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4.04/5 (sur 119 notes)

Nationalité : Canada
Né(e) : 1959
Biographie :

Jeremy Narby est un anthropologue canadien.

Il étudie l'histoire à l'Université de Canterbury et obtient un doctorat en anthropologie à l'Université Stanford.

Il passe plusieurs années avec les Indiens Ashaninka dans la forêt amazonienne péruvienne cataloguant les usages des ressources de la forêt par les indigènes dans le but de les aider à combattre la destruction de celle-ci.

Ses nombreuses recherches dans la forêt d’émeraude et ses contacts réguliers avec les indiens lui ont permis d’accéder aux connaissances du chamanisme amazonien, un savoir qu’il est essentiel de transmettre et de valoriser.

Il a écrit plusieurs livres traitant les systèmes de connaissance indigènes et l'usage de l'ayahuasca (un breuvage à base de lianes consommé traditionnellement par les chamanes des tribus indiennes d'Amazonie, utilisé pour sa capacité curative associée aux croyances et pratiques locales) dans l'acquisition de connaissance.

Depuis 1989, il travaille sur mandat pour l'ONG suisse Nouvelle Planète pour défendre les peuples indigènes et réaliser des projets en leur faveur.
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Source : www.archipress.org
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Entretien avec Jeremy Narby, à propos de son ouvrage Anthologie du chamanisme



03/04/2018

Cette anthologie regroupe 64 textes d`explorateurs, d`ethnologues et anthropologues ayant côtoyé des chamanes, du XVIe au XXe siècle. Comment est né ce projet ? Quels ont été vos critères de sélection ?

Le projet est né de l`amitié et du dialogue intellectuel que j`ai eu avec mon co-éditeur Francis Huxley, qui était un vrai érudit. Il fallait que les textes soient à la fois pertinents et compréhensibles. La lisibilité avant tout !



Alfred Métraux définit le chamane comme « tout individu qui, dans l`intérêt de la communauté, entretient par profession un commerce intermittent avec les esprits ou en est possédé ». Ce que vous complétez par : « le chamanisme implique une sorte de scène théâtrale, sur laquelle le chamane opère, tandis que les membres de son public assistent au rituel sans en devenir les acteurs. » Comment expliquer que l`on retrouve cette pratique sur presque tous les continents, avec certes des différences, mais également des invariants ?

La psyché humaine a une unité au-delà des cultures ; les humains sont tous de la même famille, et nous sommes une jeune espèce.



Au fil des textes se dessine le portrait complexe, pluriel, du chamane, homme-médecine, homme de pouvoir, mais aussi être « appelé » par son sacerdoce, qui ne peut se soustraire à une vie contraignante au service de la communauté. Un rôle assez peu enviable, au fond…

Oui, dans de nombreuses cultures, le rôle du chamane implique une vie difficile, faite d`épreuves et des risques.



Quelle place occupe l`écrit dans le chamanisme ? Cette pratique semble d`abord se transmettre oralement, mais il est tout de même fait mention de textes…

A la base, le chamanisme se pratiquait dans les « sociétés sans écriture », comme on les appelait. Mais ensuite, au XXe siècle, les « sauvages » et les « primitifs » ont appris à lire et à écrire. Et les premiers livres écrits (ou dictés) par des chamanes ont commencé à paraître, comme La sage aux champignons sacrés, de Maria Sabina, ou le buveur de yagé, de Fernando Payaguaje. Excellents livres, par ailleurs.



On observe une nette évolution, à partir du XXe siècle, du regard porté sur les chamanes et le chamanisme, notamment dans les écrits de Knud Rasmussen, Alfred Métraux et Claude Lévi-Strauss. Quel vous semble être l`avenir du chamanisme, dans un monde où le « village planétaire » a remplacé le cercle tribal, contexte qui donne son sens à la pratique chamanique – comme le souligne Eleanor Ott dans son texte de 1995 ?

Nous sommes entrés dans l`ère du « néo-chamanisme », où des individus pratiquent dans les sociétés industrielles, en leur nom propre, plutôt qu`au nom de leur tribu ou de leur communauté. Le chamanisme est un phénomène caméléon, tel qu`en lui-même toujours il change, pour reprendre la formule du Concombre Masqué.




Jeremy Narby à propos de ses lectures




Quel est le livre qui vous a donné envie d`écrire ?

