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Critiques de Daniel Charneux (42)
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Trop lourd pour moi

"Qui se met à parler court le risque de ne pas être compris. Est-ce une raison pour se taire ?", s'interroge Jean-Baptiste Taillandier, le narrateur de Trop lourd pour moi. En tout cas, dans ce livre, il est bien décidé à se livrer, et à tout nous dire de façon la plus honnête possible.

En compagnie de Jean-Baptiste, nous parcourons le dernier demi-siècle du dernier millénaire, avec ses révolutions industrielles, l'émergence du rock et ses slogans publicitaires qui parlent à certains d'entre nous (et oui, Seb, c'est bien !).

Pour ma part, la grande force de ce roman ne réside pas dans l'évocation d'une époque ou d'un destin ; d'ailleurs, celui de Jean-Baptiste n'est pas particulièrement remarquable : on y voit des illusions, des découvertes, sur soi et les autres, des essais, une ambivalence très forte dans l'approche de l'autre (notre narrateur tente par exemple de se fondre dans un collectif bouddhiste mais se refuse l'intimité avec une dame... enfin, c'est plus compliqué que ça, mais...). En dépiautant avec une très belle écriture bien équilibrée la vie de son anti-héros, le lecteur que je suis s'est senti invité à regarder à son tour sa vie, celle qu'on imaginait, celle qui a été, celle qui se profile.

J'ai trouvé beaucoup de justesse dans ce titre, dans les choix de vie, dans la façon de les aborder, dans le ton et l'écriture. C'est une magnifique découverte, que j'ai beaucoup apprécié, mais il vaut mieux, avant de se lancer, ne pas avoir le moral dans les chaussettes (même si le tout n'est pas dénué d'humour) !

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Pierre Hubermont écrivain prolétarien : De l'as..

Dans un premier élan, tous mes remerciements à l’éditeur belge M.E.O, ainsi qu’à la dernière Masse Critique-BABELIO-Essais, qui m’ont dévoilé l’existence de cet écrivain belge dont j’ignorais jusqu’au nom ; Un parcours des plus complexes, tant… que trois écrivains ont été interpellés par la personnalité littéraire et politique et se sont lancés dans l’élaboration de cette étude très détaillée tant sur la personnalité ambivalente de cet auteur dit prolétarien que sur l’histoire de la Belgique pendant la seconde guerre…



Fils et petit-fils de mineurs, enfance malheureuse, tentative de suicide à 10 ans alors que sa mère, atteinte de démence est internée…Pierre Hubermont commence à 17 ans son métier de journaliste. De tempérament dépressif, il aura toute sa vie, une tendance à la « persécution »…



Il fut le fondateur de plusieurs revues prolétariennes, dont la première, « Tentatives » (1928-1929) ; Après son succès avec « 13 hommes dans la mine » (1931), il est reconnu, comparé à Zola, ; avec les rentrées d’argent, il voyage un peu, mais pas autant qu’il le souhaiterait trop accaparé par son métier de journaliste politique, tant la crise économique, et les mouvement sociaux s’aggravent… ;Il se bat avec ses articles, ses romans, contre les injustices et les déterminismes sociaux…



Pierre Hubermont acquiert une vraie reconnaissance auprès des autres écrivains dont celle de l’écrivain, Charles Plisnier..

« Première descente---

Cet émouvant récit, publié dans -Tout-, décrit la première journée de fosse d'un gamin de quatorze ans dont le modèle est plus que probablement François, le frère aîné de l'auteur.

Hubermont insiste sur l'atavisme, le poids du déterminisme social et familial:

"Mineurs de père en fils: mineur tu seras. Il faut que tu apprennes, dès aujourd'hui, à boucler ta ceinture.

Tu étais le deuxième de ta classe. Le premier, c'était le fils de l'employé qui est un ami de l'instituteur. Ils jouent tous les deux de la musique à la fanfare du charbonnage. Le troisième, c'était le fils du porion. C'est décidé: le fils de l'employé va à l'athénée, le fils du porion à l'école moyenne. Finie la dernière partie de cache-cache, ils ne te reconnaissent plus. Ils ont appris à mesurer les distances. Déjà...Toi, si tu peux-et si tu veux- tu iras, ta journée faite, suivre les cours industriels. (p. 63)”



Cet essai est très riche, tant sur l’analyse détaillée des romans et écrits de Pierre Hubermont, de sa personnalité, que sur le contexte historique et économique de l’Europe et de la Belgique annexée, envahie par l’Allemagne… Pierre Hubermont, en sus d’une histoire intime traumatisante, est tombé dans une période, elle –même ambivalente… et tourmentée.

Pourquoi, lui , qui comme Zola, défendait et écrivait pour les ouvriers, fustigeait les classes bourgeoises et dirigeantes, a-t-il dérapé vers la collaboration… ? traumatisé par la première guerre, puis la seconde guerre ayant en partie brisé sa carrière littéraire, l’écrivain avait « la Colère », a dérapé, développé un nationalisme exacerbé, et des propos antisémites !!



« Dans -Germain Péron, chômeur-, Hubermont se livre en quelque sorte à son autocritique. L'auteur de -treize hommes dans la mine- dresse ici un constat lucide de la redoutable responsabilité des intellectuels aux yeux de la classe ouvrière qu'ils prétendent servir. (..)



