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Critiques de Henry Roth (21)
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À la merci d'un courant violent, tome 1

J'ai fait connaissance avec Henri Roth, cet été, au hasard d'une visite dans une boîte à livres, sur la plage...Dans la grande "famille" des Roth, je ne connaissais que Philip et Joseph. Petite précision, aucun d'eux n'a de liens de parenté avec les autres...

Alors pourquoi pas une plongée dans ce New-York, et dans Harlem des années 14 ? Une plongée comme le promet la 4ème de couverture dans la prohibition, et dans cette Amérique du début du siècle. D'autant plus passionnante si on connaît le New-York d'aujourd'hui, sa vie trépidante, ses voitures, ses grandes avenues...

Ira, jeune gamin héros du livre, vit dans une famille pauvre, dans des immeubles assez sordides. Son père effectue chaque matin des livraisons de lait avec un cheval pour lequel il loue une écurie à Manhattan. Toute la famille loge à Harlem, quartier d'Irlandais. Là, Ira est le "maudit Juif", qu'on raille. "C'est plein de sales goyim d'Irlandais. Ils me traitent tout le temps de sale Juif, et ils cherchent sans arrêt la bagarre."

Henri dépeint ces différentes communautés qui habitent New-York, chacune dans son quartier, celle des juifs au langage si particulier inspiré de l'allemand, (heureusement qu'un glossaire figure en fin d'ouvrage), mais aussi les communautés irlandaises et celle des Noirs. Communautés qui se rejettent, se haïssent.

La Première Guerre mondiale passera par là, les Noirs en reviendront avec une forte volonté de reconnaissance.

Si le père est un peu le raté de la famille, multipliant les projets foireux, il n'en est pas de même de l'oncle d'Ira, Oncle Gabe, devenu membre éminent du parti républicain, ce qui lui ouvre des portes pour pistonner sa famille et l'aider dans ses projets. Et le père d'Ira n'en manque pas. Il se relève de chaque échec, grâce à un nouveau projet...Ira ne l'admire pas...Bien au contraire.

Alors le gamin s'évade de sa condition, voyage grâce à la lecture, "Mais lire, ah ! c'était le gros problème; il passait trop de temps dans les livres, au détriment du reste."... Il leur demandait de lui faire oublier quelle était sa condition de gamin juif, fils de paumé, condition qu'il vit mal, de lui ouvrir de nouveaux horizons. De bien belles pages sur les vertus de la lecture.

Une construction parfois déroutante.On perçoit derrière le gamin Ira du roman, toute la nostalgie de l'auteur pour son enfance. Mais Henri Roth parle aussi de lui, adullte, à Ecclessias, son ordinateur, sur lequel il écrit. Le mélange des époques est parfois dérangeant.

Le gamin est attachant, le voyage dans l'histoire et dans ce New-York des années 15- 20 et plus, est dépaysant et passionnant.
Lien : https://mesbelleslectures.co..
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À la merci d'un courant violent, tome 1

Biographie et roman s'entremêlent aux détours de l'East Side et de Harlem.



Evolution d'un enfant dans une Amérique aux portes d'un conflit qui se fera mondial.



Enfance se terminant dans une vie d'adultes de défis et de colères où idéaux et misères se côtoient dans un même quotidien.



A découvrir et suivre dans ses apprentissages et réalités.
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À la merci d'un courant violent, tome 1

Mercy of a Rude Stream :

A Star Shines Over Mount Morris Park

Traduction : Michel Lederer



Premier volume de la tétralogie autobiographique de l'auteur, "Une Etoile Brille sur Mount Morris Park" est un texte qui déstabilise souvent son lecteur par son étrange construction. En effet, le récit compte trois types de narration : le récit autobiographique impersonnel, à la troisième personne, avec un narrateur omniscient ; le récit autobiographique personnel, à la première personne, dans lequel l'auteur se confond avec son héros, Ira, mais toujours dans un action et un décor qui datent du début du XXème siècle ; et enfin, des sortes d'intercalaires, où l'écrivain évoque sa vie présente, auprès de sa femme, désignée par l'initiale M. Ces dernières pages se présentent en outre comme une forme de dialogue entre Henry Roth et son ordinateur, surnommé "Ecclésias."



A notre humble avis, pareil choix dessert le texte qui alterne des scènes de réelle puissance avec un ergotage assez fastidieux, centré sur une chose mystérieuse que, selon Ecclésias, Henry Roth ferait bien de révéler au plus tôt à ses lecteurs. Et c'est bien vrai : pourquoi ne le fait-il donc pas ? Car, à la fin de ce premier tome, on ne dispose d'aucun élément nouveau sur l'énigme en question.



Le romancier-biographe tourne autour du pot, avance d'un pas pour reculer de trois, énerve prodigieusement son lecteur mais lui et permet aussi de comprendre quel enfer d'angoisses dut être son existence. Ce refus de révéler ce que l'on soupçonne assez tôt toucher à sa sexualité lui vient peut-être de sa religion mais là encore, il y a ambiguïté puisque Roth admet assez vite - et sans difficultés majeures - rejeter sa judéité.



A part cela, que retient-on d'"Une Etoile ..." ? Avant toute chose, un tableau réaliste et impressionnant du New-York d'avant 1914, avec ses carrioles de laitiers tirées par des chevaux, ses premières voitures automobiles, ce conflit qu'on croit d'abord si lointain mais qui finira par toucher le Nouveau Monde, et cette masse d'immigrants venus des quatre coins de la Vieille Europe.