Le chant des pistes, de Bruce Chatwin.



Quel est le livre que vous auriez aimé écrire ?

Je n`ai jamais rêvé d`écrire le livre de quelqu`un d`autre.



Quelle est votre première grande découverte littéraire ?

Hermann Hesse.



Quel est le livre que vous avez relu le plus souvent ?

Traité du Zen et de l`entretien des motocyclettes, de Robert Pirsig.



Quel est le livre que vous avez honte de ne pas avoir lu ?

Honte, non. Mais disons quand même A la recherche du temps perdu, de Marcel Proust.



Quelle est la perle méconnue que vous souhaiteriez faire découvrir à nos lecteurs ?

La Chute du ciel de Davi Kopenawa et Bruce Albert.



Quel est le classique de la littérature dont vous trouvez la réputation surfaite ?

Aucun. Si un livre a une bonne réputation, je me dis qu`il l`a mérité.



Avez-vous une citation fétiche issue de la littérature ?

« Je m`étudie plus qu`un autre sujet. C`est ma métaphysique, c`est ma physique » (Montaigne).



Et en ce moment que lisez-vous ?

Un petit tas de livres, surtout des essais concernant les êtres terrestres. Comme le livre de Francis Hallé, Atlas de botanique poétique.



Découvrez Anthologie du chamanisme de Jeremy Narby aux éditions Albin Michel :





Entretien réalisé par Nicolas Hecht.


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Vidéo de

Deux Plantes enseignantes, le Tabac & l'Ayahuasca, de Jeremy Narby et Rafael Chanchari Pizuri. https://www.mamaeditions.com/catalogue/chamanismes/deux-plantes-enseignantes