A la maison, le père Péron menace de chasser Germain si, dans les huit jours, il ne trouve pas de travail. Au cours de la discussion, le vieil ivrogne blesse son fils à la face d'un coup de tisonnier. Germain doit rester quelques jours au repos, le temps pour la plaie de cicatriser. Il lit pour tuer le temps, un hebdomadaire fasciste aussi bien que -L'Humanité- :



"Il y a en moi des tendances contradictoires, communistes ou fascistes ? Je n'en sais encore rien. J'ai lu longtemps un hebdomadaire fasciste et je me suis presque trouvé d'accord avec les articles qu'il contenait. Mais comme je lisais la feuille fasciste qu'une fois par semaine et que l'Humanité achetée à Blanc-Misseron me servait quotidiennement de pâture intellectuelle, j'étais communiste tous les jours de la semaine et fasciste le dimanche. " (p. 98)



Bravo à ces trois écrivains pour cet ouvrage précieux, documenté à l’extrême, nous faisant découvrir cet auteur,avec toute l’objectivité possible, nous signalant combien ce dernier est demeuré « sulfureux », même présentement, au vu de plusieurs refus quant à la consultation d’archives, dont celui du propre fils de l’écrivain, Paul Jumeau…



Je transcris les dernières lignes qui en disent long…sur les difficultés extrêmes de ces procès pour « collaboration »…D’autres exemples d’artistes français se sont trouvés dans des situations détestables ; certains ont bénéficié du fait que le « public » a su séparer l’œuvre littéraire des opinions « politiques » ...





« Joseph Jumeau alias Pierre Hubermont s’éteint le 18 septembre 1989 à Jette, deux semaines après son exact contemporain Georges Simenon. Le plus traduit des romanciers belges avait, en 1945, fui la justice française, le Comité national d’épuration des gens de lettres à Paris enquêtant sur ses succès littéraires et cinématographiques sous l’Occupation. Il s’était alors installé au Canada, puis aux Etats-Unis. Si le décès du créateur de Jules Maigret déclencha une sorte de deuil national, on chercherait vainement quelconque notice nécrologique portant sur l’auteur de –Treize hommes dans la mine »[…que je suis curieuse de lire après la lecture très instructive de cette biographie ! ]

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A propos de Pre

'Pre , il n'aimait pas qu'on l'appelle ainsi ...

Son nom , c'était Steve Prefontaine. Et , bien sûr , il était d'origine française .'

Pre , c'est cet athèlte américain originaire de l'Oregon , Oregon qui viendrait peut être du mot français Ouragan .

Steve Prefontaine est inclassable , il a marqué les mémoires par ses performances hors du commun et la brièveté de sa vie .

Il est mort à 24 ans dans un accident de voiture , destin tragique pour celui pour qui la course était un art , qui s'entraînait dans des conditions drastiques , est ce qu'inconsciemment il savait que chaque minute était précieuse ?

Mort alors qu'il était au sommet de sa forme , ironie du destin .

Steve Prefontaine va avoir comme entraîneur Bill Bowerman qui est à l'origine de chaussures Nike , j'ai adoré l'anecdote de la semelle en caoutchouc cuite dans le fer à gaufres de sa femme avec la promesse de lui en acheter un autre .

Steve c'est le dépassement de soi , même blessé il continue à courir , c'est le côté noble du sport , dépasser ses limites , faire triompher le mental .

30 ans après sa mort , il est encore vénéré aux Etats Unis , il est devenu une icône de la course à pied .

Moi je n'en j'avais jamais entendu parler, je ne connais pas du tout le monde du jogging comme on dit aujourd'hui , j'ai pris un risque et j'ai été récompensée , l'écriture est très belle , l'histoire est passionnante , des références historiques sans oublier l'éloge du rôle de l'amitié dans le sport .

Et je ne peux m'empêcher d'ajouter une petite note personnelle concernant le site Babelio , il n'y a pas d'accent sur Pre ...., soyons puristes .

Merci au dernier Masse Critique et aux éditions MEO .

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Comme un roman-fleuve

l'aube de sa vie, François Lombard jette un regard dans le rétroviseur. Il revoit sa vie s’écouler, comme les eaux du fleuve qu’il longe quotidiennement, au fil de ses balades. Tantôt calme et joyeuse, tantôt tumultueuse, sombre, tourmentée. Chaque promenade est l’occasion de se remémorer un événement précis, une époque de sa vie qu’il a soin de replacer dans le contexte géographique et historique. Ainsi en sept chapitres au titre évoquant des ponts de Liège, il nous confie sa vie et nous conte également sa ville et ses transformations, les heurs et malheurs qui l’ont façonnée et la façonnent encore aujourd’hui. Et l’on plonge dans l’une et l’autre avec curiosité et tendresse. La Meuse devient miroir de l’âme.



Au fil des pages, nous découvrons le paradis perdu de François, arpentons Liège et la sentons vibrer sous ses pas. Je serais curieuse de savoir si les non Liégeois sont sensibles à ce roman. Tout y est si intime, si parlant pour un habitant de la Cité Ardente que j’ai eu l’impression à chaque page qu’il avait été écrit pour moi, pour que je me souvienne et que je n’oublie pas. Je me suis immergée dans les parfums de l’enfance, ai retrouvé des images enfouies, des visages, des lieux que j’avais connus et aimés. J’ai retrouvé des sensations oubliées. Mais peut-on goûter à ces petites perles narratives, si on ne les a pas vécues de l’intérieure ?



L’écriture de Daniel Charneux est pleine de charme et de rigueur, frôlant parfois l’obsession. Après avoir été séduite par la maîtrise de la langue et la beauté des mots, j’avoue pourtant m’être un peu lassée de ses multiples appositions et des énumérations sans fin. Certes la langue est belle mais les phrases sont longues et par trop ouvragées. Cela sied à merveille à cet octogénaire sur lequel pèse le poids des ans et du passé. Forme et fond s’unissent pour attiser le propos ; l’effet est indéniable. Mais j’aurais goûté un trait un peu plus léger.



Mis à part ce petit bémol, je quitte à regret cette balade en amnésie dans laquelle ce roman m’a plongée. Ce fut pour moi un vrai coup de cœur.