Henry Roth dépeint les communautés qu'il a bien connues : sa communauté natale, tout d'abord, des Juifs issus de Galicie, au parler yiddish savoureux (fort intelligemment, un glossaire a été placé à la fin du livre) où les initiés s'amuseront à retrouver mêlés des mots d'origine allemande ; la communauté irlandaise catholique ensuite, où le petit Ira se fera des ennemis mais aussi des amis ; et enfin, à un moindre degré, la communauté noire, cette communauté dont les membres, au retour de la Grande guerre, veulent de plus en plus être tenus pour des citoyens à part entière - ce qui stupéfie tous les bons WASPS avant de commencer à les inquiéter.



Puis l'atypisme, la bizarrerie de caractère du petit Ira. Si Henry Roth a vraiment ressemblé à son alter ego de papier, avec lequel sa plume le confond d'ailleurs souvent en utilisant le "Je" comme si l'écrivain, perdu dans sa transe, se mettait en pilotage automatique, on conçoit combien sa vie put ne pas être simple. Ira redoute son père - là encore, on perçoit que bien des choses sont passées sous silence - adore sa mère - mais qui ne l'aimerait pas ? - étouffe sous les tentacules de la sa vaste parentèle et pourtant n'aime pas à envisager l'idée qu'un jour, ses membres puissent venir à lui faire défaut, et enfin se cherche une identité qui ne soit pas juive tout en conservant tout ce qu'il peut y avoir de meilleur dans la judéité.



Ergoteur, oui : complexe aussi, hypersensible, touché par la grâce de l'écriture mais accablé en parallèle par la certitude que sa prose n'était pas si terrible que ça, tel nous apparaît Henry Roth à la fin d'"Une Etoile Brille sur Mount Morris Park." Et le lecteur, tout surpris, s'aperçoit que, malgré les tours et détours empruntés, malgré tout ce qui a pu l'agacer et l'ennuyer dans la structure du texte, il s'est pris de sympathie pour cet étrange personnage et désire l'accompagner jusqu'au bout de son périple intime.



Un livre déconcertant mais bien plus riche qu'il n'y paraît. ;o)
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L'or de la terre promise

Henry Roth (1906-1995) est un écrivain américain. Né en Europe centrale, il émigre vers les États-Unis à l'âge de trois ans avec sa famille et passe son enfance au sein de la communauté juive de New York. Son premier roman, L'Or de la terre promise, publié en 1934 passe inaperçu. Henry Roth laisse alors de côté ses ambitions littéraires et épouse, en 1939, Muriel Parker, fille d'un pasteur baptiste et pianiste qui renoncera à sa carrière pour l'accompagner dans l'État du Maine où il exerce plusieurs métiers (garde forestier, infirmier dans un hôpital psychiatrique, aide plombier…). Henry Roth sombre dans une dépression chronique. C'est en 1964 (1968 pour la traduction française), soit trente ans après, que L'Or de la terre promise est réédité et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Ce succès inattendu convainc l'auteur de se remettre à écrire. En 1994, soixante ans après la publication de son premier roman, A la merci d'un courant violent sort en librairie, premier volume d’une autobiographie qui en comprendra cinq, tous commentés sur ce blog.

Le jeune David et sa mère Genia débarquent à New York en 1911, dans le flot d’immigrés européens, pour retrouver Albert Schearl, le chef de famille arrivé précédemment. L’enfant a 6 ans et nous allons le suivre durant ses deux premières années en terre promise, comme le dit avec une ironie amère le titre du roman. Très vite l’enfant va être confronté à la dure vie qui l’attend, la violence latente du père, la dureté du monde qui l’entoure, l’alternance de méchanceté et d’amitié des copains de sa rue du ghetto juif mais aussi l’amour de sa mère, seul refuge où il pourra toujours se blottir. Le gosse, peut-être aussi surprotégé par sa mère, est toujours angoissé et nerveux, mais on le serait à moins quand on voit le peu d’amour que lui témoigne son père, au point que David préfère le savoir au travail qu’à la maison.

Et c’est là que le talent d’Henry Roth se révèle, le lecteur chemine aux côtés de l’enfant mais aussi au cœur de ses pensées et nous constatons que sa vision du monde et des choses est en partie faussée par son imagination, grossissant certains faits, s’effrayant vite d’autres. Tous les enfants sont ainsi mais David pousse le bouchon assez loin. Roth avance dans son récit mais sans empathie particulière pour David, ce qui en accentue la dureté.

Roman dur donc, un père affligé d’un complexe de persécution maitrisant mal sa violence, une tante Bertha aussi vulgaire que grande gueule, une mère soumise tentant de colmater les plaies ; mais aussi découverte de la religion juive pour David auprès d’un rabbin pas commode ou découverte de la vie tout court lors de scènes mémorables (le vol des bouteilles de lait à son père livreur par des va-nu-pieds et l’explosion de violence en résultant, l’expédition à son corps défendant avec un camarade pour que celui-ci puisse « coincer » une des nièces de David dans un sous-sol etc.)

Le roman est dense, Henry Roth utilise le langage phonétique pour restituer l’accent yiddish et l’anglais mal maitrisé par les immigrants. Dès les premières pages on est impressionné par la puissance du texte, surtout sachant qu’il s’agit d’un premier roman. Quant à l’épilogue, il est d’une force incroyable, débutant par une lessive de linge sale en famille hallucinante – voire insoutenable - où chacun déballe les horreurs ou les vérités qu’il taisait depuis toujours, pour se poursuivre par une longue scène complexe à suivre (car traitée comme du Joyce) aboutissant à un feu d’artifice (si j’ose cette image, néanmoins appropriée) dramatique, qui laisse le lecteur k.o. quand le bouquin s’achève.

Un très bon roman c’est certain mais qui peut ne pas plaire à tout le monde. J’ai dit qu’il était dur, mais il est moins « raide » (dans tous les sens qu’on peut donner au mot) que ceux qui suivront, il reste donc le plus abordable pour ceux qui voudront découvrir l’univers de cet écrivain.

