque du vieil Empire.

Je n'arrive pas à décrire mes impressions de cette lecture; tantôt je me délectais, tantôt j'avais l'impression que tout m'échappe.

4/5; je crois que mon cerveau n'est pas tout à fait capable d'entrer entièrement dans la ronde endiablée des proses de Schulz, mais essayez le vôtre, c'est un auteur à découvrir !

Commenter  J’apprécie          7221
Les Boutiques de Cannelle

Bruno Schulz est un écrivain singulier. Il nous fait entrer dans un monde étrange et désordonné. Sa voix est celle d'un poète à la fois tendre et tourmenté. Bruno Schulz est né à la fin du XIXe siècle à Drohobycz, un gros bourg de Galicie, aujourd'hui en Ukraine. Dans " les boutiques de cannelle", au commerce équivoque, tout tourne autour de cette ville ensorcelante, que Bruno Shulz semble n'avoir jamais quittée, et de la maison familiale, perçue à travers l'imagination d'un enfant.
Commenter  J’apprécie          421
Les Boutiques de Cannelle

Les boutiques de cannelle, c'est un recueil de nouvelles mais il pourrait facilement constituer un roman. C'est que l'auteur, Bruno Schulz, fait revivre une année de son enfance à travers des souvenirs épars. Chaque nouvelle met l'accent sur un élément ou un thème en particulier mais l'ensemble suit une logique quelconque (à défaut d'être chronologique). Mais est-ce complètement autobiographique ? Sa biographie va en ce sens mais le jeune narrateur se fait habituellement appeler Joseph et je n'ai pas réussi à résoudre cette énigme.



Dans tous les cas, tout y passe. On découvre son père Jacob, sa mère, sa fratrie, la fidèle servante Adèle ainsi que les pensionnaires des innombrables chambres dans l'édifice que la famille possède. En effet, le père tient une boutique, non pas de cannelle mais de draps et de tissus, qui donne sur la place du marché dans une petite ville de province, Drohobycz. (Bien que ses habitants soient Polonais, la ville et toute la région de Galicie faisaient alors partie de l'empire austro-hongrois.)



Tout ce beau monde mène une vie bourgeoise au début du 20e siècle. Toutefois, avec le temps, les promenades à la campagne se font de plus en plus rares et les visites tout autant. Alors, le père se lance dans des improvisations de plus en plus fréquentes. Il lance des sermons à droite et à gauche, à ses enfants, aux pensionnaires, aux clients et même à des passants sur la place du marché. Mais il sait aussi raconter de belles histoires, mélanger le réel et l'irréel. Son imagination captive les enfants mais quelque chose semble clocher.



En effet, tout cela n'est qu'un jeu pour les petits mais, au fur et à mesure que les nouvelles se succèdent, ces sermons et ces histoires qui égayaient se transforment en obsessions incohérentes, effrayantes. Il devient alors évident pour le narrateur (et le lecteur) que la santé mentale du père se dégrade. La folie le guette. L'univers de la petite ville de province se transforme subtilement en un cauchemar labyrinthique.



Ainsi, à travers les yeux du jeune narrateur, on vit la chute du père (et du dieu qu'il représente pour un garçon), la fin de l'enfance mais sans jamais tomber dans le larmoiement. Et tout n'est pas sombre, les mauvais moments sont toujours entrecoupés de meilleurs. Joseph va acheter des confiseries dans le nouveau quartier et découvre le tramway, son frère rapporte un train électroaimant, ils observent une comète dans le ciel, etc.



Je ne peux pas dire que le recueil Les boutiques de cannelle m'ait grandement marqué mais je suis content de l'avoir lu. C'est un recueil agréable à lire. Il donne un aperçu de ce à quoi pouvait ressembler la vie d'un garçon à cette époque, juste avant la Grande Guerre. C'est un témoignage d'une époque révolue…
Commenter  J’apprécie          393
Les Boutiques de Cannelle

« Aussi bien, en transcrivant ces récits, en ordonnant ces histoires dont mon père est le héros dans la marge rongée du texte, ne caressons-nous pas l’espoir secret de les voir s’intégrer un jour imperceptiblement aux pages jaunies de ce livre des livres qui lentement se disloque, de les voir participer au grand bruissement de ses pages qui les engloutira ? ».



