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Citations de Giacomo Casanova (82)


Dès que je vis le père Balbi assez loin, je me levai, et , ayant aperçu à peu de distance un berger qui gardait un petit troupeau sur une colline, je me dirigeai vers lui pour me procurer quelques informations qui m'étaient nécessaires.
"Mon ami, lui dis-je, comment s'appelle ce village ?
- Valdepiadene, signor. "
J'en fus surpris, car j'avais fait beaucoup plus de chemin que je ne croyais. Je lui demandai ensuite les noms des maîtres de cinq ou six maisons que je voyais à la ronde, et par hasard tous ceux qu'il me nomma étaient des personnes de ma connaissance, mais chez lesquelles je ne devais pas aller porter le trouble par mon apparition. Lui ayant aussi demander le nom d'un palais que je voyais, il me nomma la famille Grimani, dont le doyen était alors inquisiteur d'Etat, et il devait s'y trouver en ce moment ; je devais donc bien me garder de m'y laisser voir. Enfin, pour dernière question, lui ayant demandé à qui appartenait une maison rouge que je voyais au loin, il me répondit qu'elle appartenait au nommé capitaine de campagne qui était le chef des sbires. Ma surprise fut extrême ; mais disant adieu à ce bon pasteur, je me mis à descendre machinalement la colline, et je suis encore à concevoir par quel instinct je me dirigeai précisément vers cette maison d'où la raison aurait dû m'éloigner non moins que la peur. Je m'y rendis en droite ligne, et je puis dire avec vérité que ce ne fut pas l'effet d'une volonté déterminée.
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Vous êtes en France, Monsieur, où l'on connaît le prix de la vie, et où on tâche d'en tirer parti.
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" Mon séjour à Munich fut une espèce de malédiction, ou plutôt pendant ce mois fatal, je les vis toutes réunies comme pour me donner un avant-goût de tous les maux que souffrent les âmes des réprouvés. La Renaud aimait le jeu et Desarmoises taillait de moitié avec elle. Je ne voulus jamais être de leur partie, car le faux marquis trichait sans aucun ménagement et souvent avec plus d'impudence que d'adresse Il invitait chez moi des gens de mauvaise compagnie, qu'il traitait à mes frais; puis dans leur jeu, il se passait chaque soir des scènes scandaleuses."

p 77
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Un jour, après nous avoir fait dîner tous trois avec lui, le sénateur nous laissa seuls pour aller faire la sieste ; c'était son ordinaire. La petite Gardela, devant aller prendre sa leçon, sortit peu d'instants après, de sorte que je me trouvai tête-à-tête avec Thérèse, que je trouvais fort de mon goût, quoique je ne lui eusse jamais conté fleurettes. Assis tout près l'un de l'autre à une petite table, le dos tourné à la porte du cabinet où nous croyions notre patron endormi, il nous prit envie à certain propos de vérifier la différence de notre conformation ; mais au plus intéressant de la besogne un violent coup de canne sur les épaules, suivi d'un second, qui l'aurait été sans doute de bien d'autres, si...
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On peut défier tous les physiciens de l'univers de trouver un frein plus puissant que celui-ci contre la démangeaison d'une fille qui sait avoir été belle, et qui se voit dans le risque de devenir laide par sa faute si elle se gratte.
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Les nuits éternelles de l'hiver me désolaient. J'étais obligé de passer dix-neuf mortelles heures positivement dans les ténèbres, et dans les jours de brouillards qui, à Venise, ne sont pas rares, la lumière qui entrait par le trou de la porte n'éclairait pas assez mon livre. Ne pouvant pas lire, je tombais un peu dans la pensée de mon évasion, et une cervelle toujours occupée dans une même pensée parvient facilement aux confins de la folie. Je contemplais comme un souverain bonheur celui de posséder une lampe à huile, et ma joie fut grande lorsque, après avoir pensé à me la procurer par ruse, j'ai cru d'en avoir trouvé les moyens. (p. 69 - 70)
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Trente-deux ans après l'événement, je me détermine à écrire l'histoire d'un fait qui me surprit à l'âge de trente, nel mezzo del cammin di nostra vita [au milieu du chemin de notre vie (Dante)]. La raison qui m'oblige à l'écrire est celle de me soulager la peine de la réciter toutes les fois que des personnes dignes de respect ou de mon amitié exigent ou me prient que je leur fasse ce plaisir. Il m'est arrivé cent fois de me trouver après le récit de cette histoire quelque altération dans la santé, causée ou par le fort souvenir de la triste aventure ou par la fatigue soutenue par mes organes en devoir d'en détailler les circonstances. J'ai cent fois décidé de l'écrire, mais plusieurs raisons ne me l'ont jamais permis : elles sont toutes disparues aujourd'hui à l'aspect de celle qui me met la plume à la main. (p. 9)
Avant-propos
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La vie est comme une coquine que nous aimons, à laquelle nous accordons à la fin toutes les conditions qu'elle nous impose, pourvu qu'elle ne nous quitte pas : ceux qui ont dit qu'il faut la mépriser ont mal raisonné ; c'est la mort qu'il faut mépriser, et non pas la vie ; et ce n'est pas la même chose ; ce sont deux idées entièrement diverses : aimant la vie, j'aime moi-même et je hais la mort parce qu'elle en est le bourreau : le sage cependant ne doit que la mépriser, parce que la haine est un sentiment qui incommode.
