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Critiques de Larry Brown (201)
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Sale boulot

Les éditions Gallmeister continuent leur travail de réédition de l’œuvre de Larry Brown avec un de ses romans les plus singuliers.

Sale boulot met en scène deux personnages : Braiden Chaney croupit depuis vingt-deux ans dans un hôpital militaire du Mississippi. « Il avait pas de bras, pas de jambes, rien que des moignons. Comme dans Johnny s’en va-t-en guerre. » nous dit l’autre protagoniste de cette histoire, Walter James, qui vient d’atterrir ici après une de ces absences qui le saisissent parfois depuis que, vingt-deux ans plus tôt, son visage a été mutilé par une roquette et son cerveau endommagé par la balle d’un sniper vietnamien.

Deux hommes, une glacière pleine de bières alimentée régulièrement par une infirmière de bonne disposition, de l’herbe, et des nuits interminables… De quoi pousser au dialogue et à l’introspection. Aussi les parcours de Braiden et Walter se révèlent-ils peu à peu avec tout ce qu’ils peuvent avoir de commun : les mutilations, bien entendu, la guerre du Vietnam à laquelle ni l’un ni l’autre, le pauvre noir et le pauvre redneck, ne pouvait échapper de toute manière, et leurs espoirs. Celui de vivre malgré tout pour Walter qui a rencontré une fille qui n’est pas effrayée par son visage ravagé. Celui de mourir enfin pour Braiden qui, malgré les attentions de Diva, l’infirmière, n’en peu plus de ne vivre que dans les rêves qui, pour aussi beaux qu’ils puissent être, ne constituent qu’un pâle dérivatif à l’inanité de la vie qu’il supporte depuis plus de vingt ans.

Alors que se forge, si ce n’est une amitié, à tout le moins une relation faite d’une compréhension intime de l’autre et de compassion réciproque entre ces deux hommes, Larry Brown parle de la guerre, bien entendu, de la pauvreté endémique et des profondes inégalités de ce Mississippi dans lequel il a toujours vécu. Comme fil conducteur, il place une once de mystère : comment et pourquoi Walter a-t-il atterri ici ? Que s’est-il passé avant sa perte de connaissance et après ? Cela va se révéler peu à peu en même temps que se dévoilent les cœurs et les âmes des deux personnages pour aboutir à une fin saisissante. Premier livre d’un auteur autodidacte publié sur le tard, Sale boulot plaçait d’emblée Larry Brown au panthéon des grands écrivains américains contemporains. C’est un magnifique roman.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Dur comme l'amour

Indispensable de connaître cet auteur !

Moi ce sont surtout ses nouvelles que j'adore.

Larry Brown c'est une sorte de Raymond Carver croisé d'un John Fante.



Je ferais n'importe quoi pour faire découvrir cet auteur.

S'il vous plaît, lisez-le !
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Affronter l'orage

Neuf nouvelles par l’auteur de Joe et Fay, ayant de nombreux points communs entre elles : l’alcool, des femmes et des hommes dépassés, des couples en crise, une pauvreté ou une précarité endémique. Surtout des gens sur le point d’abdiquer, ou l’ayant déjà fait. Ici nous sommes loin de l’american way of life.

La soirée d’un couple où l’amour est parti depuis longtemps, un homme désemparé face à l’alcoolisme de sa femme, un homme qui a un double travail pour financer les traitements de l’enfant de sa compagne qu’il n’aime plus, une femme divorcée qui fantasme sur un ouvrier venu réparer sa porte, un alcoolique qui tente d’aider une femme tombée encore plus bas que lui, un employé d’une agence de tourisme qui hait les touristes, un libéré sous contrôle judiciaire qui joue allègrement avec les lignes rouges… Comme le dit la chanson « Noir, c’est noir, il n’y a plus d’espoir » ! Seule l’empathie de l’auteur pour ses personnages évite la déprime au lecteur.

Larry Brown décrit avec justesse et finesse cette Amérique des loosers, celle de gens qui ne savent pas de quoi demain sera fait et qui quelque part s’en foutent, l’essentiel étant de s’en sortir aujourd’hui, demain on verra… Un auteur que l’on peut rapprocher de Russel Banks, Daniel Woodrell ou Jim Harrison, tant pour les thématiques que pour la qualité d’écriture.
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Sale boulot

Des lits de fuite



Le Vietnam est un des démons de l’Amérique. Ce traumatisme né d’une guerre anachronique tourmente encore le pays le plus puissant du Monde qui a perdu un conflit sans être véritablement défait. Peut-être qu’un jour, le temps aidant, la grande recyclerie mémorielle de ce pays transformera cet épisode en nouveau western. Et on sait depuis au moins Liberty Valance que quand la légende est plus belle que la réalité…



En attendant, si « Sale Boulot » de Larry Brown nous confronte une nouvelle fois à cet univers des « Vets » revenus brisés physiquement et moralement, il propose un récit d’une profonde originalité, dans le huis-clos d’une chambre d’hôpital.