Si le personnage d’un père est effectivement présent dans la plupart des textes qui composent ce recueil de nouvelles, il n’a pourtant rien d’un héros. Souffreteux, il hante ses appartements aux multiples pièces, à l’affut de tout ce qui s’y passe. Ses sens sont aiguisés et il lui arrive même de converser avec Dieu…



Le « je » de la narration est mené par un fils éternel, qui lui aussi ne quitte pas souvent ce lieu. La mère est absente, occupée par le magasin de tissus qui les fait vivre, située dans la campagne austro-hongroise.



Le plus remarquable dans ces textes, c’est un style à nul autre pareil. La narration part dans tous les sens, entre rêves et excroissances tout à fait baroques. Le corporel se mêle au végétal, comme dans la première nouvelle « Août », qui m’a véritablement saisi : « L’enchevêtrement touffu des herbes folles et des chardons brûle en crépitant dans le feu de l’après-midi. La sieste paresseuse du jardin bourdonne du vacarme des mouches. Les chaumes dorés hurlent au soleil comme une nuée de sauterelles rousses, les grillons s’égosillent dans la pluie ruisselante du feu, les siliques pleines de graines explosent discrètement avec un bruit de cigales. »



Bruno Schulz a vécu presque toute sa vie dans cette petite ville de Drohobycz, alors dépendante de l’Autriche-Hongrie, aujourd’hui situé en Ukraine, près de Lviv. Les textes de ce recueil ne sortent pas de nulle part : malgré leur étrangeté ils sont proches de ce qu’il a vécu. On peut dire qu’il a rêvé sa vie, plus qu’il ne l’a vécue. Il est mort en 1942, à l’âge de 50 ans, dans le ghetto de Drohobycz, assassiné par la Gestapo.



Il est tentant de la rapprocher de Franz Kafka, en raison d’origines juives communes et d’un rapport au père compliqué. C’est une fausse piste. Le style de Schulz est beaucoup plus fleuri, exubérant. Ce recueil comporte une préface et des annexes dont on peut se passer : après avoir lu ce livre, je ne suis pas du tout convaincu par l’analyse faite par Arthur Sandauer, qui a connu l’auteur.



Franchement ces textes puissants se suffisent à eux-mêmes dans toute leur étrangeté.

Commenter  J’apprécie          313
Les Boutiques de Cannelle

Par la magie de l'écriture, une morne ville polonaise provinciale du début du XXème siècle devient un univers extraordinaire, parcouru de révolutions mystiques, élémentaires et astrales. C'est une cosmogonie qui est mise en mouvement par le mécanisme d'un style particulièrement travaillé, surchargé de figures de style. Tout devient métaphore, tout devient allégorie, tout devient signe, et signe de signe ; si bien que les signifiés se perdent parfois dans ces arabesques sans fin, et que l'on se demande même s'ils ont jamais existé. La nuit et le vent confèrent un caractère démesuré et inquiétant à ce monde observé à hauteur d'enfant, où la figure du père joue le rôle de démiurge impotent, parfois emporté par les métamorphoses incessantes de son monde empli de colifichets, de tissus chamarrés et d'oiseaux (empaillés ?).



Ces thèmes amènent des comparaisons entre Schulz et Kafka, mais leurs styles ne pourraient guère être plus opposés, tant la simplicité du deuxième diverge de la complexité baroque du premier. Les mots de Schulz deviennent parfois assourdissants à force d'hyperboles proches de l'hystérie, quoique celles-ci aient la propriété d'être toujours observées à distance sur un ample espace-temps, et ce malgré la focalisation narrative interne. Comme si au point de vue de l'enfant se superposait le point de vue d'un autre démiurge, celui de l'écrivain qui joue à recolorer cette enfance et à la parodier tendrement. Cela confère à l'ensemble une curieuse langueur, aussi tapageur puisse-t-il être. La ville semble être peuplée de mannequins et d'automates, rejouant artificiellement l'envers du monde éveillé. Avec Bruno Schulz le rêve est chose publique, car ses rêves mettent en scène le peuple d'une cité, qui tout entier devient l'objet d'une dérive onirique. C'est donc tout naturellement que les Boutiques de Cannelle se changent en la République des Rêves, peuplée de lecteurs capable de prendre les métaphores de Bruno Schulz « au pied de la lettre », de croire que l'imagination puisse bâtir une vi(ll)e meilleure grâce aux mythes enfouis dans les mots et éveillés par la littérature.



