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Guy de Maupassant ne s'y trompa point. Il formula son opinion, . au-dessous d'un curieux croquis du jeune romancier, dans une de ses chroniques de début (...) : " Pâle et triste à donner le spleen, maigre comme un séminariste, chevelu comme un barde, et regardant la vie avec des yeux désespérés, jugeant tout lamentable et désolant, imprégné de mélancolie allemande, de cette mélancolie rêveuse, poétique, sentimentale des peuples philosophants, dépaysé dans l'existence vive, rieuse, ironique et bataillante de Paris, Edouard Rod, un des familiers d'Emile Zola, erre par les rues avec des airs de désolation ". Et il portait ce jugement dont l'avenir a si largement justifié la louange finale : " Grandi parmi les protestants, il excelle à peindre leurs mœurs froides, leur sécheresse, leurs croyances étriquées, leurs allures prêcheuses. Comme Ferdinand Fabre racontant les prêtres de campagne, il semble se faire une spécialité de ces dissidents catholiques, et la vision si nette, si humaine, si précise, qu'il en donne dans son dernier livre Côte-à-Côte, révèle un romancier nouveau, d'une nature bien personnelle, d'un talent fouilleur et profond. »

Chapitre I
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M. Rod discerne nettement, à distance, l'influence qu'exerça sur lui Charles Secrétan. On sait avec quelle ardeur et quelle originalité ce penseur professa la philosophie à l'Académie, devenue ensuite Université, de Lausanne. Il était chrétien, mais sa critique ne connaissait aucune barrière; son indépendance avait horreur de tous les fanatismes. Le cours de Droit naturel surtout fut, pour le jeune homme, rempli de révélations. Ce maître excellent témoigna lui aussi une extrême bienveillance à son élève, et M. Rod, passé maître à son tour, fut vivement touché, lors des premières conférences qu'il fit à Lausanne, de revoir la vénérable figure du « Philosophe » parmi celles de ses auditeurs.

Chapitre I
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L'homme ! nous le sentons vivre et souffrir dans les hommes, balbutier à travers leurs paroles, aspirer à travers leurs efforts. Mais où l'atteindre enfin, où le voir face à face, où le saisir dans sa réalité vivante ? Nous le cherchons bien loin, alors qu'il est en nous. « Regarder en soi », voilà peut-être le secret ou tout au moins le principe de tout art profond, qui ne soit pas un artifice. Et qu'on ne dise point que ce sera de l'individualisme étroit, de l'impertinent égoïsme. Ce qu'il faut regarder en soi, ce n'est pas l'accident fortuit des jours, le défilé des petits faits personnels. Ce le spectacle peut amuser des vanités complaisantes ; il n'a rien de commun avec l' intuition profonde où se fondera l'art vivant : « Regarder en soi, non pour se connaître et pour s'aimer, mais pour Connaître et aimer les autres, chercher dans le microcosme de son cœur le jeu du cœur humain, à partir de là, pour aller plus loin
parce qu'en soi, quoi qu'on dise, se réfléchit le monde. »

C'est cette méthode que M. Rod appelait l'intuivisme. Elle répondait à sa nature et aux circonstances. Elle était surtout, pour lui, une excellente méthode de travail. Elle lui a donné un point d'appui dans la seule expérience réelle qu'il eût acquis. Cette expérience, il n'aurait plus désormais qu'à l'élargir pour qu'avec le champ de sa vision s'étend tout naturellement celui de son art. Une belle carrière commençait, qui devait se développer avec ampleur. Edouard Rod était dans sa voie et il allait l'attester en donnant les deux premiers livres où il fût vraiment lui-même : La Course à la Mort et Le Sens de la Vie.

Chapitre II. L'intuitivisme et les romans psychologiques
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Tout s'est passé dans l'âme et il nous a fallu tout deviner. (...)
Car la passion ravage à tout jamais les cœurs qu'elle visite. Derrière elle germent les épines et les ronces et il n'y a plus à récolter que de la douleur. Quelle autre moisson pourrions-nous attendre du champ désolé de la vie ? Les tristes fleurs que notre illusion y cueille fleurissent dans l'épreuve, sous la rosée des larmes. Elles nous promettent l'oubli et ne nous donnent que le désespoir : comme si elles concentraient en elles toutes les vertus du sol de misère où elles naissent !