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A la merci d'un courant violent, tome 2 : U..

Henry Roth (1906-1995) est un écrivain américain. Né en Europe centrale, il émigre vers les États-Unis à l'âge de trois ans avec sa famille et passe son enfance au sein de la communauté juive de New York. Son premier roman, L'Or de la terre promise, publié en 1934 passe inaperçu. Henry Roth laisse alors de côté ses ambitions littéraires et épouse, en 1939, Muriel Parker, fille d'un pasteur baptiste et pianiste qui renoncera à sa carrière pour l'accompagner dans l'État du Maine où il exerce plusieurs métiers (garde forestier, infirmier dans un hôpital psychiatrique, aide plombier…). Henry Roth sombre dans une dépression chronique. C'est en 1964, soit trente ans après, que L'Or de la terre promise est réédité et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Ce succès inattendu convainc l'auteur de se remettre à écrire. En 1994, soixante ans après la publication de son premier roman, A la merci d'un courant violent sort en librairie, premier volume d’une autobiographie qui en comprendra cinq, Un rocher sur l’Hudson, La Fin de l’exil, Requiem pour Harlem et enfin Un Américain, un vrai. Initialement prévue en six tomes, l’œuvre d’Henry Roth restera inachevée.

Dans Un rocher sur l’Hudson, paru en 1995, nous retrouvons Ira Stigman l’alias d’Henry Roth dans le New York des années 1920. L’enfant est devenu un adolescent, introverti et mal dans sa peau, ne sachant jamais où est sa place. Victimes de brimades à l’école, il se venge en volant ses camarades mais ses larcins découverts, il est exclus de l’établissement à la plus grande honte de ses parents ce qui nous vaut quelques belles scènes de ménages désopilantes avec l’accent yiddish (« Je vais lui donner à manger, moi ! s’écria Pa en faisant claquer son journal. Du chagrin haché menu, oui ! »). Ira va alors enchaîner les petits jobs, garçon de bureau (viré), vendeur dans une boutique de jouets (démissionne), receveur de bus (comme jadis son père) et vendeur de sodas dans un stade, avant de reprendre les cours dans un nouvel établissement.

La vie d’Ira Stigman semble suivre un chemin presque banal, jusqu’à ce qu’Henry Roth lâche abruptement page 170, qu’il a une sœur cadette (lui 17 et elle 14 ans), alors que Minnie n’avait jamais été évoquée et que nous en sommes au tome second de ses mémoires, mais le réel coup de théâtre suit, il a des rapports incestueux avec elle ! En général le dimanche matin, seul créneau où leurs parents sont absents de l’appartement. Obsédé par le sexe, Ira poussera le bouchon jusqu’à avoir des rapports du même genre avec sa jeune cousine Stella. Ses pulsions sexuelles assouvies, encore que, il se fait deux amis. Billy avec lequel il fait du camping et du canoë, donc vie au grand air et sport et surtout Larry. Celui-ci, intellectuellement plus mûr, poète, issu de la bourgeoisie dont il veut s’éloigner, a une liaison avec sa prof de lettres, Edith Welles. A leur contact, Ira est introduit un peu contre son gré, dans un petit cercle littéraire. Quand le bouquin s’achève, Ira voit l’un de ses textes - un devoir mal noté par son professeur, pour n’avoir pas respecté l’énoncé, mais reconnu intrinsèquement de qualité – publié dans la revue trimestrielle du collège. Pour Ira, désormais la voie est tracée, adieu les cours de biologie, sa vraie vie est ailleurs, il écrira.

Ce second volet des mémoires d’Henry Roth respecte la forme narrative que nous avions découverte précédemment, Ira qui se raconte, Henry qui le raconte et Ecclésiaste qui intervient régulièrement, personnification de sa conscience. Le coup de théâtre « qu’il n’avait jamais eu l’intention de révéler », donne un poids bien particulier à ce livre, plaçant le lecteur dans une situation souvent inconfortable, celle du témoin involontaire des aveux intimes d’un homme qui ne peut s’empêcher d’écrire, ce qu’il ne voudrait pas dire. Il y a là une dimension psychanalytique affolante accentuée par la forme narrative, Roth discutant avec Ecclésiaste des motivations d’Ira, quel niveau du « moi » de Roth veut avouer, quel autre veut cacher, sachant qu’au final le bouquin a quand même été édité ! Epoustouflant.

La dernière partie du livre ouvre les portes pour la suite, Ira sait qu’il va écrire et introduit le personnage d’Edith Welles qui logiquement devrait prendre une envergure supérieure ensuite, puisque ce pseudo voulu par l’écrivain dissimule dans la vraie vie, Ida Lou Walton avec laquelle vivra un certain temps Henry Roth…

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A la merci d'un courant violent, tome 4 : R..

Bien qu'il en ait terminé avec sa sœur, Ira Stigman poursuit sa cousine de ses assiduités, qu'elle ne dédaigne certes pas, à telle enseigne que cette dernière, ayant du retard, terme litotique consacré, semble se trouver dans une situation compromettante, ce qui le plonge dans les affres de l'angoisse. Édith, la professeure de lettres, qui devient in fine son amante, représente l'opportunité de s'échapper d'une famille dysfonctionnelle, de caresser le rêve d'accéder à une carrière littéraire, et d'en finir avec Harlem.