Ils sont deux.

Braiden Chaney n’est plus qu’un tronc. Découpé par la mitraille, il est alité depuis 22 ans dans un hôpital militaire, où il survit avec la présence bienveillante de Diva, son infirmière, ses sit-com à la télévision, sa bière et son monde imaginaire, quelque part en Afrique entre lions, crocodiles et nubiles. Même Jésus vient parfois le visiter.



Un jour, on amène un nouveau patient dans le lit voisin. Walter James lui, est entier, mais profondément défiguré, sujet à des épisodes d’absence et de délire, dont le dernier l’a conduit inconscient dans cette chambre.



L’un est noir, l’autre non, l’un n’a plus ses membres, l’autre n’a plus toute sa tête, mais ils partagent la même enfance bousillée, encroûtée par la pauvreté et le destin plombé, là-bas, dans le Sud.

Des laissés-pour-compte.



Inévitablement, on pense à « Johnny s’en va-t-en guerre » de Dalton Trumbo (c’est d’ailleurs la 1ère pensée de Walter en voyant son voisin), mais aussi à Misfits ou à Au Revoir Là-haut. Pourtant, aucune référence ne permet d’approcher vraiment l’originalité de ce roman.



Au début, les deux hommes s’observent, se méfient, puis peu à peu, se confient.



Ce roman n’est pas forcément facile à lire. D’abord parce que l’histoire est profondément triste et que les dernières pages sont bouleversantes, car Brown sait entretenir le suspense. Mais c’est aussi la forme qui surprend : les récits entrecroisés, les retours en arrière, les divagations…Il faut rester concentré pour ne pas perdre le fil.



Mais, à ce prix, c’est une lecture marquante et un grand roman. Cru, dur, frappant au cœur et à la tête.

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Affronter l'orage

Ce recueil de neuf nouvelles de Larry Brown, indépendantes les unes des autres, présente l’Amérique des paumés et des laissés-pour-compte qui affrontent, comme ils le peuvent, l’orage de leurs existences …



J’ai trouvé toutes ces tranches de vie un peu trop portées sur la boisson pour que je puisse pleinement les apprécier. Le thème de l’alcoolisme est effectivement abordé dans presque toutes les nouvelles et cela m’a tout bonnement lassé au fil de ma lecture.



Je n’ai absolument rien compris à la nouvelle intitulée "Julie : un souvenir", qui semblait pourtant être l’une des plus intéressantes de par sa construction complexe (mais je n’avais visiblement pas les clés pour l’élucider).



Côté positif, puisqu’il y en a tout de même, je dois reconnaître que j’ai apprécié la nouvelle "Vie nocturne" car elle a créé en moi une attente, dès les premiers paragraphes, qui m’a tenu en haleine jusqu’à la fin, même si ce que j’attendais n’est finalement jamais venu. L’avant-dernière nouvelle du recueil, "Partir", sur l’extrême solitude, est ma préférée.



En définitive, je pense que le format des nouvelles ne me correspond pas car il ne m’a pas permis de m’attacher aux différents personnages. Voici donc ma toute première déception du catalogue Gallmeister !
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Sale boulot

Je voulais découvrir Larry Brown, un des auteurs fétiches de ma mère et également lire un roman sur la guerre du Viet Nam. Alors ma mère pour mon anniversaire c'est dit que c'était une bonne idée de m'offrir Sale Boulot, roman de Larry Brown sur deux vétérans de la guerre du Viet Nam qui ont été mutilés là bas.



Ce roman assez court, 202 pages, se passe en une nuit, une nuit où Braiden Chaney revenu de la guerre sans jambe ni bras, qui est alité depuis 22 ans dans un hôpital militaire et Walter James, qui n'a plus de visage et des troubles au cerveau, vont se raconter leur vie d'avant, leur vie pendant la guerre et leur vie d'après.



Larry Brown nous raconte la vie de deux types, un blanc et un noir mais qui ont en commun en plus d'avoir été mutilés à la guerre, d'avoir eu une vie plutôt misérable et qui pensaient que s'engager dans l'armée les sauverait de cette misère. Mais au final, en plus d'avoir perdu leur corps ils sont aussi perdu un peu de leur âme là bas et ils mènent dorénavant une vie encore plus triste qu'avant cette putain de guerre comme dirait Rambo !