Je ne vois guère d'équivalent à l'écriture de Bruno Schulz, à part peut-être celle du Mandelstam du Timbre égyptien, qui est une possible influence. Les comparaisons s'avèrent tout aussi hasardeuses avec ses amis Gombrowicz et Witkiewicz. Des bribes de correspondance entre les trois hommes closent le recueil. Schulz éclaire sa conception de l'art comme mythologie personnelle, et adresse une réponse-fleuve aux provocations coutumières de Gombrowicz, un des plus beaux exemples d'amitié artistique que j'aie rencontrés, plaçant l'autre face à ses limites et ses possibilités dans un échange d'une franchise rare. Une personnalité et une voix importantes dans l'histoire de la littérature, malgré une oeuvre avortée par les horreurs du XXème siècle.
Commenter  J’apprécie          295
Le sanatorium au croque-mort

Le sanatorium au croque-mort, c’est la suite des mémoires d’enfance que Bruno Schulz avait commencé à coucher sur papier dans Les boutiques de cannelle. J’écris souvenirs d’enfance, mais le narrateur devait être rendu à l’adolescence, non ? J’ai trouvé cet élément et les autres indices temporels un peu flous, à moins que je ne les aie manqués. Et pareillement pour la chronologie, qui semble plus linéaire mais qui donne une impression de distance, comme si les émotions qui émanaient du narrateur lui venaient après-coup. Mais, cela, ce n’est pas grave grave du tout. En fait, s’y attarder serait passer à côté de l’essentiel : ce qui compte, c’est cette envolée de souvenirs arrachés à l’enfance et traduit poétiquement.



Beaucoup de ces souvenirs rappellent des épisodes variés, abordant à des thèmes tout aussi variés dont la logique m’échappait parfois. En effet, certains relatant des simples anecdotes alors que d’autres, des évènements ayant eu un impact majeur sur la vie du narrateur et celle de sa famille. Par exemple, au début, le narrateur se cherche encore. C’est un jeune homme curieux de nature doublé d’une âme sensible, mais, comme tous les garçons de osn âge, il a hâte aux vacances et à la liberté. Jusqu’à ce qu’il tombe sur un album de timbres-poste, une sorte de petite madeleine. À partir de là, un monde s’ouvre à lui (c’est fou comment ça peut faire voyager, une Tasmanie rose ou un un portrait d’Alexandre le Macédonien suivi d’un alphabet étrange). C’était un peu mélangeant par moment, suivre les détours et les contours de sa nouvelle érudition, et faire la part des choses quand son imagination s’emballait. Sa créativité est originale mais parfois insaisissable, comme celle de son père. Et c’est compréhensible et effrayant quand on connaît la suite de l’histoire.



Effectivement, si les premiers souvenirs de Bruno Schulz racontaient une existence bourgeoise relativement paisible, les suivantes prennent une tournure dramatique quand la santé mentale du patriarche (déjà annoncée dans le premier recueil de nouvelles) décline rapidement. Ce garçon doit s’occuper de son père et le conduire à un sanatorium. Il reste avec lui un certain temps et est témoin de ses crises. Quelle expérience terrible pour un jeune homme qui voyait en son géniteur un Dieu tout-puissant. C’est la partie que j’ai le plus aimé, elle montre le côté humain du garçon, réconfortant mais tout aussi en détresse. Sa sensibilité est mise à rude épreuve et la folie le guette également… du moins, les cauchemars.



Les dernières nouvelles du recueil laissent une impression de fin de règne nostalgique parfaite, à l’image de l’éclatement de l’Autriche-Hongrie. Le narrateur comprend que son père ne récupèrera pas sitôt, s’il le fait jamais. Puisque son ambition n’a jamais été celle de poursuivre la tradition familiale et de s’occuper de la boutique de draps, il liquide l’inventaire. Même les domestiques les quittent, la fidèle Adèle s’embarque pour les Etats-Unis. C’est la fin d’une époque. Snif, snif.
Commenter  J’apprécie          273
Les Boutiques de Cannelle

Ce livre marque ma toute première incursion dans la littérature polonaise, mais sans doute pas la dernière.