Requiem pour Harlem clôture la remarquable tétralogie aux motifs autobiographiques intitulée À la merci d'un courant violent sur une note en mode mineur. C'est une conclusion en demi-teinte, qui n'apporte pas grand-chose à l'économie du récit, si ce n'est une ultime révélation sordide et la consommation de l'émancipation du héros. L'effacement du narrateur octogénaire, aux infirmités attachantes, sans que l'on s'en rende vraiment compte, comme exfiltré subrepticement, ajoute à cette sensation d'inaccomplissement, Un roman un brin décevant, que ce Requiem pour Harlem, où les choses semblent être vues par le petit bout de la lorgnette, l'histoire se focalisant sur quelques personnages sans que l'on sache ce qu'il advient de mains autres. En somme cette ultime opus un peu bancal, qui n'a pas su se hisser à la hauteur des volumes précédents, n'est pas le parachèvement magistral qu'on était en droit d'attendre de cette œuvre remarquable qu'est À la merci d'un courant violent.



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À la merci d'un courant violent, tome 1

Après un silence de plus de 50 ans qui suivit la parution de son premier opus, dont le titre original, Call it sleep, était assez prémonitoire de l'indifférence de l'accueil qui allait lui être réservé, synonyme de traversée du désert, de dépression et de succession de petits boulots, roman considéré dorénavant comme un texte majeur de la littérature américaine du siècle dernier, Henry Roth entreprend, perclus de rhumatismes, dans un dialogue singulier avec son ordinateur appelé affectueusement Ecclésias, une tétralogie, œuvre de longue haleine et très largement autobiographique, intitulée À la merci d'un courant violent.



Cet initial volet baptisé une Étoile brille sur Mount Morris Park, narre le quotidien problématique d'un petit garçon déraciné, qui n'a pas digéré le déménagement de ses parents, du Jewish East Side de son enfance à l'Irish Harlem. En quête d'identité, il vit mal sa judéité, ne se reconnaissant pas dans l'atmosphère familiale qui tient beaucoup de la Galicie originelle. Cette construction personnelle indispensable est entravée par les relations conflictuelles de ses parents, par l'antisémitisme latent du voisinage et surtout par la menace et le dégoût profond que lui font ressentir les appétits pervers de certains adultes.



Un premier tome prometteur en vérité. Le récit, savamment orchestré, voit sa matière narrative relevée de locutions yiddish assez cocasses. Ce roman s'avère être par sa dimension autobiographique un précieux outil de compréhension rétrospective de son plus fameux roman Call it sleep. Vivement la suite.

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L'or de la terre promise

David Schearl, petit émigré juif d'Europe centrale, vit avec ses parents l'existence du prolétariat de l'East side New Yorkais. L'enfant est un être particulièrement émotif et sensible qui trouve le réconfort dans le giron maternel, toujours en demande d'affection et d'attention. Principal motif de terreur pour David, son père, être inexorable et dur, enchaînant les travaux de peine, qui reproche à son épouse cet amour qu'il juge débilitant pour un enfant qui doit devenir un homme. Face à cette situation conflictuelle David opte pour la fuite, dévalant les escaliers en quête de quelque aventure de galopin pour oublier cette atmosphère délétère. Et quand l'angoisse et les peurs se font trop envahissantes il se retire en lui-même, s'assourdissant d'une logorrhée bien de son âge et convoquant tout un monde onirique et fantasmagorique pour supplanter l'incompréhensible de ce monde d'adulte.



À travers le prisme forcément singulier d'un enfant de la diaspora juive, c'est un roman d'aspiration lyrique, onirique et psychologique, utilisant volontiers la technique du courant de conscience, qui nous est proposé, ce qui est assez rare dans une littérature américaine à dimension plutôt béhavioriste. Bien que se situant dans un environnement populaire et cosmopolite ce roman n'est pas une oeuvre du réalisme social ou misérabiliste mais avant tout un récit sur l'enfance.
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L'or de la terre promise

Je n'avais jamais entendu parler ce ce livre, trouvé par hasard. Et considéré, lit-on sur la 4e de couverture qu'il s'agit là d'un chef-d'oeuvre de la littérature juive-américaine. Pas faux. Livre impressionnant. Ecrit en 1930. Il est incontestablement précurseur de plein plein de romans plus tardifs. Une enfance, encore une, posée dans le N.-Y. populaire de l'entre deux-guerre, la communauté juive et les autres... Les découvertes, l'apprentissage, la folie, les émotions... dans une écriture combinant différentes langues baragouinées et un style très maîtrisé. Tout ça est limite parfait.

Un passage sur la fin, longue suite de morceaux de sensations, de propos confus, de regards éclatés multiples donnent un côté joycien au livre. Avant de redevenir plus classique sur la fin.

Si vous aussi le trouvez par hasard, vous ne le regretterez sans doute pas.

Coup de chapeau au traducteur qui a dû incontestablement faire un excellent travail, pas du tout simple !

(Hormis, une fois de plus, le titre de la version francophone, qui ne respecte pas le symbolisme de l'original, "Call it sleep".)



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A la merci d'un courant violent, tome 5 : U..

Henry Roth (1906-1995) est un écrivain américain. Né en Europe centrale, il émigre vers les États-Unis à l'âge de trois ans avec sa famille et passe son enfance au sein de la communauté juive de New York. Son premier roman, L'Or de la terre promise, publié en 1934 passe inaperçu. Henry Roth laisse alors de côté ses ambitions littéraires et épouse, en 1939, Muriel Parker, fille d'un pasteur baptiste et pianiste qui renoncera à sa carrière pour l'accompagner dans l'État du Maine où il exerce plusieurs métiers (garde forestier, infirmier dans un hôpital psychiatrique, aide plombier…). Henry Roth sombre dans une dépression chronique. C'est en 1964, soit trente ans après, que L'Or de la terre promise est réédité et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Ce succès inattendu convainc l'auteur de se remettre à écrire. En 1994, soixante ans après la publication de son premier roman, A la merci d'un courant violent sort en librairie, premier volume d’une autobiographie qui en comprendra cinq, Un rocher sur l’Hudson (1995), La Fin de l’exil (1998), Requiem pour Harlem (2000) et enfin Un Américain, un vrai en 2013. Initialement prévue en six tomes, l’œuvre d’Henry Roth restera inachevée.

