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Critiques de Javier Cercas (529)
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Les soldats de Salamine

Sentiment mitigé en terminant Ces soldats de Salamine. Le récit est en trois parties et s’intéresse à la guerre civile espagnole.



La première raconte la découverte et la fascination croissante de Javier Cercas pour l’histoire de l’exécution ratée d’un phalangiste, qui deviendra ministre de Franco (Sanchez Mazas). Celui-ci sera sauvé par un républicain, après sa fuite du peloton d’exécution, puis recueilli par des déserteurs républicains.



J’ai trouvé cette première partie très confuse et peu accrocheuse, avec beaucoup de noms, d’événements relatifs à la guerre civile espagnole que je connais mal. Je me suis vraiment perdue dans le récit, j’arrêtais sans cesse ma lecture au bout de trois pages et j’ai failli lâcher l’affaire.



Mais pleine de pugnacité, j’ai attaqué la seconde partie qui raconte la vie de ce phalangiste, Sanchez Mazas. Grand bourgeois, écrivain et théoricien du mouvement conservateur qui prendra finalement le pouvoir après quelques années de terrible guerre civile. Il réchappa de peu à la mort en 1939 grâce à un soldat de l’armée républicaine qui le laissa s’échapper. Cette seconde partie est déjà beaucoup plus claire et intéressante mais pas vraiment inoubliable. Ma lecture était toujours assez ralentie.



Néanmoins, pleine de courage, j’ai attaqué la troisième partie qui raconte la quête de Cercas afin de retrouver ce soldat inconnu qui a sauvé le phalangiste. Et enfin, mon intérêt était complétement en éveil. Le récit devient vivant, émouvant, c’est de loin la partie la plus réussie. Celle qui évoque avec délicatesse un très beau personnage et des sujets passionnants, et raconte avec justesse toute la tragédie de cette guerre civile.



C’était mon premier Cercas. Vu ma difficulté avant d'éprouver un réel plaisir de lecture, je ne suis pas sûre d’en essayer un autre malgré les chaudes recommandations de mes amis babeliotes (merci Merik !). Si vous avez des suggestions de lectures plus faciles de cet auteur, je suis preneuse !

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Terra Alta

Terra Alta est cette première terre où j'accoste pour découvrir enfin l'univers romanesque d'un auteur qui m'attire depuis longtemps, Javier Cercas.

Terra Alta pourrait être qualifié à première vue de roman policier et il en possède d'ailleurs toutes les qualités, bien plus encore d'ailleurs que les polars d'écrivaillons milliardaires qui envahissent les têtes de gondoles des grandes surfaces au rayon dédié. Vous en avez lu un, vous les avez tous lus, d'une certaine manière c'est bien pratique.

Ce roman transgresse les codes du genre pour nous dévoiler une intrigue, prétexte aussi à nous amener vers d'autres chemins ...

J'ai peut-être enfin compris ici la raison pour laquelle les romans policiers contemporains ne me touchent plus. Ici la question centrale n'est pas de savoir de quoi parle ce livre, mais comment il en parle et comment il me parle.

Bien sûr il y a une intrigue policière, qui se mêle d'ailleurs à la terrible histoire de l'Espagne, celle de la guerre civile qui a meurtri inexorablement ce pays de 1936 à 1939. Mais il y a bien autre chose, sans doute un supplément d'âme, à commencer par la trajectoire du personnage principal, Melchor Márin, jeune policier chargé de l'enquête et qui traverse ce roman iconoclaste dans une sorte de pessimisme solaire qui m'a totalement happé.

Terra Alta est une terre oubliée aux confins d'une Catalogne intérieure, meurtrie par les stigmates du passé qui ne s'effacent peut-être pas définitivement.

Sur ces terres catalanes où désormais il ne se passe presque plus rien, un fait divers sordide va secouer les populations. On vient de retrouver, sans vie et déchiquetés, les corps des époux Adell, riches nonagénaires qui emploient la plupart des habitants du coin.

Mais voilà que peu à peu, ce polar m'invite à faire un pas de côté comme je les aime, de surcroît à plusieurs endroits.

