Citations de Daniel Pennac (2583)
La lecture ne relève pas de l'organisation du temps social, elle est, comme l'amour, une maniere d'être.
Le temps de lire, comme le temps d'aimer dilate le temps de vivre.
En argot, lire se dit ligoter.
En langage figuré un gros livre est un pavé.
Relâchez ces liens-là, le pavé devient un nuage.
Reste ceux qui ne lisent pas et que terrorisent très tôt les radiations du sens.
Ceux qui se croient bêtes... A jamais privés de livres...A jamais sans réponses... Et bientôt sans questions.
Il saute sur ses pattes. Toujours d'accord pour sortir, toujours content de rentrer, Julius. Un chien.
Et pour les cadeaux de Noël bien sûr. Oh, un beurrier électrique ! C'est exactement ce dont j'avais envie, merci. C'est vrai, il faut attendre de dépiauter les cadeaux de Noël pour mesurer à quel point nos plus proches nous ont perdu de vue.
Si je devais caractériser ces cours, je dirais que mes présumés cancres et moi y luttions contre la pensée magique, celle qui, comme dans les contes de fées, nous fait prisonniers d'un présent perpétuel. En finir avec le zéro en orthographe, par exemple, c'est échapper à la pensée magique. On rompt un sort. On sort du rond. On se réveille. On pose un pied dans le réel. On occupe le présent de l'indicatif. On commence à comprendre. Il faut bien qu'un jour arrive où l'on se réveille ! Un jour, une heure ! Personne n'a croqué pour jamais la pomme de la nullité ! Nous ne sommes pas dans un conte, victimes d'un charme!
S la lecture n'est pas un acte de communication immediate, elle est, finalement objet de partage. Mais un partage longuement différé et farouchement sélectif.
Relire, ce n'est pas se répéter, c'est donner une preuve toujours nouvelle d'un amour infatigable.
Une bonne classe, ce n’est pas un régiment qui marche au pas, c’est un orchestre qui travaille la même symphonie.
Que tous ces batons, ces boucIes, ces rond et ces petits ponts assemblés fissent des lettres, c'était beau ! Et ces lettres ensemble, des syllabes, et ces sylabes, bout à bout, des mots, il n'en revenait pas. Et que certains de que certains de ces mots lui fussent si familiers, c'était magique !
Maman, par exemple, maman, trois petits ponts, un rond. une boucle, trois autres petits ponts, un deuxième rond, une autre boucle, et deux derniers petits ponts, résultat: maman.
Comment se remettre de cet émerveillement?
[..] on exigeait rien de lui, pas un sou, on ne lui demandait pas la moindre contrepartie. Ce n'était même pas une récompense. (Ah! les récompenses... Comme il fallait se montrer digne d'avoir été récompensé!) Ici, tout se passait en pays de gratuité.
La gratuité, qui est la seule monnaie de l'art.
Ainsi découvrit-il la vertu paradoxale de la lecture qui est de nous abstraire du monde pour lui trouver un sens.
Le verbe lire ne supporte pas l’impératif. Aversion qu’il partage avec quelques autres ; le verbe «aimer »... le verbe «rêver »...
On peut toujours essayer, bien sûr. Allez-y : «Aime-moi !» «Rêve !» «Lis !» «Lis ! Mais lis donc, bon sang, je t’ordonne de lire !»
— Monte dans ta chambre et lis !
Résultat ?
Néant.
Les droits imprescriptibles du lecteur:
1. Le droit de ne pas lire.
2. Le droit de sauter des pages.
3. Le droit de ne pas finir un livre.
4. Le droit de relire.
5. Le droit de lire n'importe quoi.
6. Le droit au bovarysme (maladie textuellement transmissible).
7. Le droit de lire n'importe où
8. Le droit de grappiller.
9. Le droit de lire à haute voix.
10. Le droit de nous taire.
- Le spritz à l’Aperol …
Le grand Georges esquissa un sourire :
- Un des pires fléaux de la mondialisation, ce truc.
- Connaissez-vous le seul moyen de faire rire le bon Dieu ?
Hésitation au bout du fil.
- Racontez-lui vos projets.
Je l'ai laissée parler, je me suis dit que se nourrir de mots c'était déjà manger quelque chose, et pendant qu'elle sustentait son âme je surveillais la machine qui bouffait mes pièces une à une, et pendant que la machine gobait du métal guilloché, moi, lové dans mon écouteur comme dans ces coquillages où bat le cœur de la mer, je m'offrais un festin d'amour gratuit.
Et qu'en dirais-tu, toi, le spécialiste, de cet état d'ignorance ?
- Je dirais que ce n'est pas le grand trou noir que vous imaginez. C'est tout le contraire. Un marché aux puces où tu trouves tout et n'importe que sauf le désir d'apprendre ce que les profs t'enseignent.
- p. 294
Vous êtes tous les mêmes, les profs ! Ce qui vous manque, ce sont des cours d'ignorance ! On vous fait passer toutes sortes d'examens et de concours sur vos connaissances acquises, quand votre première qualité devrait être l'aptitude à concevoir l'état de celui qui ignore ce que vous savez !
- p. 291