J'ai beaucoup aimé la construction du roman, on change régulièrement de narrateur et de temporalité mais on ne s'y perd pas, on reconnaît très rapidement avec qui et quand on est. Et pour ça Larry Brown est vraiment très fort. Il est également très fort pour prendre le lecteur aux tripes sans virer dans le larmoyant.

Et le final, mon dieu le final ! Je l'ai lu 2 fois !



Sale boulot est un superbe roman noir sur le fait que la guerre détruit les hommes physiquement mais pas que. Je vous le conseille vivement !



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Père et fils

Glen, qui sort tout juste de prison, est un homme où la vengeance et la colère se sont installées dans son être, jusqu'aux tréfonds de son âme. Après trois années d'emprisonnement, Glen Davis revient dans sa petite ville du Mississippi, entourée de champs de coton et étouffée par la chaleur du sud. La rancœur et la haine vont réveiller d'anciennes souffrances, de vieux secrets et des histoires au sombre passé.



A peine arrivé, Glen Davis tue deux personnes. N'ayant aucune preuve de sa culpabilité, Larry Brown en profite pour nous présenter une bien belle panoplie de personnages. Chacun d'eux ayant une part d'ombre. L'auteur nous peint des hommes et des femmes avec une large palette de nuances, allant d'un enfoiré sortant de taule, mais dont on ne peut s'empêcher d'être attristé par son vécu ; d'un vieillard plein de remords mais qui donne l'impression d'être un homme bien, une femme au passé peu glorieux mais qui souhaite ce qu'il y a de mieux pour son fils ; un shérif qui ne sait plus où mettre de la tête et qui ne fait que penser à la femme qu'il ne peut pas avoir.



Larry Brown nous dépeint des paysages, des scènes du quotidien, avec une extrême précision, ce qui donne au lecteur l'impression de transpirer au milieu des champs de coton, d'être satisfait en pleine partie de pêche et d'étancher sa soif avec une bonne bière. Son récit nous est conté avec lenteur, avec compassion puis avec violence. Les personnages sont décrit avec ce qu'il y a de plus beau et de plus laid chez l'être humain.



Pour les lecteurs peu patients ou qui souhaitent de l'action toutes les deux lignes, ce roman risque de vous donner une très légère indigestion. Cependant, je suis quasiment certaine que vous prendrez énormément de plaisir à voir les liens se dénouer au fil de votre lecture, juste pour avoir le plaisir de savoir ce que va devenir notre bon à rien de Glen Davis !


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Joe

Que de souffrances dans cet état du Mississipi. Au début, on se croirait au siècle dernier et quand les voitures ou la machine à laver apparaissent dans le décor, on se dit avec horreur que ça pourrait être aujourd’hui. Le jeune héros est émouvant de courage, de bonté et d’innocence. Fidèle à sa famille de « pauvres blancs » américains, désespérante et révoltante, il se bat dans tous les sens du terme. Cet ado va être initié à la vie par un homme en proie à d’autres souffrances. La nature n’est pas en reste mais elle est habilement sublimée. Un livre dur et passionnant sur des luttes individuelles au destin imprévisible.
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Fay

Ayant décidé de fuir sa famille et en particulier son père alcoolique, fainéant, violeur et violent, Fay Jones, du haut de ses 17 ans, va parcourir le Mississipi pour rejoindre Biloxi et ses plages paradisiaques vers une vie de rêve. A la fois naïve et belle comme un cœur, elle va apprendre la vie à travers différentes expériences et devenir une femme fatale à qui aucun homme ne peut résister. Elle va trouver un lit dans un camping auprès de jeunes gens vivant d’alcool et de drogue avant de rencontrer Sam, un policier de la route.



Sam et sa femme ont du mal à surmonter la mort de leur fille. Ils accueillent donc les bras ouverts Fay qui va découvrir cette nouvelle vie comme un paradis. Jusqu’à ce qu’elle se rende compte que Sam trompe sa femme devenue alcoolique. C’est d’ailleurs à cause de l’alcool qu’elle trouvera la mort et que Fay la remplacera … jusqu’à un nouveau drame qui l’obligera à reprendre la route et à rencontrer Aaron, un videur de boite de nuit violent tombé fou amoureux d’elle.