Sous couvert d'un vrai roman policier, plusieurs chemins se sont ouverts durant ma lecture, des questionnements aussi, me permettant de percevoir dans son univers complexe la dimension véritable de ce roman, à tel point que le noeud de l'intrigue va presque devenir secondaire.

La psychologie des personnages est peinte avec force er subtilité, à commencer par la personnalité complexe et déchirée du personnage principal, Melchor Márin, tandis que nous découvrons son itinéraire chaotique et accidenté, dans une sorte de rédemption incroyable mais pas exsangue des blessures du passé... C'est ce qui en fait sa densité.

S'ajoute alors l'atmosphère des paysages...

La littérature va prendre une place importante dans la vie de ce jeune policier, rencontrant l'âme soeur qui deviendra plus tard sa femme, Olga, lorsqu'il franchit les portes d'une bibliothèque et ressort sous les conseils de celle-ci avec Les Misérables...

Peut-on rencontrer l'âme soeur par les livres, parmi les livres ? Je le crois furieusement.

Melchor Márin va être happé par cette lecture. Un personnage va l'intriguer, le séduire, non ce n'est pas celui que vous croyez, il s'agit du policier Javert, celui que tout le monde déteste. Melchor Márin ne le déteste pas, trouve son itinéraire intéressant, parce qu'il recherche la loyauté, l'intégrité. C'est à cela que ce roman, - je reviens ici à Terra Atla, explore des territoires fascinants de l'âme humaine.

C'est alors que je me suis dit que j'avais affaire à un très grand écrivain et c'est la raison pour laquelle je n'ai pas lâché ce livre du début jusqu'à la fin.

J'ai aimé cette frontière qui s'invite dans le roman, entre la fiction et l'histoire d'une des pages les plus douloureuses de l'Espagne. Cette oscillation porte le texte.

Les guerres ont leurs secrets, sans doute plus encore les guerres civiles. Les vraies blessures, ce sont celles que personne ne voit, celles que les gens conservent secrètement, celles qui expliquent tout. C'est un livre qui réveille les cicatrices rancunières du destin.

Sans outrance, le roman convie une violence aussi sourde que brutale, parce que c'est cela aussi la réalité, celle du présent du récit, celle du passé qui en est le réceptacle.

Fort heureusement, il y a aussi une belle histoire d'amour en filigrane du roman, qui ne se contente pas d'être là passivement, Olga, à sa manière, va devenir passeuse, aider Melchor à la rejoindre vers l'autre rivage, s'affranchir de ses démons. Il est des femmes ainsi aux pouvoirs enchanteurs qui les délivrent par le seul don de l'amour.

J'ai découvert ici un roman intense, insondable, poétique, quasiment métaphysique à certains endroits, un roman que j'ai dévoré avec jubilation.

Ah ! J'oubliais de vous dire : Olga et Melchor ont eu une fille qu'ils ont appelé Cosette. Si je vous dis cela, je vous laisse percevoir que ce n'est pas forcément de bonne augure pour la mère...

J'ai apprécié le style de l'auteur, sa manière de conduire le récit avec fermeté, dans un scénario efficace qui tient en haleine... Les méchants ne sont pas ceux qu'ont croit, les gentils non plus... La fin ouverte permet d'envisager que Terra Alta est le premier d'une série et c'est un bonheur de le savoir.

Un polar intelligent, au style populaire et à l'allure sophistiquée, - j'aurais même pu écrire l'inverse, ce n'est pas tous les jours que cela vous tombe du ciel... Aussi ne vous privez pas d'accoster sur ce territoire insondable qu'est Terra Alta.



« Qui peut prétendre que le parfum des aubépines est indifférent aux constellations ? » Les Misérables - Victor Hugo
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Le monarque des ombres

le monarque des ombres, c'est au fil du livre que se dévoile ce monarque des ombres. Livre historique, roman, biographie familiale, réflexion philosophique? c'est toute la charge du voyage dans lequel nous emmène Javier CERCAS. Partant de l'image de son ancêtre, mort si jeune, et dans le mauvais camp, l'auteur parcourt l'Espagne pour comprendre cette "tâche" dans la généalogie familiale.

Le voyage est long et plein d'imprévu, comme l'Odyssée d'Ulysse, mais riche d'enseignements pour amener vers l'apaisement.