Nous retrouvons donc Ira Stigman, cet alias de Roth, en 1938 à New York où il affronte un nouveau tourment, une panne d’inspiration qui l’empêche d’écrire son second roman. Côté vie sentimentale, il est toujours officiellement avec Edith laquelle a un riche amant qui paye les factures du trio mais bien vite il va tomber amoureux de M (Muriel Parker), prise pour une lesbienne lors de sa première rencontre. Elle est musicienne, pianiste, issue d’une famille aisée et à priori tout l’opposé d’Ira. En quête d’indépendance financière, Ira se résout à tenter sa chance à Los Angeles dans l’écriture de scénarios pour le cinéma, voyage effectué avec son ami Billy, communiste révolutionnaire. La côte Ouest n’est guère plus souriante, Ira revient donc à New York en stop et en train de marchandises. Finalement, Ira épousera M et ils vivront ensemble durant cinquante ans, jusqu’au décès de celle-ci en 1990.

Comme lors des précédents épisodes, l’écrivain alternent les époques, le présent avec un Henry Roth veuf, salement handicapé par l’arthrite, retiré à Albuquerque et le passé avec Ira Stigman son héros, vivant à New York. Ira toujours paralysé par les doutes, incapable de prendre des décisions tranchées, tant pour trouver des moyens de subsistance que pour gérer sa vie amoureuse, ici quitter Edith et s’engager avec M ou encore continuer dans la littérature ou se contenter de textes pour les journaux ou de scénarios pour le cinéma. Henry Roth persiste à nous dépeindre Ira, son double, avec un manque de vergogne qui met le lecteur mal à l’aise, mais néanmoins avec assez de talent pour le retenir, fasciné par les péripéties vécues par ce personnage jamais vraiment sympathique.

Ce dernier roman s’avère par contre beaucoup moins sordide que certains volets précédents qui avaient pu déplaire, j’imagine, à certains lecteurs. Mais comme il a été publié, bien après le décès de l’écrivain, on peut s’interroger sur le rôle joué par l’éditeur… On s’intéressera à ce roman, car il nous montre aussi un Ira lancé dans un road trip à travers les Etats-Unis avec retour sur Manhattan en compagnie de hobos dans les trains, complètement anachronique pour le lecteur qui s’imaginait le héros, figure urbaine exclusivement. On mentionnera aussi des passages où Ira et Irène s’affrontent sur le rôle de l’écrivain ou encore lorsque Roth met le lecteur dans la tête d’Ira tentant d’écrire une nouvelle à partir d’un incident de la circulation – tous ceux qui ont tenté l’aventure de l’écriture en savoureront la véracité.

Et enfin, autre bonne raison pour lire ce roman, c’est cette histoire d’amour entre Henry Roth (Ira) et Muriel Parker (M) qui sur la forme est à mille lieues des romans roses de gare, mais terriblement touchante quand on lit entre les lignes, puisque Muriel Parker sacrifiera sa vie professionnelle de musicienne pour se consacrer (se dévouer) à Henry Roth et l’aider tout au long de sa vie, à surmonter ses doutes et vaincre ses névroses, pour en faire peut-être, un Américain, un vrai ? En tout cas très certainement, un écrivain, un vrai !

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À la merci d'un courant violent, tome 1

Un style particulièrement fluide et prolixe. Une matière abondante dans un récit où surgissent des personnages plus vrai que nature. L’effort de fraicheur et d’honnêteté dont fait preuve cet écrivain en fin de vie pour retrouver l’enfant qui revit sous nos yeux m’a profondément ému. Parce que j’en suis un aussi, je ne suis plus seul à assumer les malaises de cette aventure fondatrice tellement éloignée des clichés idylliques.
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À la merci d'un courant violent, tome 1

Ira habite un quartier de Harlem, dans un taudis , avec une grosse majorité d'irlandais la violence est présente à tous les coins de rue. Il connait la misère. La première guerre mondiale 14/18 fait rage en Europe. En italique, le présent de l'écriture de février à avril 1985 au Nouveau Mexique (loin de N.Y et d'Harlem), le regard du vieillard qui est entrain d'écrire sur Ecclessias (le non qu'il donne à son ordinateur, son conseiller) , regard sur le temps, et sur son enfance le passé de 1914 à 1920.

Les sentiments de lecture sont la mélancolie. Un livre terriblement attachant, un livre qui m'a beaucoup plus. Un livre magnifique, dense une écriture forte à lire, un incontournable !!!!! Un coup de cœur !

Ce tome 1 donne envie de lire la suite...



http://livresdemalice.blogspot.com/
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A la merci d'un courant violent, tome 2 : U..

Ce qui n'était qu'allusif, sous-entendu, dans le premier opus, rapport à la faille originelle du narrateur, et bien plutôt refoulé, est clairement exprimé dans le Rocher sur l'Hudson. Ce qui a trait au pulsionnel, dont la presse se fit l'écho à la parution de ce second volet de la tétralogie À la merci d'un courant violent et qui relève du tabou dans notre société occidentale, est peut-être bien ce courant violent à la merci duquel se trouve Ira Steigman, alter ego de Roth. En tout cas c'est bien sur cet interdit que s'appuie le récit et que le narrateur évoque ad nauseam. Le petit gars déraciné du Lower East Side est devenu un étudiant en perte de repère, embarqué par défaut dans des études scientifiques pour lesquelles, à l'évidence, il n'est pas fait, et qui, par la grâce d'une dissertation frappée d'un expéditif "médiocre" pour cause d'hors-sujet et publiée pourtant dans la revue trimestrielle de son université, va voir l'horizon de son avenir s'éclaircir dans ce que peut lui offrir l'écriture en fait de sublimation de ses pulsions et de transcendance des fêlures de l'enfance.