Avant-propos, p. 10 -11.
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Soyons assez sages pour nous imaginer que nous avons fait un agréable songe, et ne nous plaignons pas de notre destin; car jamais songe délicieux n'a été aussi long. Vantons-nous d'avoir su nous rendre parfaitement heureux pendant trois mois de suite : il n'y a guère de mortels qui puissent en dire autant. Ne nous oublions jamais, et rappelons souvent à notre esprit les instants heureux de nos amours pour les renouveler dans nos âmes qui, quoique séparées, en jouiront avec autant de vivacité que si nos cœurs palpitaient l'un sur l'autre.
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Oh ! ma chère France, où tout dans ce temps-là allait bien malgré les lettres de cachet, les corvées et la misère des paysans, et le bon plaisir du Roi et de ses ministres, qu'es-tu devenue aujourd'hui ? Ton roi est le peuple. Le plus brutal, le plus fou, le plus indomptable, le plus coquin, le plus inconstant, le plus ignorant de tous les peuples. Mais tout retournera peut-être à sa place avant que je finisse d'écrire ces Mémoires ; en attendant, Dieu veuille me tenir loin de ce pays-là frappé par son anathème.
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Les Turcs dévots plaignent les libertins mais ils ne les persécutent pas. Il n'y a pas ici d'Inquisition. Ceux qui n'observent pas les préceptes de la religion seront, disent-ils, assez malheureux dans l'autre vie sans qu'on leur inflige quelque punition dans ce monde aussi.
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Vous rirez quand vous saurez que souvent je ne me suis pas fait un scrupule de tromper des étourdis, des fripons, des sots quand j’en ai eu besoin. Pour ce qui regarde les femmes, ce sont des tromperies réciproques qu’on ne met pas en ligne de compte, car quand l’amour s’en mêle, on est ordinairement la dupe de part et d’autre. Mais c’est bien différent pour ce qui regarde les sots. Je me félicite toujours quand je me souviens de les avoir fait tomber dans mes filets, car ils sont insolents, et présomptueux jusqu’à défier l’esprit.
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L'homme qui veut s'instruire doit lire d'abord, et puis voyager pour rectifier ce qu'il a appris.
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La femme est comme un livre qui bon ou mauvais doit commencer à plaire par le frontispice ; s’il n’est pas intéressant il ne fait pas venir l’envie de le lire, et cette envie est égale en force à l’intérêt qu’il inspire. Le frontispice de la femme va aussi du haut en bas comme celui d’un livre, et ses pieds, qu'intéressent tant des hommes faits comme moi, donnent le même intérêt que donne à un homme de lettres l’édition de l’ouvrage. La plus grande partie des hommes ne prend pas garde aux beaux pieds d’une femme, et la plus grande partie des lecteurs ne se soucie pas de l’édition. Ainsi les femmes n’ont point tort d’être tant soigneuses de leur figure, et de leurs vêtements, car ce n’est que par là qu’elles peuvent faire naître la curiosité de les lire dans ceux qui à leur naissance la nature n’a pas déclaré pour dignes d’être nés aveugles. Or tout comme ceux qui ont lu beaucoup de livres sont très curieux de lire les nouveaux, fussent-ils mauvais, il arrive qu’un homme, qui a aimé beaucoup de femmes toutes belles, parvienne enfin à être curieux des laides lorsqu’il les trouve neuves. Il voit une femme fardée. Le fard lui saute aux yeux ; mais cela ne le rebute pas. Sa passion devenue vice lui suggère un argument tout en faveur du faux frontispice. Il se peut, se dit-il, que le livre ne soit pas si mauvais ; et il se peut qu’il n’ait pas besoin de ce ridicule artifice. Il tente de le parcourir, il veut le feuilleter, mais point du tout ; le livre vivant s’oppose ; il veut être lu en règle ; et l’egnomane* devient victime de la coquetterie, qui est le monstre persécuteur de tous ceux qui font le métier d’aimer. Homme d’esprit, qui as lu ces dernières vingt lignes, qu’Apollon fit sortir de ma plume, permets-moi de te dire que si elles ne servent à rien pour te désabuser tu as perdu ; c’est-à-dire que tu seras victime du beau sexe jusqu’au dernier moment de ta vie. Si cela ne te déplaît pas, je t’en fais mon compliment.