Ecrit dans un style littéraire et méticuleux, Larry Brown continue à nous montrer la société américaine, en s’écartant des miséreux pour détailler la vie des ouvriers. Il montre des gens qui dépensent leur argent en alcool ou en drogues dans un monde sans pitié, un monde sauvage ne respectant que la loi du plus fort. Il est d’ailleurs intéressant de voir que l’auteur oppose Sam à Aaron, comme deux faces d’une même pièce de monnaie, le Bien et le Mal. Pour autant, chacun de ces deux mâles vont succomber aux charmes de Fay et avoir une psychologie complexe et bien plus nuancée qu’une simple opposition Bien/Mal.



On voit aussi Fay, une femme fatale moderne, qui va devenir consciente de son pouvoir d’attraction envers les hommes, et sa capacité à les utiliser. De jeune femme victime, elle va orchestrer les événements à son profit et devenir femme manipulatrice. Personnage éminemment complexe, semblant parfois rechercher une sécurité, parfois prenant des décisions, elle démontre une sacrée faculté à obtenir ce qu’elle veut avec un beau machiavélisme.



De ce personnage féminin d’une force remarquable, de cette peinture de la société sans concession, de ce style si détaillé, de cette intrigue suivant l’itinéraire d’une adolescente, nous garderons cette image bien noire des Etats-Unis brossée par Larry Brown, avec la sensation d’avoir parcouru un sacré chemin et avoir abordé des thèmes divers qui font réfléchir. De la grande littérature, tout simplement.
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Fay

Voilà un nouveau Totem de lu et un nouvel auteur de découvert. J’avais hâte de lire Larry Brown après en avoir entendu beaucoup de bien sur Bookstagram.



A la lecture du résumé, j’ai tout de suite su que ce roman allait me plaire. J’aime lire les histoires de filles / femmes qui partent de loin et qui vont essayer de s’en sortir le mieux possible dans la vie. Ici, c’est l’histoire de Fay, 17 ans, qui vient de quitter sa famille pour se protéger des agressions de son père et de l’attirance perverse qu’il peut avoir vis à vis d’elle. Elle est seule, avec très peu d’éducation, très peu d’argent mais elle est terriblement belle. Elle veut rejoindre la mer qui est selon elle, le bout du chemin, avec un travail et un logement à la clef. Mais bon, vous vous en doutez, rien ne va se passer comme elle le souhaite.



Fay va donc rencontrer sur sa route, des personnes mal intentionnées qui veulent abuser d’elle, mais également de bons samaritains. Le problème qui se pose, c’est que malgré toute la bonne volonté dont elle fait preuve, le malheur arrive toujours, comme une sorte de malédiction qui plane au dessus d’elle. Fay attire les hommes, elle a une sorte de pouvoir sur eux, sans s’en rendre bien compte, cette femme/enfant fait ressortir le pire et le meilleur chez chacun d’eux.



Voilà donc un très bon roman noir, sur cette Amérique qui me passionne tant, cette Amérique paumée, cette Amérique d’alcool, de drogue et de sexe. J’ai passé un excellent moment de lecture, malgré je dois l’avouer quelques longueurs parfois, mais c’est aussi ce qui donne cette espèce de noirceur à la lecture. Je découvre Larry Brown avec ce roman, et je découvre un grand auteur, j’ai plusieurs de ses romans dans ma PAL que je vais m’empresser de lire.
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Affronter l'orage

Le recueil de nouvelles "Affronter l'orage" (c'est également le titre de la première nouvelle) met en scène des personnages désabusés et esseulés, souvent en proie à des difficultés matérielles conséquentes. L'alcool y est un recours, bien trop, et met à nu les espoirs et le laisser-aller de ces personnages, qui comme nous tous, ont des rêves, et s'y accrochent comme à une planche de secours au milieu des éléments déchaînés.



Car oui, il s'agit bel et bien d'affronter l'orage de la vie : tous les personnages sont confrontés à un moment crucial, à un choix, ou aux conséquences d'une absence de choix, parfois pour se sauver, parfois pour descendre plus bas encore, mais en finir. Pour certains l'amour est présent et reste une ressource, pour d'autres il serait une entrave, si tant est qu'ils soient même capables d'aimer. Les femmes en particulier y ont connu la violence à plus d'une reprise, elles s'accrochent peut-être plus durement à la vie, mais là encore, le regard de l'auteur sur leur univers est dur, voire impitoyable, car elles sont rarement de bonnes mères, et délaissent leur progéniture, dans plusieurs nouvelles.