En écrivant ce commentaire, j'ai dans la tête la voix de Brassens et le début de "heureux qui comme Ulysse, a fait un beau voyage, heureux qui comme Ulysse a vu cent paysages,...."

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Indépendance

Deuxième volet de la trilogie commencée avec Terra Alta où nous retrouvons Melchor dans un chapitre choc d'ouverture où il défend de jeunes prostituées. Mais l'essentiel du roman n'est pas là puisque Melchor est appelé en renfort à Barcelone aux côtés de son ancien chef Blai. Cette fois il doit enquêter sur un chantage visant la maire de Barcelone.



Les recherches vont plonger les enquêteurs dans les sombres manigances des familles ‘régnantes' de Barcelone, celles qui détiennent toutes les clés de la richesse et du pouvoir depuis longtemps et qui sont prêtes à tout pour que rien ne change, indépendance de la province ou pas.



J'ai été moins embarquée dans ce roman que pour Terra Alta, les discours sur la politique catalane sont trop longs et desservent à mon sens le rythme du roman. On devine que l'auteur veut faire passer un message ou régler des comptes. Heureusement que le récit de l'enquête est parfois entrecoupée par les aveux partiels d'un des protagonistes ce qui donne envie d'en savoir plus.



La conclusion de l'intrigue est alors sans grande surprise sauf en ce qui concerne un twist final qui permet à Melchor de résoudre enfin un mystère qui touche à sa vie personnelle passée. Autre bémol en ce qui concerne des personnages un peu caricaturaux, vraiment très noirs et très cyniques d'un côté ou résolument humanistes de l'autre, seul Melchor, le héros dont on attendait le retour est en demi-teinte, plus nuancé, un peu trop peut-être même. Cela reste un assez bon roman policier et je lirai tout de même le troisième volet en espérant retrouver le même enthousiasme que pour Terra Alta.

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Indépendance

Avec le second volume de la trilogie policière de Javier Cercas, je me réjouissais de retrouver Melchor découvert dans « Terra Alta ».

Le flic au lourd héritage s'est retiré à Gandesa à plus de deux heures de route de Barcelone.

Depuis l'assassinat de son épouse dont il se sent responsable, il vit avec sa fille Cosette (sic).

Ce passionné de littérature envisage de devenir bibliothécaire pour tenter d'oublier la noirceur de son métier.

Lorsque son ami Blai, policier lui aussi, le sollicite pour résoudre une affaire, il met son projet sur pause et enquête sur le chantage à la sextape dont est victime la maire de Barcelone.

Ses investigations reflètent la collusion entre l'argent et le pouvoir ainsi que les mensonges, le populisme et la manipulation dont les politiques sont des virtuoses, notamment les Catalans qui auraient agité le mirage de l'indépendance pour tromper le peuple.

Elles sont aussi l'occasion pour Melchor de se replonger dans son passé.

J'ai trouvé cet opus 2 bien en deçà du premier. La trame policière est plutôt convenue, les dialogues foisonnants sont souvent redondants et il manque la dimension historique qui faisait la saveur du premier.



EXTRAIT

- Tant que dure le repentir dure la faute.


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Terra Alta

On a l’impression que l’auteur tire à la ligne, rapportant le moindre mouvement (par souci de réalisme ?), ce qui ralentit la lecture et ça manque de punch.

Une intrigue peu intéressante qui suit la découverte d’un vieux couple atrocement torturé, histoire de donner un peu de gore inutile à un récit plat. On n’arrive pas non plus à se passionner pour cette région pauvre, ni à son passé dévasté par la guerre civile, pourtant le cheval de bataille de ce romancier réputé, qui s’attaque pour la première fois au polar.

Il y a des moments intéressants, comme la rencontre avec la future femme de l’inspecteur Marin, au moyen d’échanges de livres, mais les retours incessants aux « Misérables » finissent par lasser. Le développement sur sa mère prostituée assassinée pour justifier son entrée dans la police (après avoir purgé une peine de prison, ce qui me laisse perplexe, mais peut-être est-ce possible en Espagne ?) est également trop long.

Bref je me suis ennuyé avec une intrigue finalement simpliste, des passages peu réalistes, alors que cet ancien champ de bataille offrait de belles ressources.

