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Citations de Jacques Abeille (263)


Je vis de grands champs d'hiver couvert d'oiseaux morts. Leurs ailes raidies traçaient à l'infini d'indéchiffrables sillons.
Ce fut la nuit.

J'étais entré dans la province des jardins statuaires.
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Le tas de terre glissait lentement du centre vers la périphérie ; la statue peu à peu surgissait. Il s'agissait cette fois d'une Vénus pudique toute blanche, dont les mains apeurées ne cachaient guère les charmes. Elle était gigantesque. La terre, qui l'avait épousée si étroitement, la quittait comme à regret, et il en restait des paquets nichés en chaque repli du corps. Les orbites, les épaules, les aisselles en étaient garnies, comme des marques irrévérencieuses d'un grand âge négligent.
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Il y eut ce silence mûri par les proximités fortes avant que j'entendisse son rire en vol d'alouette matutinale. L'air qui trainait par la cellule était imprécis quand nos yeux s'ouvrirent. S'appuyant sur un coude, elle vint se pencher au-dessus de moi ; elle souriait.
- D'où viens-tu étranger ?
- Du plus lointain ; de toi. Et je tendis la main vers le ciel de son visage ; la sienne berçait mon front.
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Jacques Abeille
On a le droit d’avoir de l’imagination si on est sud-américain, si on est irlandais, tchèque. On trouve partout des amateurs d’«Alice au pays des merveilles» ou des «Voyages de Gulliver». Mais l’écrivain français doit être vraisemblable. Tous, même les plus grands, doivent passer par cette contrainte, et il est inadmissible d’y échapper. Je m’insurge contre ça.
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- Il est arrivé qu'en se polissant par-dessous, la pierre parvienne d'elle-même à si bien réduire tout ce qui pourrait la rattacher au sol qu'elle s'envole.
- Comment ? m'exclamai-je.
- C'est la vérité pure. La forme nuageuse atteint si bien la perfection qu'elle se confond en elle et que l'on voit soudain s'élever dans les courants ascendants de l'air chaud un nuage de pierre qui va rejoindre les vapeurs célestes.
- Et, ajouta mon guide, lorsque ces nuages parviennent à une certaine hauteur dans le ciel, le gel les fait éclater. Ils choient donc en fragments lumineux que le frottement de leur chute consume et réduit en poudre. Cette pluie très douce tombe, portée par le vent, sur d'autres domaines. Elle se mêle au terreau des plates-bandes comme un levain merveilleux. Les statues, cette saison-là, sont vaporeuses.
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En un instant je passai du sentiment d’avoir tout perdu à un chaleureux et vivifiant élan de foi dans le renouvellement incessant de la vie qui exige, contre toute vraisemblance, que ce qui en un moment fut consumé en un autre moment reverdisse dans sa fraîcheur native.
Le temps lui-même n’est peut-être pas autre chose que ce profond et fécond ressac de consomptions et de résurrections dont sont comptables nos fragiles tâtonnements.
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A mes pieds s'étendait à perte de vue la houle fixe des brandes noires et impénétrables. Par-delà leur épaisse frange, il me semblait distinguer les cimes les plus hautes d'une forêt, qui se confondaient peut-être à mes yeux avec celles d'un domaine, au-delà de toute cette sauvagerie, isolé, perdu. Et tout cela, dans la lumière rousse du soir, tout clinquant de l'égouttement parcimonieux, de rameau à rameau, des dernières gouttes de pluie que retenait encore le rare feuillage. J'étais dans ces dispositions exceptionnelles où, faisant face à la paix du monde, on se sent le cœur prix aux couleurs de la joie.
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Ne t'est-il jamais arrivé de découvrir quelque chose de très beau, et, soudain, de souffrir très fort, et si vite que tu t'en aperçois à peine, parce que ce fragment de beauté que tu contemples, tu devrais le partager avec quelqu'un et qu'il n'y a que l'absence ?
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"Vous ne lisez plus ?" demanda la marchande en le scrutant.
Il sursauta comme si elle l'avait pris en défaut.
"Ne craignez point, poursuivit-elle, que je prenne ombrage de votre rêverie. Il n'y a pas de meilleurs lecteurs que les rêveurs.
- Ils sont inattentifs, pourtant.
- Que non point ; mon métier m'a accoutumée à les reconnaître ; eux seuls savent faire fleurir comme il convient les virtualités de l'écrit. Ce qui est écrit à besoin d'être déplié et c'est tout un art que de donner leurs aises aux mots ; aux lieu de faire effet, il faut s'abandonner, vous comprenez ?
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Livres de papier de Marie Huot