Bref, des hommes et des femmes s'approchent, se recherchent, s'espèrent, et cela aboutit ou non à un semblant de relation. C'est ici qu'intervient l'écriture : on est à la fois dans l'Amérique profonde, c'est totalement américain, mais aussi universel, et même intemporel. L'écriture de Larry Brown réussit le tour de force de nous faire glisser dans la peau de personnages peu recommandables, tout en nous donnant un aperçu de ce qui fait échouer ou déraper les relations - la peur de l'intimité, l'égoïsme presque forcé par les conditions de vie, où il faut avant tout survivre, lutter pour conserver son travail... On est à la fois dans la peau du personnage, et on ressent de l'empathie pour lui et pour l'autre, les autres, qui se débattent autour de lui.



Je n'ai pas ressenti de tristesse en pénétrant dans cet univers, la lumière y est crue mais marque bien les contrastes, j'avais envie d'y retourner, je pensais aux personnages du livre. Il me semble que c'est un ouvrage qui agit aussi à retardement - on croit avoir refermé le livre, mais il agit encore, et projette sa lumière dans notre propre décor.
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Joe

Larry Brown, né en 1951 à Oxford dans le Mississippi aux États-Unis et décédé en 2004 d'une crise cardiaque, est un écrivain américain. Après avoir servi dans l'US Marine et exercé de multiples petits boulots, bûcheron, charpentier, peintre, etc. il fut pompier pendant seize ans. Un éditeur remarque un jour une de ses nouvelles dans un magazine et lui demande s'il aurait d'autres textes à publier. L'écrivain lui répond qu'il en a des centaines. En quelques années, Larry Brown est reconnu comme un grand romancier par la critique comme par les lecteurs et il récolte de nombreux prix. Son œuvre compte six romans, deux recueils de nouvelles, une autobiographie et un essai.

Le roman Joe, date de 1991 et vient d’être réédité dans une traduction révisée. Son adaptation pour le cinéma sort en salles le 30 avril prochain avec Nicolas Cage dans le rôle titre.

Nord du Mississipi, une famille de vagabonds arrivée à pied et sans un sou de Californie, échoue dans une masure abandonnée au coeur d’un bois, près d’un bled. Il y a Wade, le père, un vieux salopard alcoolo, sa femme une épave battue et résignée perdant un peu la tête, leurs deux fillettes Fay et Dorothy et Gary le fils de quinze ans, illettré, ne connaissant ni sa date ni son lieu de naissance. Le récit nous apprendra que d’autres enfants sont morts ou partis, personne ne s’en souciant beaucoup. Joe, une figure locale, dirige un groupe de journaliers noirs qui déboisent un terrain. La quarantaine bien entamée, un peu marginal, ce n’est pas ce qu’on appelle un innocent. Il tête ses bières à tout de bras, joue aux cartes, n’hésite pas à faire le coup de poing même contre les flics, d’ailleurs il a fait de la taule. Sa femme l’a quitté avec leurs enfants mais il en pince encore pour elle et tente de l’amadouer en se rendant régulièrement au bureau de poste où elle travaille. Quand Joe engagera Gary, une sorte d’amitié virile va naitre entre eux deux, l’un pouvant être le père de l’autre. Un père plus responsable pour Gary, un enfant dont il s’occupera vraiment pour Joe, comme une rédemption.

Un roman extrêmement noir et dur. Le vieux Wade jouant le rôle de l’ordure irrécupérable, abruti d’alcools de toutes sortes, il commettra les ignominies les plus abjectes pour obtenir sa bibine. Gary, c’est l’innocence du gamin qui ne connait rien de la vie, si ce n’est la faim et les coups reçus mais qui tente néanmoins d’aider sa famille à survivre. Enfin Joe, la figure de celui qui a beaucoup roulé sa bosse, beaucoup laissé de lui en chemin mais toujours prêt à se battre pour survivre, le type qui dans ces romans, circule en pick-up sur des routes désertes en sirotant des bières tirées de la glacière posée sur la banquette, fumant comme un pompier, le coude à la portière et le flingue dans la boite à gants. Ce genre qui fait fantasmer les lecteurs amateurs d’une certaine Amérique, celle du pays profond qui n’est pas là sous ses plus beaux atours. J’adore.

Ne vous y trompez pas, Larry Brown ne nous refourgue pas une histoire rabâchée. Il signe un roman puissant, noir de chez noir, très bien écrit avec des personnages inoubliables et une fin ouverte. Avec ce petit plus, ancienneté du roman peut-être, on ne sent pas ici – ce que je ressens souvent hélas en lisant des romans américains – le côté formaté découlant des ateliers d’écriture… Encore un excellent livre à ne pas rater donc ? Hé oui !