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Indépendance

Deuxième opus de la trilogie de Rabière Cercas, construite autour d’un policier, Melchor Marin. Attention, je conseillerai aux potentiels lecteurs de commencer par Terra Alta pour bien comprendre toutes les allusions à ce roman et la construction de la personnalité de Melchor. Le personnage de Melchor est fort de ses faiblesses et fêlures et fort de son amour pour les livres.

L’action se déroule, non pas en Terra, Alta, mais à Barcelone lorsque la maire de la ville subit un chantage à la sextape. L’intrigue est bien menée, complexe mais réaliste ; les personnages intéressants ; en outre la ballade dans les quartiers de Barcelone résonnera pour les lecteurs qui aiment cette ville. Cercas est joueur puisqu’il fait de lui et de son précédent roman l’un des personnages et l’une des clés du roman ! Je ne suis pas sûr que c’était nécessaire.

En revanche, j’ai bien apprécié le procédé narratif qui revient à plusieurs reprises dans le livre et qui consiste en un dialogue entre l’un des protagonistes supposé du chantage à la sextape, et un interlocuteur dont ne connaît pas l’identité et qui permet au lecteur de comprendre peu à peu ce qui s’est passé, d’identifier le(s) coupables et le mobile.

Il faut préciser que le titre du roman a peu voir avec l’intrigue. Le thème de l’indépendance de la Catalogne n’apparaît en fait qu’en filigrane lorsque Cercas fait référence au contexte historique du Procés (le processus d’accès à l’indépendance) de la Catalogne et aux événements de 2017. Je retiens quand même cette phrase clin d’œil de l’un des personnages : « Le catalan, qui ne veut pas l’indépendance n’a pas de cœur ; celui qui la veut n’a pas de tête. »

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Terra Alta

Premier opus d’une trilogie, Terra Alta est un polar de Javier Cercas, grand romancier espagnol

Il tire son titre de la région Terra Alta, terre pauvre, aride, inhospitalière du Sud-Ouest de la Catalogne.

Le roman est le récit d’une enquête policière autour de la mort du fondateur d’une grande entreprises et de son épouse, de la vie en Terra Alta, de l’histoire de la guerre civile et de ses cicatrices. Mais il est surtout le récit de la vie et de la personnalité du personnage principal : Melchor Marín, fils d’une prostituée, délinquant et condamné à la prison. En prison, il découvre la littérature et plus particulièrement Les Misérables, les personnages de Jean Valjean/M. Madeleine et surtout de Javert, ce policier obnubilé, obsédé par son enquête et sa traque de Valjean. La lecture lui donne envie de reprendre des études pour ces derniers mois en prison.

Devient policier quelques temps après sa sortie de prison, comme Valjean, il commence une nouvelle vie et entre dans la police après en avoir réussi le concours d’entrée. Il devient même un héros dans la police en mattant fin à un attentât islamiste.

L’enquête est lente, difficile. Au point que la hiérarchie policière décide de la clore. Grace à sa ténacité et à son intelligence, Melchor va démasquer l’auteur du crime. On retrouve là un thème classique dans les polars : celui du refus du classement de l’affaire, celui de la quête obsessionnelle et déraisonnable de la vérité, comme dans le Dalhia noir !

Les dernières pages du roman sur l’éthique de la justice (« quand on pousse le bien à l’extrême, il se transforme en mal ») sont lumineuses.

Enfin, il faut saluer la construction habile, intelligente, non linéaire du roman avec des allers-retours dans le passé immédiat ou dans le passé lointain qui apporte beaucoup à la narration.
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Les soldats de Salamine

Miralles, le vétéran de la guerre d’Espagne, simple soldat du début à la fin, démobilisé en 1945 en Autriche s’interroge sur la pérennité du souvenir d’évènements qui n’intéressent plus personne. Un soldat inconnu que tout le monde appelle Miralles comme s’il s’agissait de son prénom. Une des dernière voix capable de parler de cette guerre qui, quoi qu’il en dise, hante encore les esprits au point d’observer chez certains intellectuels, une forme de nostalgie, un rêve de guerres idéologiques à une époque où le numérique et les effets spéciaux ont remplacé les textes épiques. Les déjections d’un Malraux (Genre BHL) ou d’un Hemingway tentent de nous bercer des légendes qui les nourrissent. Les admirateurs inconditionnels de ceux qui poussaient les commissaires politiques staliniens à remettre de l’ordre dans les rangs pour se préserver des POUM ou autres poussées chaotiques, des lubies d’anarcho-syndicalistes ressurgissant aujourd’hui comme des démons extraits d’une fosse commune.