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J'aimais, j'étais aimé, je me portais bien, j'avais beaucoup d'argent, et je le dépensais; j'étais heureux, et je me le disais, riant des sots moralistes qui disent qu'il n'y a pas de véritable bonheur sur la terre. C'est le mot sur la terre qui me fait rire comme si on pouvait aller le chercher ailleurs.
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Mon seul plaisir était celui de me repaître de projets chimériques, tous tendant au recouvrement de ma liberté sans laquelle je ne voulais pas de la vie. Je lisais toujours Boèce ; mais j'avais besoin de sortir de là, et dans Boèce je ne trouvais pas le moyen ; j'y pensais toujours parce que j'étais persuadé de ne pouvoir le trouver qu'à force de penser. Je crois encore aujourd'hui que lorsque l'homme se met dans la tête de venir à bout d'un projet quelconque, et qu'il ne s'occupe que de cela, il doit y parvenir malgré toutes les difficultés : cet homme deviendra grand vizir, il deviendra pape...
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Ou mon histoire ne verra jamais le jour, ou ce sera une vraie confession. Elle fera rougir des lecteurs qui n'auront jamais rougi de toute leur vie, car elle sera un miroir dans lequel de temps en temps ils se verront ; et quelques-uns jetteront on livre par la fenêtre, mais ils ne diront rien à personne et on me lira ; car la vérité se tient cachée dans le fond d'un puits, mais lorsqu'il lui vient le caprice de se montrer, tout le monde étonné fixe ses regards sur elle, puisqu'elle est toute nue, elle est femme et toute belle. Je ne donnerai pas à mon histoire le titre de confessions, car depuis qu'un extravagant l'a souillé, je ne puis plus le souffrir ; mais elle sera une confession, si jamais elle en fut.
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Alors,la prenant dans mes bras et la serrant amoureusement contre mon sein,je lui imprimai sur la bouche un long et ardent baiser que je mourais d'envie de lui donner;mais ,à sa nature, la timide colombe sentit qu'elle était tombée dans les serres du vautour.Elle se débarrassa de mes bras , tout étonnée de m'avoir découvert amoureux par cette voie. Son frère m'applaudissait , tandis que,pour cacher son trouble,elle se remettait le masque.
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J'arrivai à Ancône le 25 février de l'an 1744 et j'allais loger dans la meilleure auberge. Content de ma chambre, je dis à l'hôte que je voulais faire gras ; mais il me répondit qu'en carême les chrétiens faisaient maigre.
"Le Saint-Père m'a donné la permission de faire gras.
- Montrez-la-moi.
- Il me l'a donné de vive voix.
- Monsieur l'abbé, je ne suis pas obligé de vous croire.
- Vous êtes un sot.
- Je suis maître chez moi, et vous prie d'aller vous loger ailleurs."
Une réponse pareille et une intimidation à laquelle je ne m'attendais pas du tout me mirent en colère. Je jure. Je peste, je crie, quand tout à coup un grave personnage entre dans ma chambre en me disant : "Monsieur, vous avez tort de vouloir manger gras, tandis qu'à Ancône le maigre est bien meilleur ; vous avez tort de vouloir obliger l'hôte à vous croire sur parole, et, si vous avez la permission du pape, vous avez tort de l'avoir demandée à votre âge ; vous avez tort de n'avoir point demandé la permission par écrit ; vous avez tort de traiter l'hôte de sot, puisque c'est un compliment que personne n'est obligé d'agréer chez soi, et finalement vous avez tort de faire tant de bruit."
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Je devais faire ma grande opération le jour suivant, car autrement, d'après les idées reçues, j'aurais été obligé d'attendre la pleine lune du mois prochain. Je devais conjurer les gnomes à pousser le trésor au niveau du sol, à l'endroit même où j’aurais fait mes conjurations. Certes, je savais bine que l'opération manquerait, mais je savais aussi que je ne manquerais pas de raisons pour satisfaire Franzia et Capitani. En attendant, je devais bine jouer mon rôle de magicien que j'aimais à la folie. Je fis travailler Javotte toute la journée pour coudre en cercle une trentaine de feuilles de papier sur lesquelles je peignis les figures les plus bizarres. Ce cercle, que j'appelais Maxime, avait trois pas géométriques de diamètre. Je m'étais fait une espèce de sceptre ou baguette magique de la branche d'olivier que Franzia m'avait apportée de Césène. Etant ainsi préparé, je dis à Javotte qu'à minuit, au moment où je sortirais du cercle, elle devait se tenir prête à tout. Elle ne reçut pas cet ordre avec répugnance, car il lui tardait de me donner cette preuve d'obéissance ; et de mon côté, me regardant comme son débiteur, je me sentais pressé de ma satisfaire.
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