Les livres ont toujours été mes cabanes dans les arbres. J'y monte, je retire l'échelle, j'habite là, je suis au monde, au présent.
On le sait, un livre ouvert posé sur une tête est déjà un petit toit. (p. 88)
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Livres, je vous salue ! d'Alain Roussel

Je viens ici vous rendre hommage pour m'avoir aidé à vivre, appris à rêver et à penser, et sans doute à aimer, car l'amour s'invente d'abord dans la langue, avant même le premier baiser. (p. 152)
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Changer de vie, changer la vie ? - Alain Miquel

Il y a tant de livres, neufs, soldés, d'occasion, tant de vies possibles dont il s'agit de guérir. Il reste toujours un livre de papier essentiel à découvrir et à tenir entre les mains. Il y a tant d'inconnu dans une vie et dans un livre à déchiffrer qu'il reste toujours une énigme sur laquelle délicieusement buter. (p. 141)
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Sa femme s'inquiéta de lui voir certains jours un air de si profonde hébétude et il la mit au fait de ses voyages. Elle souffrit un peu en apprenant que certaines nuit il s'éloignait tant des siens, mais elle savait qu'il n'y avait pas d'amour qui ne soit mêlé d'une pointe d'amertume et jugea avec sagesse que cette étrangeté n'était pas le pire défaut qu'on pût trouver chez un homme.
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Ainsi ai-je appris, à mes dépens, qu'aucune force ne peut garder un visage dans le souvenir, mais seulement son effacement, ce qui est une cruauté bien grande.
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Je vis de grands champs d’hiver couverts d’oiseaux morts. Leurs ailes raidies traçaient à l’infini d’indéchiffrables sillons. Ce fut la nuit.
J’étais entré dans la province des jardins statuaires.
Il n’y a pas de ville ici, seulement des routes larges et austères, bordées de hauts murs que surplombent encore des frondaisons noires. Chaque communauté vit repliée sur elle-même dans sa demeure au cœur du domaine. Çà et là, au hasard semble-t-il, on aperçoit un toit sombre et pentu. De temps à autre on passe devant une porte qui est comme un accident de la muraille et demeure toujours close.
Les voyageurs sont rares. Il y a des routes, mais on n’y passe pas. Je ne parle pas des convoyeurs qui mènent leurs lourds chariots aux roues de bois plein. C’est une charge qui échoit aux jardiniers à tour de rôle. J’ai cru d’abord que le pays ne comptait guère que trois ou quatre hôtels, vétustes, délabrés, dont la silhouette massive devait surgir sur quelque carrefour abandonné. C’est dans l’un d’eux que je logeais et c’est d’après celui-ci que je jugeais des autres. Je n’y trouvais aucune commodité. La toilette se faisait dans la cour. Les lieux d’aisance n’étaient qu’un inqualifiable appentis. La chère était pauvre dans une salle vaste et sinistre. La chambre était malcommode, chichement éclairée, et, la nuit, j’y entendais des rats dont les ongles griffaient les dalles. Et pourtant j’y restais. C’est là que vint me prendre un matin celui que je désignerai désormais comme mon guide.

(Incipit)
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Si j'ai pu d'une seule vision déduire comme en dévidant un rêve un assez long roman, ce fut pour ne plus dépendre de ce que je m'efforçais de dépeindre.

p 32
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- Ça te fait soucis à toi ?
- Ça fait peine à voir, par moments. Tu vis comme un mendiant et tu as de l'or dans les mains. Celui qui te donnera sa fille n'y perdra pas.
- Je n'ai pas un sou, pas un lopin, pas un arbre... Je suis aussi riche qu'un chien errant... et je commence à me faire vieux pour la noce. Les filles convolent jeunes.
- Un homme qui a du savoir-faire vaut mieux que tous ces petits greluchets...
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- Peut-être ignorez-vous, Monsieur, que dans notre pays on cultive les statues.
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- Crois-tu que certaines idées peuvent tuer ?
- C'est certainement ce qui tue le mieux.
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J'existe comme un colombier déserté des oiseaux.
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