Citations de Elvire Murail (267)
Mais, même ça, je ne pourrais pas. Je suis trop gros pour entrer dans un trou de souris.
Personne ne s'intéresse à moi. Personne ne me demande ce que je pense. Personne ne sait ce qu'il y a dans mon cœur. Dans mon cœur, il y a un secret. Mais je ne le confierai à personne. Parce que je n'ai personne à qui le confier.
Je me tais quand on me parle de gros. J'ai honte. Je suis gros. Très gros. Très très gros. Même mon nom est gros. Henri. Des petites lettres qui pèsent lourd, avec un gros H majuscule. Je rêve d'un nom avec des lettres qui s'élancent dans les pages : des l et des t bien minces. Pas de b ou de d, ils sont trop rondouillards. J'aurais voulu m'appeler Gilles ou Titus.
J ai appris que le courage n'est pas l'absence de peur, mais la capacité de la vaincre.
Il dépassa le premier étage, le cœur battant. Il descendit plus rapidement, les deux mains accrochées à la rampe. La veilleuse de l'entrée restait allumée en permanence.
Damien espéra qu'il se mette à neiger. Les marches de l'escalier craquaient sous ses pas.
Moi aussi, je collectionne des choses : des cartes postales, des savonnettes d’hôtel, des porte-clés... Mais surtout, je collectionne tout ce qui se rapporte aux loups. J'aime les loups. Dans l’ordre, j'aime papa et maman en premier, les loups juste après.
Mais les racistes ne posent jamais les bonnes questions.
C'est un truc qui m'énerve chez ma soeur, elle parle beaucoup de tout ce qu'elle va faire, mais elle ne fait jamais rien. Moi je la ferme et j'agis.
C'est ça la démocratie. On a le droit de faire les erreurs qu'on veut
- Vous portez toujours des pantalons ?
- Ça vous embête, hein ? Si j'avais des jupes, vous pourriez passer votre main dessous.
- Je ne suis pas sûr d'en avoir envie.
- Allons donc ! Osez dire que vous ne vous intéressez pas à mon cul !
- J'ai horreur de la vulgarité chez les femmes.
- J'en suis persuadée. En tout cas, vous ne me ferez jamais croire que vous êtes venu ici pour regarder mes toiles.
- Pourquoi m'y avoir invité, alors ?
- Je n'ai jamais dit que je ne voulais pas baiser avec vous.
- Ah ! Je vous plais ?
- Oh que non !
- Pourquoi faire l'amour dans ce cas ?
- Parce que je veux savoir COMMENT vous baisez. Ça m'intéresse.
- C'est une drôle d'idée ! Quelle est la place du plaisir là-dedans ?
- On verra bien.
- Je ne veux pas de vous, merci.
- Je ne vous crois pas. D'ailleurs, je vais me déshabiller, ça m'étonnerait que ça ne vous tente pas, à la longue.
C'est fou ce que les conversations qu'on a avec soi-même peuvent être dénuées de tout intérêt et de tout sens logique.
(p. 31)
Comment pouvais-je venir en aide à Joss Hardy ? Il y avait de fortes chances qu'il oublie mon intervention, et en tout cas ce qu'il m'avait dévoilé. Il valait mieux que j'efface de ma mémoire les paroles dérisoires d'un misérable poivrot. Oui, retourner dans mon confort individualiste, rayer de mes pensées les problèmes des autres, comme tout le monde, comme toujours... Après tout, qui me tend la main, à moi ? Pourquoi aiderais-je ceux qui ne font rien pour moi ?
(p. 72-73)
Ce matin-là, j'aurais tout foutu par la fenêtre si j'avais pu. Au-dessus, Rachmaninov jouait l'opus quatre cents décibels, à côté Sparks et Beatrix s'écorchaient vifs, environ cinq cents décibels et en dessous un gosse hurlait pour se faire entendre dans le tintamarre avec la mère en sus : j'allais devenir sourd dans la minute qui suivait. Je sortis sur le palier en poussant moi-même une gueulante, histoire de ne pas être en reste.
(p. 57)
La plupart des locataires voyaient d'un très mauvais oeil la présence de deux homosexuels parmi eux.
[...]
- On ne peut quand même pas laisser ce pauvre gars se faire écorcher vif sans bouger ! insistai-je quand je compris qu'ils ne tenaient pas à se mêler de cette histoire.
- Franchement, Tuncurry, les problèmes de ces deux pédales ne nous concernent absolument pas ! me répondit Sparks en haussant les épaules.
- Mais enfin ! m'écriai-je, si un homme battait sa femme jusqu'à lui fendre le crâne, vous vous dresseriez bien haut en exigeant justice ! Parce qu'il s'agit d'un homosexuel, vous considérez sans doute que ça fait partie de ses perversions !
- Mais il a lui-même refusé que tu lui portes secours !
- Il n'y a pas deux femmes sur cinq qui osent avouer qu'elles sont battues ou qui se plaignent. [...]
(p. 13-14)
A la cantine, Abdourahim prit l'assiette de saucisson. Il alla s'asseoir en face de son frère et mordit dans une rondelle. Il fit la grimace car il ne trouva pas ça bon.
- Tu te crois malin ? demanda Cali.
- Va chier, répondit Abdourahim. Moi, je suis libre.
Cali regarda le saucisson et ressentit un trouble, presque un malaise.
( p 196)
Wafa pensa à Halimo. Toujours souffrir...Devait-elle aussi se résigner, se sacrifier et se taire éternellement ? Était-ce cela, le destin des femmes?
( p174)
C'était une poupée russe écrasée, accrochée à une chaînette tordue dont l'anneau principal avait été arraché.
Jusqu'alors, Mélaine avait surtout ressenti de la compassion pour sa grand-tante. Elle s'était imaginée une Mélanie à l'image de sa photo, sage au regard profond et direct.