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Fay

Du rififi dans le Mississipi.

La trame principale de l’histoire met un moment avant de vraiment s’installer et de nous happer. Mais une fois le trio de personnages principaux en place, on comprend que l’intrigue va droit dans une impasse, menant irrésistiblement vers une rupture fatidique et la deuxième partie, comme tout roman noir qui se respecte, est plus captivante.

Il faut dire que cette Fay, même si elle subit plus qu’elle ne provoque les événements, a une faculté certaine pour s’attirer des ennuis ou pour endurer le joug des hommes qu’elle croise, gent masculine décrite ici comme une bande de pervers alcooliques violents mal intentionnés, ou dans le meilleur des cas dans l’impossibilité de résister à son charme juvénile.

Stylistiquement, il ne se passe pas grand-chose et les descriptions narratives sont par moment assez ennuyeuses : des lignes et des lignes pour raconter une balade en voiture, boire et fumer au volant ou juste pour descendre se faire couler un café à la cuisine.

Je trouve que Larry Brown ne fait pas grand-chose du monde qu’il décrit, de toute cette déchéance sociale qu’il relate, cette fange humaine qui ne pense pour les uns qu’à boire, fumer et assouvir leurs pulsions, ou à être restreint à objet sexuel pour les autres quitte à devoir en payer le prix tant physiquement que moralement par les premiers. Même dame nature, telle une décharge géante à ciel ouvert, en prend pour son grade en subissant l’incivisme de chaque personnage par leur délestage continu en tout genre.

Pour autant cette description ne mène à aucune porte de sortie qu’elle ne s’ouvre sur des notes d’espoir sinon par ce constat assez sombre que l’être humain court à sa perte.

Non, au final, cela permet seulement à l’auteur d’incarner l’univers que côtoie Fay et de jouer sur la dualité entre la naïveté d’une jeunesse malheureuse par une vie recluse et l’attirance sensuel que provoque son corps de jeune femme, ambivalence à l’origine de son infortune et du chaos que cela engendre.

Par son rythme plutôt lent et ses longs passages narratifs, je qualifierai ce roman noir de roman « d’atmosphère » plutôt que d’action. Aussi le personnage éponyme est je trouve moyennement réussi et son côté vénéneux pas assez souligné pour venir suffisamment appuyer les motivations des protagonistes.

Ce n’est pas totalement inintéressant, je l’ai lu assez rapidement, mais quitte à faire prétentieux, je trouve que cela manque d’ambition littéraire et que ce roman, alors qu’il y a de bonnes idées et un certain regard, reste cantonné à un roman de genre.
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L'usine à lapins

C’est une assez (très?) grosse déception que cette lecture. Quand tu en es à la page 50 et que tu vois qu’il t’en reste 380 à lire et que t’as déjà envie de te flinguer, c’est que ça ne le fait pas du tout!



Je pourrais dire, c’est dommage, l’histoire est sympa, blablabla… Oui, l’écriture est agréable, c’est fluide, tout ça tout ça, OK, mais imaginez vous le truc: c’est comme si l’auteur avait eu l’idée de créer des histoires différentes avec des personnages communs à ces histoires MAIS qu’il avait regroupé tout ça en un seul ouvrage et donc finalement sans aboutir aucune de ces histoires, au lieu d’en écrire 5 ou 6 correctement et proprement! Bah , ce livre c’est ça. A chaque chapitre, on change d’histoires, de personnages… résultat, je me suis souvent sentie perdue et c’était pas cool parce qu’en fait, il n’y a pas de cohérence voire de relation.



Je n’ai pas retrouvé le côté humour noir ou caustique auquel je m’attendais. C’est un roman noir mais plat. Je n’ai ni souri ni ri d’aucune façon. Si appeler un de ces personnages M. Hamburger, domino ou encore Melle Muffet est synonyme d’humour décapant, alors ah ah ah, je n’ai pas d’humour du tout.



Aucune des situations ne m’a semblé risible, j’ai plutôt trouvé ça pathétique et c’est véritablement le mot qui convient aux personnages, leurs histoires, leurs vies, du coup, c’était très long et pas très passionnant.



