Elle avait l'impression de comprendre les Italiens mieux que la plupart des Américains. Elle avait été charmée par les paysages bien ordonnés, l'omniprésence de l'art et du passé dans les rues des villes, la chaleur enthousiaste de leurs habitants.
Autrefois, elle avait vécu dans un autre monde où on célébrait la vie plutôt que la subir: l'Italie. Elle était partie terminer ses études d'art à Florence dix ans plus tôt, quatre ans après la guerre, à une époque où les gens étaient encore hantés par la destruction de leurs villages et la famine qui avait suivi. Elle voulait prendre exemple sur la patience et le courage des Florentins qui, bien qu'affligés par le deuil, accueillaient avec une joie mêlée d'ironie la saveur particulière des jours.
Un seul monument n'est pas inventé. Il s'agit du mémorial que j'ai situé sur la place de la mairie de Rocca al Sole. L'original se trouve sur la piazza d'un village dans les collines au nord-est de Florence. C'est en l'observant que j'imaginai cette histoire. Il porte la même date: avril 1945, quand les Allemands furent forcés de quitter la région. Les morts dont le nom figure sur le socle furent, comme à Rocca al Sole, massacrés à la dernière minute, en représailles contre les actes de résistance des villageois. Aucun homme adulte ne figurait parmi les victimes.
Ma première vision est un ciel noir de suie et toujours ces trombes d’eau. L’instant d’après je contemple la rivière bouche bée
Six heures du soir à Florence. Une foule d’imperméables regagne ses pénates par les ruelles étroites du centre ville.
"les Florentins, qui n'ont jamais considéré que les trésors artistiques de leur ville leur appartenaient, se considèrent comme les gardiens d'un héritage inestimable qui est le bien commun de l'Occident"