Chapitre III. Les Romans de la Passion
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(...) Léonard Ferreuse, avocat achalandé, confortablement établi dans sa fonction et dans son ménage, père de deux beaux enfants. Il a oublié depuis longtemps une aventure de jeunesse, la banale liaison avec une ouvrière séduite, puis abandonnée au seuil de la maternité. Un fait-divers vient la lui rappeler un soir, quelques lignes de son journal : la jeune femme est en prison à Londres, accusée d'avoir assassiné sa fillette. Vous imaginez le drame de cette conscience d'homme heureux où le remords s'éveille, d'égoïste à qui le devoir s'impose. Car tous ses sophismes ne sauraient persuader Ferreuse qu'il n'eût rien à faire. Les circonstances laissent un rôle à son intervention, et il a près de lui un frère qui, jadis confident et témoin de son caprice, a pris en pitié la victime, l'a quelque temps suivie et assistée de sa sympathie, ne peut pas douter de son innocence. Il veut entraîner Léonard, apporter leur double témoignage, une correspondance propre à disposer favorablement le jury ; il veut tout tenter pour sauver la malheureuse, exposée à subir la fatalité des apparences. Mais Léonard peut-il laisser peser sur sa femme et sur ses enfants les conséquences de sa faute, désorganiser son foyer ?
M. Rod a remarquablement analysé cette situation et montré plus tard, quand Ferreuse s'est décidé à agir, l'inutilité de l'effort, l'impuissance de la vacillante vérité et de la bonne volonté individuelle devant le jeu de l'ample machine où s'ajustent par un mouvement régulier, implacable, les rouages des lois et des mœurs.

Chapitre IV. Les Romans de Mœurs vaudoises et les Romans sociaux.
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M. Edouard Rod manifestait dans Là-Haut une remarquable aptitude à analyser la vie morale et à découvrir les grandes lois de ses faits dans chacun de ceux qu'il observe. Le sens de ce livre, comme de toutes les belles œuvres (et c'est à quoi on les reconnaît) s'amplifie au-delà des limites où est enclose l'action. Ce n'est plus seulement le joli village de Vallanches dont nous voyons finir l'âge d'or ; ce n'est plus l'unique histoire de ce coin du monde, aimé de ses fidèles, et qui devient pareil aux autres, avec les chemins de fer, les vastes hôtels, l'invasion des touristes et les convoitises autour de cette proie. Non ; c'est cela d'abord, et c'est bien cela toujours, par la vertu évocatrice de l'art qui nous enchaîne aux plus étroites intimités des milieux et des âmes ; mais c'est encore quelque chose de plus. C'est la grande, l'inquiétante métamorphose de ce temps, la fin de cet âge tranquille où la vie du fils ressemblait à celle du père, où les rêves ne montaient pas plus haut que la fumée du toit familial, où la joie des ancêtres était de causer le soir sous l'orme de la place, quand le ciel versait le repos de sa douceur étoilée sur la fatigue des travailleurs. L'histoire de ces humbles s'élargit pour embrasser toutes les destinées pareilles, toutes les destinées tranquilles que nos villes et nos campagnes ont abritées pendant des siècles et qui maintenant apparaissent comme un impossible et charmant idéal à notre temps d'ambitions fiévreuses, d'exigences démesurées, de fortunes rapides.

Chapitre IV. Les Romans de Mœurs vaudoises et les Romans sociaux.
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Le naturalisme avait détourné toute l'attention vers l'extérieur, vers l'apparence des choses et les gestes des êtres. Ceux qui se montreraient le plus curieux de l'humanité ne dépassaient pas l'esprit scientifique, plus préoccupé encore du mécanisme des faits que de leur réalité profonde. L'analyse n'atteignait pas les sources vives de l'âme. il y a quelque chose de plus fécond encore que l'étude positif des faits : c'est l'intuition des forces qui les produisent, le sens de leur travail mystérieux et des conflits où s'engagent leur déterminisme et notre liberté, l'angoisse des soumissions nécessaires le frémissement des justes révoltes, le sen temps des responsabilités sacrées, des efforts à tenter, des défaites à comprendre, des possibles victoires. Il y a une inquiétude, supérieure à la curiosité, un vouloir efficace, plus précieux que le simple.ple savoir. On s'en rendait enfin compte, vers le temps où M. Rod prend conscience de lui-même. Il s'était égaré, lui aussi, et rien n'est plus signi fictif que cette erreur, sinon le retour qui la suivit. Un goût vif des problèmes philosophiques, une intelligence très ouverte, une sensibilité pro fonde, un esprit d'analyse aiguisé encore par une culture extrême et l'habitude de la réflexion, dé fendaient le jeune écrivain contre les illusions où s'acharnaient quelques ouvriers de lettres, les uns sincèrement fourvoyés, les autres avides de passer par la brèche qu'avait ouverte un gros succès.