L’écrivain américain, auteur de Pour qui sonne le glas, traduit en une phrase la tragédie, un échange verbal entre deux de ses personnages fictifs s’exprimant au sujet de Calvo Sotelo, «c'était un bon fasciste», et l’autre qui lui répond, « ce sont ceux qu’il faut tuer en premier ».

Le journaliste J.Cercas s’exprime lors d’une interview dans un salon du livre en France et fait référence à son livre qui a changé sa vie parce qu’avant Les soldats de Salmine il était un écrivain sans lecteur et que du jour au lendemain il s’est métamorphosé en auteur à succès.

Il précise également que la guerre d’Espagne n’est pas une tragédie parce que dans une tragédie les deux camps ont raison. Mais dans le cas du conflit entre nationalistes et républicains, le gouvernement légal est attaqué et doit se défendre. Mais quelle est la légitimité de ce gouvernement légal quand ses milices assassinent des députés, emprisonnent des opposants et par conséquent confisquent le débat démocratique, profitant de l’entrée en conflit pour fusiller les leaders nationalistes.

Comme beaucoup de gens de gauche à la sauce Antonio Machado (Son frère a choisi le camp nationaliste) saupoudré de Nicolas Guillen (Prix Staline pour la paix en 1954), J.Cercas est dans le camp du bien, alors que j’ai choisi le camp du diable, il y a de cela longtemps et bien qu’il m’arrivât encore de fredonner les mélodies de Paco Ibáñez.

Mais j’apprécie néanmoins sa performance littéraire, le plan en trois parties qu’il nous livre est remarquable et nul n’est besoin de reprendre son souffle pour le parcourir. La guerre d’Espagne n’est pas qu’une affaire d’historien, c’est aussi une affaire de famille, car il s’agit d’un conflit fratricide, Montherlant disait que « tout homme est une guerre civile » et sa pensée dépassait le cadre de la scène théâtrale, bien évidemment.

Cercas poursuivra cette introspection dans le Monarque de l’ombre, cette visite parmi ses ascendants qui auraient choisi le camp du mal. Ouvrage également passionnant où il réussit à mettre un mouchoir sur ses convictions personnelles pour mieux appréhender l’engagement de ceux qui auraient choisi le camp nationaliste.

Pour revenir au personnage ayant motivé le livre, Sanchez Mazas, l’un des fondateurs de la phalange, rescapé d’une exécution sommaire, antithèse de Miralles parce qu’il n’a jamais tenu un fusil de sa vie, cet homme que je ne connaissais pas avant de lire le livre demeure un paradigme. Celui de l’intellectuel, journaliste, écrivain, à l’image de Javier Cercas, dont l’engagement et la vie qui suivra, symbolise parfaitement l’écart existant entre une idéologie et sa traduction dans la réalité. Les contradictions, le travestissement, les décalages, voire aussi la trahison opposant l’homme de pensée et l’exercice réel du pouvoir éloigné de l’idéal fondateur sont ici clairement mis en exergue.

J’ai également apprécié les touches grivoises agrémentant le récit, touches personnelles d’un auteur apparemment porté sur le sexe.
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Terra Alta

Un polar passionnant, au scénario bien ficelé, mêlant présent et passé, et qui alterne l’enquête sur l’assassinat des époux Adell et l’histoire de Melchor.

Un policier complexe, au passé tumultueux et dont il a du mal à se défaire, qui s’identifie aux personnages des misérables, son roman fétiche.

Un style assez déroutant au début, où les actions et les éléments du décor sont décrites minutieusement et dans le détail, de façon un peu enfantine ou à la façon d’un script de cinéma. Mais une traduction assez médiocre.
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L'Imposteur

Mi-juin 2005, un jeune historien révèle l'énorme supercherie dont le célébrissime Enric Marco fut l'auteur pendant plus de trente ans.