Le titre et la couverture m’ont vendu du rêve mais j’ai plutôt cauchemardé en le lisant du genre: mais ce livre ne s’arrête jamais! Certains diront que je suis passée à côté, certainement mais j’étais si éloignée alors que je ne m’en suis approchée!
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Sale boulot

Deux anciens du Vietnam se retrouvent dans une chambre d’hôpital, vingt ans après la guerre. L’un est noir, amputé de ses jambes et de ses bras (la référence au personnage de Dalton Trumbo est revendiqué et assumé). Il végète depuis toutes ces années sur un lit d’hôpital, attendant la fin qui ne vient pas. L’autre, un blanc, vient d’être hospitalisé sans se souvenir de la raison. Il a reçu des shrapnel dans le cerveau et est sujet régulièrement à des absences, des évanouissements. La nuit s’annonce longue pour les deux hommes. Peu à peu, les souvenirs remontent, l’atrocité de la guerre qu’ils ont connu, la pauvreté et le racisme qui les ont amenés à être enrôlés dans ce bourbier, leur vie ou plus exactement leur survie d’après. Walter James, l’homme blanc, comprend très vite que Braiden Chaney veut lui demander un « service ». Un service impossible aux yeux du vétéran. Deux hommes au bout du rouleau, dans une longue nuit au fin fond d’un hôpital militaire au sud des États-Unis, deux hommes donc pour dénoncer l’absurdité de la guerre en général et la guerre du Vietnam en particulier, où de nombreux soldats américains n’ont toujours pas compris exactement pourquoi ils se battaient là-bas… Un roman âpre, sans concessions, qui sans être le meilleur de Larry Brown (lire "Joe" ou "Fay", sublimes), n’en est pas moins puissant.
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Fay

Fay est belle, très belle même ; elle plait aux hommes sans trop s’en rendre compte. Et puis de toute façon, elle n’a pas vraiment reçu tous les codes de la vie sociale. A peine sortie de l’enfance, elle fuit une famille toxique, sans avoir été à l’école ni été éduquée. Elle fuit la misère économique, la misère intellectuelle et la misère affective. Chez elle, il n’y a rien. Elle prend la route…



C’est sur le tas qu’elle fera son apprentissage ; au gré de ses rencontres, de son errance ; au gré des déboires, au gré des coups et de son instinct.



Fay est un roman très noir, qui nous balance à la face la dure réalité des femmes prises au piège des bourreaux, des profiteurs et des cinglés. C’est la face cachée du rêve américain ; l’univers des livrés à eux-mêmes avec encore assez de dignité pour trouver au fond d’eux un résidu d’énergie pour remonter la pente quoi qu’il en coûte.



Car ne nous y trompons pas ;Fay est un petit bout de femme attachant et lumineux ; une gamine qui en réalité ne nous inquiète pas plus que cela ; d’instinct, on a dans l’idée qu’elle peut s’en sortir.



Encore une belle découverte des éditions Gallmeister !


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Dur comme l'amour

Second recueil de nouvelles de Larry Brown, Dur comme l’amour – Big Bad Love en version originale – réunit des textes dans lesquels on retrouve les personnages habituels de l’auteur, travailleurs pauvres du Mississippi, chômeurs, aspirants écrivains en proie aux vicissitudes de la vie et, comme l’indique le titre, se heurtant à l’amour. Celui qui brise le cœur. Celui qui a été, celui qui ne sera jamais, celui que l’on recherche, celui que l’on regrette.

Un amour qui, d’une manière générale, chez les hommes ici mis en scène dans les dix nouvelles qui composent ce recueil, représente avant tout l’espoir de combler un vide. Et faute d’amour, on le comble ici avec de la bière : « Apparemment, Mildred était partie avec un autre homme doté d’un énorme pénis. Cette réalité m’ayant quelque peu dégrisé, je suis allé dans mon pick-up chercher une autre bière et je suis ensuite allé vers mon chien. Il était toujours là, toujours mort, sauf qu’à présent la rigidité cadavérique commençait à s’installer. »

L’amour qu’ils cherchent en est-il d’ailleurs vraiment un ou simplement une manière de trouver, au moins brièvement, dans le regard de l’autre, une raison de s’aimer soi-même ? C’est certainement en grande partie le sujet qui traverse tous ces récits. L’amour ou autre chose, d’ailleurs, une complicité, une certaine reconnaissance dans un monde qui en accorde bien peu aux gens que décrit Brown et qui, bien souvent, apparaissent comme ses alter ego. Des hommes frustes, obsédés par le sexe, dominés par le goût de la bière, effrayés par la mort, tenaillés par le besoin de toucher même fugacement un bonheur qui leur échappe et leur donnerait une raison de vivre.