Curieux recueil que ses "boutiques de cannelle". J'ai cru au départ que c'était un recueil de nouvelles - il y a un peu de cela sans doute, mais les récits se suivent, impossible de picorer un texte de ci de là comme un vrai recueil de nouvelles. La temporalité du récit n'est d'ailleurs pas très facile à suivre. Le texte "les boutiques de cannelle" illustrent d'ailleurs ce soucis de temporalité, car tout se passe en une soirée, mais à cause des flash-back du narrateur, je ne savais plus très bien quand j'étais, ni où j'étais. Pour ce dernier point, lui non plus, et cela lui était égal.

Ensuite, le ton est assez particulier. Les descriptions sont très belles, très riches, mais j'avais l'impression d'osciller constamment entre réalisme et fantastique. Le réalisme est celui de la vie quotidienne de cette famille, entre le père, omniprésent, la mère, Adèle, la servante capable de mener le père à la baguette, Poldine et Pauline, les ouvrières. Pourtant, très vite, le moindre fait prend une autre dimension, difficilement explicable. Je ne pourrai que le comparer à La métamorphose de Kafka, si ce n'est que ce sont les choses qui prennent vie, et les êtres humains qui se réifient.

Je ne puis m'empêcher de chercher un symbolisme caché dans ce texte. La fin du roman boucle la boucle et clôt les aspirations (scientifiques ? artistiques ? créatrices ?) du père, à cause des réactions pragmatiques et cruelles des autres personnages. La réalité reprend ses droits face à ses fantasmagories, et le créateur est étouffé. Tel père, tel fils : l'imagination du narrateur est sans limite, préférant une réification de son père aux explications prosaïques de sa mère, mettant en mots ce que le père n'a pu créer.
Lien : http://le.blog.de.sharon.ove..
Commenter  J’apprécie          171
Le sanatorium au croque-mort

A lire absolument. J'ai pleuré à certains passages tant ces nouvelles sont merveilleusement écrites. Une orgie de beauté, une sensualité qui transpire.
Commenter  J’apprécie          151
Le printemps

Publiée pour la première fois en Pologne (pré-stalinienne et pré-hitlérienne) au cours de l'année 1937 dans le recueil "Sanatorium pod Klepsydra" ("Le sanatorium au croque-mort"), cette longue nouvelle de Bruno Schulz - fort provincial professeur de dessin au lycée de Drohobycz... mais aussi graveur, peintre et écrivain "amateur" - est une merveille de fantastique onirique... et, disons-le, de pure poésie.



Son compatriote Wojciech Jerzy Has en donna une fascinante illustration dans son film-phare "Sanatorium pod Klepsydra" ("La Clepsydre"), sorti en Pologne en 1973 (*) : oeuvre aussitôt repérée et dûment couronnée par le Prix du Jury au festival de Cannes de la même année...



On ne se lasse pas de suivre les trajectoires météoriques des personnages juvéniles de Bianca et Rodolphe, couple perdu - avec le narrateur - au milieu des intrigues impériales entre François-Joseph et Victor-Emmanuel Ier : trajectoires qui semblent naître d'un étrange album de timbres détenu par Rodolphe. le rêve se crée et se recrée ainsi autour de chaque nouveau personnage entrant dans la danse, entre tourbillons de feuilles mortes, "hirondelles qui s'envolent entre les lignes" et calêches lancées au grand galop...



Style flamboyant, lyrisme de chaque ligne... Honte éternelle à cet imbécile de "SS ordinaire" qui assassina comme pour s'amuser - avant et après tant d'autres humains terrifiés - le poète par une froide nuit de l'automne 1942 à Drohobycz !



(*) Vous pourrez lire (par exemple) le trrrrrrrrès grand article que j'avais illustré des splendides photos de plateau, consacré au film de Wojciech-Jerzy HAS sur mon site (lien ci-dessous) : article en date du 26 février 2011. Une fois arrivé sur le site, aller en colonne de gauche (vers là où je vote - à peu près - en général... ) et cliquer en "Catégories" = "Bruno SCHULZ" : vous êtes arrivés, bravo !!!! Et vous y découvrirez encore d'autres films de HAS... Bonne chance, et surtout... (Aaaat... choum !) ne vous perdez pas dans les couloirs du vieux Sanatorium !
Commenter  J’apprécie          141
Le sanatorium au croque-mort

quel choc, ce type, en écho au film La Clepsydre, une logorrhée d'images justes et profondes, c'est le cœur de son âme qu'il fouille avec fureur et talent. C'est ce que j'appelle faire rendre gorge aux moindres soupirs, nuances, circonvolutions d'une émotion ou d'une impression, c'est d'une vitalité juvénile, le torrent créatif d'une âme sensible, nuancée, exposée à des (palpitations). Ce sont les mouvements de l'âme, au lieu qu'ils soient soupçonnés, devinés, entrevus, Schulz s'en empare, les exprime, les explore. Il y a une foi juvénile en la valeur des élans de son imagination, il s'en empare et il tient le fil, tient le coup, garde le cap en s'enfonçant dans ses méandres et métaphores.