Symbole de la lutte contre le franquisme qui lui offrit les lettres de noblesse pour diriger le mouvement anarcho-syndicaliste alors qu'il s'accommoda, comme la grande majorité des Espagnols, de la dictature, l'homme atteignit l'acmé de la mystification en s'inventant un passé de déporté dans un camp nazi.

En écrivant sur Marco, c'est sur son pays que l'auteur écrit car Javier Cercas aime à puiser dans l'histoire de l'Espagne pour composer ses livres. Pourtant, il a mis du temps à se décider à s'emparer de l'usurpateur.

Après moult atermoiements autour de la légitimité de son projet, il se décide à sauter le pas pour tenter de comprendre le cheminement qui a conduit Marco à berner le monde entier.

« Comprendre […] ne veut pas dire pardonner » écrit-il en justifiant son intention de saisir « toute la confuse diversité du réel, depuis ce qu'il y a de plus noble jusqu'au plus abject ».

En se « servant » de Marco, Cercas s'interroge sur la fonction de l'écrivain et sur le rôle de la littérature ce qui l'amène à considérer que le romancier est un fabulateur car, « pour arriver à la vérité, il faut mentir ». Comme son objet d'étude, il est un imposteur mais la différence est qu'il en a le droit parce que c'est en quelque sorte sa mission. À l'instar de Cervantes qui a transformé Alonso Quijano en un personnage, Don Quichotte, un idéaliste avide d'héroïsme.

Tout en alimentant le récit de considérations sur son rôle comme inventeur de fictions et donc un peu imposteur, Cercas confronte la biographie réelle de Marco à celle qu'il a imaginée, réfléchit aux conséquences des mensonges proférés et cherche à saisir les raisons de cette tromperie.

En affirmant qu'il fut une victime du nazisme, il a non seulement manqué de respect pour les vrais persécutés et favorisé les théories négationnistes. Et Marco de rétorquer que, grâce à ses talents d'orateur et son charisme, il est parvenu à sensibiliser les jeunes générations à l'horreur de la Shoah. De même, en se présentant comme un combattant antifranquiste, il se targue de « raviver la mémoire historique de ce pays amnésique ». Quitte à en faire un business, non par appât du gain mais par une sorte de nécessité de s'inventer une vie plus belle que la sienne, plus belle que celle de la plupart de ses compatriotes.

Pourquoi ? Tout simplement par envie d'être aimé, une nécessité pour celui qui est né dans un asiles d'aliénés d'une mère folle, dont le père « n'était pas un homme affectueux » et dont les premières années furent marquées par les coups de sa marâtre.

Alors, Marco n'est-il qu'un charlatan, n'est-il pas surtout un homme qui a été privé d'affection pendant son enfance et menti pour plaire et être admiré ?

La réalité est décidément complexe et l'intelligence de l'écrivain espagnol est de l'avoir mis en évidence avec brio mais aussi avec une humilité remarquable parce qu'il procède par tâtonnements, questionnements et sans certitude.

Dommage que le récit souffre de quelques longueurs et de répétitions qui frisent le radotage.



EXTRAITS

La réalité tue, la fiction sauve.

Le passé n'est qu'une dimension du présent.

Marco a fait un roman de sa vie.

Entre la vérité et la vie, ils choisissent la vie.

Ce pays a fait la réconciliation sur fond d'oubli.
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L'Imposteur

L'imposteur est un livre original dans lequel Javier Cercas essaie de retracer ce qui a pu pousser un homme à mentir et à s'enfoncer dans son mensonge. Le propos est loin de tout manichéisme.

Ce livre souligne la complexité de l'Humain et j'invite à le lire même si certains passages peuvent être un peu longs.
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Le château de Barbe Bleue

Polar d’une fille disparue, qui se change en « Mission impossible ».



L’ex-policier devenu bibliothécaire n’a pas de nouvelles de sa fille, partie en vacances à Majorque avec une copine. Pour la retrouver, il devra faire face à une sordide histoire d’exploitation sexuelle de mineures.



Si l’intrigue semble parfois un tantinet capillotractée, il n’en demeure pas moins trop réel, ce phénomène des hommes riches qui « achètent » les services de petites filles.