Lien : http://argali.eklablog.fr/co..
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Nuage et eau - Maman Jeanne

Ce livre est comme les personnages qui l'habitent : contemplatif...



J'ai eu besoin de plusieurs jours pour écrire ces quelques mots sur cet ouvrage car le tempo de ses pages invite le lecteur à la lenteur, à la méditation, à la réflexion et au silence. Et j'ai eu peur qu'en écrivant mon avis, je dénature la pureté, l'humilité, la douceur et la force qui émanent des deux romans de ce livre.



Dans "Nuage et Eau", c'est la vie du moine Ryôkan qui nous est contée au coeur d'un Japon spirituel et beau.

Ce récit est une invitation au voyage lointain mais aussi tout proche. Il nous propose de poser un regard critique sur nos manières de vivre, sur nos relations, nos attachements et nos questionnements.

C'est aussi une plongée dans les souvenirs intenses de mon séjour au Japon, sur le Koya San, cette montagne aux 117 temples bouddhistes.

Sous la plume experte de Daniel Charneux, j'ai ressenti à nouveau au plus profond de moi la prière matinale au temple, le bruit du roulement des moulins de prière, la douceur des regards des moines et la vibration de leurs chants graves et envoûtants.

L'auteur est un fin connaisseur du bouddhisme et de manière simple, accessible et romancée, il nous invite à la découverte de cette spiritualité, voire à sa pratique .

Ce premier texte est une halte bienfaisante au coeur de nos vies trop chargées. A déguster sans modération !



Changement de décor avec "Maman Jeanne" qui raconte l'histoire de vie d'une femme d'un autre temps - pourtant pas si lointain - qui, devenue veuve, vit une misère affective et physique intense.

On aimerait être à ses côtés, lui dire que sa vie a du prix, que malgré les douloureuses "aventures" que lui offre son quotidien misérable, elle est importante pour nous. En quelques lignes, je me suis attachée à cette femme simple et j'ai eu envie de voyager dans le temps afin de l'aider, la conseiller, la sauver.



Ces deux romans sont de belles histoires d'amour, de beaux chemins différents vers la recherche d'un absolu, d'un bonheur que l'on croit accessible. Les deux personnages ont en commun cette simplicité de coeur qui leur permet de faire un choix radical qui ouvre à l'Autre, au divin.

Deux histoires profondément émouvantes et riches, exigeantes et denses qui nous invitent à nous taire et à méditer.



Un petit bémol tout à fait personnel : Une fois de plus, j'ai l'impression que le bouddhisme est présenté comme une philosophie bienfaisante, positive qui apporte des solutions concrètes à nos problèmes actuels tandis que le catholicisme y est présenté de manière plutôt négative, comme une religion hiérarchique qui rabaisse la femme qui n'est bonne qu'à réciter machinalement le chapelet et à supporter l'autorité des hommes qui la pratiquent.

Bien sûr, on ressent dans ce livre que la vie de moine bouddhiste n'est pas facile, que les choix de Ryôkan sont radicaux et difficiles et que c'est une lutte de tous les instants. Il en ressort cependant une impression positive, une belle lumière.

Dans "Maman Jeanne", tout ce qu'on dit de la religion catholique est lourde de préjugés. Jeanne ne trouve aucun repos, aucun soutien, aucune espérance dans cette foi chrétienne qui apprend aux gens à rabâcher des prières et à respecter le prêtre tout-puissant.



Comme le yin et le yang s'équilibrent et se complètent,

comme ces deux récits s'éclairent et s'ajustent,

j'aurais aimé que les deux spiritualités dansent sur le fil du beau et du positif sans renier leurs failles et les difficultés de leur pratique.



Un grand merci à Babelio et à la Collection Espace Nord pour la découverte de cet auteur dont je n'avais jamais entendu parler. Quand la Belgique rencontre la Suisse, le courant passe magnifiquement ! MERCI !
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Nuage et eau

Dans les derniers chapitres de « Nuages et Eau », Ryokan, presque à l’orée de sa vie, attend le retour du printemps et de sa jeune et bien-aimée Teishin. Son cœur est devenu aussi fragile que les ailes d’un papillon ; la patience et la confiance, infinies. Son amour de la vie (qui peu à peu s’éteint en lui) le fait désormais pleurer certains soirs. Aucun apitoiement sur soi dans ces chaudes larmes, juste le reflet éphémère de la mer qui se retire à l’autre bout du monde.



Lorsqu’ils se voient enfin, Ryokan et Teishin échangent très peu de mots. Comment pourraient-ils être suffisamment entiers et fidèles pour évoquer simplement ce que le cœur dit au cœur ? Ils écrivent juste quelques délicats et subtils poèmes, qu’ils accrochent aux murs délabrés de l’ermitage. Il est peu question d’eux dans ces courtes oraisons et les « je t’aime » n’y trouvent pas leur place. A moins que cela ne soit juste l’inverse… il n’est question que d’Eux et de l’Eternité de l’Amour.
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Nuage et eau

Ce roman relate la vie du moine bouddhiste et poète japonais Ryôkan qui vécut au XVIIIème siècle. Biographie romancée, biographie poétique, Daniel Charneux raconte d’une plume aussi fine que précise les chemins et le cheminement du moine zen, de ce moine itinérant « unsui, nuage et eau « , de ce moine « fou » qui aimait les arbres et les couleurs des saisons, la lune et les enfants.



« Était-ce lui qui suivait le sentier ou le sentier qui le menait ? [ Il ] pensait le monde et le monde le pensait. »



Daniel Charneux raconte comme un conte – les mots, les images coulent d’une parfaite limpidité – et pourtant, ce récit, c’est également celui de la société impériale japonaise shintoïste, des traditions et de l’administration des shoguns, ainsi que celui de l’art de la calligraphie, de l’initiation au bouddhisme, l’engagement, l’enseignement, la pratique, les vœux, la vie monacale.