Commenter  J’apprécie          145
Le printemps

un très beau livre, très poétique , j'avoue être passée un peu à côté de l'histoire. des textes qui viennent d'une autre époque, avec un style très travaillé, lyrique.
Commenter  J’apprécie          120
Le sanatorium au croque-mort

J'ai mis le temps, j'ai pris le temps.

Il me fallait goûter chaque phrase, chaque mot. Il me fallait apprécier les couleurs déployées en une palette infinie de nuances. Il me fallait tendre l'oreille aux notes harmonieuses et discrètes.

Ces nouvelles sont emplies d'étrangeté, à la fois structurées et déconstruites. Nourris par une imagination débordante, enfantine presque, ces écrits m'ont parfois dépassé dans leur surréalisme.

Telle une beauté froide, indéniablement remarquable mais trop souvent inaccessible...
Commenter  J’apprécie          111
Le sanatorium au croque-mort

Simplement inviter ici nos (fervents) lecteurs de Bruno Schulz à découvrir les magnifiques, nombreuses photographies de plateau du film "la Clepsydre" de Wojciech J. Has (1973), rassemblées pour composer un très vaste article en date du 26 FÉVRIER 2011, que j'avais intitulé : "Le Sanatorium sous la Clepsydre" ou le monde pictural du cinéaste Wojciech Jerzy Has"...



Il se trouve toujours sur mon site "Regards Féériques " (voir le lien ci-dessous) : la recherche en sera facilitée en cliquant colonne de gauche du site, "Catégories" = "Bruno SCHULZ".



Le DVD du chef d'oeuvre de W.-J. HAS est toujours commercialisé par l'éditeur "Malavida", ayant édité l'intégrale des 17 films de cet artiste qui est l'égal d'Andrzej WAJDA.



Pour rester honnête avec vous, "Le noeud coulant" (1957), "les adieux" (1958), "Manuscrit trouvé à Saragosse" (1964), "La Poupée" (1968), "La Clepsydre" (1973) et "Une histoire banale" (1982) (*) sont parmi les plus beaux dans sa filmographie... L'auteur, disparu en 2000, avait déjà une formation de peintre en commençant ses études à l'Ecole de cinéma de Lodz...



Amitiés schulziennes !



(*) Invitation là encore à découvrir mon (également grand) article à propos d' "Une histoire banale" : ce film ultérieur de HAS, toujours si merveilleusement mélancolique, adaptation poignante de la pièce de Tchekhov. Article figurant en hors-Champ sur le site "critikat" qu'on rejoint par ce lien : www.critikat.com/panorama/hors-champ/une-histoire-banale.html‎
Lien : http://www.regardsfeeriques...
Commenter  J’apprécie          100
Le sanatorium au croque-mort

Du pur onirisme. Ce n'est pas facile à suivre et cela divague beaucoup trop à mon gré et dans des eaux plutôt sombres. Je l'ai terminé malgré tout pour la très belle poésie que cet auteur insuffle dans ses nouvelles. Celle qui donne son titre à l'ouvrage est révélatrice de l'attachement de l'auteur à son père et c'est de loin une de mes préférées.



Pas sûre pour autant que j'irai plus loin dans la découverte de cet auteur polonais, même si c'est clairement ce que j'appelle de la littérature.
Commenter  J’apprécie          92
Le printemps

Je n'ai tout simplement pas accroché du tout au monde onirique et fantasque que nous propose Bruno Schulz.



Cela manque de tangible et de corps, cela part dans tout les sens, et les impressions sont posées telles qu'elles sortent de la tête de l'auteur.

Je conçois très bien le côté poétique, il y a de très belles choses écrites, mais sur une centaine de pages ça fait beaucoup, parfois même je comprends chaque mot, mais mis bout à bout dans une même phrase ce n'est plus du tout le cas.



