Citations de Emily St. John Mandel (363)
La chaleur rendait toutes choses irréelles.
L’argent ouvre de nouveaux horizons.
Le plagiat, c’est une chose grave. À l’école de journalisme, on t’apprend ça dès le premier jour.
C’est vraiment trop demander que d’avoir un endroit sûr où mon enfant puisse jouer ?
Les enfants sont les premiers à en souffrir. La réduction du financement des aires de jeu est pour nous un véritable cauchemar.
You can’t argue with them, because they live by an entirely different logic. You come to a town where everyone’s dressed all in white, for example. I’m thinking of a town we visited once just outside our usual territory, north of Kincardine, and then they tell you that they were saved from the Georgia Flu and survived the collapse because they’re superior people and free from sin, and what can you say to that? It isn’t logical. You can’t argue with it. You just remember your own lost family and either want to cry or harbour murderous thoughts.
Le trouble de retrouver ses contemporains plus ou moins décrépits, les souvenirs d'un visage plus jeune venant se heurter à la réalité des bajoues, des poches sous les yeux, des rides inattendues, puis l'effroi de se rendre compte qu'on a probablement l'air aussi vieux qu'eux.
Peut-être croyons-nous à un certain niveau que si le monde devait prendre fin et être réinventé, si quelque catastrophe inconcevable devait survenir, alors nous pourrions être réinventés, nous aussi, sous la forme de personnes meilleures, plus héroïques, plus respectables.
Mais qu’est-ce qui fait qu’un monde est réel ?
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Dans ces rues, tous les autres marchaient plus vite que moi; ce qu'ils ne savaient pas, c'est que je m'étais déjà déplacé trop vite, trop loin, et que je ne souhaitais pas voyager davantage. Dernièrement, j'ai beaucoup réfléchi au temps et au mouvement, au fait d'être un point fixe dans le va-et-vient incessant.
Il est surprenant de voir la rapidité avec laquelle on en vient à trouver normal de vivre sur un banc, avec une simple valise, près d’une porte d’embarquement. P.257 EPUB
- Pourquoi voulais-tu prendre la mer ? (…) Je ne veux pas être indiscret, si tu préfères ne pas en parler. (…)
- Non, ça va. En fait, ce n’était pas vraiment… Je n’ai pas quitté la terre ferme à cause de ce que cet homme a fait, spécifiquement. Je l’ai quittée parce que je n’arrêtais pas de tomber sur les gens qu’il ne fallait pas.
– C’est ça le problème avec la terre, dit Geoffrey. Il y a trop de gens dessus.
Ce n’était pas ça qui la retenait dans cette nouvelle vie étrange, dans le royaume de l’argent ; ce n’étaient pas les vêtements, les objets, les sacs à main ni les chaussures. Ce n’étaient pas la luxueuse maison, les voyages ; ce n’était pas la compagnie de Jonathan, même si elle avait pour lui une sincère affection ; ce n’était même pas l’inertie. Ce qui la retenait dans le royaume, c’était le fait – précédemment inconcevable – de ne pas avoir à penser à l’argent, car c’est bien cela que l’argent vous procure : la liberté de cesser d’y penser. Si vous n’en avez jamais été privé, vous ne pouvez pas comprendre la profondeur de cette donnée, à quel point cela change radicalement votre vie.
Vous savez ce que j’ai appris au sujet de l’argent ? Quand j’ai essayé de comprendre pourquoi ma vie à Singapour me semblait plus ou moins identique à celle que j’avais à Londres, c’est là que j’ai réalisé que l’argent est un pays en soi.
« Nous traversons ce monde si légèrement », dit Marie, citant de travers l’une des chansons favorites de Leon. L’espace d’un instant, il crut qu’elle parlait d’une manière générale, pour toute l’humanité, toutes ces vies individuelles qui passaient à la surface du monde en laissant si peu de traces, mais il comprit ensuite qu’elle parlait spécifiquement pour eux deux, Leon et Marie, et il ne put imputer à la nuit tombante le frisson qui le parcourut. Vers l’âge de trente cinq ans, ils avaient décidé de ne pas avoir d’enfants ; à l’époque, ça leur avait paru une manière raisonnable d’éviter les chagrins et les complications inutiles, et cette décision avait conféré à leur vie une certaine aisance qu’il avait toujours appréciée, une bienheureuse absence de contrainte. Mais on pouvait aussi considérer une contrainte comme une ancre, et Leon s’était pris à penser, ces derniers temps, qu’il aurait bien aimé être davantage ancré à cette terre.
Dans le monde extérieur, il restait éveillé la nuit, inquiet à l'idée d'être envoyé en prison ; maintenant, il dort très bien entre deux séances de comptage. Il y a une exquise insouciance à se réveiller chaque matin en sachant que le pire est déjà arrivé.
"C'est purement théorique, avait déclaré le juge, mais je suis tenu, pour des raisons techniques, d'imposer une période de liberté surveillée à l'issue de votre peine." Idée pour une histoire de fantômes : il était une fois un homme qui resta trois ans en liberté surveillée après avoir purgé sa peine de cent soixante-dix ans de prison. Idée pour une histoire de fantômes : il était une fois une femme qui erra, invisible, dans les rues de New York, jusqu'à disparaître dans la foule écrasée de chaleur.
(il)... parlait pour plusieurs d’entre nous qui avaient beaucoup réfléchi à cette dualité : savoir et ne pas savoir, être honorable et ne pas être honorable, savoir que vous n’êtes pas quelqu’un de bien mais essayer quand même d’être quelqu’un de bien dans les limites de la corruption. Nous étions tous prêts à mourir pour la vérité dans nos vies secrètes, ou sinon exactement à mourir, du moins à passer deux ou trois coups de téléphone confidentiels et tâcher de feindre la surprise quand les autorités arriveraient ; mais dans la vie réelle, nous touchions un salaire exorbitant pour rester bouche cousue, et vous n’avez pas besoin d’être un individu totalement horrible pour fermer les yeux sur certaines choses – ou même participer activement à certaines autres choses – quand il ne s’agit pas uniquement de vous, parce que, parmi nous, qui est absolument seul au monde ?
Selon les experts, le 1er janvier 2000 à minuit pile, les centrales nucléaires risquaient de tomber en panne tandis que des ordinateurs déréglés enverraient des myriades de missiles par-dessus les océans, le réseau électrique expirerait, les avions dégringoleraient du ciel. Mais pour Paul, le monde s’était déjà effondré ; c’est pourquoi, trois jours après la mort de Charlie Wu, il était dans le hall des arrivées de l’aéroport de Vancouver, près d’un téléphone public, essayant de joindre sa demi-sœur Vincent. Il avait eu assez d’argent pour fuir Toronto, mais il ne lui en restait pas suffisamment pour faire quoi que ce soit d’autre.
L'enfer, c'est l'absence de ceux qu'on voudrait tant avoir auprès de soi.