Citations de Laurent Binet (622)
Le moine Savonarole n'avait pas seulement tué la beauté en intimant à Botticelli de brûler ses toiles. Il avait épuisé le goût de l'idéal en réduisant l'idéalisme à son fanatisme borné.
Dieu, Madame, doit vous aimer beaucoup puisqu'il m'a mis sur votre chemin.
La cervelle des jeunes gens est comme du sable. On s'y enfonce en voulant la pénétrer.
Simon, pensif, demande à Bayard: "c'est quoi, pour toi, le réel?"
Comme Bayard ne comprend évidemment pas où il veut en venir, Simon précise: " Comment tu sais que tu n'es pas dans un roman? Comment tu sais que tu ne vis pas à l'intérieur d'une fiction? Comment tu sais que tu es réel?"
Bayard considère Simon avec une curiosité sincère et lui répond sur un ton d'indulgence: "T'es con ou quoi? Le réel, c'est ce qu'on vit, c'est tout."
Leur vaporeto arrive et pendant qu'il effectue sa manoeuvre d'accostage, Bayard tapote l'épaule de Simon: "Te pose pas tant de questions, va."
Que m'importent vos histoires de banquets, de joueurs de flûte, de vieillards aux oubliettes ou d'épouse réformée ? Le mari peut bien manger sa femme en ragoût si ça lui chante ! la peste soit de cette famille ! Le duc d'este et son fils vous ont semblé dégénérés ? La belle affaire. Êtes-vous donc le seul à ignorer que la mère du Duc était Lucrèce la putain, fille du Borgia ?
Giorgio Vasari à Vincenzi Borghini . 113
Mon histoire est trouée comme un roman, mais dans un roman ordinaire, c'est le romancier qui décide de l'emplacement des trous, droit qui m'est refusé parce que je suis l'esclave de mes scrupules.
Les porte-parole ne parlent pas pour les autres mais à leur place.
On pourra reprocher beaucoup de choses à Heydrich, mais pas de ne pas tenir ses promesses.
A ce degrés de bêtise politique, la trahison devient presque une œuvre d𠆚rt.
Dans ce monde, tout semblait possible avec de l'or; ou du moins, rien ne l'était quand il venait à manquer. L'or et l'argent simplifiaient tout.
Mais de nouveaux, des Skraelings furent frappés par la fièvre et moururent. Comme les Groenlandais étaient épargnés, ils comprirent qu'ils n'avaient rien à craindre de la maladie mais qu'ils l'avaient apportée avec eux. Ils comprirent qu'ils étaient la maladie.
Avec le flot d'or et d'argent qui lui parvenait de Tahuantinsuyu, Atahualpa n'en avait plus besoin. C'est la misère qui crée le désordre. Or, l'Espagne devenait chaque jour plus prospère.
De nouveau, ils furent confiés aux bons soins des tondus, catégorie de la population qui recouvrait décidément les activités les plus diverses : l'adoration de leur dieu, la collecte du breuvage noir, le stockage et l'entretien des feuilles qui parlent.
Regardez ces oiseaux dans le ciel. Regardez ces fruits dans les arbres. Ici, nous n'avons pas besoin de nous couvrir de peaux de bête ni de faire du feu pour nous réchauffer ou de nous abriter du vent dans des maisons de glace.
De tous les portraits d'Atahualpa faits par Le Titien , le plus fameux est sans doute celui peint dans les jardins de l'Alcazar , que l'histoire a retenu sous le titre de "Conseil".
Dans la Mort est mon métier, Robert Merle reconstitue la biographie romancée de Rudolf Höss, le commandant d'Auschwitz, à partir des témoignages et des notes que celui-ci a laissés en prison avant d'être pendu en 1947. Toute la première partie est consacrée à son enfance, à son éducation incroyablement mortifère par un père ultra-conservateur complètement psychorigide. L'intention de l'auteur est évidente : il s'agit de trouver des causes, sinon des explications, à la trajectoire de cet homme. Robert Merle essaie de deviner - je dis deviner, pas comprendre- comment on devient commandant d'Auschwitz.
Je n'ai pas cette intention - je dis intention, pas ambition- avec Heydrich. Je ne prétends pas qu'Heydrich est devenu le responsable de la Solution finale parce que ses petits camarades l'appelaient " la chèvre" quand il avait dix ans. Je ne pense pas non plus que les brimades dont il a été victime parce qu'on le prenait pour un Juif doivent nécessairement expliquer quoi que ce soit. Je ne mentionne ces faits que pour la coloration ironique qu'ils confèrent à son destin : " la chèvre" va devenir celui qu'on appellera, au faîte de sa puissance, " l'homme le plus dangereux du III° Reich". Et le juif Süss va se muer au Grand Planificateur de l'Holocauste. Qui aurait pu deviner une chose pareille ? P. 35. LDP.
(...) Bayard tapote l'épaule de Simon : « Te pose pas trop de questions, va. »
Hitler peut bien pester. La France et l'Angleterre lui ont grand ouvert une porte dont il n'avait pas la clé. Et évidemment, l'ont incité, en affichant une telle complaisance, à recommencer.
Ceux qui sont morts sont morts, et il leur est bien égal qu'on leur rende hommage. Mais c'est pour nous, les vivants, que cela signifie quelque chose. La mémoire n'est d'aucune utilité à ceux qu'elle honore, mais elle sert celui qui s'en sert. Avec elle je me construis, et avec elle je me console.
- Quelle stipulation verrouille, clôture, organise, agence l'économie de ta pragma comme l'occultation et/ou l'exploitation de ton ek-sistence ? (=Que faites-vous dans la vie ?)
- J'expulse des petits bouts de code. (=Je suis dactylo)