C’est également le récit d’une rencontre, celle d’avec la moniale Teishin. La quatrième de couverture insiste sur cet aspect, donnant une image romanesque trompeuse de ce livre. S’il est vrai que cette rencontre réelle entre Ryôkan et Teishin de quarante ans sa cadette est magnifique, que la pureté des sentiments et des poésies qu’ils échangèrent est d’une émouvante beauté, elle n’est exposée à notre lecture que lors du dernier tiers de ce récit consacré au moine, simplement du fait de leur écart d’âge.



« Nuage et eau » raconte l’esprit du zen, le parcours d’Éveil et de poésie que Teishin accompagna les dernières années de vie de Ryôkan.



Daniel Charneux est parvenu à écrire ce livre dans cet esprit sensible « de joie, de découverte, de curiosité souriante « , en calligraphe la fluidité des mots qu’il trace, en spiritualité une lumière qui n’occulte pas « cette souffrance que l’on appelle la vie « , la poésie en transparence. Une narration, des scènes comme des peintures par touches, sensations, émotions, qui s’offrent le temps des paysages, des souvenirs, des méditations; le temps des doutes et des pertes aussi; le temps de s’émerveiller, l’infime et l’infini.



Être « une abeille qui, sans abîmer la fleur, sans lui voler sa couleur ni son parfum, n’emporte que le suc dont [elle] fera son miel. «
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A propos de Pre

La liste des prix littéraires obtenus par l’auteur est impressionnante, mais leurs intitulés me laisse perplexe : tous peu connus (prix Thiry décerné par la ville de Liège, prix Plisnier par la Province du Hainaut,….). Ceci dit, les prix les plus prestigieux ne sont pas toujours synonymes de qualité du livre primé ! En effet, en France les prix plus célèbres semblent d’abord attribués à un éditeur et certains le sont par des jury dont les membres, souvent des hommes, sont désignés à vie (Goncourt) !



Dans son journal intime, le narrateur consigne événements du quotidien et souvenirs. Ex gérant d’une entreprise de ferronnerie et grand amateur de course à pied, il évoque ses "proches" désormais éloignés de lui (géographiquement, ou par la maladie ou la mort). Parmi eux, son épouse décédée et le coureur de fond Steve Préfontaine. Ce personnage du roman a existé, né en 1951, il fut notamment entraîné par Bill Bowerman à l’université de l’Oregon de 1970 à 1975, l’un des fondateurs de la marque Nike. Durant sa courte carrière, Préfontaine a détenu tous les records des Etats-Unis du 2 000 m. (5 min 1 s 4) au 10 000 m. (27 min 43 s 6), en passant par les distances exprimées en Miles (multiples de 1 609,34 m.) ; il remporta la médaille d’or du 5 000 mètres des Jeux panaméricains de Cali en 1971 (13 min 52 sec 53).

Le narrateur nous fait partager sa passion pour la course à pieds, qu’il pratique en amateur, et son admiration pour son ami Préfontaine, dont les stratégies de courses étaient simples : prendre la tête de la course dès le début puis tenter de la conserver (souvent avec succès : 128 victoires sur 153 courses selon Wikipedia). En effet, connaissant ses limites relatives en tant que sprinter, Préfontaine préférait fatiguer ses adversaires sur tout le parcours, même s’il les protégeait ainsi de vents auxquels il s’exposait en première ligne.



A travers les aventures du narrateur et de Préfontaine, nous parcourons des épisodes marquants de l’histoire des Etats-Unis et du monde, de la guerre du Viet-Nam à Donald Trump, en passant par l’affaire du Watergate et le conflit israëlo-palestinien. Le guignol qui préside actuellement les Etats-Unis est égratigné, mais pas plus qu’il ne le mérite… Les magnifiques paysages de l’Orégon sont en outre mis en avant, la course à pieds laissant à ses amateurs le temps de voir leur environnement.



La fin du livre est plutôt « surprenante », surtout si vous évitez d’aller voir wikipedia avant de l’avoir terminé.



Ce livre m'a fait penser à celui de Jean Hatzfeld intitulé "Deux mètres dix", un roman aussi construit à partir de l'histoire d'un champion. Ici, le jogging n'est cependant pas réservée à une élite, mais est présentée à juste titre comme une activité dans laquelle beaucoup peuvent prendre plaisir, chacun à son propre niveau. Ce roman plaira certainement beaucoup à la plupart des pratiquants de la course à pieds ; je ne sais pas si les autres apprécieront autant.



Merci à Babelio et à l'éditeur (opération Masse critique).

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Maman Jeanne

Après Nuage et eau, que j’avais beaucoup aimé, Daniel Charneux a publié ce très court et simple roman, pourtant d’une densité très touchante. C’est le roman d’une femme déshéritée, dépossédée du peu qu’elle a eu, et pendant si peu de temps : une enfant née d’un amour interdit, qu’elle croyait authentique. Une femme du siècle passé, d’avant la guerre de 14, d’abord soumise à son père puis à son premier mari, qui lui a donné trois garçons avant de mourir prématurément et d’obliger Jeanne à se mettre « en service » pour assurer la subsistance de ses enfants. C’est ainsi qu’elle est devenue bonne du curé. Un curé, c’est censé être juste, droit, sincère… Jeanne lui a fait confiance, elle lui a toujours été fidèle, même quand elle a dû quitter le presbytère…