Un Rocher sur l'Hudson est un second volet plus dérangeant pour le lecteur et plus exigeant pour l'auteur parvenu au crépuscule de sa vie, se confrontant dorénavant sans détour à son Œdipe et mettant à nu les motifs sous-jacents de sa vocation d'écrivain.
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À la merci d'un courant violent, tome 1

Henry Roth (1906-1995) est un écrivain américain. Né en Europe centrale, il émigre vers les États-Unis à l'âge de trois ans avec sa famille et passe son enfance au sein de la communauté juive de New York. Son premier roman, L'Or de la terre promise, publié en 1934 passe inaperçu. Henry Roth laisse alors de côté ses ambitions littéraires et épouse, en 1939, Muriel Parker, fille d'un pasteur baptiste et pianiste qui renoncera à sa carrière pour l'accompagner dans l'État du Maine où il exerce plusieurs métiers (garde forestier, infirmier dans un hôpital psychiatrique, aide plombier…). Henry Roth sombre dans une dépression chronique. C'est en 1964, soit trente ans après, que L'Or de la terre promise est réédité et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Ce succès inattendu convainc l'auteur de se remettre à écrire. En 1994, soixante ans après la publication de son premier roman, A la merci d'un courant violent sort en librairie.

Le livre sous-titré, Une étoile brille sur Mount Morris Park, est le premier volume d’une autobiographie en cinq parties, Un rocher sur l’Hudson, La Fin de l’exil, Requiem pour Harlem et enfin Un Américain, un vrai qui vient tout juste de sortir en librairie. Initialement prévue en six tomes, l’œuvre d’Henry Roth restera inachevée.

Dans le bouquin, Henry Roth endosse le rôle d’Ira Stigman, huit ans, un petit juif né dans les premières années du XXe siècle et tout juste immigré à New York avec son père (Pa) homme violent au mauvais caractère et pas doué pour les affaires, et sa mère (Ma) une femme douce prête à tout excuser. Après avoir vécu quelques temps dans le Lower East Side, en 1914 ils déménagent vers Harlem alors quartier Irlandais. Nous suivrons donc le jeune Ira entre sa huitième année et ses quatorze ans quand le livre se referme.

Parcourt initiatique pour ce gamin devant apprendre à être Juif dans un monde qui ne vous aime guère, tiraillé entre son éducation familiale orthodoxe et ce monde extérieur moins pesant, au point de peiner à retenir ce cri de haine lors de sa bar-mitsva « Devenir un Juif, devenir un homme, un membre de la communauté n’était qu’une sinistre plaisanterie, et devint un sinistre souvenir ». C’est aussi au cours de ces années qu’il rencontrera la littérature et se mettra à fréquenter les bibliothèques, fasciné par le Huckleberry Finn de Mark Twain il subodore le pouvoir mystérieux des livres, sans pouvoir se l’expliquer encore. Quand s’achèvera le roman, nous sommes en 1920, Ira quatorze ans, a découvert qu’il pouvait être accepté par des non Juifs comme son ami Farley Hewin ou le personnel de l’épicerie de luxe où il travaille en dehors de ses cours au collège pour rapporter un peu d’argent à la maison. Mais il aura aussi été confronté au sexe avilissant, tripoté par un inconnu dans un parc de la ville et un professeur au collège…

Henry Roth met sa vie par écrit en utilisant plusieurs formes narratives. Caché derrière Ira qui se raconte, ou encore parlant de lui-même enfant à la troisième personne, tout en incluant de courts paragraphes où, mise en abîme, l’écrivain se cite à quatre-vingt ans perclus de rhumatismes devant le clavier de son ordinateur, ou bien en courts dialogues avec Ecclesias comme un homme devant son Dieu aux portes du monde des morts.

Le bouquin est aussi cette suite de scènes familières aux lecteurs de romans traitant de l’exil des Juifs en Amérique à cette époque, familles nombreuses, jactance et bagout, propos émaillés de termes yiddish (glossaire en fin d’ouvrage), conflits et bagarres entre Juifs et Irlandais, les petits boulots pour survivre, etc. Selon qu’on lira ce bouquin avec un bout ou l’autre de sa lorgnette, on y verra une part de la fresque historique des Etats-Unis ou bien une tranche de la vie d’un gamin à l’aube de son existence.

Ce que ce livre ne dit pas encore mais que ma curiosité m’a poussé à découvrir, c’est que le volume suivant, Un rocher sur l’Hudson, révèlera un très lourd secret dans la vie d’Henry Roth… à suivre donc !

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A la merci d'un courant violent, tome 3 : L..

Dans la Fin de l'exil, troisième volet d'À la merci d'un courant violent, Ira Stigman n'en a pas encore fini avec ses turpitudes. Il sembler que les risques insensés qu'il prend pour satisfaire ses pulsions, ce goût de l'interdit, ne fait qu'ajouter au plaisir, le rendant irrésistible. Pourtant toucher au fruit défendu aura des conséquences irréversibles sur la psyché, l'idiosyncrasie du personnage. Par le biais d'un camarade d'étude qui entretient une relation répréhensible, bien que nettement moins tabou avec une de ces professeurs, Édith, Ira va pleinement comprendre l'opportunité que représente pour lui la littérature. Cette dernière, de retour d'un séjour en Europe, va lui remettre un livre à la couverture bleue, alors interdit en Amérique, l'Ulysse de Joyce, que son déficient amant d'étudiant a dédaigné. Cette œuvre révolutionnaire, dont il se fera le contempteur petit à petit et les années passant, est le révélateur qui va montrer toutes les couleurs et les potentialités narratives que peut représenter la vie pathétique et rude qu'il a mené jusqu'alors. Une mine d'or inépuisable en fait.