Je ne poursuivrai pas dans la découverte de cet auteur.
Commenter  J’apprécie          41
Les Boutiques de Cannelle

Ce n’est pas vraiment une critique de « Les Boutiques de cannelle » parce que

1) elle est basée sur le texte anglais,

2) le texte est de Jonathan Safran Foer, également en anglais.

3) c’est intraduisible (vous verrez pourquoi)

ceci dit c’est un ouvrage littéraire remarquable.



Bon tout cela pour en arriver là où je voulais aller. Jonathan Safran Foer est un fervent lecteur, en particulier de Bruno Schultz. Ce dernier, assassiné dans la rue par un officier SS, est l’auteur de nouvelles, dont «Sklepy cynamonowe » qui sera traduit en anglais et dont l’une des nouvelles « Les Boutiques de cannelle » se passe dans « La rue des Crocrodiles ». Pourquoi cette longue introduction. C’est que le titre anglais « The Street of Crocrodiles » va servir de base pour un livre assez étonnant de Jonathan Safran Foer. En effet de « The Street of Crocodiles» de Bruno Schulz, il en tire le titre « The Street of Crocodiles» par suppression de lettres soit « Tree of Codes » (L’Arbre des Codes). Et il le publie (10, Visual Editions, 142 p.). Il procède ainsi sur tout le texte. Je vous invite, soit à l’acheter car c’est un superbe travail d’impression et d’édition, soit à regarder sur le site de l’éditeur le processus de fabrication (http://visual-editions.com/tree-of-codes-by-jonathan-safran-foer ). C’est en effet un nouveau livre, dont l’histoire se tient, et qui se lit, bien entendu plus vite que l’original. C’est normal, les passages coupés forment des vides, et de la première page, il ne reste pratiquement rien. Et le tout reste parfaitement sensé et lisible « Only now do I understand the war against the lost cause of empty hours, of empty days and nights.», «Our city is reduced to the tree of codes». Certaines sont carrément très poétiques. «Perhaps the spaces suggested by the wind did not exist.» ou bien «The landscape of folded material obscured the shapeless mob without face or individuality. », «The earth was covered with a tablecloth of winter. »



Bonne lecture pour les curieux.

Commenter  J’apprécie          30
Le sanatorium au croque-mort

Et sublime adaptation de Has au cinéma en 1973: Sanatorium Pod Klepsydra:

http://www.dvdclassik.com/critique/la-clepsydre-has
Commenter  J’apprécie          20
Le sanatorium au croque-mort

Le sujet principal de mon mémoire de maîtrise. Une très belle découverte grâce à mon amie Christine Ferret. Un échange fructueux avec l'écrivain Bertrand Visage. Six mois d'écriture et de rencontres à Lodz en Pologne. Relire Le Sanatorium au Croque-mort dans une nouvelle traduction. Un objectif qui me permettrait de visualiser le temps qui passe et de mesurer encore une fois la richesse de l'écriture de Bruno Schulz.
Commenter  J’apprécie          20
Les Boutiques de Cannelle

Bruno Schulz, auteur polonais, mort sous les balles nazies, en 1942, a écrit un roman autobiographique, très descriptif.

Les deux personnages centraux de ce tableau sombre et tourmenté :

Drohobycz, bourgade natale de l’ écrivain, située aux confins de la Pologne

et, le père, marchand drapier, fantasmagorique et .obsessionnel .

Entre métamorphose et angoisse, fantasme et noirceur, la narration paraît touffue.

si quelques pages rappellent Kafka et certaines scènes « Le petit monde de la rue Krochmalna »d.Isaac Bashevis Singer.

L’ auteur n’a, pour moi, ni le génie du premier, ni le talent du second.

Le style luxuriant , l’oeuvre complexe et baroque m’ ont déçue.



Commenter  J’apprécie          12


Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Lecteurs de Bruno Schulz (192)Voir plus

Quiz Voir plus

Un quiz plein d'étoiles (titres en littérature)

Quel écrivain, auteur de "Croc-Blanc", publie, en 1915, un roman fantastique intitulé "Le vagabond des étoiles" ?

Jack London
Romain Gary
Ernest Hemingway

10 questions
95 lecteurs ont répondu
Thèmes : littérature française , littérature américaine , bande dessinée , culture générale , poésie , étoile , littérature , livres , romanCréer un quiz sur cet auteur

{* *}