Cela passe aussi par l’écriture, abordée ici dans trois textes. Dans la première partie du recueil, un homme voit sa femme, déterminée à devenir écrivaine, s’éloigner de lui. La deuxième partie est composée d’un texte étonnant, « Discipline », mettant en scène l’audience de mise en liberté conditionnelle d’un apprenti écrivain, enfermé dans une prison où sont regroupés des coupables de plagiat. C’est l’occasion, pour Larry Brown, avec une ironie douce-amère, de rire des éternels « nouveaux Faulkner » ou disciples autoproclamés de Flannery O’Connor et de convoquer les auteurs qu’il admire comme Harry Crews ou Cormac McCarthy. Le plus long texte compose la troisième partie du recueil. Dans « 92 jours », Brown fait la chronique du quotidien d’un homme rongé par le besoin d’écrire et confronté à son échec à se faire publier. Âpre et violente, encore portée par une intense autodérision, cette nouvelle concentre tout ce qui nous transporte chez Larry Brown. C’est beau, c’est triste, c’est marrant et pathétique, pudique sous l’exubérance. Sublime.


Lien : http://www.encoredunoir.com/..
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Fay

RÉSUMÉ: A 17 ans à peine, Fay fuit une vie de misère.Elle s'élance sur les routes du Mississippi pour gagner la mer et un autre avenir.Elle n'a pas mis les pieds à l'école depuis longtemps, ignore beaucoup des règles de la vie en société et ne sait pas vraiment ce que les hommes attendent des femmes.Belle, lumineuse et parfois inconsciente, elle trace sa destinée au hasard de ses rencontres, s'abandonnant aussi facilement qu'elle prend la fuite. cette femme-enfant, qui ne réalise qu'à demi l'emprise qu'elle exerce sur ceux qui croisent son chemin, laissera dans son sillage une traînée de cendre et de sang.



MON AVIS: Quelle histoire émouvante et terrible! J'ai été très touchée par Fay, si naïve et perdue face à des comportements humains qui lui sont totalement étrangers. Pourtant elle est forte et réagit à l'instinct, celui de la survie, quitte à créer des situations dramatiques, voire mortelles pour ceux qui la côtoient . Elle apprend de la vie au fur et à mesure de ses mésaventures, elle mûrit, elle grandit, et voit bien que la vie ne sera pas facile pour une jeune femme comme elle, seule, sans soutien, ayant commis des actes irréparables.

Je me suis mise au fil des pages à espérer pour elle une issue favorable, une possibilité d'avoir une vie meilleure. Même si je voyais bien que ni Sam, le flic paumé, ni Aaron amoureux jaloux et violent ne pourraient la lui offrir.

Et puis j'ai vu qu'elle survivrait, avec ses armes à elle, femme fatale ayant finalement appris à se servir de ses atouts.



Larry Brown a su décrire admirablement tout ce que pouvait ressentir cette jeune fille confrontée à la réalité parfois cruelle de la vie. Il sait aussi nous parler de ces lieux entre champs de coton et bord de mer. C'était une lecture parfois très dure et elle était passionnante, prenante et belle dans toute sa noirceur.



Du nature-writing, du roman noir comme j'aime et une envie de lire d'autres livres de cet auteur hélas disparu.



Lu grâce à mon club de lecture Babelio/Vannes
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Joe

Larry Brown dresse le portrait des invisibles, de ceux qui marchent au bord de la route, dépenaillés et dont on ne veut rien savoir. Ces gens qu'on plaint et qui font un peu peur. Cette misère, cette pauvreté matérielle, culturelle et surtout morale.

Pour un verre d'alcool, tous les moyens sont bons.

Certains ne dépassent pas la limite de ce que la société et la morale permettent, tiraillés par leur conscience, d'autres ne savent même pas qu'il y a une limite. On vole ou on tue comme on ferait autre chose, sans état d'âme, parce qu'on survit, parce qu'on est saoul on parce qu'on veut l'être.

Joe et Gary se rencontrent dans toute cette misère, chacun a son histoire, ses faiblesses. L'un a encore des rêves, l'autre plus ou presque plus. L'un décide de préserver l'autre, de l'aider à conserver ses rêves et ses maigres ambitions.

Une histoire dure, noire mais dans toute cette noirceur, il y a un brin de lumière, quelque chose de tellement émouvant dans cette petite solidarité naissante, qu'on peut encore croire, un tout petit peu à la gentillesse, à l'amitié ou à la bienveillance.

Bref, un peu de douceur dans ce monde de brutes, mais il faut le dire vite !
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Joe

Un roman brut aux héros attachants, un environnement rude d'une beauté sauvage. Tout est sauvage, même les humains, peu d'humanité, des conditions de vie extrêmement dures, des adultes sans moralité mais dans cet univers, apparaît malgré tout un signe d'espoir.
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