À lire aussi pour le plaisir d’une visite à Majorque.
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Le château de Barbe Bleue

Woah j'ai adoré Javier Cercas nous offre un roman façon "Océan's".Une intrigue qui inclue analyse politique et sociale, des histoires de flics et d'ex flics, une histoire d'amitié et surtout une montée de la barricade comme dans "les misérables". Javier Cercas est un grand romancier, moderne, sensible aux problématiques de notre époque et avec la petite touche en plus : la dérision par rapport à son oeuvre, un clin d'oeil qui nous interpelle pour ne pas s'engouffrer dans l'histoire et pour que nous restions vigilants aux vrais sujets de ses romans. Bref je suis fan
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Terra Alta

Avec « Terra Alta », premier volume d'une trilogie, Javier Cercas, écrivain espagnol réputé pour son exploration du passé sombre de son pays, s'est essayé au roman policier, un genre qui ne lui empêche pas de poursuivre son introspection historique. Bien au contraire.

Alors que son service de nuit s'achève dans un commissariat de la Terra Alta, Melchor reçoit un appel d'un collègue lui annonçant qu'un triple assassinat avait été commis dans une propriété cossue des environs. Deux personnes âgées ont été sauvagement torturées et la domestique roumaine a pris une balle en pleine tête.

Pourquoi s'est-on acharné avec une telle violence sur le richissime et puissant propriétaire des Cartonneries Adell et sa femme ?

Pourtant on lui avait dit qu'il ne se passait jamais rien dans cette comarque ! En affirmant la tranquillité de cette contrée, c'est oublier qu'elle fut le théâtre de la sanglante bataille de l'Ebre pendant la guerre civile espagnole.

Cela fait quatre ans que Melchor vit, avec son épouse et sa fille, dans ce petit bout de terre catalane où il a été muté pour être protégé d'éventuelles représailles de l'État islamique après qu'il a occis quatre de ses membres lors de l'attentat de Cambrils en août 2017.

Avant d'intégrer la police Melchor était un petit malfrat qui paya d'une peine de prison ses multiples forfaits.

C'est au cours de son incarcération qu'il se prend de passion pour la littérature et particulièrement pour l'un de ses grands classiques : « Les Misérables ». De ce pavé hugolien il s'attache à Javert, incarnation de « la vertu déguisée en vice » et prouve qu'un livre a le pouvoir de changer la vie.

C'est cette lecture et l'assassinat non élucidée de sa mère prostituée qui vont le motiver à devenir policier et à abandonner son passé de délinquant.

Récit très maîtrisé campant un personnage complexe et en colère contre toutes les formes d'injustice touchant les plus fragiles, « Terra Alta » est plus qu'un simple roman policier. En employant les codes du genre, Javier Cercas offre un regard d'historien et de quasi anthropologue pour mieux décrire un pays qui n'en finit pas de panser ses plaies.



EXTRAITS

Quand on pousse le bien à l'extrême, il se transforme en mal.

La justice absolue peut être la plus absolue des injustices.
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Terra Alta

J'ai trouvé que ce polar était en polar sans vraiment en être un. En effet on a bien une histoire de meurtres et de policiers mais la résolution de l'affaire est sans rebondissement et plutôt simple. 



Ici l'auteur se concentre surtout sur le personnage principal, à la fin du livre on connaît entièrement son passé, le but est certainement d'introduire un personnage récurrent.



La lecture n'est pas désagréable mais ça manque un peu d'actions.



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Indépendance

Long, pénible. J'ai adoré Les soldats de Salamine, j'ai bien aimé Terra Alta. Indépendance ne m'a pas plu. C'est très bavard et très politique. L'intrigue policière est superflue, c'est un prétexte qui s'efface derrière le sujet : Barcelone. Ce n'est pas que ça ne m'intéresse pas. Si, c'est bien ça, ça ne m'intéresse pas tellement.
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Terra Alta

Cela fait quelques années que je ne m'étais pas promené en terre catalane, pour boire une bière fraîche sur une terrasse ombragée à regarder le cul des catalanes ou le sourire des andalouses. En attendant Penelope Cruz, - pourquoi pas ?-, venue s'aventurer dans mes fantasmes ou mes souvenirs, je m'installe pour déguster un bon polar, premier d'une trilogie, signé d'un maître de la littérature espagnole, découvert avec Les soldats de Salamine et surtout établi au zénith de mes écrivains avec A la vitesse de la lumière, un chef d’œuvre.