Avec une grande économie de moyens, Daniel Charneux raconte l’histoire de cette femme simple, soumise aux hommes, à la religion, à une époque où les femmes avaient peu de droits et sûrement pas droit à la parole. Une femme dont la vie a été dure, d’ailleurs est-ce une vie, elle ne sait en parler qu’en mettant le mot en italiques. Une femme mise entre parenthèses, une femme effacée, oubliée. Ca m’est difficile d’en dire beaucoup, la fin est bouleversante, ce roman m’a fait penser à Chercher Sam, de Sophie Bienvenu, ou encore Les Demeurées, de Jeanne Benameur, avec des différences, bien sûr. Il montre aussi l’étendue du talent et des centres d’intérêt de Daniel Charneux, et son regard plein de sensibilité sur le réel.
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A propos de Pre

Ce n’est pas la première fois que Daniel Charneux s’inspire d’un personnage bien réel pour écrire un de ses romans : dans Nuage et eau, il nous racontait l’histoire du moine bouddhiste Ryôkan. Ici c’est de l’athlète américain Steve Prefontaine (1951-1975) qu’il raconte le parcours : un coureur doué, obstiné, spécialisé dans les distances de 1500 à 10 000 mètres, qui a « profité » de ses études universitaires pour s’entraîner sérieusement et se faire connaître déjà au-delà de son état natal l’Oregon et des Etats-Unis et qui se préparait aux J.O. de Montréal quand il perdit brutalement la vie dans un accident de voiture. C’était un athlète particulier, qui préférait le style et le panache à la tactique : faire la course en tête du début à la fin, c’était son idée, comme prouver qu’un coureur issu d’un milieu modeste pouvait se hisser au rang des grands (au prix d’un courage et d’un travail acharnés).



Daniel Charneux fait raconter ce destin par Pete Miller, un narrateur lui-même très amateur de jogging qui a été l’ami de celui qu’on appelait Pre. Veuf, vieillissant, Pete se souvient de celui qui a détenu de nombreux records des Etats-Unis au temps où il courait, mais aussi de sa propre femme morte d’un cancer et d’une course de relais ambitieuse à laquelle il a participé avec tout un groupe de copains quelques mois auparavant.



C’est donc un roman qui parle de course à pieds, de performances, d’ambition mais aussi d’amitié, de deuil, de résilience, de mémoire. Le tout dans la langue fluide et élégante de Daniel Charneux. Bon, je n’ai pas été aussi séduite que le moine Ryôkan (je ne suis définitivement pas sportive) mais j’ai passé un bon moment en compagnie de Steve et de Pre. En toile de fond, l’Amérique des droits civiques, de la guerre au Vietnam, les Jeux olympiques de Munich en 1972 avec l’attentat palestinien, entre autres. De plus, le profane comme moi apprendra quelques anecdotes intéressantes sur l’entraînement et l’équipement des coureurs à pieds.
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More

De Thomas More je ne connaissais que les grandes lignes .

Ici j'ai enfin fait le rapprochement entre l'auteur de l'utopie et le contemporain d'Henri XIV , j'ai appris qu'il était ami avec Erasme qui lui a écrit son Éloge de la folie au même moment .

Thomas More qui a été quasiment le seul à ne pas renier ses idées et à ne pas accepter le divorce et le remariage de son souverain pourtant tout puissant , comment cet homme intelligent a - t-il pu tenir tête à ce roi qui n'acceptait aucune opinion personnelle , aucune critique , et là son ami , son conseiller lui tient tête devant tout le royaume .

Péché d'orgueil , grand humaniste qui ne renoncera pas à ses idées , homme fidèle à la reine Catherine , la reine déchue , un peu de tout ça sans doute à la fois .

J'ai eu la chance de rencontrer l'auteur à une soirée littéraire , j'ai apprécié qu'il nous raconte qu'au début du travail d'écriture, il a commencé par écrire la vie d'un saint , ses recherches , ses tâtonnements , ses doutes .

Et puis lire cet essai m'a donné envie de regarder la très belle série Les Tudors avec ce talentueux acteur qu'est Jonathan Rhys Meyer , série que j'ai regardé en quelques jours , rattrapant le temps perdu mais surtout incapable de décrocher , puis j'ai regardé deux films sur la vie d'Elisabeth 1ère , quelques infos sur le net sur la reine d'Ecosse , jusqu'à ce que j'ai envie de passer à autre chose .

C'est un des plaisirs de la lecture d'apprendre plein de choses , de dériver sur le net au gré des découvertes .
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Trop lourd pour moi

Daniel Charneux est un ecrivain que j'ai rencontré à plusieurs reprises , un homme passionnant qui a une grande sensibilité, qui a déjà une longue carrière derrière lui , il est également passionné par le bouddhisme, il écrit des haïkus .

Dans ce roman , il se livre un peu mais avec la réserve qui le caractérise , un peu autobiographie mais pas trop , mêlant habilement confidences et création romanesque .

J'ai beaucoup aimé ces passages où l'auteur se dévoile , avec une grande pudeur .
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Nuage et eau





Au XVlll siècle, vivait le moine Bouddhiste Japonais Ryôkan, passionné par les enfants avec qui il joue à la balle. Très vite il devient moine Zen et ermite. Pour lui la poésie fut le plus beau des cadeaux. Très beau livre de Daniel Charneux



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Nuage et eau

C’est avec ce livre que je découvre l’auteur Daniel Charneux, très éclectique dans ses thèmes de romans si j’en crois le catalogue de son éditeur Luce Wilquin, et surtout, surtout j’ai découvert le moine et poète Ryôkan, qui a vécu au Japon de 1758 à 1831, et j’ai passé un très beau moment !