Point n'est besoin d'attendre la lecture du volet final pour réaliser qu'on se trouve en face d'une œuvre majeure du roman autobiographique du XXème siècle. . Le contraste saisissant que constitue la narration des infamies d'un jeune personnage par ce dernier devenu presque nonagénaire et veuf depuis cinq ans n'est pas le moindre de ses attraits. Peut-être le meilleur volume de la tétralogie pour l'instant.

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L'or de la terre promise

Tout le roman est vu travers les yeux de cet enfant nerveux, angoissé. L'or de la Terre Promise allie la description féroce du prolétariat cosmopolyte à New York au lyrisme propre à une inspiration inquiète, qui transfigure les évènements les plus sordides en aventures tour à tour merveilleuses ou terrifiantes.



Protégé par sa mère, dont la figure inoubliable enveloppe de tendresse et de générosité ce roman cruel, le petit David n'en fait pas moins l'apprentissage de la misère, de la méchanceté et de la sottise, entre un père morose et violent, une tante vulgaire, un rabbin répugnant et pitoyable, des camarades brutaux, obsédés par le sexe.



Loin d'être la démonstration d'une idée politique ou le procès du paupérisme, l'Or de la Terre promise est le cauchemar éveillé d'une jeune émigrant juif, c'est-à-dire, un roman qui allie selon les mots du critique américain Irving Howe, le réalisme le plus froid à la fantasmagorie la plus débridée
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A la merci d'un courant violent, tome 4 : R..

Henry Roth (1906-1995) est un écrivain américain. Né en Europe centrale, il émigre vers les États-Unis à l'âge de trois ans avec sa famille et passe son enfance au sein de la communauté juive de New York. Son premier roman, L'Or de la terre promise, publié en 1934 passe inaperçu. Henry Roth laisse alors de côté ses ambitions littéraires et épouse, en 1939, Muriel Parker, fille d'un pasteur baptiste et pianiste qui renoncera à sa carrière pour l'accompagner dans l'État du Maine où il exerce plusieurs métiers (garde forestier, infirmier dans un hôpital psychiatrique, aide plombier…). Henry Roth sombre dans une dépression chronique. C'est en 1964, soit trente ans après, que L'Or de la terre promise est réédité et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Ce succès inattendu convainc l'auteur de se remettre à écrire. En 1994, soixante ans après la publication de son premier roman, A la merci d'un courant violent sort en librairie, premier volume d’une autobiographie romancée qui en comprendra cinq, Un rocher sur l’Hudson, La Fin de l’exil, Requiem pour Harlem et enfin Un Américain, un vrai. Initialement prévue en six tomes, l’œuvre d’Henry Roth restera inachevée.

Ce quatrième volet est paru en France en 2000 et nous y retrouvons Ira Stigman alias Henry Roth, dans le New York des années 1920 alors que lui-même a 21 ans, à la période charnière d’une nouvelle vie. Ira, toujours prisonnier de ses pulsions sexuelles qui le dégoutent mais le poussent encore et encore vers la concupiscence avec sa cousine Stella est au bord du désespoir quand il croit qu’elle est enceinte et qu’il pense que son grand-père est au courant de sa liaison incestueuse. De son côté Edith, dont il est devenu le confident, lui avoue qu’elle a avorté des œuvres de son amant Lewlyn avec lequel elle a rompu. Empêtré dans ses sentiments et un peu contre sa volonté, Ira déballe sa vie à Edith, ne lui cachant rien de ses turpitudes, mais Edith, à 32 ans en a vu d’autres ! Entre Ira et Edith, les rapports d’amitié évoluent et « ce qu’il sentait venir » advient. Quand le roman s’achève, Ira quitte le logis familial pour emménager chez sa maîtresse dans un quartier plus huppé que Harlem, il laisse derrière lui quatorze années de sa vie d’adolescent, désormais il entre dans sa vie d’homme mais avec angoisse, « Il rompait avec ce qu’il était, mais sans espoir de devenir autre chose. »

Si La Fin de l’exil m’avait paru faiblard, on retrouve ici la force des deux premiers tomes de l’œuvre magistrale d’Henry Roth. Le souffle de l’écriture de l’écrivain à la hauteur des aveux humiliants de l’homme. Même si la vie de l’auteur est largement à la base de son œuvre, il s’agit néanmoins d’un roman mais il atteint des dimensions dignes des tragédies grecques, en plus explicite. Inceste entre frère et sœur ou cousin et cousine, révélation ultime et scabreuse concernant le père d’Ira, avortement, liaisons tumultueuses entre amants, scène désopilante de sexe dans un cinéma, amitiés viriles rompues, tourments psychologiques intenses… n’en jetez plus, la cour est pleine.

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A la merci d'un courant violent, tome 3 : L..

Henry Roth (1906-1995) est un écrivain américain. Né en Europe centrale, il émigre vers les États-Unis à l'âge de trois ans avec sa famille et passe son enfance au sein de la communauté juive de New York. Son premier roman, L'Or de la terre promise, publié en 1934 passe inaperçu. Henry Roth laisse alors de côté ses ambitions littéraires et épouse, en 1939, Muriel Parker, fille d'un pasteur baptiste et pianiste qui renoncera à sa carrière pour l'accompagner dans l'État du Maine où il exerce plusieurs métiers (garde forestier, infirmier dans un hôpital psychiatrique, aide plombier…). Henry Roth sombre dans une dépression chronique. C'est en 1964, soit trente ans après, que L'Or de la terre promise est réédité et vendu à plus d'un million d'exemplaires. Ce succès inattendu convainc l'auteur de se remettre à écrire. En 1994, soixante ans après la publication de son premier roman, A la merci d'un courant violent sort en librairie, premier volume d’une autobiographie qui en comprendra cinq, Un rocher sur l’Hudson, La Fin de l’exil, Requiem pour Harlem et enfin Un Américain, un vrai. Initialement prévue en six tomes, l’œuvre d’Henry Roth restera inachevée.