A toi, venu t'asseoir à la table d'à-côté, bienvenue donc en Terra Alta...



Cela commence par un fait divers banal, même pas sûr que la une du journal en soit bousculée : les époux Adell, riches nonagénaires propriétaire de la grande - et seule -usine locale, monopole des richesses et de l'emploi, viennent d'être retrouvés morts... déchiquetés... torturés. Du sang, des silences, l'enquête commence avec le jeune Melchor, féru de littérature du XIXème. Mais c'est surtout l'occasion d'en découvrir un peu plus sur ce policier qui doit son salut à Jean Valjean et Javert. Délinquant juvénile, c'est en prison qu'il découvre Les Misérables de Victor Hugo (roman que je n'ai bien sûr pas lu, contrairement à Melchor qui en fait son livre de chevet pendant des années, lisant, cornant, relisant, écornant, à de nombreuses reprises). Et c'est ce livre qui le sauva, contrairement à sa mère et sa femme assassinées toutes les deux, de quoi approfondir les démons de Melchor au cœur de son âme.



La dernière page tournée avec la résolution de ce crime de haute bourgeoisie espagnole, la dernière gorgée avalée de cette IPA amarillo, la dernière lame rangée en attendant que la justice s'attaque à l'injustice, je repose Terra Alta sur l'étagère de ma bibliothèque où sont classés mes autres Actes Sud. A sa droite, Indépendance, le second volet des Misérables de Melchor qui m'embarquera un autre jour sur d'autres terres catalanes.
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L'Imposteur

Une histoire incroyable d'imposteur.



Le "héros" c'est Enric Marco (né en 1921 à Barcelone) ; il a actuellement 94 ans (en 2015).



L''homme que toute l'Espagne a admiré parce qu'elle avait besoin de héros pour affronter son histoire.

Il a prétendu avoir été interné dans le camp de concentration de Flossenburg en Bavière et a beaucoup témoigné sur les conditions de vie dans les camps de concentration en Allemagne.

Cet homme, mécanicien pendant de nombreuses années, a réinventé sa vie, de plus en plus détaillée dès que certains témoins disparaissaient. Une vie de semi-vérité et de faux mensonges. Une vie de fiction aux actes bien réels.



Javier Cercas, après avoir longtemps réfléchi, a écrit ce livre. Tourment de l'écrivain : est-ce que comprendre c'est justifier ?



Un livre passionnant qui pose la question de la Mémoire, de l''Histoire, des médias, la transition démocratique et le travail de l'écrivain lui-même.



Un livre entre documentaire et enquête : un livre courageux.

(lu en 2015)
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Terra Alta

Le temps qu’on met à lire un livre est-il synonyme de l’intérêt qu’on lui porte et de sa qualité? J’ai lu ce livre en deux semaines, de plus en plus captivé par l’intrigue. Je pouvais difficilement m’arrêter en cours de chapitre et comme chacun a environ 40 pages, l’ensemble des 400 pages de ce roman policier fut lu en quelques jours! Une double intrigue qui se croise et qui garde en haleine presque tout le long. J’ai bien aimé les liens avec Les Misérables de Victor Hugo. Tout de même j’ai été un peu déçu par un chapitre que je trouvais un peu superflu (la vie heureuse avec Olga). Une impression qu’il fallait remplir des pages car j’avais bien compris que c’était véritablement la femme de sa vie. J’aurais aimé aussi que l’auteur nous offre le dénouement de certaines intrigues secondaires. Peut-être cela fera-t-il parti d’un autre roman? Dans l’ensemble l’auteur nous offre assez de suspens pour nous tenir en alerte, avec un style et des mots bien choisis. Une nouveauté pour moi, cette façon d’offrir des descriptions au temps présent plutôt qu’au passé. Par moments, j’avais l’impression d’entendre une vidéodescription : « L’assassin entre dans la pièce. Il voit la victime endormie dans un fauteuil,,, » plutôt « L’assassin entra dans la pièce et aperçut la victime endormie dans un fauteuil » Ça fait beaucoup plus moderne, plus dynamique. 9/10
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