Dès la petite enfance, Eizo est un garçon original, et son lien à la nature, au monde de l’eau, des oiseaux, son goût de la solitude et de la lecture ne cessera pas, même lorsque, entrant dans le monde des adultes, il reçoit le nom de Fumitata et doit s’initier à la charge de myoshun (maire et collecteur d’impôts pour les shoguns), dont le fils aîné est censé hériter de son père. Un évènement dramatique le conduira tout droit au temple de Kosho où il demande à devenir moine bouddhiste. C’est à son ordination qu’il recevra le nom de Ryôkan, qui signifie « Grand coeur ».



A travers le personnage de Ryôkan, on découvre l’initiation à la vie monastique bouddhiste, à la méditation zazen, à la recherche guidée par l’enseignement d’un maître, à la progression du moine sur le chemin de la Voie. Les longues heures de méditation l’ouvrent à un amour universel qui veut sauver tous les êtres, qu’ils soient humains, animaux et même végétaux. Ryôkan porte bien son nom, lui qui adore jouer avec les enfants, lui qui est capable de se tenir immobile au point que les oiseaux viennent manger sur lui, lui qui ne se lasse pas de contempler les érables et les cerisiers au fil des saisons, la lune son amie argentée, ou de laisser pousser en liberté une petite tige de bambou qui s’est invitée dans son ermitage.



« La vie, la Voie, la poésie » : les trois piliers de l’existence de ce moine qui a vécu en communauté plusieurs années, puis est devenu moine itinérant, unsui, « nuage et eau » et a fini sa longue vie en ermite, continuant à pratiquer une ascèse rigoureuse, mendiant sa nourriture, accueillant toute forme de vie qui passait chez lui, jusqu’à rencontrer la moniale Teishin, « Coeur fidèle ». Ces deux coeurs s’accorderont dans une amitié que l’on peut qualifier de mystique, très pure et très ouverte.



J’ai été vraiment très touchée par la vie et l’oeuvre de Ryôkan. J’ai été frappée par les correspondances très marquées entre les moines bouddhistes et les moines chrétiens : peu importe le dieu ou le personnage de référence, ce qui compte, c’est la décision de vivre à l’écart du monde tout en continuant à porter ce monde et tous les êtres vivants dans la prière ou la méditation, l’appel à l’ascèse, à l’épure, au détachement de soi, l’exil intérieur vers une forme de vie nouvelle, en ce monde ou dans l’au-delà, tout en gardant bien les pieds sur terre par le travail, l’accueil des hôtes, et même la mendicité.



Jusqu’à la fin de sa vie, Ryôkan ne cessera pourtant de penser aux siens, à ses parents, à ses nombreux frères et sœurs, les liens, bien que purifiés par la distance, ne seront jamais tout à fait tranchés, ce qui le rend tellement humain et proche. Son amitié avec Teishin, alors qu’il approche de la mort, lui rendra « une mère, une sœur, une épouse, une amie » dont il sera « le père, le frère, l’époux, l’ami ». Tous deux sont aussi poètes, ils manient sans cesse « la pierre et l’encre, le papier et le pinceau » pour exprimer leurs sentiments dans des haikus et autres formes poétiques très codifiées qui parsèment le livre.



J’ai vraiment aimé ce temps de contemplation, de silence intérieur, de recherche auquel nous invite Ryôkan. J’ai parfois été un peu gênée, au début, par l’écriture très codifiée elle aussi de Daniel Charneux, qui emploie de nombreuses énumérations qui vont toujours par trois ou par quatre. Mais cela correspond peut-être aussi aux rituels qui rythment l’existence du moine et je m’y suis très vite habituée. C’est aussi une belle méditation sur la vie et la mort, sur l’impermanence des choses, sur l’importance de goûter l’instant présent… toutes choses qui peuvent parler à nos coeurs et nos cerveaux peut-être rassasiés de vitesse, souvent obligés à la rentabilité.



Une très, très belle découverte en forme de coup de coeur, qui n’a pas été dans me rappeler les estampes d’Hiroshige, et qui m’incite à découvrir encore davantage l’univers de Daniel Charneux
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Nuage et eau



Daniel Charneux : "Nuage et eau"

Unsui ”, nuage et eau, moine itinérant. D’une écriture fluide, pure et simple, Daniel Charneux raconte la vie de Ryokan (1758 à 1831), moine zen japonais. Une vie intense, proche de l’essence du monde, en communion avec la nature, comblée par le vol des oiseaux, les jeux des enfants, le vent dans les feuilles, la croissance d’un bambou et les ricochets à la surface de l’eau. De sa belle écriture calligraphiée, Ryokan fige ces bonheurs purs pleins de sérénité avec des haïkus transcendés au crépuscule de sa vie par une rencontre avec une moniale, sage et aérienne, de quarante ans sa cadette, avec qui il entretint une correspondance poétique.



Ce roman biographique, “Nuage et eau” (Luce Wilquin, 230 pp., env. 20 €), Daniel Charneux – professeur de français et directeur d’école –, l’a écrit après avoir reçu le prix Charles Plisnier en 2007 pour “Norma, roman”, comme s’il avait fallu un signe. Et si le récit de cette vie d’ascète semble si juste, empli d’images poétiques, c’est parce que Daniel Charneux a lui-même pratiqué le zen plusieurs années.



Comment avez-vous découvert Ryokan ?

Par les haïkus. J’ai acheté un recueil de Ryokan par hasard et j’ai immédiatement été fasciné par son œuvre et, plus tard, grâce à une biographie, par sa vie.

Vous avez publié “Pruine du temps”, un recueil de haïkus. Qu’est-ce que ce genre représente pour vous ? Quelles sont les contraintes ?

Un haïku, c’est un regard instantané sur les choses. Comme une photographie avec des mots. Le haïku classique contient dix-sept syllabes en trois séquences, il existe aussi des haïkus libres mais j’aime cette musique de dix-sept syllabes, les contraintes techniques sont indispensables à toute forme d’art.