Citations et extraits (74) Voir plus Ajouter une citation
Des abeilles au passage d’un labyrinthe élémentaire en forme de Y.
(Résumé de l’auteur à partir de la publication de Martin Giurfa en 2001 : « The concept of « sameness » and « difference » in an insect.)
L’entrée était marquée par un symbole particulier, en l’occurrence la couleur bleue. L’abeille qui volait à travers l’entrée parvenait à un carrefour, ou « chambre de décision », où elle pouvait choisir entre deux voies. L’un des embranchements était marqué par la couleur bleue, l’autre par la couleur jaune. Les abeilles qui suivaient la piste bleue trouvaient en fin de parcours une fiole contenant une solution sucrée. Celles qui choisissaient la piste jaune ne recevaient aucune récompense. Les abeilles avaient appris que le sucre se trouvait au bout de la piste portant le même symbole que celui qui marquait l’entrée extérieure du labyrinthe. En d’autres termes, « même » égale « sucre ». Dans une expérience ultérieure, l’entrée avait été marquée par un symbole différent, des lignes horizontales de couleur sombre, par exemple. Dans ce deuxième cas, en atteignant la chambre de décision, les abeilles rencontraient à nouveau les deux voies, qui, cette fois, ne se signalaient plus par des couleurs, mais par des lignes – lignes verticales pour l’une, horizontales pour l’autre. Les abeilles réussissaient brillamment, en se dirigeant DIRECTEMENT vers le motif semblable à celui qu’elles avaient vu à l’entrée.
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La plupart des projets que j'ai présentés, à des individus, des communes, des groupements de citoyens, des fondations et même une organisation gouvernementale, ont été financés, puis réalisés sur le terrain. Au cours de cette période, j'ai appris à donner des conférences publiques pour expliquer pourquoi il était écologiquement utile de confier la forêt tropicale à ses habitants ancestraux. Dans mes présentations, j'exposais la nature rationnelle de leur utilisation de ce milieu fragile, insistant par exemple sur le rôle-clé, dans les techniques agricoles indigènes, de la polyculture et du déboisement de petites surfaces. Mais plus je parlais, plus je me rendais compte que je taisais une partie de ce que je pensais.
Je ne disais pas que ces indiens, qui détiennent un savoir empirique attesté par la science, affirment que celui-ci provient des hallucinations induites par certaines plantes. J'avais moi-même expérimenté ces hallucinogènes végétaux sous leur direction, et ma rencontre avec les serpents fluorescents avait véritablement modifier ma manière de considérer la réalité. En hallucinant, j'avais appris des choses importantes pour moi - à commencer par le fait que je ne suis qu'un être humain intimement lié aux autres formes de vie et que la vraie réalité est plus complexe que ce que nos yeux nous font voir et croire habituellement. Telle était devenue ma conviction.
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Le fait est que boire de l'ayahuasca est nécessairement une proposiion risquée. Dans la mesure où le breuvage agit comme un "psychédélique" - ce qui signifie révélateur de la psyché - on prend un risque avec sa propre psyché lorsqu'on en boit. On ne sait jamais avant de l'avoir avalé, ce que ce puissant hallucinogène va révéler sur soi ; mais alors, il sera trop tard pour faire marche-arrière.
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Jeremy Narby
Les cellules à l'intérieur d'un être humain sont en conversation permanente par un système de signalisation complexe et symbolique. Il existe environ onze mille signaux moléculaires ou électriques qui sont véhiculés dans une sorte de bavardage permanent entre nos cellules pour que nous puissions exister. (...) . On decouvre (également) que les mêmes signaux neuromoleculaires véhiculés par nos neurones sont utilisés par les cellules d'une plante lorsqu'elle perçoit le monde de façon sensible et prend des décisions.
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Les scientifiques ont étudié le tabac depuis plus longtemps, et plus en profondeur que l'ayahuasca. Dès le XVIè siècle, le tabac a fasciné les observateurs du monde entier. Tandis que l'ayahuasca est restée un hallucinogène amazonien obscur jusqu'à la seconde partie du XXè siècle. En réalité, l'étude scientifique de l'ayahuasca en est à ses débuts.
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D'où vient la vie ? Peut-être la réponse n'est-elle pas connaissable par de simples êtres humains. Tchouang-Tseu le laissait entendre il y a longtemps déjà : « Il y a un commencement. Il y a un commencement qui n'a pas encore commencé à être. Il y a un commencement qui n'a pas encore commencé à être un commencement qui n'a pas encore commencé à être. Il y a l'être. Il y a le non-être. Il y a le non-être qui n'a pas encore commencé à être. Il y a le non-être qui n'a pas encore commencé à être un non-être qui n'a pas encore commencé à être. Soudain, il y a le non-être. Mais je ne sais pas, en ce qui concerne le non-être, lequel est réellement l'être et lequel est le non-être. Maintenant, je viens de dire quelque chose. Mais je ne sais pas si ce que j'ai dit a réellement dit quelque chose ou non. »
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Le tabac a une âme, il a un esprit, qui est de deux sortes, la médecine et la malice (maldad), ou ce que nous appelons en espagnol la sorcellerie (brujeria). Il a deux esprits.
_ Est-ceque toutes les plantes ont deux esprits, ou seulement le tabac ?
_ Surtout les plantes qui ont du pouvoir, c'est-à-dire les plantes enseignantes, l'ayahuasca, le tabac, le toé, le catahua, le palmier chambira, toutes les plantes puissantes ont deux esprits ou deux âmes.
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Tous les recoupements que j'avais trouvés jusque là entre le serpent cosmique et l'axe du monde, d'une part, et l'ADN, d'autre part, opéraient surtout au niveau de la forme. Cela rejoignait ce que Carlos Perez Shuma m'avait dit : la nature parle en donnant des signes et, pour la comprendre, il fallait être attentif à des similarités formelles. Il avait également dit que les esprits de la nature communiquaient avec les humains dans les hallucinations et les rêves, c'est-à-dire par des images mentales. Cette idée est très répandue dans les traditions « pré-rationnelles ». Par exemple, Héraclite d'Ephèse disait de l'oracle pythien (du grec puthôn, serpent), qu'il « ne parle pas, ne dissimule pas, mais donne un signe ».
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On voit ce que l'on croit, et pas seulement l'inverse. Et pour changer ce que l'on voit, il est parfois nécessaire de modifier ce que l'on croit.
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La première fois qu'un homme ashaninca m'a dit que les propriétés médicinales de plantes s'apprenaient en absorbant une mixture hallucinogène, j'ai cru qu'il s'agissait d'une plaisanterie. Nous étions en pleine forêt, accroupis à côté d'un buisson, dont les feuilles, disait-il, permettaient de guérir la morsure d'un serpent mortel. « C'est en buvant l'ayahuasca que l'on apprend ces choses », avait-il conclu - mais il ne riait pas.
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