Citations de Elvire Murail (267)
Les navets, les épinards et les haricots verts ne sont pas infects. Ce qui est dégoûtant, c'est de jeter la nourriture. C'est une insulte envers tout ceux qui n'ont pas les moyens de s'en offrir, du gratin de chou-fleur.
Il doit y avoir des milliards de première fois au cours d'une vie. Il y en a une que tout le monde redoute. La première fois où on perd quelqu'un qu'on aime. Quand ça m'arrivera, et ça m'arrivera... Je ne veux pas y penser.
A force de mettre le diable à toutes les sauces, on finit par le voir dans sa cuisine.
(p 132)
- Bande de moules ? Allez vous faire voir chez les grecs ? Je suppose que je dois te remercier pour cette nouvelle contribution au vocabulaire de ta petite sœur?
Pablo rit. Depuis que Norma savait parler, elle jurait comme un charretier.
( p 4 )
Depuis qu'elle avait commencé à leur offrir des choses, elle avait beaucoup moins peur. Les Ombres semblaient s'être écartées d'elle. Morgane avait conscience que les Ombres rodaient tout autour mais elles s'attaquaient aux autres. Morgane l'avait compris. Et même s'il lui restait un doute, elle pensait que l'accident de Mlle Dautun n'en était pas un. Les Ombres avaient puni sa tortionnaire. Elles l'avaient fait pour la protéger. Elle n'était plus seule, maintenant.
Les Ombres veillaient.
-Tu ne me parle plus des Ombres, dit-elle. Tu n'as plus peur ?
-Non répondit Morgane. Elle ne me poursuivent plus.
-C'est curieux... Parce qu'elles sont toujours là, n'est-ce pas ?
-Je crois...
Camilia comprit que Morgane ne voulait pas discuter de cela avec elle. Sur le moment, elle n'y attacha pas trop d'importance.
-Je t'aime... murmura-t-il.
Et la glace devint de l'eau. Camilia ouvrit les yeux et sourit .
Je t'attendais dit-elle.
Mélaine sourit tristement : il y avait également pillé la maison de poupée de style victorien, n'y laissant qu'une table cassée. Elle ouvrit une des boîtes posées sur une étagère. Des fleurs séchées. Elle n'osa pas y toucher. Elle s'approcha de l'armoire mais Heidi l'arrêta.
- Je ne te conseille pas de regarder là-dedans.
Ce sont sûrement des vêtements et... c'est trop... enfin, tu ma comprend.
Oui,Mélaine comprenait. Les habits d'une fillette disparue, c'était sinistre. Pire, c'était un sacrilège.
Après avoir essayé trois chambres sans succès, Mélaine et les sœurs finirent par trouver celle de Mélanie. Il ne pouvait y avoir de doute. C'était une chambre de petite fille pleine de jouets en bois et de boîtes décolorées par le temps. Tout avait été laissé en l'état, comme si on avait espéré le retour de la petite fille après tant et tant d'années...
Dans l'excitation du moment, Mélaine avait oublié toutes ses appréhensions et était entrée dans la chambre.
Le coffret contenait des bijoux de valeur mélangés avec des babioles bon marché.
Et un trousseau de vielles clés.
- Qu’est-ce qu’on mange ? demanda Christopher.
- Du dindonneau, répond Hortense. Je vais allumer les fours.
- C’est quoi, du dindonneau ?
- Ben… C’est un genre de dindon. Une espère de poulet.
Christopher regarda les rôtis. Il enfonça un doigt dans la viande molle et fit « beurk ».
- Moi je veux une cuisse, dit Grégoire.
- Il n’y a pas de cuisse, expliqua Hortense. C’est préparé en rôti.
- Pourquoi ? demanda Jean-Yves.
- Il n’y a pas d’os, c’est plus pratique !
- Je n’aime que les cuisses dans le poulet, déclara Grégoire.
- J’en veux pas, dit Sophie. C’est trop bizarre, du poulet en rond.
[…]
- C’est pas grave si c’est mauvais, répondit Nicolas. On a l’habitude avec la cantine.
J’ai vu qu’il y avait des larmes dans les yeux tristes d’Enzo. Et ça, je n’ai pas aimé. Alors j’ai insisté :
- Enzo a le droit de s’amuser, lui aussi. Ce n’est pas la maladie qui doit gagner.
Moi, j’aime pas ma cousine Ludivine. Elle est persuadée que son nom c’est « Divine » seulement. Elle se prend pour la huitième merveille du monde. Tout ça parce qu’elle a les yeux verts et de longs cheveux blonds. Mais si on la regarde bien, on voit qu’elle a aussi un nez en pied de marmite et les épaules tombantes. Et pis, elle est petite pour ses neuf ans. Surtout à côté de moi.
A la rentrée, notre maîtresse nous a prévenus qu’il fallait être gentils avec Enzo parce qu’il est fragile. Il a été opéré récemment. Il faut faire attention à ne pas lui passer nos microbes. Ça nous a bien filé la trouille. Du coup, on n’ose pas s’approcher d’Enzo.
- C’est à cause de sa maladie, qu’il a les yeux tristes ? demande Félix.
- Ben… Sans doute.
Félix est observateur. Il a raison. Enzo a les yeux tristes. C’est comme s’il n’y avait plus de lumière dedans.
Maman sort en appelant Félix. Et ensuite, elle hurle. Elle a découvert qu’il avait déroulé le rouleau de papier-toilette en entier. C’est une des bêtises préférées de Félix. Je ne comprends pas pourquoi il faut ça aussi souvent. Ça se termine forcément par une punition. Et voilà ! Félix pleure quand Maman l’envoie dans sa chambre avec l’interdiction d’en bouger jusqu’au dîner. Il est privé de ses dessins animés du soir. Mon petit frère est un idiot.
Je glisse la carte postale sous mon pull. Je ne sais pas pourquoi j'ai envie de la garder. Mais c'est une habitude chez moi. Je garde des tas de trucs. Maman dit que ce sont des saletés. Pour elle, un caillou, c'est un caillou. Moi, je vois qu'il a la forme d'un croissant de lune.
La mémoire visuelle, élimine les détails sans importance, sublime la sensualité.
Il y a un moment drôle quand on approche du collège. J'aperçois Karen qui marche vers nous. Alors qu'elle n'est plus qu'a dix mètres d'elle, ma sœur continue de lui parler au téléphone ! Peut-être que pépé Louis a raison. Les ondes, ça vous liquéfie le cerveau.