La fluidité et la simplicité de l’écriture ressemblent à la beauté pure du haïku.

En tant que professeur de français, la beauté existe quand il y a adéquation entre la forme et le fond. Si cela fonctionne, cela me réjouit. J’ai essayé de raconter cette histoire de la manière la plus limpide, la plus classique, sans effets de manche.

La vie de Ryokan est-elle exemplaire ?

C’est un idéal que vous partagez ? Oui. Il suffit de s’interroger un peu sur nos vies. On ne comprend plus rien au monde, on passe le plus clair de son temps à des choses pas très nécessaires, il y a une phrase qui dit “on perd sa vie à la gagner”. Notre vie est faite de superflu et on oublie souvent l’essentiel. Ryokan comprend qu’un bol, une hutte, le vêtement qu’il porte et la lune dans le ciel suffisent. Les meilleurs moments que l’on a vécus sont toujours liés à l’émotion, une rencontre, un chevreuil qui passe dans un bois… rien de matériel. Ce retour à l’essence même des choses est l’idéal bouddhiste, il pourrait aussi être mon idéal.

Dans la vie de Ryokan, il ne se passe rien et, pourtant, elle est si riche, si remplie…

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Comme un roman-fleuve

Très beau livre émouvant. François, 80 ans, se remémore sa vie au fil des ses promenades le long de la Meuse à Liège. Il tente de reconstituer comment Sonia, son épouse s'est éloignée de lui est s'est murée dans le silence. Chaque chapitre évoque un pont jeté au-dessus du fleuve. Mais n'est ce pas aussi des ponts jetés pour retrouver leur amour originel, le temps lissant leurs désaccords ?

Très belle écriture aussi, on oublie, nous francophones belges, que nous avons de très bons auteurs que l'on néglige trop souvent par méconnaissance ou du manque de "publicité " de la part des médias.

NB Les Editions Luce Wilquin ne m'ont jamais déçue. Je leur fais parfois une confiance aveugle quand je découvre un de leur livre au détour des rayons des librairies.
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More

Tout d'abord, je remercie les éditions MEO et Babelio pour l'envoi de ce livre dans le cadre de la masse critique. J'avais coché plusieurs titres, mais j'ai été ravie que ce soit celui-ci qui ait été sélectionné !



Ayant lu l'Utopie il y a quelques années, oeuvre étonnante dont nous fêtons cette année les 500 ans de parution, j'avais gardé l'idée d'en apprendre davantage sur Thomas More. Homme du tout début du XVIème siècle, humaniste et saint patron des hommes d'Etat, juriste, père de famille, homme cultivé, amoureux des belles lettres et de la vie, mort décapité sur ordre d'Henri VIII le 6 juillet 1535.

Alors oui, j'ai appris beaucoup à la lecture de ce livre. le chapitre décryptant l'Utopie et en donnant des clés de lecture, m'a passionné; le parallèle avec la pièce de Jean Anouilh "Thomas More ou l'homme libre" est éclairant sur la personnalité du saint; son amitié avec Erasme, auteur de "L'éloge de la folie" est largement évoquée.



En revanche, la forme de ce livre m'a quelque peu déconcertée : ce va-et-vient entre vie de Thomas More et quête de Daniel Charneux m'a parfois laissée sur ma faim. J'aurais aimé que certains sujets soient davantage creusés - la jeunesse de Thomas More, sa famille, ses années de juriste - et que l'auteur s'arrête moins sur les détails de sa recherche personnelle. Ceci dit, il le fait avec beaucoup de sincérité : oui, il s'agit d'une "suite baroque", de "variations", plus que d'une sonate classique ou tout simplement d'une biographie classique.



L'auteur cherche en Thomas More une sainteté sans Dieu, c'est certainement ce qui m'a le moins convaincue. Car dans l'Eglise Catholique, le saint est bien celui qui, puisant à la source de sa foi en Dieu, déploie ses qualités humaines et les met au service de la société et de l'homme. Rien d'éthéré en cela, contrairement à ce que de nombreuses hagiographies fort mal écrites, voudraient nous présenter. Et difficile par là-même de séparer la foi des oeuvres.



Thomas More, homme intègre a fait preuve d'une "grande cohérence morale", il a été un père de famille aimant, un homme affable, un ami fidèle, mais aussi un homme faillible et perfectible, ce que Daniel Charneux a bien su montrer.



En refermant ce livre, mon intérêt pour Thomas More n'a pas décru, bien au contraire…Pour terminer, je voudrais citer ces quelques mots de l'auteur que je trouve magnifiques :

"J'ai peut-être grâce à la compagnie de More, développé en moi quelques quarks de sainteté. Parler d'atomes serait prétentieux. Ce More que je vais quitter bientôt, certainement pas pour toujours, car les êtres passés un temps par notre plume restent en nous davantage peut-être que de nombreux être réels."
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Pierre Hubermont écrivain prolétarien : De l'as..

J'ai reçu ce livre dans le cadre de l'événement « Masse Critique » non-fiction. A ce propos, je remercie Babelio et l'éditeur M.E.O. de m'envoyer ce livre intéressant.



En lisant le résumé du livre, j’étais immédiatement intéressé : un écrivant plorétarient, c’est-à-dire progressiste, fait le choix de collaborer avec l’occupant nazi. Comment ? et pourquoi ?



Charneux, Fourmanoit et Duray nous livrent ici une biographie complète, minutieusement recherchée et documentée, de l’écrivain belge controversé Pierre Hubermont. Ils ne négligent pas le contexte politique, économique et sociale dans lequel Hubermont vivait. Un point que j’ai trouvé très fort c’était que ses œuvres sont présentés autant efficacement que l’on peut constater son évolution idéologique et les caractéristiques fondamentales de son style littéraire.