Chapitre Il. L'intuitivisme et les romans psychologiques
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M. Rod est le romancier de la conscience.
« La vie présente ainsi des situations hautement tragiques, dont tout le drame est intérieur, dont tous les fils sont dans la conscience, et qui, pourtant, nous remuent jusqu'à nos fibres les plus secrètes. » A ces profondeurs de la conscience, se révèle à lui le conflit le plus aigu, le plus douloureux, celui de la passion égoïste, aveugle, et du Devoir, universel, absolu. Comme elles sont bien de leur temps, ces âmes désemparées et généreuses, dont la sensibilité est à vif, l'intelligence grande ouverte, et la volonté en déroute ! Faibles avec « l'amour du bien et des intentions excellentes », tous les héros de M. Edouard Rod sont déchirés par la lutte de leur noblesse intime et de leur intime misère. L'amour les sauverait peut-être. Mais l'amour, le véritable amour, celui qui triomphe de tout, celui qui s'oublie, celui qui se donne, cet amour leur est impossible. L'impuissance d'aimer n'est qu'une forme de l'impuissance d'agir. « Mon cœur a les défaillances de mon cerveau, mes affections sont aussi flottantes que mes pensées. » Ils ne connaîtront que la passion. M. Rod est aussi et surtout le romancier de la passion. Et de ces deux forces en lutte quelle que soit maintenant celle qui triomphe, la plus amère désespérance est le prix du combat. L'homme oscille entre les mirages de la passion et les tortures de la conscience, tour à tour résigné ou rebelle, mais toujours malheureux.

Chapitre III. Les Romans de la Passion
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M. Rod avait été nommé, dans le courant de 1886, professeur de littérature comparée à l'Université de Genève, en remplacement de Marc Monnier. Il apporta à cet enseignement, puis à celui de la littérature française dont il fut chargé par la suite, le même esprit de recherche sans parti-pris et de libre franchise. (...)
Edouard Rod comprit alors qu'il fallait choisir entre sa carrière d'écrivain et sa carrière de professeur. Elles ne sont sans doute pas incompatibles ; mais tandis que le roman l'attirait de plus en plus, il se sentait de moins en moins de goût pour la parole publique. Un enseignement universitaire doit se renouveler constamment ; il exige l'effort de toute une vie et M. Rod ne se trouvait pas disposé à lui vouer la sienne en renonçant à des travaux d'une autre sorte, qui l'avaient toujours intéressé au-dessus de tout. Il revint donc à Paris, cette fois pour n'en plus partir. Il y arrivait avec un talent mûri et des œuvres dont la rare qualité l'avait mis au premier rang des jeunes romanciers. La Sacrifiée publiée dans le Figaro, La Vie privée de Michel Tessier dans la Revue des Deux-MondeSj où M. Rod donnera désormais tous ses romans, inauguraient les beaux succès qu'allaient continuer La seconde vie de Michel Tessier (1894), le Silence (1894), les roches blanches (1895). Il y a là une brillante période de cinq ou six années à laquelle M. Rod doit sa place dans les lettres contemporaines.

Chapitre Il. L'intuitivisme et les romans psychologiques
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Et nous sentons toute l'amertume de ce vœu désespéré : Tout passe, tout coule, tout s'effondre, il faudrait un point fixe, au-dessus de la vie, au-dessus de l'amour. » Une fois peut-être, M. Rod sembla avoir atteint, aux profondeurs même de cette conscience où cherchait avidement son regard, ce point fixe qui défierait enfin le doute et la douleur : « Nous nous sommes à nous-mêmes nos propres ennemis ; nos désirs, nos volontés, nos passions, sont des mirages qui ne nous attirent que pour nous décevoir ; notre seule sagesse, c'est de les abdiquer définitivement, dans une humble soumission au décret, d'où qu'il vienne, qui nous ordonne d'en dégager nos âmes, afin qu'elles soient toujours prêtes à recevoir la grâce ou la mort, à entrer libres et pures dans le néant ou dans l'éternité. » Mais il faudrait avoir la foi — ou ne pas aimer la vie. Et quand le philosophe qui est en M. Rod dégageait de ses belles études et de ses créations émouvantes l'austère leçon qui tombe des plus sublimes morales et des religions les plus pures, de Bouddah à Kant, à travers le stoïcisme et le christianisme, le romancier, qu'il est aussi et par-dessus tout, ne cessait pas de voir, sur notre pauvre petite terre, l'humanité éternellement en marche vers ces mirages, sur le chemin de l'amour et de la douleur...

Chapitre III. Les Romans de la Passion
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