Ce troisième volet est paru en France en 1998 et nous y retrouvons Ira Stigman alias Henry Roth, au milieu du New York des années 1920 alors qu’il a une vingtaine d’années, toujours et encore tourmenté par sa sexualité, étonné par sa propre personnalité, se considérant comme étranger parmi les humains et devant ruser pour se donner une apparence « normale » vis-à-vis des autres.

S’il ne couche plus avec sa sœur Minnie, ce n’est pas pour retrouver le chemin de la morale mais parce que celle-ci sort désormais avec des garçons. Du coup il se contente de sa cousine Stella les lundis, lors de rapports sexuels qui en viennent à être drôles pour le lecteur – toute question morale mise à part – Ira se tapant Stella vite fait dans une pièce pendant que les deux parents âgés de la jeune fille sont occupés dans une autre ! De leur côté, Larry et Edith évoluent. Son ami, après avoir tâté de la poésie et de la sculpture, se tourne maintenant vers le théâtre, cherchant sa voie artistique. Edith, sa maîtresse plus âgée, maître assistant de littérature, après avoir guidé le jeune homme doute désormais de sa capacité à entrer dans cet univers intellectuel.

Des rapports complexes entre les personnages vont se créer. Ira devient le confident d’Edith qui lentement se détache de Larry, pas très performant au lit, entretenant une liaison parallèle avec Lewlyn un homme marié. Entre ces deux couples, Ira bouche cousue, tient la chandelle tout en se sentant irrémédiablement attiré par Edith qui par de petits signes amicaux alimente ses troubles sentiments. Entre sa vie personnelle faite de sexe honteux, « sa maudite libido dénaturée », et celle de ses amis faite de rapports mensongers, Ira Stigman se débat comme un beau diable pour ne nuire à aucun tout en cherchant à se placer au mieux dans les grâces d’Edith mais il est là en terrain mal connu ; Edith est une femme, expérimentée qui plus est, alors qu’Ira n’a jamais connu que des gamines ou au pire des prostituées.

Comme dans les précédents volumes, la forme narrative adoptée par Henry Roth reste la même, au cœur du roman se greffent des inserts, bribes de textes où l’écrivain de 89 ans décrit ses souffrances physiques liées à sa polyarthrite ou anticipe sur l’avenir du récit. Ainsi, le lecteur est clairement informé qu’Ira et Edith auront une relation intime mais quand le roman s’achève, la jeune femme et Lewlyn son amant sont en train de se séparer et Ira est à deux doigts de conclure.

Si le sexe est omniprésent dans les pensées d’Ira, la littérature s’impose de plus en plus en lui comme une échappatoire à sa condition. Alors que chez Larry elle était une attitude ou un souhait, pour Ira elle est une nécessité profonde qui lentement s’impose avec la complicité d’Edith lui révélant Joyce (nombreuses digressions très intéressantes) et TS Eliot, pour l’éveil intellectuel, et la sensualité bientôt, pour le sexe adulte. La fin de l’exil, le début de la vraie vie ? Le prochain volet devrait nous le confirmer…

Je tiens néanmoins à préciser que j’ai trouvé ce troisième épisode, moins puissant que les deux précédents, comme une pause au milieu de l’étalage des révélations intimes et du cheminement intellectuel vers l’écrivain en devenir.

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À la merci d'un courant violent, tome 1

A la merci d'un courant violent - Henry Roth



Henry Roth alors âgé de 73 ans en 1979, rédige son autobiographie a peine déguisée sous ce titre.



Il commence sa vie empreinte de violence en août 1914 où la famille s’est déracinée du village de l’East Side pour s’installer à Harlem. Il est né dans l’Ukraine actuelle, et sa famille émigre pour les E-U. Il n’a alors que 3 ans. Mais, Henry, est Ira dans ce livre et il a huit ans. On va le suivre jusqu’à 14 ans à travers les désarrois de sa puberté avec un père violent, toujours à cran et énervé mais aussi avec les persécutions des enfants émigrés comme des irlandais et des italiens qui n’aiment pas les Juifs. Et puis la Grande guerre frappe à la porte et la honte s’ouvre à la braguette avec des attouchements qu’il subit de la part de son professeur.



C’est un livre qui n’a pas d’une écriture mémorable, mais l’histoire l’est et la persécution des Juifs, la persécution de son enfance, la construction du mental d’Henry Roth est forte dans ce livre et émouvant à bien des égards



PS : Un livre qui a été conseillé par Jean-Marie Le Clézio à Laurent Seksik dans le livre « Un fils obéissant » qui souhaitait devenir écrivain et qui lui conseilla de lire ce livre. Le premier livre écrit en 1934 par Henry Roth est passé inaperçu jusqu’en 1964, année à laquelle plusieurs millions ont finalement été vendus.
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À la merci d'un courant violent, tome 1

enfance juive en quartier goy



drôle de type que ce Roth là, à 30 ans il publie un livre qui deviendra un best-seller 30 ans plus tard et en attendant il sombre dans la dépression, qui conserve puisqu'il mourra à 90 ans après avoir publié sur le tard 4 tomes de sa biographie qui devait en compter 6.

Celui-ci en est le premier.



En lisant leurs souvenirs de jeunesse à ce Roth et à l'autre, le Philip, un fond commun en ressort : c'est l'aversion des juifs d''avant-guerre envers les goys ... ça ne pouvait que mal finir.



Le petit Henry ne se remettra jamais de son enfance dans un quartier goy entre une mère juive et un père brutal. On le quitte jeune adolescent à la fin de ce premier tome.
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