On trouve, alors, une réponse très claire et détaillée à la première question (comment a-t-il collaboré ?). On voit les changements, parfois subtils et parfois abrupts, dans les articles d’Hubermont et comment il rapproche de « l’Ordre Nouveau ». En revanche, c’est le lecteur qui doit répondre à la deuxième question (pourquoi a-t-il collaboré ?). Il manque d’analyse profond de ce changement, mais il me semble que ce soit fait exprès. Les chercheurs ne veulent pas donner de réponses catégoriques ; c’est évident puisqu’on voit le point d’interrogation souvent dans ce livre. Ce n’est pas nécessairement un point négatif, puisqu’il l’on fait penser et poser des questions. J’avais rencontré cette phénomène plusieurs fois : un écrivain ou un intellectuel progressiste change la peau en face des circonstances qui mettent ses convictions auparavant exprimées à l’épreuve. En lisant sur Hubermont, j’ai développé une idée qui peut donner une partie de la réponse : peut-être est-il le désir d’un auteur, journaliste, acteur, etc. d’être individuellement reconnu, différent, avant-gardiste qui l’empêche d’engager avec les « foules » quand c'est le temps pour le faire. On trouve des traces de cela chez Hubermont même avant la guerre, quand il signe le manifeste du Groupe du lundi.



En retournant vers le livre, je le trouve pertinent à nos jours, puisque l’on trouve des similarités très inquiétantes entre le discours des collaborateurs avec les nazis et ceux des porte-paroles, officiels ou pas, de l’extrême droite et les néo-fascistes.



Encore une fois, je remercie M.E.O. pour le livre et la lettre gentille que j’ai trouvé dedans.

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Trop lourd pour moi

Il y a un peu plus d’un an, je découvrais Daniel Charneux avec « Comme un roman fleuve ». C’est avec plaisir que je l’ai retrouvé ici, dégustant lentement, son écriture pleine de charme et de rigueur. Il aime faire vibrer les mots qu’il choisit avec soin pour décrire le quotidien, les émotions, les personnes rencontrées ou les paysages traversés. Sa langue s’est allégée des multiples appositions qui alourdissaient quelque peu son roman précédent et j’ai pris encore plus de plaisir à la lire. Formellement, ce roman est donc pour moi une réussite.



En ce qui concerne le fond, j’avoue avoir déchanté au deux tiers du roman. Jean-Baptiste Taillandier est à peine plus vieux que moi et j’ai beaucoup aimé découvrir ses souvenirs d’enfance, sa famille et ses habitudes, les objets du quotidien, les loisirs qui étaient les siens... Je me suis en quelque sorte replongée moi aussi en enfance à l’évocation de ces souvenirs qui faisaient écho en moi.



Là où cela se corse, c’est dans la manière dont il aborde sa vie d’adulte. Un Œdipe mal réglé, une perte prématurée, un égo assez développé... et ce petit garçon qui semblait avoir tout pour devenir un adulte épanoui, va passer sa vie à se chercher, à passer à côté des autres et de lui-même. A chaque obstacle, il s’enfonce un peu plus dans la déprime, voire la schizophrénie et perd pied avec la réalité. Cherchant son équilibre dans un métier tourné vers les autres (psychologue en milieu scolaire), dans des relations où il se laisse faire sans vraiment faire de choix, et même dans le bouddhisme ! Il se perd un peu plus au fil du temps qui passe.



Si l’enfant et l’adolescent m’ont émue, l’adulte m’a passablement irritée. Témoin passif des déboires du monde, des problèmes de notre société, de sa propre existence, il fuit toute réalité ne faisant jamais face. Il se pose en victime, telles les héroïnes des tragédies grecques, ballotées par la fatalité. Par peur, par lâcheté, par manque d’audace, il est le jouet du destin, jamais acteur de sa propre existence. Que j’aurais aimé le secouer !



Un récit de vie tout en finesse à fuir si l’on est soi-même un peu déprimé. Un roman à l’écriture minutieuse que j’aurais souhaitée au service d’un récit optimiste. A lire pour se faire sa propre impression.


Lien : http://argali.eklablog.fr/tr..
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Comme un roman-fleuve

François a 80 ans, il est au seuil de sa vie, il va revivre celle-ci, telle les méandres du fleuve qui a bercé son existence. Au gré de 7 chapitres, 7 ponts de Liège nous conteront son histoire. Il vit avec Sonia qui ne lui parle plus. Pourquoi? On va remonter le temps et essayer de comprendre comment ils se sont éloignés.



Un amour fusionnel au départ qui nous conduit vers l'incommunicabilité. Un amour très fort, très puissant, resté intact pour François. Mais pourquoi en est-il là aujourd'hui?



Avec beaucoup de tact et de sensibilité, on va suivre sa vie au jour le jour, le long de ses promenades le long de la Meuse.



Un vrai régal pour celui qui connaît la ville de Liège décrite avec beaucoup d'amour et de passion comme celle qui unit François à Sonia.



Le style est plaisant, Daniel Charneux est un magicien des mots, bien choisis, délicatement. Des expressions bien liégeoises ou belges en italiques surprennent un peu. Aucun dialogue, un style narratif très chargé, toujours très beau, mais la longueur de certaines phrases ou des descriptions m'a un peu fatiguée par moment.



Il n'en reste que c'était un excellent moment , un petit bijou au niveau de l'écriture. En résumé, l'histoire d'une vie, d'un roman que l'on écrit , l'histoire d'un homme et de sa ville, l'histoire d'un homme et d'un fleuve.


Lien : http://nathavh49.blogspot.be/
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